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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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27 avril 2020 1 27 /04 /avril /2020 16:42

Le film a deux titres. Le titre Russe signifie Le fils de Gengis Khan, alors que la présentation triomphale à Berlin en 1929 a été faite sous le titre évocateur de Tempête sur l'Asie. Les deux sont en fait objectivement justifié par les événements de la dernière partie du film...

Un paysan Mongol se rend au marché de la ville la plus proche pour y vendre des peaux. Mais il se heurte à la violence de spéculateurs étrangers: la Mongolie est occupée par une force étrangère (le film nous montre des officiers qui ressemblent à s'y méprendre à des Britanniques) et le jeune homme se fait arnaquer. Il riposte, et est aussitôt poursuivi par des militaires... Il trouve refuge, paradoxalement, sur les eaux gelées de la Taïga: on est chez Poudovkine...

Hors de portée de ses poursuivants, il se cache dans les montagnes, alors qu'y fait rage une lutte à mort entre les Russes d'un camp et de l'autre, pour l'installation d'un pouvoir Soviétique. Il prend instinctivement parti pour les Rouges, et fraternise. Mais il sera fait prisonnier par les Européens et condamné à mort, avant qu'un linguiste ne se rende compte qu'un document manuscrit qu'il porte sur lui, écrit dans une ancienne langue quasiment oubliée, ne l'authentifie comme l'héritier de Gengis Khan. Il devient du coup un dirigeant fantoche pour servir les intérêts Européens, mais ça ne va pas durer...

A en croire les commentaires des historiens, on est face à un monument, une sorte de western des steppes, deux heures et dix minutes de pur souffle épique... Ne nous emballons pas: une chose est sûre: ça dure, en effet, deux heures et dix minutes. Poudovkine a du se rendre compte, lui aussi, qu'à force de célébrer la Révolution puis de re-célébrer la Révolution, le cinéma Soviétique tournait en rond, d'où une idée simple: partir de la grande ville maintenant que l'empire Soviétique s'est considérablement étendu, et tourner là où on ne va jamais... D'où un prologue impressionnant, tourné en pleine steppe avec du vide à perte de vue... Mais le film est rarement décoratif. Le décor est là, et il est impressionnant, certes, mais il sert constamment l'histoire... 

Le choix de Valery Inkijinoff, un acteur qui traverse l'histoire du cinéma en faisant le tour du monde, pour incarner le paysan Mongol, est excellent: il donne à son personnage une force peu commune pour incarner à la fois le Candide, ballotté de situation en situation, accueilli par les rouges et arrêté par les Européens... et en même temps, il est l'homme sûr de son bon droit, qui n'accepte pas l'impérialisme parce qu'il le ressent comme profondément injuste. Le film utilise à fond les ressources du montage (Poudovkine se livre d'ailleurs à de nouvelles recherches pour trouver de nouvelles techniques, parmi lesquelles un montage d'images uniques, par groupes de deux, qui donne des effets électriques un peu bizarres), pour installer l'inévitable et sacro-sainte dialectique Bolchévique: les Européens, les capitalistes, le patronat, mal. Les paysans, les Mongols (qui s'ouvraient au communisme à l'époque du tournage), les braves gens, les Bolchéviques: bien. Et une fois de plus c'est là que le bât blesse: en terme de suspense, c'est un peu râpé: on SAIT que les Britanniques vont se comporter comme des pourceaux, que les partisans soviétiques sont valeureux et que tous ont l'âme pure et ne sentent pas mauvais de la bouche... Le manichéisme fonctionne à plein régime, et le proverbial "souffle épique" vire à la propagande pure et dure. Notons que Poudovkine retourne à son pécéh mignon: la citation de Griffith, avec cette fois-ci pour le final, un rappel de la chevauchée des chevaliers du KKK dans The birth of a nation

Alors le film est peu commun, fort différent par exemple des oeuvres d'Eisenstein; il utilise avec adresse le montage, et certaines séquences sont superbes. Inkijinoff est splendide, mais franchement, une bobine entière pour nous montrer les préparatifs d'un général Britannique et de son épouse, suivis par une visite documentaire d'une lamasserie en temps réel, ça sent quand même un peu le remplissage. Même si ces "vues documentaires" seront ensuite louées par les tenants du cinéma vérité, les Ruttmann et autres...

Maintenant, s'il s'agit de rappeler que la Révolution est inévitable, que le Tsarisme (quoique absent du film, cette fois) est un totalitarisme inacceptable, qu'il fallait que quelque chose arrive... Oui, on ne peut que constater. Quand même, il faut le dire: le cinéma Soviétique n'en finissait pas de se mordre a queue. 

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Vsevolod Poudovkine 1928 Bientôt nous serons des milliers **
13 avril 2020 1 13 /04 /avril /2020 15:23

En moins de 80 minutes, Poudovkine réussit un tour de force: visualiser la façon dont St-Petersbourg (appelée Petrograd depuis 1914), théâtre crucial de la Révolution d'Octobre, se met en mesure de devenir Leningrad... Le film est une commande de l'état qui entend mettre en avant le dixième anniversaire de 1917. Mais il tranche sérieusement sur Octobre d'Esisenstein, par le refus de Poudovkine de se débarrasser des protagonistes, comme dans ses précédents films.

A St Petersbourg avant la première guerre mondiale, un paysan (Ivan Tchouvelev) venu chercher du travail tombe mal: on est en pleine grève. Plein de rancoeur envers ceux qui lui ont conseillé de ne pas trop insister, il essaie de participer à la vie de l'usine en brisant la grève. Par sa faute, les arrestations se multiplient, et l'épouse (Vera Baranovskaia) du leader syndical lui fait comprendre sa faute; il désire tout faire pour faire libérer les hommes, mais il est envoyé au front quand la guerre éclate. Pendant ce temps, les spéculateurs de St-Petersbourg se font de l'argent sur le dos des combattants...

On retrouve aussi bien la dialectique simpliste basée sur l'opposition, des films d'Eisenstein: nous/eux, les pauvres,/les riches, avant/après, le travail/le capital, etc... qu'une volonté de s'intéresser à des parcours. Poudovkine, contrairement à Eisenstein, laisse vivre les personnages et leur permet de nous installer dans ses intrigues. Tout en utilisant le montage de façon spectaculaire, bien entendu, mais il acquiert un cadre qui est me semble-t-il essentiel à l'effet produit par ses films. Et la dernière bobine de ce film, à ce titre, est tout bonnement spectaculaire! 

De plus, le metteur en scène semble constamment permettre, au moins un peu, le temps pour le spectateur d'intégrer l'erreur, une sorte de point de vue de l'opposition, comme à travers ce paysan dont on reconnaît la légitimité de sa rancoeur par exemple. Bien sûr que le propos reste dans la stricte ligne du parti et que le film fait dans la dichotomie assumée plutôt que dans la dentelle, mais il est notable qu'il permet ainsi à un personnage de passer par des étapes dramatiques bien plus intéressantes, qu'au hasard ce pauvre Vakoulinchouk, le marin Bolchevique ultra-sanctifié dans Le cuirassé Potemkine: ici notre paysan est affamé, puis en colère, puis dans la faute, la culpabilité, la rédemption et enfin le pardon. Pas mal pour un seul Bolchevik, non?

 

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Published by François Massarelli - dans Vsevolod Poudovkine Bientôt, nous serons des milliers 1927 Muet **
9 avril 2020 4 09 /04 /avril /2020 16:58

Alors que le monde entier semble ne plus se préoccuper que d'échecs, le jeu bien entendu, un couple Russe veut se marier, et la cérémonie est justement prévue en ce jour. Mais le marié, obsédé par le jeu dont il est question dans le titre, est en retard. La rupture, et les horreurs qui suivent (suicide, remise en question et pourquoi pas abandon de la passion des échecs) sont inévitables...

C'est une franche comédie à laquelle nous convie l'acteur Poudovkine, passé pour la première fois (mais pas la dernière) à la réalisation, et c'est une formidable surprise... Car le futur grand théoricien ombrageux du montage, est aussi un grand cinéphile, et ici il paie sa dette... à Harold Lloyd. Et pas seulement en dotant son personnage principal (Wladimir Fogel) d'une paire de lunettes! Dans une scène formidable, le héros est empêché par les circonstances de lire une affiche sur laquelle on présente un tournoi d'échecs. Il va déployer des trésors d'ingéniosité burlesque pour lire le panneau tout en continuant son chemin vers sa fiancée...

Ce premier film, déguisé en comédie burlesque jusqu'au format (deux bobines, pas une de plus) est une petite merveille, dans laquelle le metteur en scène chatouille amoureusement le goût immodéré des Russes pour cet étrange sport à damier.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Muet Vsevolod Poudovkine