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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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1 janvier 2025 3 01 /01 /janvier /2025 09:27

L'un des plus fameux films de Capra pré-It happened one night, le serait-il tout autant si Jean Harlow n'y interprétait pas un rôle de garce? Au passage, toute comparaison entre la même Harlow en 1931 chez Wellman (The public enemy) et chez Browning (The iron man) permet de constater soit que la dame apprend très vite, soit que Capra était un fabuleux directeur d'acteurs! Car elle est ici excellente de bout en bout...

Donc, dans une rédaction si typique d'un film du début des années 30, la star des reporters Stewart "Stew" Smith (Robert Williams) se voit confier une mission importante: récolter des informations sur le dernier scandale de la très respectable famille Schuyler. Une fois arrivé chez eux, ils essaient de faire jouer leur atout principal, la séduction de la petite dernière, Anne (Jean Harlow) mais le plumitif intraitable ne fera rien pour leur faire plaisir, et le journal publiera bien les informations. Seulement, il revient à la charge et séduit Anne... et le couple convole en juste noces lors d'un mariage éclair! Deuxième scandale, mais pas seulement pour les Schuyler: la jeune collègue de Stew, sa meilleure amie Gallagher (Loretta Young) le prend particulièrement mal... Mais l'arrivée de l'électron libre Stew chez les Schuyler va provoquer quelques tempêtes cocasses.

Evacuons de suite ce qui dérange le plus: Robert Williams. Il joue ici un rôle assez proche du style de journalistes que pouvait jouer Lee Tracy, qui généralement n'en faisait qu'à sa tête, et le fait de plonger ce zozo chez les Schuyler tendrait presque à nous les rendre sympathiques! Avec Stew, on est bien loin des Deeds et des Smith, dont la candeur serait un bon vecteur pour s'attirer la sympathie du public. D'ailleurs, il est intéressant de constater un certain nombre des ingrédients qui feront justement le succès de Deeds: une presse aux aguets, une famille bourgeoise sous investigation, des personnages manipulateurs, et un éléphant dans un magasin de porcelaine...

Le film est plus qu'un brouillon, d'abord parce qu'il anticipe joyeusement, sans jamais céder la place au drame (Contrairement aux films plus baroques que sont Ladies of leisure, Forbidden, ou The miracle woman), sur l'oeuvre future de Capra et sur ses thèmes de prédilection. Le scénario dû pour une large part à l'ami Robert Riskin fait la part belle aux dialogues qui font mouche, et il est construit sur une progression limpide et étanche. Et le metteur en scène a su choisir son rythme avec une assurance rare, en se ménageant des petites haltes comiques ou même absurde qui font toujours respirer le film... enfin, le film, deux ou trois ans avant, anticipe aussi sur tout un style dont Capra sera brièvement un maître, le temps d'un film mémorable, It happened one night: la screwball comedy.

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Published by François Massarelli - dans Frank Capra Pre-code Comédie Screwball comedy
14 janvier 2024 7 14 /01 /janvier /2024 11:32

Topper? C'est un banquier (Roland young) marié à une héritière-bien-comme-il-faut (Billie Burke) qui aimerait tant que son mari soit un peu plus sophistiqué, et qui lui monitore tous les aspects de sa vie: par exemple, le dimanche, on mange de l'agneau... Bref, Topper, qui est raisonnable, avec un métier raisonnable, une vie raisonnable, et une épouse raisonnable, aimerait tant un peu de fantaisie...

Les Kerby, en revanche... George (Cary Grant) est un riche actionnaire de la banque Topper, et donc il se permet tout ce qu'il veut. Son épouse Marion (Constance Bennett) l'assiste allègrement dans une vie dissolue, un parcours de fêtards décidés à ç=tout tenter, tout le temps... Bref, un couple déraisonnable. Et pourtant...

Topper, clairement, a un faible plus que prononcé pour Marion, qui adore le faire tourner en bourrique. Alors quand George et Marion meurent dans un accident de la route (qu'ils ont bien cherché par leur inconséquence), ils ne peuvent que revenir hanter leur pauvre ami Topper.

C'est l'une des premières screwball comedies, contemporaine de l'ineffable Bringing up baby, et force est de constater que Cary Grant y est totalement à son aise, même si son rôle reste quand même limité. Disons qu'il y est à la lisière entre personnage principal et personnage secondaire: il est d'ailleurs crédité en deuxième position... C'est une production Hal Roach, car le producteur sentait bien avec le succès des longs métrages Laurel et Hardy que le marché des courts métrages, qui avait fait son studio et sur lequel il basait son modèle économioque, était en train de mourir. Donc Topper est une étape importante vers une tentation de respectabilité, d'où une durée assez longue, ce qui est très rare dans le studio Roach. Comme les autres films du studio à cette période, la distribution en a été assurée par la MGM...

C'est gentiment loufoque, ou loufoquement gentil, c'est selon; on voit bien qu'il esxiste un genre à part entière, la comédie de fantômes, dont ce film (avant le Fantôme à vendre de René Clair) serait en quelque sorte exemplaire: le sel y repose sur l'absurdité de la situation (Topper étant la dernière personne qu'on imagine avec une vie intérieure, le voir constamment dans l'embarras face à des fantômes invisibles est le principal ressort du film, en particulier quand celui qui assiste à la scène est Eugene Pallette) bien plus que sur une quelconque épouvante. Le film ne joue jamais la carte du fantastique pour faire peur, mais utilise à fond l'idée que le couple des Kerby, étant déjà passé de vie à trépas, on pouvait sans trop craindre la censure les représenter dans toute leur malice et leur amoralité... Et les Kerby vont incarner d'une certaine manière les mauvais instincts de Topper.

Quant à ce bon McLeod, il a toujours été un fidèle exécutant, adroit sinon doué, et était pluôt à l'aise dans la comédie. Quand comme c'est le cas ici, il disposait d'acteurs particulièrement doués, il faisait un excellent boulot. Mais soyons quand même clairs: LE film de la screwball comedy (un genre, après tout, auquel les courts muets de Roach ont énormément préparé), pour les années 30, c'est... Bringing up baby. Définitivement!

 

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Published by François Massarelli - dans Screwball comedy Boo!! Cary Grant Hal Roach
22 février 2014 6 22 /02 /février /2014 08:12

Ca commence de façon très inattendue, par une scène d'action trépidante: deux hommes se battent sur un train en marche, et tombent tous deux dans une rivière. Ils meurent et le mot fin, acccompagné d'une musique dramatique, vient nous déstabiliser un peu plus... Nous sommes à Hollywood, dans une salle de projection; un homme explique que ce qu'on vient de voir, c'est le capital et le travail qui se détruisent mutuellement... le metteur en scène John L. Sullivan vient de montrer un nouveau film à ses producteurs, qui se demandent pourquoi le réalisateur de comédies à succès veut à tout prix réaliser des drames à message. Mais celui-ci n'en démord pas: à presque quarante ans, il n'a rien fait de valable, et souhaite se lancer dans son grand oeuvre: une adaptation de O Brother where art thou? , un roman social (Fictif) qui dépeint la vie des millions de vagabonds qui vont sur les routes. Afin de se rendre capable d'aborder le sujet, Sullivan annonce donc à ses employeurs qu'il va partir sur les routes à son tour et ramener des expériences authentiques qui lui permettront de réussir son film... La mort dans l'âme, afin de ne pas froisser la poule aux oeufs d'or, les responsables du studio acceptent, mais tentent de superviser un peu la lubie de leur poulain... Qui n'est pas au bout de ses mésaventures.

 

Dans une première partie, l'ironie gentille de Sturges fait que Sullivan, joué par Joel MCCrea (Qui est parfait avec son humeur teigneuse) ne peut jamais s'éloigner d'Hollywood: chaque coup du destin, chaque route qu'il prend, chaque initiative d'improvisation dans son périple, le renvoie à son quartier, son studio, ou un bus spécial affrêté par les producteurs pour le suivre à distance. Une façon comme une autre d'amener l'idée, qui fait un peu partie du 'message' du film: on ne peut pas se renier, et Sullivan, quoi qu'il fasse, ne sera jamais totalement un vagabond. Mais on ne s'en tient pas à cet aspect comique de l'intrigue, puisque deux facteurs vont jouer un rôle important: d'une part, Sullivan rencontre une jeune femme, aspirante actrice, dont il tombe vite amoureux (Veronica Lake, qui n'est pas nommée comme pour en faire une sorte de symbole féminin; à coup sur, un choix ironique de la part de Sturges). Ensuite, il va prendre une décision généreuse, et un peu stupide, celle de distribuer les dollars à des compagnons d'infortune... Ce qui va évidemment attirer les convoitises, puis les ennuis. C'est donc lorsque Sullivan a décidé d'abandonner l'expérience qu'il va vraiment la vivre: il est arrêté pour avoir agressé un homme en sortant d'un train, et par-dessus le marché, apprend lors de son séjour au bagne, qu'on a retrouvé son corps. Désormais mort, condamné à six ans de travaux forcés, il n'a plus rien, et c'est à ce moment qu'il a une épiphanie: au milieu d'autres forçats, il est amnené à la fin d'un service religieux (Dans une communauté exclusivement Afro-Américaine) ou l'on va projeter un film. Précisément, il s'agit de Playful Pluto, un Mickey Mouse de la grande époque, présenté sur un vieux drap, muet. Les hommes rient et s'abandonnent, et Sullivan presque malgré lui, se laisse aller à rire aussi: un geste qui va bouleverser sa vie de façon durable...

 

Le film nous propose un message à la fois ironique, bien tourné et paradoxal: à savoir que le cinéma ou l'art ne doivent pas se sentir obligés justement de délivrer un message ou d'engager les consciences, mais se doivent de tenir jusqu'au bout, contre vents et marées, crises, inquiétudes, guerre, leur rôle d'amuser les gens. L'idée n'est absolument pas de critiquer la conscience de la culture, et d'ailleurs on cote ouvertement Capra comme un exemple contemporain d'artiste soucieux à la fois du grand public et de l'édification des spectacteurs... Et Preston Sturges, qui sait de quoi il parle, met en avant l'indispensable existence de la comédie. Pour appuyer son propos, il passe en revue presque contre Joel McCrea lui-même, dont le Sullivan est un incorrigible bougon, les différentes sortes de comédie, en multipliant les faire-valoirs (Tous les secrétaires, attachés de presse, valets et producteurs qui entourent le héros, mais aussi la fille interprétée par veronica lake, ou encore un prisonnier durant les scènes de bagne), les séquences de slapstick, la screwball comedy... Il rend aussi hommage au cinéma muet à plusieurs reprises. Et surtout, s'il prend l'exemple de Capra qui a tendance à parler des petites gens qui cherchent à s'élever, on notera qu'il nous parle d'un Américain parvenu qui cherche à s'abaisser même si ce n'est que momentanément. Pour l'auteur de Christmas in July, c'est contre-nature...

 

Aucun mépris pourtant, aucune condescendance dans la peinture des paumés, des vagabonds, avec des images qui parfois feraient presque documentaires... Ces gens auxquels le réalisateur Sullivan voudrait ressembler, ils semblent bien mériter le surnom collectif, The great unwashed: sales, aux vêtements élimés, revenus de tout, pouilleux... Le film n'édulcore pas, mais ne se réfugie pourtant dans aucun misérabilisme. Sullivan, heureusement, reprendra ses esprits. Il revient à sa vocation, utilise son influence pour pistonner sa petite amie, etc... Mais ce sera sa rédemption, d'autant qu'il est presque mort dans le film. Faut-il le dire? Sullivan's travels est un film passionnant, capital et pour tout dire, magnifique.

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Published by François Massarelli - dans Preston Sturges screwball comedy