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Après le soap-opera homosexuel à tiroirs, autobiographique et transgressif, de La mauvaise éducation, Volver constitue en apparence un retour à la comédie, un retour aux femmes aussi après leur quasi-absence du film précédent. Plus encore, il s'agit aussi d'une déclaration d'amour aux femmes, mères, filles, grand-mères, tantes, restauratrices, meurtrières ou prostituées... et d'un film, une fois de plus, gonflé: mort brutale, mensonges, trahison et inceste débouchent sur une vision rassérénée du monde, un monde dans lequel les femmes sont plus fortes parce qu'unies, en paix avec elles-mêmes, en paix avec le passé, et enfin, débarrassées des hommes. Donc la comédie n'est pas à proprement parler si légère que cela, mais le public a fait un triomphe au film, l'un des plus beaux de son auteur. Tour de force puisque cela reste une oeuvre dans laquelle par exemple, un lien dans le temps entre une femme et sa mère qu'elle croit disparue s'exprime, dans l'émotion basée sur un souvenir olfactif: l'odeur des pets maternels... Et pourtant on n'a pas tant que ça l'impression de provocation; d'une part, on est habitué, d'autre part la force des sentiments, la puissance des actrices sont magiques et font magnifiquement leur travail.
Raimunda (Penelope Cruz), originaire d'un petit village, vit avec sa fille à Madrid. Elle a perdu ses deux parents dans un incendie, mais garde un lien fort avec le village natal, puisqu'elle se rend souvent en compagnie de sa soeur Soledad (Loa Dueñas), et de sa fille Paula (Yohana Cuobo) au cimetière, et visite sa tante restée seule; celle-ci est un peu gâteuse, mais les accueille toujours avec gentillesse. Raimunda, dont la fille est née de père inconnu, s'est mariée avec Paco (Antonio de la Torre), un homme pas vraiment admirable. Celui-ci tente un soir de molester Paula restée seule avec lui, et Paula le tue avec un couteau de cuisine. En rentrant et en découvrant ce qui s'est passé, Raimunda prend illico la décision, d'une part d'assumer la responsabilité, d'autre part de cacher la mort de Paco. Elle va utiliser le congélateur du restaurant en voie de fermeture dont un ami va lui confier la garde. De son coté, Soledad au même moment apprend la mort de la tante Paula. le jour de l'enterrement, alors que Raimunda reprend le restaurant, Soledad découvre que sa mère (Carmen Maura) est bien vivante, et cache un secret bien lourd à porter...
J'ai tenté ici, sans grand succès, de rendre compte d'un scénario qui a tout pour être extrêmement embrouillé, mais qui est aussi clair dans son déroulement que captivant. La part belle est faite aux femmes, et dans le cadre de cette intrigue on découvrira des faits peu glorieux, cachés par le passé, mais qui établissent une étonnante filiation entre la maman qui se fait passer pour morte, Raimunda qui a si longtemps été fâchée avec sa mère, la petite Paula, et la figure tagique de Agustina (Bianca Portillo), la voisine de la vieille tante Paula, dont la mère a disparu la nuit de l'incendie. Almodovar s'amuse à enfouir de façon ludique une intrigue finalement pas très compliquée à deviner dont les différentes implications vont lier à tout jamais les femmes, qui dans ce film, c'est une évidence, enterrent tous les hommes, comme le dit quelqu'un au début du film, lors de la scène du cimetière. Sinon, Almodovar a recours à des ficelles de son univers, et si on peut dresser un parallèle avec Talons Aiguille, à travers la sacrifice potentiel de Raimunda pour Paula, si on constate une nouvelle fois le recours à un intermède musical (la chanson Volver) qui renvoie une fois de plus à la culture populaire Espagnole, le lien le plus fort avec le reste de l'oeuvre reste quand même le fait que l'histoire vécue par Raimunda était déja l'objet d'un roman qui joue un rôle dans le film La fleur de mon secret...
Personnel et une fois de plus extrêmement ouvragé dans sa construction, La mauvaise éducation délaisse, c'est très notable, les héroïnes au profit cette fois d'un ensemble quasi uniquement masculin: Ignacio et Enrique se sont connus dans une institution scolaire Espagnole durant les années 60. L'un et l'autre ont ressenti une attirance mutuelle, mais elle a été tuée dans l'oeuf par un prêtre qui était clairement amoureux d'Ignacio, qu'il a d'ailleurs essayé de violer, avant que celui-ci ne se laisse faire afin de protéger Enrique. Mais ce dernier a quand même du quitter l'école, et les deux garçons ne se sont jamais revus. Au début des années 80, un homme qui se prétend Ignacio frappe à la porte d'Enrique, devenu un cinéaste à succès, et lui remet une nouvelle (
Manuela perd son fils Esteban, qu'elle a élevé seule; il est renversé par une voiture alors qu'il courait après la voiture de l'actrice Huma Rojo, dont il souhaitait avoir un autographe. Manuela, qui a accepté la transplantation du coeur de son fils, a cru devoir suivre l'heureux bénéficiaire de l'opération, mais elle finit par souhaiter faire un autre pèlerinage, et se met en quête du père de son fils, un homme qui a choisi de devenir une femme, Lola, et qui se prostitue à Barcelone; elle s'y rend et y retrouve Agrado, une vieille connaissance, ainsi que Soeur Rosa, une jeune religieuse enceinte de Lola-Esteban, qui va vite découvrir sa séropositivité. Elle recroise également la route d'Huma rojo, dont elle va devenir l'assistante personnelle pendant les représentations d'
infirmière coordinatrice en charge des transplantations, participe à un jeu de rôle autour des négociations entre médecins et familles de patients décédés...
Compliqué? pas vraiment. Ce point de départ, qui culmine dans une scène avec flingues pointés dans tous les sens, genre oblige, est clair dans sa narration, logique dans ses
quiproquos. Il s'agit pour Almodovar d'installer une intrigue de vengeance, qui se déroulera ensuite d'une façon peu commune: si Victor sera motivé par la vengeance durant son passage en prison,
il en déviera bien vite, et une autre vengeance se mettra en place, la vieille querelle entre Sancho et David ressurgissant quelques années après.
de
son état. Et coment Victor, né dans un bus, et en constant apprentissage (Il n'a jamais fait l'amour avant de rencontrer Elena, reprend ses études en prison, et sollicite Clara Sancho pour lui
enseigner les arts de l'amour) va enfin se réaliser... Le film noir se pare des couleurs invraisemblables du feuilleton, et on avoue, sinon une certaine impatience, en tout cas un certain
scepticisme devant tout ce dispositif. Mais une scène parmi d'autres retient l'attention: l'ouverture, durant laquelle Penelope Cruz nait à Almodovar. Elle serait bientôt de retour...
Volver, disais-je, reviendra sur ce film par deux aspects: d'une part, en recyclant le même décor de maison, où vit ici la maman de Leo. D'autre part, un petit mystère récurrent dans La fleur de mon secret concerne un scénario de film (Attribué à Bigas Luna!) curieusement inpiré d'un roman non publié de Leo: l'intrigue de base de Volver, avec le meurtre du mari par l'épouse qui n'a pas supporté que celui-ci s'en prenne à sa belle-fille, puis le fait que le cadavre soit caché dans un congélateur... Un lien étonnant entre deux chefs d'oeuvre d'Almodovar, qui passe évidemment par les ficelles du crime et de l'exagération mélodramatique...

soucieuse de trouver un nouveau sens à sa vie. Le choix de la référence à Don Siegel et son film prend alors du sens, avec cette histoire de corps qui volent les âmes, comparés à Marina qui souhaite elle que son âme et son corps soient sur la même longueur d'ondes, après un passage désastreux par l'héroïne. De plus, le film qu'elle tourne ne lui offrira symboliquement pas grand chose, tourné par un metteur en scène infirme, incomplet, et qui tourne pour ne pas mourir plus que pour s'exprimer...
Le
désir, donc, est la clé du film. Pas tant le désir sexuel que ses conséquences: chacun des protagonistes a une histoire différente, et une façon différente de traiter ses désirs: Tina a été très
loin pour assumer son attirance pour les hommes en devenant une femme, et a perdu toute confiance dans les hommes (Après deux histoires mouvementées... avec un prêtre, puis avec son père... Hum.)
Sa fille est manifestement prète à tout pour que Pablo la remarque (mais Almodovar a su rester dans le ton léger de la comédie, il n'a pas franchi la ligne jaune ici); Pablo, lui, est un
dominateur frustré: il voudrait que tout marche dans son sens, mais que ça le fasse naturellement: il va jusqu'à écrire une lettre à Juan dans laquelle il lui dicte la réponse qu'il souhaite
lire; il ne sera jamais satisfait... Antonio, prèt à tout lui aussi, est le moins inhibé des personnages, c'est lui qui va le plus loin... il va bien sur trop loin.