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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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26 février 2020 3 26 /02 /février /2020 08:30

Titre à rallonge, mise en scène absente, dialogues extravagants, mise en abyme de la révolution sexuelle et de ses provocations: pas de doute, on est chez Audiard. Il ne me viendrait pas à l'idée de critiquer ce film comme je peux le faire pour n'importe quelle comédie française des années 60: c'est impossible tant le réalisateur est aux abonnés absents.

J'ai plusieurs hypothèses... comme l'explique doctement un spécialiste sur les suppléments du blu-ray de ce film, Audiard se serait senti dépossédé, trahi en quelque sorte, car ayant écrit tant de films, c'est toujours au metteur en scène qu'on se serait référé... Deux commentaires: d'une part, pourquoi ferait-on autrement? Quand les scénaristes comprendront-ils qu'ils ne sont pas vraiment les auteurs d'un film qu'un autre à mis en scène? D'autre part, il serait malvenu d'émettre cette hypothèse aujourd'hui, quand il faut se battre pour rappeler qu'Audiard n'a pas mis en scène, par exemple, Les tontons flingueurs... Non mais.

Autre hypothèse: Audiard, comme tant de scénaristes avant et après lui, comme les trois quarts du public aussi, était sans doute persuadé d'être l'auteur de ces films et qu'il lui suffirait d'écrire deux, trois répliques qui flinguent et d'apparaître sur le plateau pour "faire un film"... Dont acte: maintenant vous m'autoriserez à douter quand même de l'efficacité de la formule.

Enfin, peut-être, tout simplement, lui a-t-on proposé, et a-t-il accepté, d'autant que l'aubaine était lucrative. Ca ne l'a pas empêché, quelques années plus tard, d'arrêter de mettre en scène, et de juger bien sévèrement sa production!

Quoi qu'il en soit, voici ce film raté, qui doit autant aux parodies baroques de Lautner, qu'au dessin animé (la façon dont les voitures explosent, la palette de couleurs franches et l'attrait du gag), au rythme absent, aux transgressions permanentes (des personnages qui passent leur temps à s'adresser à la caméra) et aux répliques devenues légendaires:

Blier: J'ai bon caractère, mais j'ai le glaive vengeur et le bras séculier. L'aigle va fondre sur la vieille buse!

ou encore:

Françoise Rosay: Tends lui la main, Fred!

André Pousse: si je la lui tends, ce sera en travers de la gueule!

Bref, qu'on le veuille ou non, ce film foutraque, mou du genou, idiot (mais alors vraiment idiot) fait partie du paysage, et distille incidemment, presque sans le vouloir tant ça donne l'impression d'avoir été fait pour payer ses impôts par un cynique gonflé, un plaisir certes coupable, mais que voulez-vous? ... Françoise Rosay en mamie flingueuse, Blier et Pousse en frères ennemis tendant aux aphorismes, et Marlène Jobert mutine et divine (et court-vêtue, ce qu'on ne manquera pas de remarquer dès la première scène... Tiens, même Rosay l'a remarqué!) qui prend un plaisir certain à formuler les répliques que lui a ciselées Audiard... On n'est pas de bois, que voulez-vous.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Michel Audiard
20 octobre 2019 7 20 /10 /octobre /2019 19:32

Un film, une lanterne, trois parties: les deux premières sont signées de Gilles Grangier, la dernière de Lautner. Le script est lui de Simonin, et les dialogues de Michel Audiard dont la verve est particulièrement présente: c'est qu'il est ici question d'un contexte historique particulier, celui de fermeture "par l'intolérance" des maisons dite de tolérance. Qu'on se le dise tout de suite, le film n'est ni un plaidoyer, ni un aperçu nostalgique, juste un récit goguenard en trois actes, qui fustige le bourgeois à travers l'histoire d'un ironique retournement de situation...

La fermeture: Bernard Blier est le taulier d'une maison qui ferme, donc, à l'heure dite. On assiste aux préparatifs de départ des petites pensionnaires, et aux lamentations des têtes pensantes de l'entreprise comme du petit personnel... Et puis Blier est à la fête! Sinon, on pose dans cette partie des liens avec les deux suivantes: on y fait allusion à Lucette, une fille qui est partie, et qui reviendra dans la deuxième partie. On décide d'un cadeau à lui faire: l'emblématique lanterne...

Le procès: c'est celui d'un malfrat joué par Jean Lefebvre: il a commis un cambriolage chez la baronne Seychelles du Hautpas, née Lucette Granu (Andrea Parisy): bien qu'il ait subtilisé des fortunes en bijoux (qu'il a tous restitués), le cambrioleur est accusé d'avoir volé une lanterne qui n'a pas été retrouvée... Le procès vire au grand n'importe quoi, avec le retour de Blier en témoin lyrique d'une époque révolue.

Et justement, la lanterne revient dans le troisième épisode, Les bons vivants: elle avait été volée par le complice de Lefebvre, joué par Carmet, et Louis de Funès l'achète, semble-t-il pour décorer sa maison à la fin d'un sketch hallucinant où le brave homme, un bourgeois rigoureux, bon et vertueux, offre l'asile à une prostituée (Mireille Darc) puis les choses évoluent, jusqu'à ce que son auguste domicile se transforme en une véritable maison close, semble-t-il sans qu'il en ait eu connaissance...

Sur ce sketch rigolo, les complices qui sont derrière la caméra se paient effectivement la fiole du bon bourgeois de province, ce qui poussa les bonnes gens et autres pères-la-pudeur à vilipender le film, alors que sa principale qualité, justement, est de ne pas trop se prendre au sérieux... 

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Georges Lautner Michel Audiard
28 janvier 2019 1 28 /01 /janvier /2019 14:39

Ayant déjà prouvé qu'il était payant de mélanger sans vergogne le film noir et la comédie avec Le monocle noir, dans lequel il avait introduit en contrebande un certain nombre d'éléments perturbateurs avec tact, afin de miner le film de l'intérieur, Lautner est en quelque sorte passé à la vitesse supérieure avec ce nouveau film, son huitième long métrage. Le "Monocle" est déjà revenu dans un deuxième film, mais il est encore soumis à une production tatillonne qui croit qu'il est impératif que le public puisse encore suivre le film comme si c'était sérieux... Mais Albert Simonin, auteur adapté et adaptateur, puisqu'il est le scénariste de ces Tontons, et Michel Audiard responsable des dialogues, sont sur une mission autrement plus directe: une comédie, qui ne fera que très vaguement semblant d'être un film noir, mais le fera bien.

L'intrigue est essentiellement un cas de règlements de compte liés à des "droits" de succession dans l'affaire florissante d'un parrain du milieu Parisien, et la "crise du personnel" qu'elle enclenche. Chaque acteur a été choisi, finalement, avec soin, pour "incarner" sans aucune réserve un personnage clé du genre, mais cette fois tous le savent: ce sera une parodie. Une parodie, d'ailleurs, qui prend son temps, car si le verbe fleuri de Michel Audiard est présent dès le début, on pourrait presque croire, durant les vingt premières minutes, assister à un film de gangsters classiques... Et Ventura, Blier, Blanche, Venantini et les autres maintiennent l'illusion assez longtemps.

Mais l'esprit frondeur de la comédie s'installe et s'infuse tant et si bien que le film semble succomber sous les coups de boutoirs de cette insolence caractérisée. Cette approche subtile, qui fait défaut au film suivant du trio Lautner-Ventura-Audiard (Les Barbouzes) est sans doute l'une des clés de son succès: on a ainsi un semblant d'intrigue qui fonctionne, et permet à Lautner d'installer sa "petite vie des truands" à travers leurs attitudes (le patron face aux employés, la vie d'un truand n'a rien de démocratique), leurs habitudes (le truand se couche tard et se lève tard, quand il se lève), et surtout leur langage.

Oui, car le film a des dialogues, bien sûr, c'est même à ça qu'on le reconnaît. Et ils sont savoureux, d'ailleurs... Mais d'abord et avant tout ces Tontons flingueurs, c'est un film et un film c'est de l'image: avec le complice Maurice Fellous, Lautner s'est amusé une fois de plus à prendre les codes du film noir et les appliquer à la lettre, et à parfaire un style fait de la froideur des faits, de collages inattendus (la visite du président Delafoy, sourd comme un pot, pendant qu'autour, ça défouraille à tous les vents), de running gags (les bourre-pifs que se prend Blier), et d'une musique de Michel Magne dont le motif unique a probablement été écrit en 12 secondes, mais est ensuite décliné  de toutes les façons possibles...

Voilà qui fait un divertissement solide, qui a eu un grand succès et fini de forger la carrière de son metteur en scène; celui-ci a fait littéralement des dizaines d'autres films, dont certains sont bien meilleurs encore... Mais de là à faire comme feu Henry Chapier (oui, le grand homme nous a quitté, eh bien, hier) qui fustigeait ce film qui rencontrait un grand succès public, d'un cinglant "vous pavoisez haut... mais vous visez bas". Ce qui est petit, mais on comprend bien ce qui gênait avec Les Tontons Flingueurs: le cinéma, ça pouvait être du style, un style effronté, et qui plus est qui ne gênait pas le public... Une révolution à laquelle la Vouvelle Nague n'était sans doute pas prête.

Mais je ne veux pas non plus affubler Les Tontons Flingueurs d'une trop grande influence, ni de ces intentions ronflantes, car Lautner l'a toujours dit: si on le laissait faire un film en déconnant un peu, et en le laissant concocter ça et là une scène visuellement forte, il était content. Si en plus, le public se dérangeait...

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Published by François Massarelli - dans Georges Lautner Comédie Michel Audiard
21 août 2018 2 21 /08 /août /2018 15:45

C'est d'un roman noir de Patrick Alexander, Mort d'une bête à la peau fragile, que Lautner tire son troisième film avec Belmondo. Une fois de plus, Audiard est de la partie, pour l'une des dernières fois, mais le scénario est signé de Lautner et du nouveau venu Jacques Audiard, dont le père, évidemment, se charge des seuls dialogues.

C'est loin d'être son chef d'oeuvre...

Josselin «Joss» Beaumont, un agent secret Français, a été arrêté dans une petite dictature Africaine, alors qu'il se préparait à assassiner le président Njala, sa mission. Mais le gouvernement français ayant changé, les relations avec le président en question aussi, et c'est donc avec la collaboration active du service qui l'a envoyé que Beaumont a été démasqué. Il passe donc deux ans dans un bagne, mais s'évade de façon spectaculaire, et rentre en France juste à temps: le président Njala doit effectuer une visite diplomatique en France: l'occasion pour Joss de terminer sa mission d'une part, et de se venger d'autre part des services qui l'ont trahi...

D'une part : au moins, il y a une histoire, et Belmondo n'est pas en totale liberté comme il pouvait l'être sur le film précédent, l'infect Le guignolo. On pourra toujours discuter de l'opportunité de lui faire dire « Couscous poulet » avec un accent qui donne l'impression qu'à côté de lui Michel Leeb est Victor Hugo, pour un gag totalement idiot, et surtout pas drôle, mais dans l'ensemble, Belmondo joue. Mal, mais il joue. Un personnage bien dans sa ligne (coucheur, raciste, buveur, arbitraire, violent, manipulateur), et qui se croit drôle, bien sûr. Pour le reste, le film est aussi dans la ligne des polars de Lautner, ceux qui sont à prendre au sérieux : une ligne droite, méthodique et assez impitoyable, dans laquelle le destin montre que l'espoir n'a pas sa place, et dont les incidents peuvent ressortir du pus haut baroque.

Mais politiquement... Dans ce film ou on critique en permanence la démocratie et ou on n'utilise pour parler d'un dignitaire étranger que les mots de «négro», «nègre», voire qu'on le compare à un singe, oh, avec subtilité, mais c'est encore pire... On aime Lautner au pays des rigolos, de Bernard Blier et de Francis Blanche, pas quand il devient la concitoyen de Nadine Morano et cette vieille saloperie de Céline, l'écrivain préféré d'Audiard. C'est à fuir, il n'y a rien, mais alors rien à sauver dans ce film nullissime. Pas même la musique de supermarché d'Ennio Morricone.

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Published by François Massarelli - dans Georges Lautner Navets Michel Audiard
12 août 2018 7 12 /08 /août /2018 17:48

Comme le dit Alexandre Dupré, "Je ne fais pas dans l'utile, je fais dans le romanesque"... Et c'est là tout le problème de ce film!

Car après le succès de Flic ou voyou, Lautner, Belmondo et Audiard ont carte blanche et un budget conséquent: ce dernier point pour la première fois dans la carrière de Lautner, habitué au système D, et aux tournages gracieux à Nice parce que le maire est un copain... Les trois compères s'entendent pour réaliser un film qui sera une fois de plus un mélange entre comédie et espionnage, avec bien sûr accent sur les cascades et le côté bondissant de Jean-Paul Belmondo. Mais il y a deux problèmes insurmontables, qui sont pour beaucoup dans le fait que ce film au titre insupportablement crétin, est un tas de boue sans saveur...

Premièrement, Lautner est habitué à adapter des romans, les trahir certainement, mais il part d'une intrigue, d'une colonne vertébrale, quoi. Ici, il n'y a rien... Ou du moins, un personnage, qui adore se déguiser, tromper son monde, et qui a un problème avec les convenances et l'autorité (et le bon goût, aussi).

Et le deuxième problème, c'est Belmondo: une star avec caprices, et non des moindres: en gros, tout se passe comme si le flm s'était construit uniquement sur la promesse à la star d'une scène qui lui permettrait d'être suspendu à un hélicoptère, au-dessus de Venise, en caleçon à pois avec un haut de forme... j'imagine le jour où Lautner s'est présenté à Alain Poiré avec ce pitch! Bien sûr, Jean Vautrin (sous le pseudonyme de Herman) s'est attelé à un semblant de scénario, mais pour des raisons de décence, je ne vais même pas en parler.

Bref, passez votre chemin, à moins d'avoir envie de voir des personnages se sortir des pires situations en donnant un coup de pied dans les joyeuses d'un personnage qui se met alors à hurler en se tenant les cousines endolories. Surtout qu'à un moment, c'est Philippe Castelli qui se fait torturer ainsi, et s'il est accepté que cet acteur fétiche de Lautner est exécrable en toutes circonstances, il est ici pire que tout. 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Georges Lautner Michel Audiard
26 juillet 2018 4 26 /07 /juillet /2018 16:24

Un type étrange, un peu vulgaire et carrément bohème, commence à agiter la pègre Niçoise en distribuant les bourre-pifs et en posant des questions gênantes au sujet de la mort suspecte d'un flic, et d'une prostituée: c'est qu'en dépit des apparences (on a retrouvé son corps abattu d'une balle sur la grande corniche), le policier un rien pourri serait mort en compagnie de la jeune femme, dans un motel miteux. L'affaire, compliquée, est liée à deux sales types qui se partagent les sales coups sur toute la côte d'azur (autant dire qu'entre les deux, la moindre étincelle peut déclencher des hostilités), et qui semblent couverts par des avocats et des policiers...

Le type étrange qui mène l'enquête, c'est Belmondo. Alors on pourrait développer, ou se contenter que c'est l'acteur en roue libre, à son pire: c'est exactement ça, et il fâcheusement irritant. De son côté, Lautner assure son service habituel, avec quelques haltes bienvenues (deux scènes de meurtre ou d mort violente, dont celle d'ouverture qui est impeccable), et sa troupe. Audiard fournit à la star un dialogue à sa mesure, fait de monosyllabes, et l'enquête débouche quand même sur une bien sale impression: l'idée selon laquelle pour bien faire régner la loi, il faudrait empêcher les gangsters de la violer, et forcer les flics à le faire. Ce que Belmondo (oui, car il est représentant des forces de l'ordre) fait avec insistance: de là à traiter le film de fasciste, il n'y a qu'un pas, que je ne me refuse absolument pas de franchir.

Sinon, oui, un cinéma s'appelle "le terminus des prétentieux": au-delà de l'allusion aux Tontons, ne serait-ce pas un message codé, une façon de dire tout le bien qu'on pense d'un cinéma exigeant? Bref, au contact d'un acteur laissé à ses manies, Lautner et Audiard n'en finissent pas de perdre leur talent.

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Published by François Massarelli - dans Comédie Georges Lautner Michel Audiard
7 juillet 2018 6 07 /07 /juillet /2018 09:31

"Un barbu, c'est un barbu..."

Le puissant Constantin Bénard Shah meurt dans les bras d'une jeune femme, dans un établissement adéquat, et tout le petit monde du renseignement s'émeut: sil est un ami déclaré de la France, le trafiquant d'armes international possédait malgré tout un certain nombre de brevets particulièrement intéressants, que personne ne veut voir tomber dans les mains adverses. A tout prix, les espions vont donc devoir "séduire" sous tous les sens du terme, la jeune veuve (pas si) éplorée (que ça), Amarante, de son vrai nom Antoinette (Mireille Darc): le "chanoine" Eusebio Cafarelli, le suisse (Bernard Blier); le Russe Boris Vassilieff, dynamiteur romantique (Francis Blanche); l'Allemand Müller, le "bon docteur" (Charles Millot); et enfin, Francis Lagneau, dit "requiem", dit "Bazooka", le Français: tous ces hommes vont se retrouver au château de feu Bénard Shah, afin de soutirer les brevets à la belle dame, tout en formant des alliances de circonstances, contre l'Américain O'Brien (Jess Hahn) et contre les Chinois qui, décidément, pullulent dans les souterrains du château...

Le succès des Tontons Flingueurs a libéré Georges Lautner: lui qui a fait suivre, par prudence, son premier "polarodique" avec Lino Ventura, d'une comédie plus traditionnelle et raisonnable (Des pissenlits par la racine) histoire d'assurer ses arrières, peut désormais s'en donner à coeur joie: du coup, le deuxième des trois films avec l'ancien catcheur, acteur génial et instinctif, est aussi le plus volontiers expérimental, déraisonnable, et réjouissant à force d'excès. Il y a vraiment un avant et un après Les Barbouzes, pour Lautner et Audiard. D'ailleurs, ce n'est pas que la force du film: si le début en forme de puzzle est brillant par son montage et son utilisation savante des codes et des signes du film d'espionnage, le coeur du film devient une intrigue avec enjeu, située dans un lieu unique, qui simplifie quand même la tâche du spectateur. Mais l'impossibilité de la résolution de l'intrigue et le prolongement sur 107 minutes sont quand même déraisonnables... Pas d'étonnement donc que le film suivant (Ne nous fâchons pas) ait quand même fait un peu moins dans le baroque formel!

Si Lautner utilise le film pour tout expérimenter, et s'amuser avec les formes du cinéma, passant du policier traditionnel aux audaces qui parodient la nouvelle vague (objectifs délirants, profondeur de champ, montage "cut", angles de caméra provocants, etc...), Simonin et Audiard vont pour leur part profiter de l'aubaine pour renvoyer dos à dos les combattants d'un camp, comme de l'autre, comme du troisième. Et tous ces "occidentaux" frères ennemis, ne s'unissent que contre les Chinois, et... les Américains, bien sûr. Tout ça n'est sans doute pas très sérieux, remarquez, et puis...

"Trois barbus... c'est des barbouzes!"

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Georges Lautner Michel Audiard
1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 18:15

Au sud du Maroc, l'aventurier Castigliano (Gert Fröbe) tient une entreprise de transports routiers, dont les chauffeurs sont des durs à cuire. Mais là, ils ont la surprise de découvrir que leur patron a confié une mission et un camion flambant neuf à un novice, l'américain Steiner (Reginald Kernan)... Mais Rocco (Jean Paul Belmondo) décide de doubler Steiner et prend la direction de la mission à six heures du matin, emportant non seulement le camion neuf, mais aussi la mystérieuse cargaison qui doit rapporter cent mille dollars à la réception... Castiglione envoie Marec (Lino Ventura) pour le récupérer. Celui-ci, avec l'ide de Steiner, se lance à la poursuite de son copain...

C'est du cinéma populaire à la Audiard, avec les qualités et les défauts attenants: des bons mots, de la gouaille, des dialogues qui font mouche quand c'est Blier ou Ventura qui les dit, mais qui irritent profondément quand c'est Belmondo ou un acteur qui annone à peine le français! Notez qu'il y a de bons moments, mais bon, le film se vautre à mon humble avis sur deux points:

D'une part, ce n'est pas Le salaire de la peur.

D'autre part, Audiard et sa bande affichent une fois de plus un nihilisme goguenard, qui était souvent atténué avec génie quand Lautner était en charge de la mise en scène de leurs films en commun (sans parler de la tentation de la rigolade qui n'était pas un vain mot chez le metteur en scène!), mais que voulez-vous, quelque soit le métier de Verneuil, on finit par s'ennuyer...

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Published by François Massarelli - dans Michel Audiard
9 octobre 2017 1 09 /10 /octobre /2017 13:10

On se prend dès le départ en pleine figure l'atmosphère mortifère, lourde et empreinte d'une forte dose de désespoir en même temps qu'une triste ironie, de ce film: ça commence dans un cimetière, où le premier titre prévu pour le film avant que la Gaumont d'y mette bon ordre résonne encore des pulsations de la chanson du générique: Requiem pour un con. La chanson de Gainsbourg n'est sans doute pas sa meilleure, mais elle est un titre alternatif parfait pour ce film en forme de promenade mortuaire, par un commissaire divisionnaire qui n'a plus le temps ni l'humeur de tergiverser en étant indulgent avec le milieu: le temps presse pour lui, il n'a plus vingt ans. Et le con qu'on enterre, c'est, je cite, "son pote". Et à la fin, il précisera: "L'empereur des cons".

C'est qu'Albert (Robert Dalban), le pote du commissaire Joss (Gabin), a trempé dans une sale affaire, et le commissaire n'a en effet pas l'humeur de faire en sorte que les responsables de sa mort survivent trop longtemps... Et n'aura pas le temps de s'apitoyer sur ceux et celles, et surtout CELLE, que le con suscité aura laissée derrière lui...

Lautner a consciencieusement, lentement mais sûrement construit, en quelques années, un style fait de mélange entre le film noir, une certaine idée baroque et expérimentale du cinéma criminel, et la comédie. Le public lui a donné raison, mais là, c'est Gabin qu'il lui faut satisfaire. Avec Audiard ils ont composé une sorte d'interlude, hors-comédie, qui va permettre à l'acteur de se sentir à l'aise, et au cinéaste de mener à bien son péché mignon: varier, étonner, s'amuser enfin avec ses scènes de violence. Et méthodiquement, le film est construit, de scène en scène, avec ruptures de ton, embardées du rythme, et toujours, toujours cette poésie particulière des scènes de braquage au petit matin, des cambriolages hivernaux, des routes mal entretenues sur lesquelles la neige s'amoncelle. Les paysages pourraient être beaux, ils ne le sont pas: le désespoir, dans la belle photographie de Maurice Fellous, envahit même la nature de cette période de fin d'année... Et les lieux choisis, surtout dans ce froid hiver 67/68, sont tous sauf riants: les routes de la Picardie, les chemins de fer de l'Aube, les gares de Chaumont et Troyes... Un univers sale, métallique, froid.

Alors tant pis si il y a des longueurs, si certains scènes sentent le prétexte (la boîte de nuit et ses danseuses fort peu vêtues, la scène du studio d'enregistrement qui permet d'en rajouter une couche sur l'existence d'un disque de Gainsbourg), tant pis si Gabin est en mode automatique: avec sa lente et baroque introduction dans laquelle le verbe est rare, sa séquence de meurtre dans laquelle la flambée de violence s'accompagne d'une explosion de couleurs (Des pots de peinture bleue et jaune, troués par les balles, et dont la peinture colore les cadavres), et sa lente montée inexorable vers un final d'opéra, c'est du pur Lautner, les dialogues ("Le jour ou on mettra les cons sur orbite, t'as pas fini de tourner!" "Si je vais à Francfort, j'emmène pas des saucisses!") sont du pur Audiard, et ce "requiem" pour un Robert Dalban qui a cru pouvoir tricher, et s'est fait repasser, avec son truand "léonesque" (André Pousse, magistral), avec son héroïne qui arrive aussi brusquement qu'elle repartira, mais laissera un souvenir amer (Dany Carrel) est l'un des plus grands films du duo. C'est aussi et surtout la plus belle preuve du talent de Georges Lautner pour le rythme, et de sa façon impressionnante d'utiliser les visages plus que l'émotion: regardez le nombre de gros plans impassibles dans le film... 

 

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Published by François Massarelli - dans Georges Lautner Noir Michel Audiard
17 septembre 2017 7 17 /09 /septembre /2017 09:40

Catherine Aigroz vient de perdre son compagnon: suite à une action musclée de la police, l'ennemi public numéro 1 a en effet été abattu en gare de Montargis par une moche matinée d'hiver. Et Catherine est enceinte, et arrivée à terme... La naissance, sous le contrôle de l'assistance publique, est pour la jeune femme un traumatisme, et pour être clair, elle n'a pas l'intention de garder l'enfant. Mais très vite, les visites se succèdent: un commissaire de police (Maurice Biraud) vient pour lui secouer les puces, puis les rivaux de son Pierrot-La-Veine, tous ces braves gens n'ont qu'une idée: faire main basse sur le butin de Pierrot, et se doutent qu'elle sait. 

Oui, elle sait, mais elle est déterminée à ne rien dire, et quand elle sort enfin de l'assistance, avec son petit et aussi avec sa copine Marité (Anouk Ferjac), et son fils, c'est suivie de près par deux bandes de caïds armés jusque aux dents que Catherine prend la route de l'arrière-pays Niçois, pour y retrouver l'argent: elle sait qu'il est quelque part dans la propriété que Pierrot avait acheté. Mais... où exactement?

Cette histoire, concoctée par Marcel Jullian notamment, d'après un roman noir de Jean Amila au nom évocateur de Langes radieux, commence comme un film noir méthodique, assez sec, avec une voix off calme et sans passion aucune. Le ton est plutôt froid et dramatique, et le destin de Catherine ne prête pas à la rigolade; l'illusion continue assez longtemps, en particulier avec les interventions de Renée Saint-Cyr en médecin responsable de Catherine à l'Assistance publique: moraliste, bourgeoise, mais mère poule, car comme d'habitude Lautner sait parfaitement quel rôle confier à sa maman... On peut voir aussi dans le portrait du commissaire Verdier, par Biraud, un rôle de dur à cuire qui tranche sur les interprétations de minable ou de cave qui étaient sa spécialité. Verdier sait ce qu'il veut et quand il montre les dents dans sa première scène, il impressionne... Pourtant c'est une comédie, et elle ne va pas tarder à virer au baroque...

Pour ça, il fallait à Lautner une exposition, une vraie, et surtout il fallait un voyage: quand Catherine et Marité vont en Provence, ça change tout, et on quitte la grisaille pour un petit coin de solitude et de nature, où la présence de gangsters armés jusqu'au dents va gentiment jurer avec la quiétude des lieux, les aspirations évidentes des deux femmes à prendre du bon temps, et le voisin plus que farfelu interprété par Paul Préboist. Et le film se métamorphose intégralement, Lautner se lâche, Fellous s'amuse comme un gamin à filmer des gangsters dans la nature en fête, et ma foi tout ceci n'est plus tout à fait un film de gangsters...

Continuant son jeu avec les codes et les genres, Lautner (Continuant sa collaboration avec Michel Audiard qui est plutôt inspiré) restructure la "guerre" telle que Lino Ventura et ses copains l'avaient vécue dans Ne nous fâchons pas (A ce propos, un porte-clé à l'effigie du héros de ce dernier film est parfaitement visible dans une scène) et la filme comme un western: une baraque isolée, deux femmes retranchées, un caïd passé plus ou moins de leur côté et qui coucherait bien avec les deux (Henri Garcin en mode Burt Lancaster), et des bâtons dans les roues: il faut impérativement nourrir les deux enfants toutes les trois heures, et ça ne facilité pas le maniement des armes; et en prime, Paul Préboist est un poids mort qui fait furieusement penser à un Walter Brennan en mode Rio Bravo provençal... la dynamite en moins, les dents (pourries) en plus! Et l'arrivée des gangsters, le siège, les fusillades, l'apprentissage du maniement des armes, le décompte mortuaire... C'est règlement de comptes à Nice-Corral, et Lautner, Darc, André Pousse (Arrivée grandiose de l'acteur dans un rôle sublime de parrain de la pègre, après un tout petit rôle dans Ne nous fâchons pas), sont tous dans leur élément!

Que dire d'autre? Mireille Darc est celle qui permet à Lautner d'opérer un tel virage au sein d'une seul et même film, et il n'y aurait sans doute pas eu moyen de tenter cette expérience sans elle. Femme idéale dans le moyen La grande sauterelle, elle devient une femme d'action, qui a un vrai parcours (il lui faudra faire son deuil, puis accepter d'être mère) et qui est le centre d'une intrigue certes fort exagérée, mais qui grâce à son exposition méthodique, tient fort bien la route. Le ton choisi est constamment sur la brèche, et si j'excepte les clowneries de Préboist (Qui en fait des tonnes, je l'accorde), on reste finalement dans le raisonnable. Et au final, en dépit de la menace permanente représentée par la bande d'André Pousse, des remarques sexistes proférées par un homosexuel avéré (Amidou est excellent mais bien sûr le rôle est une faite de goût: autre temps, autres moeurs), et de l'aide apportée par un rouleur de mécaniques, ce sont bien deux femmes qui triompheront des hommes. 

Donc pas de raison de faire la fine bouche, bien au contraire. La critique Française reste pourtant bien mitigée sur ce film... tant pis pour eux.

 

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Published by François Massarelli - dans Georges Lautner Noir Comédie Michel Audiard