Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 février 2025 6 22 /02 /février /2025 17:10

Elizabeth Berry (Natalie Portman), une actrice en vue et très populaire pour des séries et téléfilms, a décroché un rôle important: elle va incarner à l'écran, Gracie Atherton (Julianne Moore), une habitante de Savannah (Géorgie) qui a défrayé la chronique vingt années auparavant, pour avoir eu une histoire d'amour interdite avec Joe Yoo (Charles Melton), un camarade de son fils, de 23 années son cadet. Ils sont désormais mariés, mais cette histoire lui a malgré tout valu de faire un séjour en prison. Elizabeth vient donc s'installer chez Gracie et joe, dans le cadre de sa recherche pour préparer le tournage... Mais son arrivée va déclencher des complications dans la vie de Joe, Gracie, et de leurs trois enfants...

C'est volontairement mis en scène autour du drame sous-jacent, et pour l'occasion profondément ironique, entre Joe qui n'en peut plus de sa relation et Gracie qui s'accroche à ses illusions; les trois enfants, d'ailleurs, n'ont aucun doute sur le pourrissement des relations entre leurs parents, et on a parfois l'impression d'assister à une sorte de téléfilm sentimental, du genre de ceux dont Elizabeth s'est semble-t-il fait une spécialité. C'est un drame, mais il en ressort une ironie à la méchanceté très palpable... Une méchanceté surtout tournée vers les excès de l'actrice qui ne parvient pas à trouver les limites de son interprétation.

Et Natalie Portman incarne une personne qui s'immerge de façon excessive dans son rôle, qui l'obsède de façon toujours très exagérée... La façon dont elle séduit Joe, dans la boutique où il a été surpris dans les bras de Gracie vingt ans plus tôt, fait d'ailleurs écho à d'autres scènes; visitant la boutique seule, la première fois, elle s'imagine faisant l'amour avec Joe. Et quand la production lui envoie les essais des jeunes acteurs qui doivent incarner Joe, elle les juge "pas assez sexy"...Lors d'une masterclass, elle tient un discours perturbant devant des étudiants qui la provoquent en évoquant les scènes de sexe... Elizabeth Berry a un peu trop effectué de recherches pour son rôle, clairement.

Mais le film se situe clairement sur deux niveaux, au moins: d'une part en sondant la façon dont l'Amérique a intégré, mais pas totalement l'expérience de Joe et Gracie, toujours montrés du doigt vingt années plus tard, et en questionnan la pertinence aussi bien que la fascination des gens pour une telle histoire. Et d'autre part, en mélangeant les expériences de Gracie et d'Elizabeth qui, les deux, vivent sous une forme ou une autre cette étrange histoire d'amour controversée.

Ce n'est pas la première fois que Todd Haynes s'intéresse à l'émour interdit, en quelque sorte, puisqu'on se souvient de Carol, qui cherchait à recréer l'époque compliquée durant laquelle un couple de deux femmes peinaient à assumer leur relation. Il avait aussi été responsable d'une superbe réappropriation de Mildred Pierce avec Kate Winslet, pour la télévision... En tournant ce nouveau film, il sonde une nouvelle fois les tourments de l'Amérique puritaine, sous ses dehors malades... Et ça fait un peu froid dans le dos.

May December, le titre, est une allusion à une expression, me semble-t-il, qui désigne la différence d'âge entre deux personnes... Avec 23 ans de différence entre eux, Gracie et Joe se qualifient semble-t-il.

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Todd Haynes
8 août 2023 2 08 /08 /août /2023 09:08

Deux vies, qui nous sont contées en parallèle, sans qu'on comprenne dans un premier temps ce qui les relie: Ben (Oakes Fegley), en 1977, est un jeune adolescent qui a perdu sa mère (Michelle Williams) et souffre d'un double manque. Il n'a jamais connu son père, et sa mère n'a jamais pu se résoudre à lui en parler... Il décide, suite à un accident (la foudre) qui l'a privé de l'ouïe, de fuguer et de se mettre en route pour retrouverla trace de celui qui a offert un étrange cadeau à sa mère: un livre/coffret signé 'Danny' qui, pense-t-il, est la clé vers son père...

De son côté, en 1927, Rose (Millicent Simmonds) est une jeune femme de la très bonne société de Hoboken qui est complètement obsédée par l'actrice Lillian Mayhew (Julianne Moore) dont elle va voir les films au cinéma, et dont elle collectionne tout ce qui est publié dans la presse. Quand la star commence un engagement au théâtre à New York, Rose s'y rend et s'introduit au théâtre... Quel est le lien qui unit Rose à cette mystérieuse et distante actrice?

Beaucoup de liens, en fait, et bien sûr il y aura une série de correspondances entre les deux intrigues, d'ailleurs soulignées par la structure du film: par exemple si Rose est au bord de l'eau dans une séquence, le passage vers l'histoire de Ben va se situer dans un environnement aquatique... Quand l'un regarde ostensiblement quelque chose, Haynes s'amuse à un jeu de champ/contrechamp entre les deux parties de son film, créant un dialogue étrange entre ses deux acteurs... Les choix esthétiques sont aussi très pertinents, l'un des plus radicaux étant de traiter tout ce qui a trait à 1927 en muet, mais sans interititres... C'est en noir et blanc, mais en format large. De même, les couleurs de 1977 ont été traitées de manière à être particulièrement chaudes, surtout quand Ben déambule dans un New York très peuplé. Principale rime entre les deux films, qui va faire dévier un peu l'ambiance muette de 1927 vers 1977, la surdité, de naissance pour Rose et accidentelle et récente pour Ben. Ca a probablement été la clé du problème de la jeune fille, à laquelle son père (et pas que son père, d'ailleurs...) semble reprocher son imperfection, ce sera la clé de Ben vers l'histoire de son père...

Et là on est bien obligé de parler de... Hugo Cabret: le roman sur lequel Haynes s'est basé est une oeuvre de Brian Selznick, l'auteur du roman quee Scorses avait adapté en 2011. Le principe est le même: une énigme qui joint deux parties apparemment sans relation, et qui permet au lecteur/spectateur de collectionner les indices vers une solution riche en émerveillement. Dans Cabret, la merveille est le monde de Méliès, et sa découverte par les yeux d'un enfant. Mais dans ce film, la merveille est d'une oart la clé de l'étrange livre ("Wonderstruck"), mais aussi le lien entre Rose et Ben, et enfin un musée (qui donne son titre francophone au film, Le musée des merveilles); musée qui d'ailleurs existe, puisqu'il s'agit du museum d'histoire naturelle de New York...

Le film a été présenté à Cannes où il a reçu une standing ovation... ce qui me parait pour le moins étonnant! Mais on sait que cette marque de respect n'a plus aucun sens aujourd'hui. Car si Todd Haynes et son casting ont fort bien fait leur travail, on attend beaucoup plus que es bouts d'énigme d'un film qui s'appelle Wonderstruck. Le merveilleux est quand même assez plat, et repose sur des fils parfois un peu trop fins... et si j'applaudis le choix du recours au cinéma muet, occasionnellement, il me semble que le résultat ne justifie pas totalement le parti-pris. Donc on a l'impression d'assister à un spectacle soigné pour les adolescents (lesquels, d'ailleurs?), mais qui ne laissera pas forcémentbeaucoup de souvenirs... Si ce n'est un don, déjà particulièrement remarquable dans les films de Haynes qu j'avais vus (Carol, Mildred Pierce), pour recréer une époque.

 

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Todd Haynes (Muet)
27 janvier 2017 5 27 /01 /janvier /2017 10:53

Ceci n'est évidemment pas le magnifique film de Michael Curtiz, l'un des joyaux aussi bien d'une fabuleuse carrière de metteur en scène, que d'un genre: le film noir. Et si aussi bien le film de Curtiz que la mini-série de Todd Haynes adaptent le même roman de James Cain, ils ne le font pas du tout de la même façon: Curtiz privilégie une intrigue simplifiée, ramassée intelligemment sur deux heures, qui mettent essentiellement en valeur le personnage de Mildred Pierce et son passage par divers aspects du mélodrame avant d'asséner les coups de théâtre sur sa dernière demi-heure; il se dégage un portrait de femme d'autant plus forte, que Joan Crawford semble devenir l'incarnation du volontarisme, que les coups rendront justement plus forte. On y retrouve une tendance pas si rare chez Curtiz: le portrait de femme, justement, qui prend toute la place.

Mais si ce nouveau Mildred Pierce est lui aussi, bien sur, un portrait de femme avec une exceptionnelle performance d'actrice (Ou plutôt deux), cette fois la dimension choisie, un ensemble de 5 heures et demie en cinq épisodes permet à Haynes de coller au roman, et de se livrer à une exploration romanesque qui puisse tenir la distance, et développe, plutôt qu'un destin court-circuité par des détours tardifs et inattendus, plutôt un parcours linéaire, entrecoupé d'accidents, et qui débouche sur un constat: oui, Mildred Pierce est une femme admirable, Américaine par son tempérament pionnier, mais qui affronte un monde qui n'est justement pas prêt pour les femmes indépendantes comme elle; et oui, la femme forte et entreprenante, qui affronte le monde, et pourrait bien réussir, a enfanté un monstre...

Mildred Pierce (Kate Winslet) prie son mari Bert (Bryan F. O'Byrne), qui l'a beaucoup déçu, de quitter sa maison, et elle cherche un travail pour continuer à subvenir aux besoins de ses deux filles. Avec l'aide de plusieurs personnes, dont un avocat un peu trop arrangeant, Wally Burgan (James LeGros), une voisine, Lucy (Melissa Leo), et même à l'occasion Bert avec lequel elle est restée en bons termes. Et très vite, son volontarisme va la pousser à entreprendre, et devenir sa propre patronne. En assez peu de temps, elle créera sa propre chaîne de restaurants, et pourra ainsi donner beaucoup à la seule de ses deux filles qui lui restera, suite au décès de l'autre: la belle rousse incendiaire Veda (Evan Rachel Wood), artiste dans l'âme, mais surtout garce absolue, qui joue un jeu dangereux, dans lequel Mildred pourrait bien perdre des plumes...

Un personnage n'apparaît pas dans ce résumé, et pour cause: Monty Beragon (Guy Pearce) est un playboy que Mildred rencontre pendant son ascension et qui se révélera bien vite un incapable ruiné, mais si beau garçon... il sera aussi à plusieurs reprise un révélateur ironique de l'ascension fragile de Mildred Pierce, qui certes devient aisée, respectée, mais restera toujours pour lui une parvenue, alors que la famille Beragon remonte à l'aristocratie Californienne... Cette dimension sociale est cruciale dans le roman, comme elle eut l'être dans la société Californienne de toujours. Glendale, le quartier où vit Mildred, ne sera jamais Pasadena...

Donc  on retrouve une chronique détaillée des étapes à franchir pour Mildred afin de devenir totalement indépendante... Et tout du long, Veda (Depuis son adolescence interprétée par la jeune Morgan Turner) va être à la fois le plus grand amour, et le pire ennemi de sa mère. Elle agit en quelque sorte, avec son obsession de grandeur, de supériorité égoïste sur les autres, en souvenir permanent de la situation dont Mildred vient: elle va jusqu'à lui reprocher d'avoir épousé son père après qu'il l'ait engrossée! Odieuse, grandiloquente, Veda est d'autant plus étonnante que c'est au tour d'Evan Rachel Wood de prendre la suite de l'autre actrice. Elle est fantastique de venin et d'étrangeté contrôlée...

Haynes, et Ed Lachman le chef-opérateur qui a fait le choix de filmer en mm ce qui donne un grain fabuleux, se livrent à ce qui reste le péché mignon du metteur en scène: une époque recréée dans se moindres détails, vestimentaires, comportements, événements marquants. Les années 30 ont ici un parfum de vérité qui va bien au-delà de la recréation maniaque: c'est tout l'esprit d'une époque, tout le tableau de l'ascension fragile d'une femme, face à des obstacles divers: patriarcat, culture, conventions sociales, coups du sort, mode, convenance, tout y passe. Et c'est sacrément addictif, comme on sait si bien le faire chez HBO. Donc ce n'est en aucun cas le chef d'oeuvre de Curtiz, mais on aurait tort de ne pas le voir... Pour commencer, ce film peut rappeler à un certain nombre de phallocrates qui ont manifestement le vent en poupe à l'heure actuelle que leur pays ne se serait pas fait sans les femmes, dont, pourquoi pas, celle-ci.

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Todd Haynes
15 janvier 2017 7 15 /01 /janvier /2017 09:43

 

Adapté d'un roman de Patricia Highsmith (The price of salt, publié en 1952 sous le pseudonyme de Claire Morgan), Carol n'est pas un film policier, ni un thriller... du moins un thriller criminel. Les émotions y sont fortes, avec l'impression de faire un tour dans les montagnes russes... Highsmith s'était pour sa part inspirée de certains épisodes de sa vie pour raconter une histoire d'amour choquante pour l'époque: la rencontre entre une bourgeoise mariée en instance de divorce, et une jeune vendeuse, qui débouchait sur une passion amoureuse intense mais compliquée. Et pour l'époque, la fin pouvait être considérée comme positive...  une époque où l'homosexualité était non seulement un tabou, mais aussi un crime, répréhensible au niveau de la loi, et bien sûr en aucun cas accepté dans quelque milieu que ce soit. On peut se poser la question, bien entendu, à l'époque de l'accession des gays au mariage, de vouloir reprendre une telle histoire, mais d'une part, quelles que soient les lois, la notion de différence subsiste, la morale dominante et la morale humaine ne s'accordent toujours pas sur le degré d'acceptation de ceux qui ne sont pas comme vous, quand ils ne sont pas par principe jugés directement et condamnés en fonction de leur différence: immigrés, migrants, autres religions, autres nationalités, autres moeurs, etc... Il y a du boulot. Et puis, Carol, après tout, c'est une histoire d'amour. Qu'elle soit entre deux femmes, entre deux hommes, ou entre une femme et un homme, peu importe.

Et ici, c'est donc l'histoire d'amour entre deux femmes: Carol Aird (Cate Blanchett), une femme d'âge moyen, mariée et mère d'une petite fille, qui est en plein divorce d'avec un mari qui ne supporte d'autant pas la situation, qu'il divorce d'une femme qu'il ne cessera jamais d'aimer, mais qui s'avère lesbienne. Et Therese Belivet (Rooney Mara), une jeune femme qui évolue dans un groupe d'amis, seule fille parmi des garçons qui tous aimeraient bien en faire plus qu'une amie. Elle travaille dans un grand magasin, mais est probablement montée à New York avec des plans ambitieux: elle aimerait faire de sa passion de photographe un métier, et elle attend patiemment en vendant des jouets. Et comme c'est Noël, Carol vient au magasin pour acheter un jouet pour sa fille... Tout part d'une rencontre fortuite, d'un simple échange de regards, et d'une fascination. Mutuelle? le mystère reste longtemps entier, justement, car pour l'essentiel du film, c'est le point de vue de Therese qui primera; d'autant que la jeune femme possède un objet qui justifie cette notion de point de vue: un appareil photo... Mais elles vont s'aimer, ça oui, et souffrir bien sur...

Todd Haynes, qui nous avait déjà régalé en 2011 d'une superbe version de Mildred Pierce pour HBO, sous la forme d'une mini-série, sait à merveille s'immerger dans une période, et le fait ici en super 16 mm, ce qui donne un grain, une texture fabuleuse, qui rend l'expérience plus tactile encore. Et il rend son histoire située entre 1952/1953 et la fin de la décennie tangible par un sens du détail (Mode, accessoires, décors...) et une façon subtile de nous faire comprendre le passage des ans: Therese va en particulier être un repère intéressant: à peine sortie de l'adolescence au début du film, elle n'a pas les moyens, pas non plus l'habitude de toutes les petites choses qui séparent une femme de sa condition d'une bourgeoise comme Carol: coiffure, vêtements, maquillage, mais aussi appartement et habitudes (Carol écluse des Martinis, mais Therese consomme des bières à même la cannette), tout trahit la condition sociale de la jeune femme; à la fin du film, elle a changé, vieilli bien sûr mais aussi elle a mûri. Et sa coiffure et son maquillage (Audrey Hepburn est passée par là!) sont désormais étudiés. 

Et justement, Carol est bien plus l'histoire de Therese, que celle du personnage pourtant nommé par le titre! Tout part du reste d'un flash-back, qui est déclenché par une rencontre entre les deux femmes, au tout début du film. Un homme entre dans un bar extrêmement chic, et voit une jeune femme en pleine conversation avec une dame élégante et un peu plus âgée. Il les interrompt, car il connait Therese, mais il ne voit pas qu'il les dérange... Pire encore, quand il parle à Therese d'une soirée à laquelle ils doivent se rendre, Carol part précipitamment, mais avant elle pose sa main sur l'épaule de Therese. Le geste est tout sauf anodin, et l'émotion qui se lit dans toute la gestuelle de Therese à ce moment est intense... Comment ne pas penser à Brief encounter, de David Lean, et à ces adieux dans la gare qui ne seront jamais totalement effectués parce qu'un trouble-fête s'est invité en dernière minute à la table des amants déchirés? Alors après, oui, on a un flash-back de Therese, qui revient sur son histoire d'amour avec Carol, et qui à ce moment n'a finalement que des regrets. On revisite la première rencontre, les tentatives de se retrouver, les retrouvailles maladroites (C'est souvent à l'initiative de Carol, qui domine assez clairement la relation) puis leur escapade, qui va mal se terminer, car le mari de Carol est en embuscade.

Et le film nous rappelle que même si c'est une histoire d'amour, elle n'est pas si éloignée que ça du domaine de prédilection de Patricia Highsmith: il y a des manigances, des calculs, de la planification chez ces deux femmes. Et il y a des risques, des dangers à vous donner des sueurs froides. Les choix de Carol sont pour une bonne part déjà faits même si tout n'est pas rose, loin de là, dans sa vie, mais pour Therese (Qui court en permanence le risque d'être jugée par ses amis, à plus forte raison parce que plusieurs garçons veulent coucher avec elle), le choix est généralement une prise de décision très grave, qui va la précipiter dans une situation ou une autre... Et l'emprise de Carol sur elle est troublante, qui va de pair avec la perte progressive des droits de celle-ci sur sa fille Rindy. Quand, après une escapade avec Therese, Carol retrouve enfin sa fille, celle-ci est coiffée également comme Therese. Ce n'est évidemment pas un hasard.

C'est pourquoi je me pose la question, du reste, du véritable sens à attribuer à la fin de ce film, que je ne raconterai du reste pas ici, puisque je vous en laisse témoins et juges. Mais le fait est que si elle lui a beaucoup apporté, Therese sait aussi que Carol a pu avoir une certaine influence destructrice. Si désormais (C'est très clair dans le film) Therese n'ira plus vers les garçons, la place de son premier amour dans sa vie pourrait bien laisser des traces. Pas parce que c'est une femme, on n'est plus en 1950 ou 1960 (à une époque durant laquelle on pouvait représenter des homos dans un film, à condition qu'ils soient punis, malheureux, ou qu'ils découvrent les joies de l'hétérosexualité!)...

J'ai déjà parlé de la photographie de Edward Lachman,qui a d'ailleurs reçu un prix du cercle des critiques New Yorkais pour ce film, et du sens exceptionnel de la période qui est donné par Haynes, mais je m'en voudrais de ne pas mentionner sa mise en scène qui s'efface constamment devant ses actrices, le rythme du montage, d'une lenteur calculée, un je ne sais quoi ni trop lent, ni trop rapide... Et bien sûr, les deux actrices sont formidables. Maintenant, je serais étonné qu'on puisse imaginer quelqu'un d'autre que Cate Blanchett dans le rôle de Carol: c'est tellement elle en roue libre, jouant de sa présence, du mystère de ses yeux, et de son talent pour jouer les bourgeoises éthérées, qu'on pourrait presque dire qu'elle est un peu en mode de pilotage automatique. Pas Rooney Mara: on l'a découverte chez Fincher, en étoile inaccessible brièvement aperçue (The social Network) puis en détective cyberpunk hallucinante (The girl with the dragon tattoo). Elle a interprété un personnage des plus ambigus avec son rôle dans Side effects de Soderbergh. Ici, elle irradie l'écran. C'est rare que je parle des hochets que reçoivent nos acteurs et metteurs en scène, mais le prix d'interprétation à Cannes? Totalement d'accord.

 

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Todd Haynes Rooney Mara