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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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24 janvier 2015 6 24 /01 /janvier /2015 08:41
Mars attacks! (Tim Burton, 1996)

Un malentendu; voilà le fin mot concernant Mars attacks!, ce qu'on en attendait, ce qu'on imaginait qu'il serait, et la déception généralisée mais relative du public et de la critique à son égard. Mais comment aurait-il pu en être autrement? Le film s'est construit sur deux bases: d'une part, l'adaptation de la série de cartes du même nom, disponible en 1962, et qui faisait envie à certains réalisateurs et producteurs depuis 1985. Alex Cox était le premier a avoir eu l'idée de tourner un film à partir de cette étrange collection de cartes graphiques représentant surtout de l'horreur bien sadique... Jonathan Gems, scénariste, avait donc repris le concept, et écrit un traitement en 1993. Il a proposé le film à Burton en 1993, alors que celui-ci, devenu intouchable, finissait Ed Wood. D'autre part, Tim Burton, qui ne faisait pas mystère de son gout pour la science-fiction à l'ancienne, y compris les films les plus douteux ou les plus ringardisés, avait depuis longtemps l'envie de prolonger sa filmographie d'une incursion parodique dans le domaine de l'attaque d'extra-terrestres méchants, avec explosions, destruction massive, et surtout un puissant second degré... Avec le succès public de ses films de Beetlejuice à Batman returns, Tim Burton est un metteur en scène à suivre, auquel la Warner va donner un budget conséquent; et avec la sortie d'Ed Wood, la critique enfin conquise atend de pied ferme le nouveau film du jeune prodige de Burbank... Surtout que sort en 1996 un film qui va faire du bruit et remettre au gout du jour le concept d'attaque massive de martiens méchants, le très pesant, quasi teutonique et immensément crétinissime Independence Day.

Mais revenons à Tim Burton: le succès a parfois un revers de la médaille: un metteur en scène comme Burton peut effectivement bénéficier de moyens, et se permettre des ambitions sur un film comme Ed Wood, Big Fish ou Charlie and the chocolate factory; mais si l'idée de base est de rendre hommage à des nanars, des films qu'on ne regarderait plus qu'en se cachant, et dès le départ tout en se livrant à quelques piques à l'égard du gros film de l'année, les ambitions parodiques de Burton vont se heurter à la conception du "toujours plus" qui prévaut quand à Hollywood on laisse les studios sentir le vent... Sorti en 1996 aux Etats-unis, le film Mars Attacks! déçoit terriblement: les uns attendent un jeu de massacre sans foi ni loi, qui forcément sera impertinent et mal élevé, et ils sont déçus car la parodie, absolument impossible à prendre au sérieux, domine largement, avec une absurdité généralisée dans l'intrigue. Et les autres qui prennent le film au premier degré (Oui, je sais, c'est incroyable, mais comment expliquer autrement le succès des films de Michael Bay ou Roland Emmerich?) s'offusquent de voir les martiens s'amuser à tout casser, y compris le président des Etats-Unis se faire dessouder comme un malpropre au terme d'un mandat surtout marqué par des décisions toutes plus stupides les unes que les autres. Donc, Mars attacks! déçoit, on dit que Burton s'est planté, et on attend de pied ferme la relève.

Pourtant, piégé dans un projet qu'il ne voulait pas rendre pharaonique, Burton s'est défendu! Il a réussi à imposer à la production un compromis sur le design des martiens. Lui voulait les animer en stop-motion, afin de mettre l'accent sur le côté factice, et renvoyer au système D de la science-fiction des années 50; le studio voulait de la 3D hyperréaliste (Du moins celle à laquelle on pouvait prétendre à l'époque de Jurassic Park). Le compromis, bien sur, est dans le film représenté par l'idée de tourner les scènes d'animation en 3D stylisée... Avec des formes rondes, des soucoupes flambant neuves, des aliens à grosses têtes de squelette et cerveau apparent. Et l'un des apports essentiels de Jonathan Gems est de structurer le script comme un film catastrophe, avec le casting de luxe qui est inévitable au genre: Burton bénéficie donc d'un groupe conséquent d'acteurs de premier plan: Jack Nicholson, Annette Bening, Glenn Close, Jim Brown, Pam Grier, Danny de Vito, Michael J. Fox, Pierce Brosnan, Sarah Jessica Parker, Martin Short, et Rod Steiger vont donc être les protagonistes du jeu de massacre, aidés par un ensemble de jeunes talents (Lukas Haas, Natalie Portman, Jack Black, Christina Applegate) et quelques cins d'oeil: Sylvia Sidney (Beetlejuice) sort de sa retraite pour interpréter la petite vieille dame qui sauve le monde sans vraiment s'en apercevoir, Lisa Marie (Mrs Burton depuis Ed Wood) va jouer l'inaccessible et étrange beauté venue d'ailleurs d'une scène parmi les plus typiques du film, et Tom Jones, le chanteur Gallois qui travaille à Las Vegas, va interpéter Tom Jones, chanteur Gallois qui travaile à Las Vegas. Et un gros casting dans un film catastrophe, ça veur dire qu'il va falloir permettre à chaque personnage une exposiion valide. C'est un des aspects les moins réussis du film, cette introduction de 20 minutes qui donne surtout l'impression de tourner à vide... Mais c'est aussi une tradition de ce genre de films.

Une fois les martiens arrivés (Dans une scène exemplaire, frontale, et qui bénéficie de l'impeccabilité du style sans fioritures de Burton en matière de montage, rythme et déplacement de caméra), le jeu de massacre commence et ne s'arrête plus. On oscille ensuite entre des batailles meurtrières avec moult bruitages idiots, et des scènes de conciliabule, faites d'une grosse dose de clichés pleinement assumés: par exemple, un scientifique lève les yeux au ciel après avoir examiné un martien, et assène, l'air grave: "ils respirent de l'azote!". Ou encore, les héros (Ou d'autres personnages moins héroïques) qui meurent tous en prononçant de malencontreuses dernières paroles: un général belliciste va mourir après avoir fourni une involontaire parodie d'un fameux discours de Winston Churchill, le président Américain qui propose l'amitié entre les peuples, un soldat (Jack Black) qui a droit à deux dernières répiques: le martial "Die, you alien piece of shit", suivi du moins glorieux, mais très réaliste "I surrender!"... Ma préférence va à Glenn Close, la 'first lady' des Etats-Unis, qui meurt en prononçant ces mots, désignant l'objet responsable de son trépas, qui lui est tombé dessus lors d'une attaque de martiens sur la maison blanche: "Le chandelier de Nancy Reagan!" Les humains se révèlent, face à la mort, face aux martiens, comme ce qu'ils sont, soit des minables, et c'est bien ce nihilisme qui pose problème à certains... Difficile de s'y retrouver, voire de s'identifier à ces personnages, pour le grand public. Pourtant une comparaison avec d'autres films de Burton, Edward Scissorhands en tête, révèle le même dispositif: les "gens normaux" dans ses films, ne sont pas des héros. le mot lui-même est irritant: pourquoi faut-il des héros? L'un des avantage de ce film est de poser la question: a-t-on vraiment besoin de comportements exemplaires dans un film? Ici, le metteur en scène flingue tous ses héros, privilégie les préoccupations personnelles: c'est parce qu'il veut sauver sa grand-mère qu'il aime que Riche Norris va par hasard découvrir comment tuer les martiens massivement, pas dans le but expressément assumé de sauver le monde; mais il ne lèvera pas le petit doigt pour assiter ses parents qui se font massacrer dans son dos; tous ceux ou presque qui s'en sortent dans le film le font d'abord parce qu'ils sauvent leur propre peau. D'autres survivent parce qu'ils sont à l'écart: Tom Jones, prisonnier de Las Vegas, Taffy Dale, qui survit à son président de père, est une sorte de reprise du personnage de Winona Ryder dans Beetlejuice: une ado à part, nihiliste et blasée. Florence Norris est atteinte d'Alzheimer, et Byron, boxeur lessivé qui décide de retourner à sa famille coûte que coûte, est lui aussi un paria. Mais cette fois-ci, Burton, qui a si souvent représenté des personnages à part, qu'ils soient gothiques (Le Pingouin, Max Schreck, Beetlejuice, Vampira), retirés du monde (Bruce Wayne, Bela Lugosi), ados en crise (Winona Ryder, là encore, dans ses deux rôles, a montré la voie) ou de simples benêts gauches et mal adaptés, tend ici à s'auto-parodier avec le 'donutophile' Richie, interprété par ce grand échalas de Lukas Haas, qui a bien grandi depuis le film Witness. Cette auto-parodie est parfois gênante, bien sur. Mais elle reviendra si souvent qu'on peut sans doute la mettre sur le compte du style...

Restet à régler le cas d'un prétendu message: dans ce film, semble passer en effet une sorte de tendance à pointer du doigt les politiciens (Le président Dale et son éternelle incapacité, il fait penser à un Jimmy Carter en pire), les décideurs (Donald Kessler, professeur et "je-sais-tout" horripilant qui fume en permanence la pipe, comme tout scientifique le faisait dans les films des années 50), l'armée (Deux généraux, un pacifiste et un belliciste, qui s'avèrent tous les deux être d'affreux crétins, ce qui bien sur me fait plaisir à titre personnel), la presse (Un couple de présentateurs-vedettes de la télévision, se fait une compétition farouche, alors que lui est un journaliste de premier plan, et elle une spécialiste de la mode)... Il renvoie dos à dos le président Dale, et un homme d'affaires véreux et vulgaire (Il habite las Vegas et y fait la loi, c'est dire) en les faisant tous deux interpréter par Jack Nicholson: en mode contenu pour le président, en Joker habité par l'esprit de Jack 'The Shining' Torrance pour l'incroyablement vulgaire Art Dale. Cette charge anti-capital, anti-politique, anti-tout, ne tient pas la route... si on la prend au sérieux. Mais Burton voulait tellement faire son film 'à la manière de...' qu'il n'a pas résisté à la perche tendue par le scénario. Donc comme les films des années 50 dissimulaient à peine un message (Gébéralement furieusement anti-communiste), Gems et Burton se sont payé les fiole des paraboles politiques des années 70, avec un plaisir gourmand.

Et du coup, en laissant les martiens ariver sur terre, et tout casser (Mais alors, tout!!), ils ont un peu laissé l'impression d'avoir choisi plutôt de s'identifier à ces sales bestioles, ce que montre à coup sur la réaction de Sylvia Sydney-Florence Norris devant sa télévision lorsque les martiens tuent toute la représentation nationale, donc Sénateurs et Représentants, d'un seul coup: elle se marre, et elle sait pourquoi: "They blew up Congress!", ils ont fait sauter le Congrès... Ce n'est pas du meilleur gout, certes, ça a fait grincer quelques dents, mais là encore, il ne faut pas le prendre au premier degré: Burton et la politique? Voyez ses autres films, les politiques n'y sont jamais qu'une caricature fonctionnelle, du vent. Ils n'ont aucun intérêt. Donc on pardonnera à Tim Burton d'avoir choisi de s'incarner dans d'horribles sales bêtes qui respirent de l'azote, viennent sur terre (Pourquoi? Pour tout casser bien sur) et détruisent tout ce qui est sacré, avant de mourir stupidement parce qu'ils ne supportent pas le yodel d'un obscur chanteur de pop country des années 40. L'Amérique triomphe toujours? Disons que son mauvais gout à la peau dure... Donc ce bilan, forcément mitigé, d'une blague cinématographique soudain étalée sous les projecteurs à cause d'un budget gonflé au-delà du raisonnable, aurait pu être bien pire, et pour l'avoir vu une dizaine de fois, j'en vois toujours les coutures, mais j'y prends toujours du plaisir... C'est déjà ça, non?

Mars attacks! (Tim Burton, 1996)
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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
15 janvier 2015 4 15 /01 /janvier /2015 20:28
Edward Scissorhands (Tim Burton, 1990)

Touché par la grâce, Tim Burton prend de la hauteur avec ce quatrième long métrage, un film qui non seulement rend accessible au plus grand nombre l'univers sombre de l'auteur Burton, sans rien sacrifier de sa saveur ni de son humour d'observateur, mais en plus crée de toutes pièces un mythe cinématographique qui a l'importance des grands contes. De toutes pièces... ou en tout cas en s'inspirant d'un univers familier et propre à Burton du moins... C'est lui qui est à l'origine de l'intrigue, un vrai conte noir en vérité, qui tourne autour du voyage initiatique d'un marginal inattendu, un homme créé par un savant fou, et qui lui a survécu, inachevé. Un homme différent et émotionnellement tout neuf, foncièrement doux, mais dont les mains provisoires, faites de lames de ciseaux et de couteaux acérés, sont autant de menaces pour la famille qui l'a recueilli, et leur environnement. Bien sur, la petite bourgade qui va l'accueillir va le fêter, l'aider à trouver sa place, mais ils vont surtout par leur bêtise et leur égoïsme, montrer à l'inconnu qu'il ne peut s'intégrer parmi eux que s'il devient comme eux. C'est impossible, et ça se terminera donc dans le drame.

Mais comme il n'est de bon conte sans un peu d'émotion, Edward va tomber amoureux, et l'éternel figure Chaplinienne du ver de terre amoureux d'une étoile va ici être illustrée à nouveau, avec un changeent de taille: l'amoureux éperdu est aimé de retour, mais la ville et ses gens bien comme il faut vont se charger de leur rappeler qu'hors de la banlieue et de son conformisme, point de salut... C'est la deuxième fois que Burton travaille avec Winona Ryder qui a grandi depuis Beetlejuice, et elle est ici confrontée à Johnny Depp, qui lui fait connaissance avec un univers Burtonien dans lequel il se sentira bien vite chez lui... Les deux tourtereaux font merveille, livrant chacun une composition définitive, contrastée: une jeune adolescente très classique, mais profondément humaine et, mais elle ne le sait pas encore, attirée par mieux que les abominables benêts que son environnement stérile a à lui offrir; et un être inadapté, expressionniste et tout en gestes, qui ne sait pas encore comment se faire accepter ni s'il doit vraiment le faire. Il a deux manques, celui de son créateur, un homme certainement fou (Vincent Price!!!) mais qui l'a aimé profondément en le créant, et celui de ses mains, dont il rêve, mais qui lui sont d'autant plus inaccessibles qu'il n'existe aux yeux des autres que par sa différence: Edward, l'homme aux mains de ciseaux, est une aubaine sans fin pour les bons voisins, qui se chargent de lui trouver des occupations. Bien sur, lui va s'évertuer à colorer de plaisir artistique cette particularité morphologique qui est la sienne: il réalise une magnifique sculpture de glace durant une scène qui voit Kim danser dans la "neige" des copeaux de glace ainsi produite par la vélocité des coups de ciseaux... Mais on lui demande surtout de rendre service, bref, d'être utile...

Le discours sur la banlieue est sans appel, et Burton n'a pas son pareil pour rendre les médiocres extrêmement équivoques: sympathiques (Les parents de Kim, la jeune femme, qui accueillent Edward, sont nuls mais bien gentils, après tout), tout en les chargeant avec une certaine férocité: le discours d'une insondable vacuité du père, entendu probablement à l'heure du repas chez tous ses voisins, est hilarant... Le contraste entre Edward, figure de cauchemar mais profondémen doux et timide, et les voisins tous plus ridicules les uns que les autres, joue à fond ici. Mais le cinéaste est un visuel, et il peint par l'image une banlieue bigarrée et vomitive qui contraste aussi fortement autant avec la vieille maison du bout de l'allée, ou vit en secret Edward jusqu'à ce qu'il soit découvert, mais aussi avec le maquillage blafard du jeune homme.

Et dans ce conte gothique, comment s'tonner que le metteur en scène ne convoque les figures du Frankenstein cinématographique de Whale (La création d'un homme, qui échappe à son créateur, et qui provoque malgré lui la colère et la violence de minables, qui veulent ensuite le lyncher) et son final, avant d'aséner avec une immense poésie une image lyrique et sublime d'amour fou, qui va permettre au film d'arriver à clore le cercle que l'introduction avait ouvert: c'est Kim, devenue grand-mère, qui raconte une histoire à sa petite fille, et on sait à la fin que cette histoire ele l'a vraiment vécue. Et la neige qui tombe sur la Calfornie l'informe qu'Edward est encore vivant, car elle sait que c'est lui qui, en créant une sculpture de glace, envoie des cristaux de glace dans le quartier... Cette scène, c'est l'ultime lien entre les deux amoureux, qui clot un film en forme de conte triste, lyrique, exalté, et à franchement parler au plaisir inépuisable.

Edward Scissorhands (Tim Burton, 1990)
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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
3 janvier 2015 6 03 /01 /janvier /2015 16:05

Le jeune Charlie, brave garçon qui vit dans une masure délabrée avec ses parents et ses grands-parents, gagne un ticket pour la visite unique d'une usine de chocolat ultra-secrète, qui le fait rêver depuis très longtemps. Avec lui, quatre autres enfants, infects rejetons gâtés, vont se rendre dans la chocolaterie mystérieuse. Tous sortiront vivants de leur rencontre avec l'énigmatique chocolatier Willy Wonka, mais... dans quel état?

Le roman de Roald Dahl est sans doute l'un des meilleurs livres pour enfants qui soit, même si dans la mesure ou on peut y apporter ce qu'on veut, le livre n'est pas réductible uniquement à cette apellation. Et paru en 1964, il est aussi un pur produit d'une époque d'ébullition artistique, si définitivement ancrée dans les trente glorieuses... Tout en étant très fidèle au livre, jusqu'à un certain point du moins comme nous le verrons tout à l'heure, l'adaptation par Tim Burton est aussi un film très personnel; Burton, sans doute le meilleur metteur en scène (Avant qu'il ne se fourvoie dans un Alice du pire mauvais gout quelques années plus tard) pour s'attaquer à une telle entreprise, y fait sienne la malice de Dahl, et s'il fournit un pendant visuel riche et très satisfaisant au livre (Déjà magnifiquement ilustré par Quentin Blake dans une édition qui fait référence), il a le bon gout de ne pas fermer l'interprétation. L'usine de chocolat, machine à rêves sublime, garde de nombreux mystères, et on n'a l'impression une fois visitée avec ce film, de n'avoir vu que la partie immergée de l'iceberg.

Avec certains de ses complices habituels, Depp et Elfman en tête, Burton s'est approprié sans efforts apparents l'histoire de Dahl, dont il renvoie en pemancence à l'aspect de conte, sans se vautrer dans du déjà vu, ou le pire mauvais gout de la version de 1971 (Par Mel Stuart. Si le film de 2005 ressemble souvent à un rêve, celui de 1971 fait partie de ces cauchemars qu'on fait quand on a 40° de fièvre...). Il crée un monde cohérent en dépit de l'absurde de la plupart des situations et réussit (En dépit du fait que Depp en fait, à mon humble avis, bien trop...) à trouver un juste milieu entre une histoire qui fonctionne et un univers qui délire. Pourtant la dernière partie, annoncée par de nombreuses allusions préalables, se perd dans une sous-intrigue rajoutée, liée à l'oubli volontaire par Willy Wonka de son père, et de là d'où il vient. Tout en reposant sur une thématique déjà vue et revue chez Tim Burton, et qui était d'ailleurs la base de l'intrigue de Big Fish, le film précédent, cet aspect du film déçoit, tend à trivialiser le propos. Ca devient un conte édifiant de plus, au lieu d'être ce grand défouloir psychédélique qu'est le livre. Ce défaut mis à part, cette très sage, mais globalement réussie, appropriation de Roald Dahl m'apparait comme un pendant valide au roman, et un Tim Burton qui n'a rien d'indigne. Une fois de plus,le metteur en scène nous envoie vers l'univers décalé de quelques marginaux, et nous fait voir sous un jour nouveau nos propres turpitudes, car, eh oui, Mike Teavee, Augustus Gloop, Violet Beauregard et Veruca Salt, ces affreux sales gosses, eh bien... C'est nous.

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
30 décembre 2014 2 30 /12 /décembre /2014 16:32

C'est sans aucun doute le succès non négligeable de Beetlejuice, et le talent singulier particulièrement mis en valeur dans la mise en scène, qui ont permis à Burton d'hériter du projet de Batman, que la Warner voulait relancer. Il était sur les rangs dès 1986 mais à n'en pas douter, avec la concrétisation de son talent, le réalisateur a été confirmé, et a même pu mettre des conditions dans la balance: Danny Elfman, son complice depuis trois films, est de retour, et c'est tant mieux (J'y reviendrai), et Bruce Wayne est interprété par Michael Keaton, l'anti-héros de Beetlejuice... Ce qui n'est pas vraiment attendu, et pourtant selon moi (Mais il y a des voix dissonnantes) il s'en tire à merveille avec son mélange de retenue et de rage concentrée, qui éclate d'ailleurs lors d'une scène étonnante...

Le film se concentre sur la naissance de la légende de Batman, non pas la conception par Bruce Wayne, et l'émergence d'un sentiment de nécessité d'accomplir la justice: ce sera le thème du très ennuyeux film de Christopher nolan, Batman Begins. Non, ici, il s'agit de la progressive reconnaissance par Gotham City de l'existence d'un justicier déguisé, vue à travers la presse, et deux personnages de journalistes, d'un côté, et par sa lutte contre Jack Napier, le "Joker": un bandit brulé à l'acide à cause de Batman, et qui se définit lui-même comme un "artiste homicide"... Au cours du film, Bruce Wayne, le richissime et mystérieux dandy, va tomber amoureux de la journaliste Vicky Vale (Kim Basinger), et apprendre aussi qui a tué ses parents. Le final aura lieu sous la forme d'une confontation entre le super-héros et le "Joker", située dans un beffroi, au milieu des vieux boies et de lacier menaçant des engrenages d'une horloge géante...

Le film est typique de cette époque, durant laquelle Warren Beatty tournait son Dick Tracy, et Spielberg transcrivait son envie de tourner du Tintin dans les films mettant en scène Indiana Jones... Who framed Roger Rabbit (Bob Zemeckis) n'est pas loin, non plus: bref, l'époque est à la bande dessinée, et contrairement à ce qui arrivera à ce type de franchise, voir à ce sujet les films de Nolan, on ne demande pas à Burton de faire autre chose. Le film est un intéressant compromis entre les desiderata de la Warner et l'univers de Burton, qui s'approprie certains éléments de l'intrigue, pour en développer les thèmes: Il fait de ses deux personnages principaux, Batman (Michael Keaton) et le Joker (Jack Nicholson) des êtres à part, marginaux comme il y en aura tant dans on oeuvre. Bien sur, Bruce Wayne est le vrai héros, mais en attendant qu'il règle son compte au joker, celui-ci aura été autorisé à faire de la casse, beaucoup de casse. Comme dans ses deux précédents films, Burton se livre à beaucoup d'excentricités et de farces grotesques, grâce à Nicholson qui a manifestement pris le plus grand plaisir à jouer ce rôle, mais cette fois il installe le grotesque dans la fabrique même du drame, ce qu'il refera bien sur souvent. Et il ose faire de ce "joker", dont le visage grimaçant nait de la rencontre avec le super-héros, un père symbolique pour Bruce Wayne: celui-ci a perdu ses parents lorsqu'il était enfant, et se rend compte que c'est bien Napier qui les a tués tous les deux, provoquant ainsi chez lui cette soif de rendre la justice, en solitaire bien entendu. Désormais vêtu de noir, et hantant les sous-sols sombres de sa propriété, Bruce Wayne-Batman s'est plus ou moins retiré du monde, en l'attente de régler cette quête impossible de vengeance, mais Burton va lui faire rencontrer son "créateur". Il sera rejoint dans d'autres films, par d'autres personnages en quête de filiation, de Edward "Scissorhands" à Willy Wonka...

Le film était suffisamment réussi pour garantir une suite, et Burton s'y sentira vraiment chez lui: Batman returns, on le verra, est un film encore plus personnel pour le réalisateur. Mais ce Batman a aussi ses petits défauts, un cahier des charges un peu trop lourd et donc impossible à tenir, entre film d'action, narration gothique et contemplative, humour subtil et grotesque avec tartes à la crême... Et il y a Prince. Je ne sais pas qui a décidé que cet artiste, par ailleurs tout à fait défendable, allait fournir les chansons du film, mais celles qui restent dans le déroulemet du film ne s'intègrent absolument pas à l'ensemble, alors que la musique d'Elfman, par son classicisme tranquille, fait magnifiquement le boulot... Mais tel qu'il est, Batman et son esthétique assumée de bande dessinée, fait figure de classique, et est un peu le grand-père de toutes les productions Marvel et DC actuelles, sans en partager le relatif réalisme, s'entend... et la chose plus importante est sans doute qu'il a permis de cristalliser l'idée que Tim Burton était, décidément, un nom à suivre.

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
28 décembre 2014 7 28 /12 /décembre /2014 09:19

C'est avec ce film que Tim Burton va cimenter son style, et du même coup véritablement faire son entrée dans le cercle des auteurs, disons... singuliers. Soyons juste: certes, ce n'est en rien son premier film, le metteur en scène a été très actif durant cette décennie qui l'a vu passer de Disney (où il était animateur sur deux longs métrages dont nous tairons les noms) à la Warner, en passant par des courts métrages, des travaux pour la télévision, et bien sûr un premier long métrage, disons, particulier, Pee-Wee's big adventure. Mais ce qui a toujours fait le prix de Beetlejuice, en plus d'être un film franchement appréciable en tant que tel, c'est de nous donner à voir une matrice du style, de l'univers, de la thématique Burton. En quelques sorte, des films comme Mars Attacks!, Dark shadows, Sleepy hollow et le long métrage Frankenweenie viennent directement de celui-ci, avec lequel ils partagent un humour frontal, et une certaine tendance à méler de façon unique le fantastique parfois le plus morbide avec une peinture du quotidien le plus banal...

Les Maitland (Geena davis, Alec Baldwin) sont un jeune couple, qui a choisi de se délasser de la vie dans la grande ville (New York) en passant du temps au calme dans une petite ville du Connecticut où ils ont acheté une maison. Ils y coulent manifestement des jours sans histoires, madame décorant tranquillement la maison, pendant que Monsieur construit inlassablement une maquette de la ville. Il y a malgré tout une ombre semble-t-il persistante au tableau: ils n'ont pas d'enfant, malgré les tentatives, et n'en auront d'ailleurs jamais, puisque, on va vite l'apprendre, ils meurent au bout de quelques minutes dans le film, une mort idiote, mais radicale: bref, la mort. Dans un premier temps, il ne s'en aperçoivent même pas, puisque leur trépas les force à revenir à leur maison, mais ils se rendront vite compte que quelque chose a changé...

Très vite, le principal souci auquel ils devront faire face, en plus de s'adapter aux formalités et au quotidien liés au fait d'être mort, sera de voir arriver dans leur maison un couple de New Yorkais, avec une adolescente: Charles Deetz (Jeffrey Jones) cherche une évasion de la vie New-Yorkaise, sa seconde épouse Delia (Catherine O'Hara), une artiste du dimanche totalement snob, cherche l'inspiration et un endroit à recréer à son image, et sa fille Lydia (Winona Ryder), adolescente solitaire, toute habillée de noir, cherche à cultiver tranquillement son spleen en nourrissant une certaine haine raisonnable à l'égard de sa belle-mère. Les deux fantômes, normalement invisibles (sauf aux yeux de Lydia, qui va vite sympathiser avec eux), vont tout faire pour se débarrasser des opportuns, y compris pactiser avec l'innomable "bio-exorciste" Betelgeuse (prononcer -trois fois- Beetlejuice), interprété par Michael Keaton, qui a des moyens raadicaux mais indéfendables pour effrayer, voire pire, les vivants...

On le voit, Burton s'amuse avec les codes du cinéma fantastique comme il le refera souvent, en investissant sur un plateau de comédie familiale et bucolique, les abords de la mort, un au-delà qui, on ne s'en étonnera pas, n'a pas de place pour toute divinité, quelle qu'elle soit: un monde dangereux, fait de débrouillardise, de formalités, de rencontres hilarantes avec d'autres morts, qui ont tous conservé de leur passage vers l'infini une particularité, physique ou autre. Le visuel du cinéma d'épouvante est rapidement envahi par l'humour, à moins que ce ne soit le contraire. Pour le reste, Burton ne se distingue pas par le montage ou une mise en scène particulièrement voyante: il s'amuse à diriger ses acteurs en fonction de l'effet voulu, en privilégiant pour certains un surjeu bon enfant: Catherine O'Hara, Michael Keaton, Baldwin et Davis ont droit d'y aller franco... Et il installe une gaelrie de personnages qui reviendront, à travers la marâtre maléfique, le sbire (Otho, joué par Genn Shadix, est le décorateur attitré de Delia, et en fait une véritable sangsue), ou les marginaux, qui se détachent du lot par certains codes vestimentaires: le noir et blanc domine, ils sont décalés par de nombreux détails: condamnés à "vivre" leur mort dans les vêtements de leur mort, comme Barbara et Adam, portant un costume fait de bandes noires verticales sur un fond blanc (Betelgeuse), ou tout simplement de noir vêtue par choix culturel (Lydia). Tout ce petit monde s'agite, en une sorte de lutte entre normalité et monde de l'au-delà, pour notre plus grand plaisir. Et Burton s'attache à pourfendre la normalité en attaquant une certaine Amérique, conformiste et prétentieuse, à travers les personnages de M. et Mme Deetz, le businessman venu se reposer et qui voit très vite le délire de l'appropriation dans le but de faire du dollar le reprendre, tandis que son épouse s'évertue à n'exister qu'en créant des horreurs prétentieuses, tout en détruisant ce qui est beau chez les autres. Il oppose des petites gens, qui n'ont certes pas grand chose pour eux, et le monde d'une certaine élite, qui s'en prend plein la figure... Mars Attacks! ne fera pas grand chose de plus, quelques années plus tard. Et là encore, comme ici, Burton "sauvera" quelques humains du jeu de massacre.

Rondement mené (le film totalise 92 minutes), parfaitement mis en musique par le désormais complice de (presque) tous les films Danny Elfman, Beetlejuice est donc aujourd'hui comme hier le meilleur moyen de commencer à se familiariser avec le style et l'univers de Tim Burton, un monde hanté par des fantômes tous distinctifs, dans lequel l'animation en volumes, image-par-image (de très loin le mode d'animation préféré d'un Burton qui a pourtant grandi à Burbank, le royaume de l'animation en 2D, le paradis de Disney et de la Warner), se confronte à des prises de vue réelles, dans lesquelles on demande à des acteurs d'interpréter une scène de repas au cours de laquelle ils doivent démontrer qu'ils sont possédés... Par une chanson de Harry Belafonte. Ca ne s'invente pas... Et puis il y a le mal poli Betelgeuse, interprété par Michael Keaton en roue libre, dont on peut se demander quelle mouche a piqué Tim Burton pour qu'il lui demande ensuite d'être Batman, mais ça c'est une autre histoire...

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
22 décembre 2014 1 22 /12 /décembre /2014 09:30

C'est le travail distinctif de Tim Burton sur Vincent et Frankenweenie, ses deux étranges courts métrages pour Disney, qui lui ont valu d'être engagé par la production de ce premier court métrage. Pee-Wee Herman, de son vrai nom Paul Reubens, est un personnage comme les télévisions locales des années 50 en proposaient à la pelle (Voir le biopic Ed Wood à ce sujet!), né pour un show de comédie qui avait du succès dans les années 80: un personnage lunaire, semblant tout droit sorti, le maquillage compris, des films muets des années 20, et qui vivrait dans une sorte d'état d'enfance en constant décalage avec la réalité qui l'entoure. Et le film ne montre rien d'autre: le scénario (Co-écrit par Reubens) conte en effet les déboires de Pee-Wee l'homme-enfant qui fait le our des Etats-Unis à la recherche de son vélo disparu... Prétexte à gags, rencontres cocasses, et visite à tout casser d'un studio de cinéma (Warner, qui distribue la film, a donné les clés à la production).

Chercher l'univers de Burton dans ce qui est avant tout un exercice imposé, s'avère un peu malaisé, mais on peut quand même voir ici une ébauche de certains des aspects burlesques de bien des films (Beetlejuice, Batman, Mars attacks!...) et constater que Pee-Wee, aussi horripilant (Voire insupportable) soit-il, est un peu un cousin de ces personnages décalés en noir et blanc, à peine sortis de l'enfance mais par une porte dérobée, qui peuplement les films du metteur en scène. Et l'humour particulier, mélange de cynisme et de premier degré parfois embarrassant, sera présent dans les longs métrages de Burton jusqu'à Dark Shadows. Mais s'il fallait retenir un aspect positif et un seul, au-delà de l'entrée en scène de Tim Burton comme metteur en scène de longs métrages, c'est bien sur le fait que Danny Elfman y ait composé et enregistré sa toute première bande originale de film, du moins la première pour un film de studio majeur. Et dès le départ, le talent hallucinant de ce disciple de Steiner, Herrmann, Stravinsky et Korngold est présent.

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
22 décembre 2014 1 22 /12 /décembre /2014 09:00

Ce film de 30 minutes est bien sur le premier Frankenweenie, puisque Burton y reviendra: c'est probablement normal, puisque dans ce projet très personnel, tourné en prise de vue réelles pour Disney (Par opposition à son remake sorti en 2012, qui lui sera tourné en stop-motion, comme le film de Selick The nightmare before Christmas, ou bien sur Vincent, le court métrage fondateur du style Burton), Burton y installe son univers très personnel, qui se retrouvera de film en film, entre Beetlejuiceng>, Edward Scissorhands, voire Big Fish: le monde, trop propre, trop ennuyeux, vu à travers les yeux créatifs d'un enfant trop doué, et trop porté sur les histoires horrifiques. Et comment ne pas penser à l'enfance de Tim Burton lui-même, passée à Burbank, banlieue somme toute normale, dont l'essentiel de l'activité (Studios Disney, studios Warner) se déroule sur les plateaux de cinéma à créer du rêve aux antipodes de cette normalité à se rendre malade? Frankenweenie a beau être en noir et blanc, on imagine sans peine les couleurs rose bonbon, jaune canari et bleu ciel, des robes, nappes, chemises Lacoste des protagonistes et voisins. Et Tim Burton a fait appel, pour interpréter les parents de Victor le héros, à deux acteurs qui vont parfaitement incarner cette normalité trop tranquille...

Ben et Susan Frankensein (Daniel Stern, Shelley Duvall) sont les heureux parents de Victor, un enfant qui s'amuse à tourner des films avec une caméra super 8, qui mettent essentiellement en scène son chien Sparky, déguisé le plus souvent en monstre ultra-destructeur à la Godzilla. C'est innocent, c'est drôle, ça ne prête pas à conséquence, et le lien entre Victor et Sparky est si touchant... Mais un jour, Sparky se fait heurter par une voiture, et Victor est inconsolable... Jusqu'au jour où un cours de sciences lui donne une idée: il va tenter de redonner vie à son chien en usant de l'électricité... Mais cela va surtout créer des problèmes, car comment faire comprendre à un chien comme Sparky, une fois revenu d'entre les morts, qu'il lui faut montrer profil bas, lui qui a tant l'habitude de se promener dans le voisinage? La confrontation entre le chien zombie et les voisins W.A.S.P va être douloureuse...

A travers ce gentil Victor, ces gentils parents, et cette édifiante histoire d'amour d'un garçon de 11 ans pour un chien, Burton s'amuse à peindre une banlieue dont les cloueurs doucereuses semblent cacher un monde terrifiant, fait de suspicion, de lutte territoriale, d'espionnage même. Un monde soumis à une quête effarante de la normalité: la fille des voisins, en tenue d'aérobic, fait subir à sa Barbie un entrainement intensif en lui disant qu'elle ne travaille pas assez; le voisin vient frapper à la porte des Frankesnstein en accusant un hypothétique chien au moindre problème, et une petite dame utilise son activité principale (Et unique), d'arrosage des plantes, pour espionner le voisinage et écouter les conversations. Et au milieu de tout ça, Tim Burton convoque le mythe cinématographique du Frankenstein de James Whale (Expérience avec l'électricité, coutures apparentes, électrodes qui dépassent et moulin en flammes) tout en commençant subrepticement à installer son univers: le bric à brac du grenier de la famille Frankenstein, un désordre qu'on retrouvera dans Beetlejuice, recèle déjà de suprenants trésors: des rennes pour une décoration de Noël, une bicyclette assez similaire à celle de Pee-Wee Herman... Pour son expérience, Victor utilise des cerfs-volants, dont un qui n'est pas sans rappeler la chauve-souris de Batman... Quant au mythe de Frankenstein, il reviendra par la grande porte avec Sleepy Hollow. Le monde de Burton est d'une grande cohérence, et ce film est sans doute la meilleure des introductions, juste adaptée, le temps d'un film, aux exigences raisonnables de Disney. Mais bon, ça raconte quand même l'histoire d'un garçonnet qui redonne vie à son chien mort, et les tribulations du zombie canin qui s'ensuivent, ce n'est pas rien!

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
22 décembre 2014 1 22 /12 /décembre /2014 08:40

Le tout premier film "professionnel" de Tim Burton est un court métrage, destiné à fournir des suppléments aux compléments de programme Disney (C'est d'ailleurs ce qui arrivera, puisque le film a été brièvement projeté en ouverture de séance de plusieurs films du studio). Mais on peut aussi, tout en admettant que le projet a d'évidents aspects amateurs, remarquer à quel point ce film est une introduction à l'oeuvre du metteur en scène. Vincent Malloy, le héros, est une version en marionette de Burton lui-même; le jeune homme mène, en quelque sorte, une double vie: bon fils, gentil garçon poli et mesuré, il se transforme par le jeu en savant fou, affublé de moustaches, et se proclame lui-même Vincent Price (C'est d'ailleurs le grand acteur qui récite les vers de la voix off, unique voix du film)... Toute activité, toute imagination projette immédiatement Vincent Malloy dans un monde de nuit, d'horreur, de zombies et d'inventions cruelles.. Il repeint entièrement le monde de la banlieue d'un noir et blanc excentrique, lardé d'éclairs et traversé d'ombres fantômatiques. On anticipe bien sur sur le film suivant, Frankenweenie, lorsque Price/Malloy nous annonce projeter des expériences sur le chien Abercrombie, qu'il s'apprête à transformer en zombie. La lecture préférée de Vincent est bien sur Edgar Allan Poe, et jouer dans le jardin représente un risque: celui de partir creuser le jardin, pour y retrouver le cadavre de son épouse morte, dont on soupçonne qu'elle a été enterrée vivante... Tout ça bien sur, finit par nous prouver que décidément, pour Malloy comme pour Burton, le monde a besoin d'être changé. Dans un noir et blanc poisseux et cauchemardesque, le petit garçon refait la banlieue propre en film d'horreur, une thématique sui reviendra sans cesse de film en film... L'animation, rythmée déjà à la façon de Tim Burton, est bien éloignée des canons Disney, et on ne s'étonnera pas du fait que le studio a surtout été très embarrassé avec ces six minutes, ne sachant pas vraiment quoi en faire dans un premier temps!

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
14 décembre 2014 7 14 /12 /décembre /2014 18:48

On ne va pas ici se lancer dans une discussion sur la validité d'un remake d'un classique aussi établi et définitif que le film de Franklin Schaffner (1968), qui a probablement été à lui seul la cause de l'existence de tout un pan de la science-fiction, avec jusqu'à récemment (Sans parler de remakes douteux et autres suites du film initial) un grand nombre de films métaphoriques d'une humanité en proie au risque de l'extinction pure et simple pour des raisons comportementales ou environnementales. A l'imitation du livre de Pierre Boulle, le classique cinématographique établissait ainsi un lien entre cette fameuse planète des singes, et le monde contemporain, sa politique et ses comportements; il le faisait avec un sens narratif, un gout pour le suspense et un certain sens de l'innovation, sans parler des images-chocs que toute personne qui a vu le film a encore en mémoire. Et bien sur, toute nécessité de réaliser un remake d'un tel classique s'avère immédiatement invalidée, tout comme, si vous voulez mon avis, toute tentative d'y apposer une suite. Seulement voilà, les temps changent, et la Fox a donc confié à rien moins que Tim Burton le soin de réaliser un remake du film... Triple erreur.

Pour commencer, le scénario du film prend comme un malin plaisir à s'éloigner du script original, afin sans doute d'éviter l'impression de redite, jusqu'à l'absurde et le contresens... Taylor, le héros de Charlton Heston dans le film de 1968, était un scientifique cynique, déterminé dès le début à quitter une bonne fois pour toutes sa planète et assez facilement porté sur l'évasion personnelle, roulant essentiellement pour lui, et donc Mark Wahlberg compose ici un personnage bas du front (C'est Mark Wahlberg, donc ça lui va très bien) qui ne comprend rien à rien, mais qui est supposé incarner le héros du film. Quelqu'un a imaginé que cette-fois-ci, les humains pourraient parler, ce qui a pour effet de les rendre aussitôt ouvertement supérieurs eux singes, qui sont globalement de vrais imbéciles: c'est à se demander comment un peuple humain, qui a depuis des temps anciens ou ils étaient les maîtres des singes, conservé son langage, a pu à ce point oublier leur vie antérieure, là ou les singes qui ont du apprendre à parler sans eux, sont devenus leurs maîtres... Et comme les scénaristes ont pris soin de situer le film sur une vraie planète des singes, et non sur la même planète que le premier film (Je fais tout mon possible pour éviter d'en révéler la fin, notez bien), le film perd tout son sens...

Tim Burton, quant à lui, a pris le parti d'accepter la commande, car il rêvait de mettre en scène à son tour, comme tant de grands réalisateurs, un film qui lui serait proposé, dans lequel on attendrait son grain de sel... qui ne vient jamais. Oh, bien sûr, le film est plastiquement très réussi, doté d'une belle partition de Danny Elfman, très allusive de la partition originale de Jerry Goldsmith, mais la tentation de développer occasionnellement une vie intérieure en contradiction avec le travail imposé par la Fox foire lamentablement: il semble que Burton tente de favoriser un semblant d'idylle entre Ari la chimpanzée (Helena Bonham Carter) et Wahlberg, au détriment de la pauvre cruche interprétée par la plantureuse, mais strictement décorative Estella Warren. Cette dernière ne servant décidément à rien, on échappe à toute impression de scène vraiment sulfureuse... Et Wahlberg est semble-t-il souligné de façon insistante par Burton comme un imbécile, un scientifique qui, pas plus que Taylor, n'a une seconde pour s'interroger sur la raison pour laquelle tous ces singes parlent... Anglais. Ce qui était une parabole dans le film initial, passe mal dans ce remake très premier degré avec ses singes militaires intense, donc ridicules. Le constat amer, tout bonnement, c'est que les soit-disant tentatives d'audace de Buron débouchent sur des maladresses encore pires que le film lui-même.

Et pour ne rien gâcher, quelqu'un (L'armée de scénaristes? Burton? Richard Zanuck?) a décidé de souligner la parenté avec le film d'origine en en inversant certains dialogues allusifs, d'un vieux singe (Heston lui-même, assez reconnaissable somme toute) qui meurt en prononçant les mots hurlés par Taylor à la fin du premier film: "Damn them! damn them! damn them all to hell!" à un militaire qui dit à un humain ce que Taylor disait à un singe: "Don't put your filthy, dirty hands on me!"... L'effet voulu est supposé être de créer un clin d'oeil, mais on obtient surtout le rappel que ce film n'est décidément pas Planet of the apes. Enfin, on pourrait parler de la fin, supposée selon les auteurs interviewés à l'époque de la sortie "scotcher les spectateurs sur leurs sièges" (On notera la richesse de vocabulaire): c'est vrai qu'elle est inattendue. Elle est surtout illogique, mais pourquoi pas? un peu d'absurde n'a jamais fait de mal à personne... Pourtant, la fin de la première version, fidèle en cela à la vision de Pierre Boulle, ne se contentait pas de choquer les esprits, elle porte en elle un message. Celle-ci est juste choquante, et désespérément vide de sens... D'ailleurs, si elle invitait une suite, la bonne nouvelle c'est qu'il n'y en a pas eu... Tout va donc bien dans le meilleur des mondes.

On peut sans doute raisonnablement considérer que ce film est bien la pire des oeuvres de Tim Burton, tout en maintenant l'idée que son Alice ne doit pas être très loin... Le pire, c'est qu'il a inauguré une période durant laquelle, de bon (Big Fish) en mauvais films (L'infect Alice in Wonderland, ou le très dispensable Dark Shadows, le trop sage Charlie and the Chocolate factory), Tim Burton a semble-t-il perdu son âme.

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton Navets
26 janvier 2013 6 26 /01 /janvier /2013 09:11

J'émettais l'hypothèse, à partir de certains indices disséminés dans le précédent film de Tim Burton, Dark Shadows (Très probablement postérieur dans l'essentiel de sa confection à celui-ci, dont la post-production a du être bien longue), d'un retour aux sources conscient, qu'il me semblait important de faire pour le réalisateur tant ses films me semblaient devenir furieusement quelconques depuis Big Fish. Sympathiques, décalés, certes. Mais quelconques, moyens, voire franchement mauvais pour l'un d'entre eux. C'est donc avec plaisir qu'on accueille ce nouveau long métrage, triple retour aux sources en effet, et retour en forme, de façon évidente... Triple, puisque d'une part il s'agit d'un film d'animation (En volumes), renvoyant à ces années de formation durant lesquelles le jeune homme fantasque de Burbank apprenait un métier dans l'industrie locale: Disney; ensuite, retour à un univers qui lui est propre, situé entre la banlieue Américaine vue par des ados qui s'ennuient, et un monde d'horreur et d'épouvante, marqué par une fascination de la mort et un humour noir qui réussit à rester bon enfant, le monde donc de Beetlejuice; enfin, Frankenweenie est un remake de... Frankenweenie (1984), moyen métrage réalisé en prises de vues réelles par Tim Burton pour Disney qui servait de complément de programme pour je ne sais quel long métrage d'animation... ce retour aux sources est confirmé et souligné par un procédé auquel Burton a eu recours dans... Beetlejuice, Batman, Edward Scissorhands, Batman returns, Ed Wood, et Mars attacks!, consistant à détourner le logo du studio afin de le personnaliser et signer le film à la manière d'Hitchcock dans ses apparitions discrètes: Disney a laissé faire, c'est un signe...

Le film suit l'intrigue du moyen métrage original, soit les aventures d'un jeune garçon, nommé Victor Frankenstein. il habite dans la banlieue "middle America" (Et imaginaire) de New Holland, un paradis pour les parents, mais un ennui mortel pour les enfants, à moins qu'ils ne trouvent à s'occuper: des copains, éventuellement, des choses plus ou moins saines à faire, et dans le cas de Victor, des films, assemblés autour de son chien, le gentil Sparky, son seul compagnon. Ses parents, gentils aussi mais un peu benêts, le soutiennent dans cette activité artistique, mais le père soucieux tente de pousser son fils vers la normalisation via le base-ball; parallèlement, un professeur de sciences magnifiquement excentrique va demander aux élèves de travailler sur un projet scientifique, qui les passionne tous.

C'est dans ce contexte que Victor perd Sparky, à cause du base-ball d'ailleurs, lorsque le chien enthousiaste court après une balle, sans voir la voiture qui approche, et... le tue. Victor a donc tout perdu, mais le déclic viendra de son professeur de sciences, lorsque Victor rapprochera dans son esprit la perte de son chien d'une expérience de physique qui démontre qu'un choc électrique peut provoquer chez un individu mort des réflexes: il décide d'utiliser l'électricité pour "réveiller" Sparky. C'est un succès, mais les ennuis vont commencer: comment cacher un chien mort et ressuscité, à plus forte raison lorsque celui-ci aime gambader, farfouiller et draguer la caniche des voisins? Comment empêcher les autres enfants bizarres du coin de venir fouiner dans ses petites affaires quand on a un secret aussi encombrant? Enfin, comment échapper à la médiocrité lorsque les parents locaux sont des imbéciles qui se transforment en meute prête au lynchage à la première occasion, professeur de sciences trop original, ou chien fantôme...

 

L'univers de Tim Burton, ce n'est pas que ce superbe noir et blanc, cette obsession des codes du film d'épouvantes et les enfants qui se vautrent dans les expériences bizarres, non: c'est aussi une certaine façon de dépeindre l'Amérique moyenne, entre banlieue cossue et traditions loufoques, comme cette célébration de la commune dans laquelle une petite fille, par ailleurs saine d'esprit, se voit obligé d'entonner un hymne local à la grande satisfaction de son oncle, le maire sadique du lieu, qui lui impose de porter un chapeau orné de bougies d'anniversaire... C'est aussi un endroit ou, bien que peuplé d'immigrants (Le garçon Toshiaki, par ailleurs fourbe et un peu voyeur, doté d'une caméra en permanence), on se méfie des étrangers, d'où la vindicte populaire contre le professeur Rzykruski, accusé d'inventer des informations pour embêter les parents, comme cette relégation de Pluton, qui n'est plus considérée comme une planète. Lorsqu'on en est réduit à accuser les professeurs d'écrire les manuels afin de tromper les enfants, c'est qu'on n'est pas loin du fascisme et de l'autodafé. Mais en suivant le canevas de Frankenstein, c'est sur Sparky le gentil chien que la folie du lynchage va retomber, même si les expériences menées par les autres enfants vont toutes dégénérer, Sparky est, pour les adultes, l'étincelle de la folie destructrice des enfants... Bref, des gros crétins comme il en existe tant dans nos beaux pays.

Cet univers passe donc aussi par la description des enfants, qui dans ce film sont tous des laissés pour compte: Toshiaki, enfant d'imigrés Japonais, Edgar, bossu et difforme, une variation sur tous les assistants de Frankenstein depuis Dwight Frye, Nassor, un grand maigre qui ressemble à Boris Karloff, et va d'ailleurs finir en momie, une jeune fille très bizarre, qui interprète de façon embarrassante les crottes de son chat, un matou étrange, Elsa la jolie voisine, une nouvelle variation sur les personnages joués par Winona Ryder dans Beetlejuice et Edward (Et dont la voix est précisément celle de Winona Ryder, autre retour aux sources), et enfin Bob le garçon obèse: tous n'aiment pas vraiment Victor, certains sont méchants, mais tous ont une raison pour leur comportement: survivre à la banlieue. Ils vont se livrer, à l'imitation de Victor, à des expériences sur des animaux morts, qui vont tourner au désastre... Ces laissés-pour-compte sont l'anti-High school Musical par excellence... Tourné chez Disney.

Enfin, Burton retourne à l'un de ses péchés mignons, comme dans le moyen métrage original: le film est un démarquage de Frankenstein bien sûr, ce que les noms du héros, d'Elsa (L'actrice Ela lanchester était la "fiancée"), le caniche avec la coiffure d'Elsa Lanchester, la présence de Boris Karloff et de Christopher Lee (Vu dans un Dracula de la Hammer regardé à la télévision par les parents de Victor) et le final dans le vieux moulin, comme dans Sleepy hollow, rend aussi explicite que possible... Mais Burton renvoie à d'autres oeuvres, comme La momie à travers le personnage de Nassor, dont l'animal fétiche est un hamster mort emballé dans des bandelettes (Qui donne lieu à un gag sadique réjouissant à souhait), Godzilla grâce à l'apparition d'une tortue mutante et géante (Qui s'appelle Shelley... Duvall?), et Nosferatu dans un plan d'ombres d'enfants qui montent un escalier... Bref, on retrouve cette échappatoire constant vers le cinéma, tendance fantastique, afin d'oublier la médiocrité des gens et de la vie, sans pour autant adopter un ton trop décalé et trop cynique de M. Je-sais-tout comme il sied désormais dans les films pour enfants. Non, pour Tim Burton, cette histoire ne se conçoit qu'au premier degré...

L'animation est superbe, intégrant des marionnettes qui bougent de façon fluide, dans des décors soignés avec l'aide discrète mais à bon escient de 3D pour la finition. Les textures "bougent" parfois discrètement, comme dans King Kong ou dans Wallace & Gromit, ce qui est un choix de souligner la confection artisanale du film, qui manquait dans le trop lisse The corpse Bride. Et le design inspiré des dessins de Burton lui-même (La seule chose qui puisse relier la réalisation du chef d'oeuvre d'Henry Selick The nightmare before christmas et l'auteur de l'intrigue Tim Burton) nous renvoie à l'art et l'univers graphique d'un metteur en scène qui avait oublié qu'il n'était pas obligé de ressembler à sa propre caricature... Le film adopte le même point de vue que celui du court métrage original, et ressemble beaucoup plus à une façon a posteriori de rectifier le tir, en proposant un élargissement du film, passant de 30 à 85 minutes. Sans enlever les mérites du film court, il était une oeuvre de jeunesse. Rien de ce qui a été ajouté ne trahit le film de toute façon, et certains éléments haussent cette nouvelle version à la hauteur des plus grands films de Tim Burton, Edward Scissorhands, Ed Wood... Ca fait très plaisir. Et si on entend ici les voix de complices comme Winona Ryder, Martin Landau (Ed Wood), Martin Short (Mars attacks!), et Catherine O'Hara (Beetlejuice) pas de Johnny Depp, ni d'Helena Bonham-Carter. Non qu'on ait quoi que ce soit contre eux, mais il fallait effectivement briser la malédiction de Tim Burton. C'est malin, maintenant on va l'attendre au tournant!

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton