La vie d'un policier, représentée sous tous ses aspects: en famille, avec femme et enfants, lors d'un repas tranquille, ou en ville, dans l'exercice de son métier. Pour les bons, comme pour les mauvais côtés... Avec les risques inhérents à cette activité.
On pourrait qualifier ce film très soigné de didactique, voire de propagande, mais si effectivement il a été tourné en collaboration avec les forces de police New Yorkaises, il reste un film du quotidien, qui s'inscrit dans la volonté de Porter (et d'Edison) de montrer la vie Américaine à travers ses exemples. On avait après tout déjà été familiarisé à la vie d'un pompier...
Du coup, le film est riche en péripéties, et déjà empreint de cette forme de naturalisme particulier qu'a le cinéma quand il préfère s'approcher d'une démarche documentaire plutôt que de capter la vie sur le vif... C'est un bel exemple de cette avancée du cinéma, qui débouche sur un film souvent digne dans son interprétation. Un autre film Edison le complète, par les mêmes auteurs: Police Chasing Scorching Auto est en fait une scène qui a été coupée faute de place... et exploitée comme un film court à part entière. Rien ne se perd...
Maintenant si on avait mauvais esprit, on se précipiterait après visionnage de ce film, sur le merveilleux Cops de Buster Keaton!
Cette pièce d'inspiration Irlandaise est typique de l'approche de Porter, qui souhaitait constamment ouvrir le cinéma d'un côté à plus de possibilités narratives (The dream of a rarebit fiend, The great train robbery), de l'autre aux possibilités théâtrales, le cinéma selon lui permettant d'amener le théâtre aux masses...
Et c'est là que le bât blesse. En adoptant une intrigue qui se passe d'intertitres (le film a été montré avec et sans), le cinéaste prend le risque de perdre son public... Il le rattrape donc en simplifiant à l'extrème. Le résultat est raté, sans parler du fait qu'avec le passage du temps, des pans entiers de ce film d'une bobine ont été perdus.
Reste que la chose, à n'en pas douter un clin d'oeil à la diaspora Irlandaise et en particulier aux nombreux natifs de ce pays qui résidaient dans les environs de New York et du New Jersey, a eu du succès...
L'un des principaux reproches faits au cinéma à cette époque reculée est de donner le mauvais example. C'est le cas ici, avec ces vignettes construites autour de sales gosses qui font les quatre cent coups pour emm... les adultes!
Mais d'une part, il s'agissait d'un thèms omniprésent dans la bande dessinée de l'époque, de Little Moritz à The Katzenjammer Kids. Un folklore que les journaux publiaient sans sourciller et qui tait extrêmement populaire non seulement pour les enfants mais aussi pour leurs parents... Et d'autre part, les sales gosses finissaient toujours par une punition salutaire...
Qu'importe: quelques années plus tard, les héros d'un film, à plus forte raison les jeunes gens, seraient toujours exemplaires. C'est un affadissement inévitable...
C'est une rareté, finalement: un film non narratif de Porter, pour Edison, qui a été colorié. [Pas "colorisé", non: rappel d'un maniaque des mots, la colorisation est un procédé électronique de coloration d'images vidéos, développé dans les années 80 avec l'essor de l'utilisation de l'informatique pour lédition vidéo, et la diffusion d'oeuvres à la télévision, ce qui avait (légitimement) causé de furieux débats en raison de l'atteinte à l'intégrité des oeuvres... La coloration des oeuvres initiée vers la fin du XIXe siècle (et très présente en Europe, notamment chez Méliès, puis avec le développement d'une branche de Pathé qui était entièrement consacrée à la chose, le Pathécolor) consistait en un ajout au pochoir par les petites mains des studios (avec des pinceaux à UN poil) de teintes ciblées, afin de rendre l'impression et l'illusion de la couleur. J'entends parfois parler de "colorisation au pochoir", c'est comme si on parlait de "Streaming à la charrue". Fin de la parenthèse...]. L'idée, charmante au demeurant, est de rendre hommage en couleurs vives à trois "beautés" typiquement Américaines, pour conclure les programmes de films Edison dans les cinémas où ils étaient projetés. La belle dame est donc boen une American Beauty, c'est également le nom donné à cette belle rose qu'on voit dame saisir dans sa main; enfin, dernière beauté: le Stars and stripes, qui nous fera voir des étoiles...
Adapté d'une bande dessinée de Winsor McCay (l'auteur de Little Nemo et Gertie the dinosaur), ce film est sans aucun doute l'un des plus célèbres de Porter, et tranche sensiblement sur sa production courante.
Il fait partie des oeuvres développées au-delà de l'anecote illustrative et représente la nuit troublée d'un homme qui a abusé de bonnes choses (en l'occurrence, du fromage, le Welsh rarebit)? Il s'est couché, mais ses ennuis ont empiré, et sa nuit de cauchemar est montrée dans toute son horreur...
D'une part on remarquera un effort conscient pour non seulement multiplier les effets fantastiques, mais aussi pour y trouver le meilleur truquage possible, ce que Méliès, à ses débuts, ne faisait pas par exemple. Mais à cette même époque, Pathé avait commencé la production de ce qu'ils appelaient des "films à trucs", et Porter, attentif au développement de son art, en a certainement étudié les contours. Mais une telle réussite dans le domaine du film fantastique est sans aucun doute une grande nouveauté, car si le film doit beaucoup (à Méliès, à Gaston Velle), il est aussi unique pour son époque dans la mesure où les truquages se mettent au service du récit et ne sont pas l'attraction elle-même...
Combien de films Porter a-t-il sorti avec le mot "train" dans le titre? Blague à part, c'est vrai que cet instrument du progrès est souvent pris pour être le théâtre de péripéties très variées... Comme ici une énième attaque de train, très sérieuse celle-ci contrairement à The little train robbery...
Mais elle est surtout vue de nombreux points de vue différents, tranchant sur le conte "omniscient" qu'était The great train robbery. En montrant les passagers, mais aussi une femme qui est témoin de l'attaque, et qui va être laissée sur les rails pour y mourir, 'est une histoire qui nous montre le chaos défait par la civilisation en marche, rien de moins...
Puisant dans les fonds de tiroir du mélodrame, l'homme de spectacle qu'était Porter se fait plaisir en contant une histoire hyper-classique: la fille d'un meunier est séduite par un artiste venu de la ville, et répudiée par son père. Elle en vient à contempler le suicide...
Le film est un concentré de choses qu'on retrouvera chez Griffith, au-delà même d ela "sagesse populaire" (l'un des moteurs même du mélo), qui consiste à assimiler à de la malfaisance tout ce qui vient de la ville... Les metteurs en scène (oui, deux sont crédités à cette époque) ont tenu à placer cette intrigue poussiéreuse dans des décors ruraux qui lui vont bien et atteignent un genre de réalisme (pour l'époque) qu'on retrouvera chez leur illustre successeur...
Pas partout cependant, ils retournent pour le clou du spectacle (la tentative de suicide suivie d'un sauvetage en bonne et due forme) à des toiles peintes, et... ça se voit.
Des employés noirs d'une ferme se servent allègrement dans les réoltes de pastèque. Les fermiers leur mènent une guerre des nerfs...
C'est l'un de ces nombeux films qu'on hésite à qualifier d'ethnographiques, qui montraient chez Edison les Afro-Américains comme étant "l'autre", des gens qu'on ne soupçonnerait pas de venir voir les films dans une salle... Mais quideveitn parfois y avoir accès quand même. C'est assez affligeant, et il serait sans doute intéressant de retourner aux racines du cliché:
Ainsi, au début, on voit des gens, mal habillés, qui rampent pour ne pas être trop visible, et qui se jettent sur les fruits mûrs. On passera sur le fait qu'ils sont animalisés, ce qui serait déjà un motif de fâcherie... Mais leur misère même n'est pas remise en question. Car pour que des gens en soient réduits à voler de la nourriture, il faut quand même rappeler qu'ils ont faim, non? Et le film ensuite se moque de leur peur, provoquée ici par des hommes grimés en squelettes. Mais il y a là aussi des racines historiques: en 1870, le Ku-Klux-Klan menait des actions de terreur dans les populations affranchies des campagnes Sudistes.
Et je ne pense pas qu'il ne s'agissait que de leur faire peur...
Dans un comté rural, une famille est sous surveillance: en effet, le mari impose un enfer à son épouse, en la battant... Les braves voisins, organisés en une société secrète et masquée, vont intervenir pour le punir...
Voilà un film qui fera forcément réfléchir, et forcément tiquer. Car les "white caps" en question ressemblent furieusement à une autre société secrète, certes interdite à cette époque (depuis les années 1870), et probablement oubliée... Mais dans de nombreuses zones rurales en 1905, ce genre de groupe de vigilance de voisinage était relativement fréquent. Dans quelle mesure Porter se rendait-il compte qu'il faisait presque une publicité favorable mais subliminale au KKK?
Porter, touche-à-tout et expérimentateur en chef chez Edison, virtuellement le seul cinéaste de l'entreprise, finalement, avait réussi à produire un indéniable classique avec The great train robbery, il s'est aussi ingénié de façon plus inattendue à en produire un remake... Avec des enfants pour acteurs! Voici donc la version junior du film, qui reproduit des scènes du film dramatique le plus spectaculaire de son auteur, sous sa propre direction, complète avec son train miniature.
C'est, fatalement, anedotique au mieux. Mais ça permet aussi de voir que même dans les mêmes décors, avec le même maître d'oeuvre, la magie n'opère pas deux fois, loin de là...