Voilà un film qu'on ne présente plus... Les personnages du Petit Chaperon Rouge se rebellent et souhaitent faire partie de la distribution d'un cartoon plus moderne... On les retrouve dans une métropole, évoluant dans la vie nocturne, autour de gratte-ciels avec tous les derniers conforts: le loup, désormais un séducteur de night-club, Red, chanteuse ultra-sexy, et sa gran-mère, qui n'attend qu'une seule chose: la visite du loup!
"Red", la jeune chanteuse animée de mains de maîtres par Preston Blair (un ancien de chez Disney qui avait besoin de tâches plus, disons, intéressantes, et qui était préposé aux jolies filles dans l'unité de Tex Avery), le loup: ces deux personnages vont devenir des archétypes de la production du metteur en scène, et leur dynamique génératrice de gags enchaînés sera vue dans plus d'un film... On retrouve aussi avec plaisir la caricature de Kate Hepburn à laquelle la filmographie Warner du réalisateur nous avait habitués, assortie en prime d'allusions à la voix de Red Skelton!
Mais l'essentiel du court métrage reste quand même la séduction tentée par la grand-mère (totalement obsédée, et qui l'assume particulièrement bien!) sur le loup qui n'en demande pas tant: c'est gonflé, c'est au ras des pâquerettes, mais c'est aussi et surtout hilarant.
Un touriste jette une cigarette allumée dans le parc de Jello-Stone, et... c'est le début d'un incendie. Les deux rangers pompiers George et Juniors interviennent donc...
Peu de choses à dire, c'est un film qui se place de suite en pilotage automatique. C'est aussi l'une des fois où Avery a recours à un truc plus associé à Disney: il donne à son feu le physique d'un espiègle galopin, un sale gosse après lequel les deux héros pas vraiment très efficaces courent du début à la fin...
Avery va aussi donner une figure concrète au rapport très particulier entre George, le meneur du duo, et son acolyte Junior, qu'on mène gentiment par le bout du nez: quand il a commis une bêtise, Junior se voit obligé de se pencher en avant ("Bend Over, Junior!") par George, qui lui administre alors un impressionnant coup de pied aux fesses. Mais on a droit à des variations de ce gag à de nombreuses reprises dans le film: Avery s'ennuyait-il?
Outre Droopy et Screwy Squirrel, Avery a tenté de lancer une autre série de courts métrages qui n'aura qu'un succès limité, s'arrêtant au bout de quatre films... Hound hunters est le deuxième (le premier s'appelle Henpecked hoboes), et présente assez bien la dynamique à la Laurel et Hardy entre les deux vagabonds (...vaguement des ours) George et Junior.
Lassés d'être sur la route, ils postulent pour travail à la fourrière et doivent donc attraper les chiens errants, ce qui ne sera évidemment pas de tout repos. Notons qu'ils retrouvent à travers cette situation les prémisses d'une comédie burlesque à l'ancienne, en montrant les héros s'engager dans une nouvelle voie afin de se nourrir.
Mais si les deux personnages ont déjà leur mode de fonctionnement, avec le petit George en tête pensante et autorité morale sur le gros Junior-tête-en-l'air, il n'y a pas encore le gimmick qui sera beaucoup mis à profit dans les films suivants: "Bend over, Junior!". Maintenant, si Avery s'est vaguement inspiré du duo de vagabonds de Steinbeck (Of mice and men) pour ces deux personnages, il a aussi fait appel à l'autre personnage inspiré directement de ce roman, Le Lenny de Lonesome Lenny, qui revient pour une apparition éclair.
Ce film situé entre Big-Heel-Watha et Lonesome Lenny voit l'écureuil dingo affronter une variation de MeatHead, le chien pas très intelligent qui était son, disons, partenaire de jeux dans son premier film, Scewball Squirrel: c'est qu'il y a école, et que le chien a pour mission d'obliger la bête à s'y rendre...
Ce qui tient suffisamment le rôle d'une intrigue... Pour le reste, on ne sera pas surpris d'y retrouver le même chaos réjouissants, le "quatrième mur" ayant de toute façon depuis longtemps volé en éclat. Maintenant on tourne clairement en rond, et il est évident que Tex Avery n'a jamais réussi à échapper à l'inévitable: un personnage avec lequel tout est permis n'aura au final pas grand chose à dire, à moins qu'on ne varie l'ordinaire: ce qui était possible avec Droopy, la feuille blanche, ne l'était pas avec ce proto-punk de Screwy!
...Ce qui explique pourquoi le cartoon suivant sera le dernier. Ce qui n'empêche pas ce film d'avoir un certain nombre de gags mémorables.
La parodie de Hiawatha, un poème qui a aussi inspiré les équipes de Disney, est essentiellement concentrée sur les deux premières minutes, lorsque le fortement balourd Big Heel Watha reçoit la mission de ramener de quoi nourrir la tribu Indienne dont il fait partie... et cette mission d'adaptation vole de toute façon en éclat quand le pauvre personnage rencontre celui qui sera désormais sa, hum, proie: Screwy Squirrel...
C'est le troisième film du personnage, et il est bien en place: mal poli, avec un don d'ubiquité et un cynisme à la Bugs Bunny, s'adressant au public en permanence. Il n'empêche qu'il se fait voler la vedette par un Indien formidable balourd, et qui se divise en une dizaine de mini-Big-Heel-Watha dans une scène célèbre...
Le personnage de Screwy Squirrel, l'écureuil timbré, est la deuxième créature de longue haleine de Tex Avery à la MGM, et sans doute le plus proche de son intention initiale pour Bugs Bunny, auquel il emprunte d'ailleurs son mélange de cynisme et de volontarisme (car contrairement à Droopy, Screwy n'a rien d'un personnage aux émotions léthargiques: il rit, se réjouit de ses blagues, et a sérieusement la bougeotte...
Ce premier film d'une série de cinq seulement, est l'un des plus célèbres, et pour cause, puisque Avery annonce la couleur dans les premières minutes en se payant généreusement la fiole de la concurrence, à travers un écureuil mignon tout plein, tout droit sorti de Bambi, et qui se fait copieusement casser la figure par le héros en titre, qui prend alors le cartoon en charge...
Violence, méchanceté, absurde, courses-poursuites, coups divers, gags éminemment idiots s'ensuivent alors pour notre plus grand plaisir, en compagnie de Meathead, le chien qui pour son malheur a croisé un jour la route de la sale bête... ce qui ne les empêche toutefois pas d'être d'accord sur un point: on n'est pas chez Disney, ce qui fait qu'à la fin, quand le mignon petit animal réapparaît, il s'en prend plein la figure, de leur part à tous deux...
Sacrifions une fois de plus au culte de la perfection en animation, en revisitant inlassablement ce film drôle de bout en bout, où Avery s'évertue à limiter au strict minimum en terme d'intrigue mais aussi de décor: un magicien qui a cru bon de placer son numéro auprès d'un chanteur lyrique se voit signifier un refus catégorique (assorti d'un coup de botte vers la sortie), et se venge en sabotant le tour de chant...
Ce qui occasionne un numéro de transformiste extrême; incongru et déplacé (donc très drôle), pour l'artiste lyrique qui n'en demandait pas tant: à y regarder de plus près, avec ces plans qui reposent sur l'intrusion et la disparition iconoclastes d'objets saugrenus, on serait presque chez Méliès.
Donc, figaro figaro, o my darling Clementine, etc etc etc. Sept minutes de pur plaisir.
Dans ce film, Tex Avery pousse assez loin la logique de la superstition selon laquelle les chats noirs portent malheur. Il commence par nous faire voir, avec force drôlerie et une série de gags éblouissants, l'enfer quotidien subi par un petit chat poursuivi chez lui 24 heures sur 24 par un chien sadique.
Puis le petit chat rencontre un chat de gouttière noir, qui lui donne un sifflet: il lui suffira de siffler et le chat noir apparaîtra comme par magie, entraînant malchance après malchance sur le gros molosse. Et en fait de malchance, c'est surtout l'inventivité dans les choses qui vont tomber sur la tête de l'animal qui laisse pantois...
Tout autant, d'ailleurs, que les façons d'amener le chat noir, qui a toutes les idées et toutes les ressources, dans un flux de génie constant. Ma préférence, comme de juste, va à la façon dont il apparaît en hauteur, sur des ventouses...
Ce film se place dans l’oeuvre de Tex Avery au sein d’un ensemble assez cohérent, et paradoxal, de courts métrages dans lesquels le metteur en scène propose une salve de gags, évidemment, mais tous liés à une sorte d’anticipation sur la vie quotidienne. Les titres en sont parfaitement parlants, entre The Car of tomorrow, The farm of tomorrow et The TV of tomorrow, il n’y a pas d’équivoque sur les intentions…
Mais il n’y aura évidemment pas de sérieux dans ce qui est surtout une recherche savante et salvatrice du gag, dans un cadre, qui est celui maintes fois éprouvé, celui du faux documentaire prétexte à des cascades de gags. On sait qu’à la Warner, déjà, Avery affectionnait ce mode de fonctionnement… Et à travers ce faux documentaire, la cible visée était bien sûr les films promotionnels, qui peignaient en rose un avenir délirant, reflet d’une période dorée et un tantinet décérébrée.
Maintenant, ce film est aussi à sa manière un reflet d’une façon de penser dont nous espérons qu’elle a bien changé, entre le gag récurrent de la belle-mère qui a droit à, disons, un traitement de faveur dans les applications diverses de la maison, et la place assumée de la maîtresse de maison au sein du foyer : aux fourneaux ! Pour finir, cette petite pépite est indicative de l’atmosphère particulière d’une époque durant laquelle l’avenir semblait écrit vers le bonheur et le confort domestique. Clairement, dans le film, tout fonctionne avec un bouton…
Un chien vagabond se couche, le soir, et dit bonsoir à son compagnon: la puce Homer... celui-ci est le premier à se réveiller le lendemain, et il a devant lui un spectacle trop tentant pour résister: dans le pelage d'un chien qu'il aperçoit au loin, il a vu... une dame puce, totalement aguicheuse. Homer laisse donc un mot à son copain et monte à bord d'un bouledogue qui ne va pas voir les amours de deux puces sur son dos de très bon oeil...
Ca commence en douceur, et Avery multiplie les signes à la Disney en direction du public; Homer est après tout une puce présentable, et il est doté d'un gros nez et d'une bouille rigolote. L'amitié avec le chien est presque touchante, mais... on parle ici d'hygiène, de parasites, et par ailleurs de reproduction avec insistance. Le metteur en scène s'amuse avec le compositeur Scott Bradley, qui est à la fête puisque le film est largement dominé par des séquences non dialoguées... La complicité entre compositeur et réalisateur renvoie aux riches heures de la Warner avec Carl Stallings.
Avery est complètement dans son élément, livrant un film à la fois parfaitement drôle, et quand même bien transgressif. On pourrait énumérer les passages volontairement douteux, parmi lesquels on trouve une tentative de suicide multiple (pendaison, présence de deux armes de poing, et bombe, le tout en une seule fois), et la communication sans parole mais particulièrement claire de Homer qui explique où il était, avec qui, et ce qu'il a fait avec elle, à son copain... le tout en deux gestes magistraux.