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25 juin 2022 6 25 /06 /juin /2022 08:53

Un mari trompé (Jean Marsan) tente par tous les moyens de passer sa colère sur son rival (Edouard Molinaro), qui tente lui-même par tous les moyens d'échapper au courroux de sa propre épouse... 

Molinaro qui sera pendant plusieurs décennies un réalisateur sûr, mais sans génie, avait au moins le sens de la comédie cinématographique. Je ne parle pas de cette insistante et agaçante manie qu'ont les français de faire reposer le rire sur le texte, puisque ce film est muet... Un "à la manière de", situé par le propos très boulevardier (on est en plein Feydeau) et par les costumes, dans la première décennie du XXe siècle, au temps où le cinéma balbutiait. Mais le cinéma, ici, ne balbutie pas du tout, il est sûr de lui, d'une grande précision, totalement irrésistible, et servi par des acteurs qui se donnent à fond. Parmi eux, on ne peut pas s'étonner de trouver Yves Robert, clairement dans son élément dans cette comédie burlesque muette, un genre qu'il connaît bien et le prouvera plus d'une fois.

Et pendant ce temps, un cycliste...

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Published by François Massarelli - dans Edouard Molinaro Comédie (Muet) Yves Robert
24 juin 2022 5 24 /06 /juin /2022 16:46

Au commencement, Les Bonnes manières... Oui, car c'est non seulement le titre, mais aussi le sujet de ce film de trois bobines, construit autour d'une causerie menée par Hubert Deschamps: le rappel des dites manières, en toutes circonstances... Au théâtre, lors du décès d'un proche qui va potentiellement nous permettre d'hériter, à table, en pleine rue... La conférence est illustrée grâce à des acteurs, parmi lesquels on reconnaît Rosy Varte, mais aussi Yves Robert, bien sûr.

C'est dans la continuité de l'oeuvre théâtrale, souvent basée sur des variations sur un thème (rappelons que Robert s'est rendu incontournable en adaptant les Exercices de Style de Raymond Queneau). Mais c'est du cinéma, qui profite allègrement grâce au bon goût de son metteur en scène (qui avait gardé un lien évident avec le cinéma muet) de l'invention visuelle, en plus d'être aussi parfois drôle par des situations plus écrites. On retrouvera cette veine dans le plus risqué (puisque plus long) Les hommes ne pensent qu'à ça, sorti en 1954...

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert Comédie
16 septembre 2021 4 16 /09 /septembre /2021 11:59

Michel (Gérard Philippe) a volé dans la caisse du magasin qui l'emploie, car il voulait satisfaire une envie de vacances de sa petite amie Juliette: celle-ci ne savait pas qu'il était un petit employé... Quand le film commence, il ne l'est plus, car son patron a porté plainte et le jeune homme est en prison. Il souhaite dormir car comme le dit un camarade c'est le seul moyen sûr d'évasion...

La porte de la prison s'ouvre, et il est dans les Alpes de Haute-Provence, à Entrevaux, une superbe citadelle médiévale. Mais aucun des autochtones qu'il rencontre ne semble connaître le nom du village. Quand il arrive au bourg, il demande après Juliette, mais personne ne semble la connaître. Un musicien des rues (Yves Robert) lui explique qu'il est au pays de l'oubli, où personne ne semble pouvoir fixer un souvenir, et que lui seul  le sait car la musique le maintient en phase avec son passé... Mais Juliette (Suzanne Cloutier) est là, et si elle ne le sait pas encore car elle ne se rappelle pas de lui, Michel est bien l'amour de sa vie. 

Sauf qu'il y a un autre personnage, plus inquiétant celui-ci, qui en veut à la jeune femme: le Prince Barbe-Bleue (Jean-Roger Caussimon) qui vit dans la citadelle, a décidé de faire de la jeune femme sa septième épouse...

C'est un bien étrange univers que celui de ce film, par ailleurs tourné dans un des plus beaux villages de France (non, je ne me prends pas pour Stéphane Bern, regardez vous même, vous verrez comment l'oeil du cinéaste, un homme qui aimait Murnau, Feyder et Lang, s'est emballé pour ce lieu magique et hautement cinématographique): on attribue souvent les mondes créés par Carné (et singulièrement ses plus magiques) à Prévert mais c'est le même univers, commun aussi bien aux Visiteurs du soir, aux Enfants du Paradis, au Quai des brumes, aux Portes de la nuit, et même à certains aspects de Drôle de drame qu'on retrouve ici: un amour impossible voire maudit, un destin plus que noir, un deus ex machina (incarné par Yves Robert, après Jean Vilar ou Marcel Herrand), une logique de l'absurde érigé en principe...

Mais Prévert n'est plus là, c'est bien Carné qui a imaginé cette intrigue avec George Neveux. Les dialogues ont le bon goût d'être souvent parfaitement efficaces, débarrassés de cette tendance du cinéma fantastique à vouloir tout expliciter de peur que le public ne comprenne rien! Pas de gratuité Coctalienne comme dans l'affreux La belle et la bête, non plus, ni perte de substance en cours de route comme dans les films de René Clair où le cinéaste semble avoir perdu la main dans les dernières demi-heures (Les Belles de Nuit, La Beauté du diable)... Non, Juliette est bien construit, et reste sur le même cap du début à la fin, à la fois onirique et même loufoque (ah, le garde-champêtre incapable de retenir le nom de Juliette, incarné par Delmont!), et profondément noir et désespéré. En ce jeune homme qui fait face à l'impossibilité de faire cohabiter le bonheur et l'amour, Carné a trouvé un nouvel avatar personnel. Et les artistes qui l'assistent ont un talent fou: Trauner et ses décors, Kosma et sa musique constamment appropriée, et Alekan dont la photo est sublime.

Si le film déçoit quand même un peu, c'est à travers le personnage de Juliette, qui donne pourtant son titre au film: volage, pour ne pas dire stupide, cette jeune femme oublieuse et pour cause (elle vit, pour la majorité du film, au pays de l'oubli) est quand même une sacrée gourde. Une fois de plus, l'homme se meurt d'amour pour une ombre, et la femme ne sort pas grandie d'un film de Marcel Carné...

 

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Published by François Massarelli - dans Marcel Carné Yves Robert
11 juillet 2021 7 11 /07 /juillet /2021 08:21

Julie François (Miou-Miou) va changer de vie: un fringant attaché consulaire (Jacques Perrin) lui propose en effet de prendre la tête d'une école d'art sous contrat avec l'éducation nationale, à Pondichéry. Mais pour ça, cette quadragénaire, mère célibataire, va devoir passer le bac: A3, lettres et arts, option arts plastiques. C'est plus difficile qu'il n'y paraît, et c'est loin d'être gagné... Mais elle va recevoir un soutien de taille en la personne d'un autre aspirant bachelier, de la génération d'avant: Léopold Bonhomme (Yves Robert), trompettiste de métier, veuf, qui a décidé de passer le bac afin e partager l'expérience avec ses deux petits-fils de 18 ans...

C'est une comédie sentimentale, mais doublée d'un certain nombre d'expériences narratives... Par exemple, à partir du moment où Julie et Léo se rencontrent, ils deviennent tous deux narrateurs, parfois en même temps. Une façon pour Yves Robert de se mettre un peu plus dans le film, lui qui a toujours résisté à cette opportunité de se donner des rôles significatifs, choisit pour cette dernière réalisation de se laisser aller à devenir son propre acteur. 

On ne s'étonnera donc pas que la chose soit, sans doute, extrêmement personnelle, et qu'il y ait beaucoup d'Yves Robert dans Léopold... Un Léopold qui partage des idées généreuses et vaguement utopiques avec l'acteur, des idées de gauche, je ne sais pas si vous vous rappelez, c'était avant le 11 septembre, avant Sarkozy et avant Eric Zemmour... Le personnage est généreux, comme ses films, et un peu trop porté sur les bons sentiments, donc il y a quelque chose qui cloche dans ce film: jusqu'à un certain point, il n'y a pas d'enjeu: deux personnes qui passent le bac, dont une pour laquelle c'est important; pas de romance à l'horizon: même s'ils ne se le disent jamais, les deux narrateurs nous le disent à nous, pas question de s'abandonner à une relation, il y en a un qui est décidément beaucoup trop vieux! ...Et contrairement à ce qu'aurait choisi un Eastwood, ils s'y tiennent. Aucun accroc de taille entre Julie et ses profs, entre Julie et ses camarades, entre Julie et sa grande fille, c'est un peu morne, sans doute... 

Le film est une expérience sympathique, mais aussi un bazar sans nom, avec des moments adorables et d'autres durant lesquels on aimerait être ailleurs (cette "chanson", vers la fin, qui rythme les révisions... la farce de mauvais goût d'André Dussolier en prof de philo...). Comme le metteur en scène, il est attachant; mais celui-ci a souvent été beaucoup plus rigoureux... Mais il est fort probable que Robert a choisi de finir sur ce film, et décidé de s'y faire plaisir avant tout: pourquoi pas?

Et tant que j'y pense, une prof de maths qui terrorise ses élèves en A3, en 1994? Dans tes rêves, vu le programme de maths en terminale littéraire ces années-là, c'est plutôt le contraire qui devait arriver! Je le sais, j'ai eu 14.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Yves Robert
4 juillet 2021 7 04 /07 /juillet /2021 09:22

Chouette, Yves Robert retravaille avec Dabadie! Et il y a Jean Rochefort en maître de cérémonie, cette fois en partenariat avec Miou-Miou! D'ailleurs ces deux derniers sont aux prises avec la réalité du monde, qui est que ce serait un bel endroit s'il n'y avait les casse-bonbons, casse-burettes, suceurs de temps, casse-couilles, bref: les casse-pieds (Jean-Pierre Bacri, Jean Carmet, Hélène Vincent, Guy Bedos, Odette Laure, Jacques Villeret, Philippe Uchan, Patrick Timsit, Jean Yanne, Valérie Lemercier, Victor Lanoux, et je suis sûr que j'en oublie)...

J'aime 

retrouver cet univers de conte à digressions, dans lequel notre appréhension de la situation globale naît d'une accumulation d'anecdotes qui finissent par former une authentique narration, d'ailleurs largement dominée par la belle voix incontournable de jean Rochefort, passé maître dans l'art de faire passer un décalage entre ce qu'il raconte et ce qu'il interprète à l'image par la grâce de la voix off... Et puis parfois le narrateur est contagieux et d'autres prennent le relais. 

mais

Je n'aime pas

le fait que les premières 20 minutes du film semblent tout droit sorties de Les hommes ne pensent qu'à ça, le premier film assez foutraque de Robert, qui nous a habitués à un peu plus de rigueur: on sent qu'il a un casting de rêve à mettre en valeur, quand même! Et ça se fait parfois au détriment du film.

mais

J'aime

comment certains segments partent loin dans la description apocalyptique de la connerie humaine, ou parfois dans une simple observation d'une série de défauts qui accumulés s'avèrent d'une exceptionnelle richesse: trois jeunes hommes rencontrés dans un café, tous avec des tics de langages contagieux, par exemple, resteront longtemps dans la mémoire des linguistes.

mais

Je n'aime pas quand ça vire au prétexte à texte, la grande maladie du cinéma français. Et Guy Bedos a beau revenir sur les fondamentaux de la comédie cinématographique en se livrant à du gag physique, il y a un brin d'irritation devant la déferlante textuelle.

mais

J'aime

Jean Rochefort et Miou-miou, et ils vont très bien ensemble... Et l'actrice n'est en rien invitée à incarner un fantasme masculin, mais un double. D'ailleurs elle a son accès V.I.P. à la bande-son narrative elle aussi, et c'est parce qu'il a découvert son égale, voire une âme supérieure, en matière de débusquage .de la connerie ambiante, que Henry (Rochefort) tombe amoureux...

Et ça vraiment, j'aime beaucoup, donc pour ce petit film qui repose sur un gimmick mais qui donne parfois l'impression de ne faire que d'ajouter 92 minutes à sa bande-annonce, on aura beaucoup pardonner.

 

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert Comédie
30 mai 2021 7 30 /05 /mai /2021 11:32

Les Souvenirs d'enfance de marcel Pagnol sont totalement à part dans son oeuvre, et sont non seulement un succès significatif d'édition sans précédent, ils sont passés totalement dans l'inconscient collectif. Il est souvent mentionné à quel point l'auteur de ces Souvenirs a su transcrire en mots et rendre visuelle la mémoire de son enfance, ou du moins de ce qu'il en retenait... Yves robert de son côté, a toujours voulu être celui qui les adapterait, au point de maintenir des années durant une correspondance acharnée avec la famille Pagnol! Et quand on voit les deux films, on comprend pourquoi: il s'est totalement approprié ces souvenirs, au point d'en faire, probablement, une réflexion personnelle et tendre sur l'enfance et le bonheur: oui, mais vus par... Yves Robert.

Deux films certes, mais un projet: les deux oeuvres ont d'ailleurs fait l'objet d'un tournage, et sont sorties à quelques jours de distance... On peut, je pense, voir le premier seul, mais pas le deuxième: Le Château de ma mère est totalement fondé sur la familiarité avec La Gloire de mon père... Je pense qu'il ne tiendrait pas debout sans visionner la première partie

Le premier film raconte donc le rapport très particulier de Marcel à ses parents, un père idolâtré et une mère couvée de toute l'inquiétude d'un enfant de 9 ans qui a conscience de sa fragilité. Le petit frère (Paul) et la petite soeur (d'ailleurs c'est son identité, sur presque toute la durée elle n'est que "la petite soeur") sont accessoires, l'intérêt ici étant le rapport du garçon à ses parents et celui du conteur à son auditoire. C'est la base d'un choix: Jean-Pierre Darras prête sa voix au Marcel devenu adulte; une démarche humble d'Yves Robert, généralement satisfaisante, parfois frustrante, quand le commentaire devient redondant ou précède l'image: on est devant un film sacré nom! Mais Yves Robert a livré une adaptation visuellement constamment soignée et enchanteresse: je suis surpris de voir à quel point j'ai eu l'impression d'avoir déjà vu les films. Ce n'était pourtant pas le cas, mais c'est exactement comme ça que je voyais les livres à leur lecture... Avec évidement une préférence pour le premier, tant le deuxième s'embourbe un peu dans cette histoire de passage en douce le long d'un canal...

Les choix d'adaptateur de Robert ont été essentiellement d'aller vers l'épure et la narration fluide, et il a choisi évidemment des acteurs qui se sont totalement soumis au projet. Il n'y a aucune erreur de casting ici, et même les enfants réussissent à obtenir ce que tant d'acteurs chevronnés (j'ai des noms) dans ce pays n'ont jamais été foutus d'atteindre: le naturel, l'évidence... C'est que les paysages à tomber par terre des hauteurs du pays Marseillais, l'impressionnant Garlaban des livres, où ont été tournés ces deux films, les cigales du mois d'aout, les collines et leur soleil insolent, ont fait leur effet magique: c'est très communicatif et c'est du pur plaisir. Des bruits, des sensations et des odeurs qui font furieusement référence aux vacances d'avant... Un souvenir enfantin? Non, pourtant...

Les deux livres sont vraiment l'oeuvre d'un adulte, et on a beau penser qu'il s'agit ici d'attraper et de représenter le bonheur, ce qui ressortira de ces trois heures et quelques de cinéma, c'est à quel point le bonheur est fugace, et laisse autant de souvenirs magnifiques que de regrets. Pagnol, qui n'envisageait sans doute pas d'apposer des suites à ces deux livres, a fait de ces deux récits des évocations de ce qui passe et s'en va, de ceux qu'on a aimés le temps qu'ils soient là, et qui sont partis. Deux expériences qui tranchent sur la superficialité embarrassée de toute son oeuvre (et qu'on ne me parle surtout pas du "cinéaste" Pagnol) par la richesse de cette évocation des petits riens de l'enfance, et bien sûr de l'absence qui se devine en creux, de par l'imposante présence dans ces souvenirs de la frêle Augustine et du magnifique Lili, l'ami et mentor des collines. La leçon est cruelle: devenir adulte, c'est se rendre compte que tout ce qu'on a aimé est arrivé à la fin. Et les films, sous couvert de nous faire plaisir, nous le démontrent fort joliment.

 

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert
4 avril 2021 7 04 /04 /avril /2021 10:43

Matthias Duval (Pierre Richard), éditeur un peu miteux (il édite des cartes postales supposées être drôles), flambeur notoire, rencontre une jeune héritière Américaine (Carey More), et le courant passe tout de suite entre eux. Mais Matthias apprend qu'elle a une jumelle (Camilla More), et il décide de s'inventer un jumeau, lui aussi, afin d'ajouter l'autre soeur à son tableau de chasse. Parallèlement, les deux soeurs sont manifestement impliquées dans de louches tractations avec un avocat au nom ridicule, Ernest Volpinex (Jean-Pierre Kalfon)...

Le scénario est d'Elisabeth Rappeneau, la soeur de Jean-Paul, et auteure pour lui du script de Tout feu tout flamme, et on retrouve ici un trait assez courant des films de cet autre cinéaste: le fait qu'on n'aime pas les personnages... Mais alors pas du tout. C'était d'ailleurs plus ou moins prévu puisque le film est adapté d'un roman noir, et qu'il a été confié à Pierre Richard un rôle foncièrement antipathique, avec ceci d'intéressant que la situation permet à Matthias d'inventer un autre personnage, plus décalé, qui correspond à un Pierre Richard que nous connaissons mieux. Mais le mal est fait!

Ces histoires de coucheries diverses et variées, ces jumelles Américaines qui prononcent avec difficulté un dialogue écrit par Boris Bergman (et qui est un sommet de vulgarité involontaire) en tenues toujours plus légères, ces moments obligés où Pierre Richard doit passer d'une chambre à l'autre, étaient sensés être une comédie. C'est surtout un pensum, long et ennuyeux.

Le seul film d'Yves Robert dans les années 80 (il a aussi réalisé une mini-série, L'été 36) est donc un ratage. Dommage, on arrive bientôt à la fin de sa carrière...

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert Comédie
27 mars 2021 6 27 /03 /mars /2021 12:16

Martin Belhomme (Jean Rochefort) est un lâche... Un vrai de vrai, quelqu'un qui a tellement peur de tout ce qui l'embarrasse qu'il a raté complètement sa vie. Sur un coup de tête, il fuit son abominable famille, et tente de refaire sa vie auprès d'une chanteuse de cabaret, Eva (Catherine Deneuve), qu'il suit jusqu'à Amsterdam, et qui est suivie en permanence par un type louche qui fait très peur à Martin! Et comment réussir à se faire aimer d'elle si il est incapable de se défendre?

C'est une déception. Pourtant ça partait d'une excellent idée, celle d'un anti-héros: pas un minable, plutôt un brave type.... Mais quelqu'un que toute prise de décision un tant soit peu drastique inhibe complètement. Avec Jean Rochefort, et le script et les dialogues de Jean-Loup Dabadie, Yves Robert pouvait sans doute y aller en confiance mais ça ne marche vraiment que pour la première demi-heure... Là, c'est la fête, avec une narration qui chamboule allègrement la chronologie, et des gags historiques avec plein de versions de Jean Rochefort toutes différentes les unes des autres. On y retrouve la verve du début des Copains, par exemple...

Et il y a cette propension comique, héritée des burlesques muets Américains,  du personnage de Martin Belhomme à se retrouver exactement là où il ne faut pas, au pire moment, le meilleur étant son étrange parcours durant Mai 1968, quand il est plutôt du côté de la "réaction" mais qu'il est trop embarrassé pour signaler aux gens qui l'entourent... et il participe donc à l destruction de voitures, en particulier la sienne! Une assez belle métaphore d'un type qui a passé son temps à assister à sa vie plutôt qu'à la vivre vraiment.

C'est vrai qu'on part ensuite un peu à l'aventure, mais c'est justement là que le bât blesse: cette aventure de Rochefort (en moto, avec un cuir et des santiags!) en Hollande ne parvient pas à être autre chose qu'erratique, en dépit de l'exceptionnelle bonne tenue du décalage permanent et subtil entre la voix off de Rochefort et les séquences vues... Sans parler de Catherine Deneuve: je ne sis pas si c'est une erreur de casting, il y a juste comme une incapacité à donner au personnage une vraie substance.

 

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert Comédie
21 février 2021 7 21 /02 /février /2021 09:31

C'était une suite inévitable, compte tenu de l'imposant succès d'Un éléphant, ça trompe énormément. Mais le bon goût de Dabadie scénariste et de Robert réalisateur a permis que cette redite soit non seulement bien menée mais plus encore: c'est un film assez différent du premier...

Un éléphant, ça trompe énormément est centré sur Etienne (Jean Rochefort) mais cette fois les trois copains (Claude Brasseur, Victor Lanoux et Guy Bedos) sont autant mis en valeur, dans une comédie de moeurs qui va au-delà de la simple évocation du démon de midi... Et malgré ça la chronique ne dégénère pas en une série de vignettes, car les personnages eux-mêmes, mais aussi leurs liens, sont suffisamment forts pour fédérer l'intérêt. Robert (et Danièle Delorme) qui avait eu des scrupules à donner une suite au Grand blond (suite qui lui est clairement inférieure, du reste) n'a eu aucun mal à produire ici une suite non seulement d'intérêt égal, mais aussi un film finalement assez différent...

L'amitié est le prétexte qui pousse les quatre amis à se rendre co-propriétaires d'une petite maison de banlieue, qui s'avèrera inexplicablement bon marché jusqu'au jour où ils découvrent, à la faveur de la reprise des activités d'un aéroport après une longue grève, que leur petit paradis est invivable quand les avions passent au dessus toutes les trente secondes... Bouly (Lanoux) gère tant bien que mal une situation d'amour libre pendant qu'il tente d'accepter son divorce; Simon (Bedos) de débat entre ses amis, ses amours et ses emm... aurait dit Aznavour, ou plutôt son insupportable mère étouffante (Marthe Villalonga); Daniel (Brasseur) se cherche, entre ses conquêtes masculines, et un amour inattendu pour une patronne qui a quinze ans de plus que lui (Lanoux: elle a des heures de vol): et pourtant, comme quand il s'agissait de montrer Daniel assumant son homosexualité dans le film précédent, le traitement de cette anecdote est d'une grande délicatesse; avant la fin du film, il y aura une mémorable engueulade entre les quatre, un mariage qui ne se fera pas, et un décès.

Bref, on n'est pas épargné par ce qui fait la vie, et les aventures d'Etienne continuent à se dérouler autour de ses déboires conjugaux, donnant d'ailleurs naissance à l'aspect le plus critiquable du film, une sorte de parodie récurrente des aventures de l'inspecteur Clouseau de Peter Sellers et Blake Edwards, dont Rochefort adopte l'imper et le feutre... Car Etienne est tout à coup confronté au soupçon sur la vie de Marthe, son épouse (Danièle Delorme)... et en menant son enquête, il va envoyer à cette dernière des signaux qu'elle interprétera de travers. Etienne est également le narrateur du film, avec une tendance à embellir le récit, qui contraste avec l'aspect souvent désastreux de ses initiatives. Mais comme il le dit lui-même, "Vous qui pénétrez dans mon coeur, ne faites pas attention au désordre..."

Mais ce n'est pas cette intrigue boulevardière qui fait le sel du film, loin de là: ici, c'est le tissu d'amitié et de vie tangible de réalité et de petits riens, de voitures estampillées 70s (des R16, cette fois) et de jeans larges, qui tissent un instantané formidable de ce qu'est la vie des gens. Le film est de ceux après lequel courent les auteurs de comédie du quotidien, ou de films qui sombrent plus ou moins dans le drame, que ce soit les Bronzés, ou Les Petits mouchoirs, on ne compte pas les films qui doivent tout à ce diptyque de Dabadie et Robert. Aucun ne les égale, bien sûr. 

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Yves Robert
23 janvier 2021 6 23 /01 /janvier /2021 11:32

C'est un film qui s'intéresse à un sujet souvent évoqué au cinéma, et souvent traité par les cinémas Français, Italiens, et Américains, sous un jour très boulevardier, propice à toutes les vulgarités: le démon de midi... Etienne Dorsay (Jean Rochefort) est un fonctionnaire d'un ministère, installé, efficace, respecté: pas un rigolo, donc. Marié à une femme qu'il adore, Marthe (Danièle Delorme), et père de deux adolescentes, il n'est pas du genre à faire n'importe quoi, jusqu'à ce jour où, dans un parking, il a vu Charlotte (Annie Duperey). Passant sur une bouche d'aération à la façon de Marilyn, elle fait voler sa robe... et revient sur ses pas pour danser, ignorant qu'elle vient d'être vue, et qu'elle a charmé les yeux d'un quadragénaire qui n'en revient pas. Le film va nous conter la désastreuse équipée de Dorsay pour non seulement rencontrer la jeune femme, mais aussi avoir une relation avec elle: déni, mensonges, échafaudage de plans tous plus lamentables les uns que les autres... Jean Rochefort est parfait dans le rôle du séducteur malgré lui, qui n'avait pas prévu de se remettre en selle. La duplicité, le mensonge du bonhomme qui s'apprête à tromper sa femme, deviennent des sources de gags y compris quand le cavalier émérite Jean Rochefort incarne un homme qui tente de se réconcilier avec l'art de l'équitation, et est nullissime!

Sinon, le film est aussi une chronique de l'amitié, et on sait que Yves Robert a depuis longtemps souhaité montrer l'amitié, les Copains pour reprendre le titre d'un de ces premiers films dans lesquels il a esquissé une telle thématique: c'est vrai qu'avec Jean-Loup Dabadie, ils ont su trouver le ton pour peindre une sorte de famille, de fratrie sous la forme d'une bande d'amis-pou-la-vie, unis par leur pratique du tennis, mais pas que. Partageant les bons moments surtout mais aussi les mauvais... Daniel (Claude Brasseur), énigmatique garagiste qui cache même à ses copains ce qui en 1976 est encore une fêlure, son homosexualité; Simon (Guy Bedos), le médecin pied-noir flanqué d'une mère envahissante (Marthe Villalonga) et qui lui pourrit la vie... ce dont il n'aurait pas vraiment besoin tant ce médecin hypochondriaque et pessimiste fait ça très bien tout seul; enfin, Bouly (Victor Lanoux), le costaud du groupe, est marié et coureur, ce qui va lui apporter bien des ennuis. Dans un premier temps, Etienne hésite à partager son tourment avec eux, mais ils finiront par devenir complices, de la même manière qu'ils feront corps pour soutenir Bouly dans les conséquences désastreuses de ses frasques.

A ce sujet, d'ailleurs, il est frappant de voir à quel point les acteurs, le metteur en scène et le scénariste ont su créer des personnages parfaitement viables, de chair et d'os, qu'on jurerait avoir rencontrés. Lanoux n'avait pas la tâche facile, lui qui incarne un macho dragueur qui trompe sa femme comme on s'attelle à un sport extrême... Il réussit pourtant, au-delà de la vulgarité satisfaite du bonhomme (le T-shirt moulant "bizoo-bizoo" sur pantalon patte d'eph!) à être touchant... Ils le sont tous, et on applaudira la façon dont les auteurs du film ont réussi à faire de la comédie fine avec les tourments familiaux du médecin juif pied-noir affublé d'une mère qui l'empêche de respirer, ou de leur subtilité pour évoquer la vie compliquée de Daniel, l'un des premiers gays du cinéma français à échapper à la caricature et au bon mot. Bref, non seulement les personnages existent, mais on croit aussi dur comme fer en leur amitié, ce qui au passage justifiera une suite!

Sinon, bien sûr, le film offrira aussi bien un arc narratif fini à la désastreuse aventure d'Etienne auprès de Charlotte (qui ne s'appelle d'ailleurs pas Charlotte!), et permettra aussi à Danièle Delorme, pour sa première vraie apparition dans un film de son mari, d'être plus qu'un personnage stéréotypé de femme légitime qui doit faire face à l'infidélité de son mari: elle incarne une jeune quadragénaire qui prend la décision de reprendre des études de droit, et se frotte au mode qui l'entoure. Si on passera sur l'omniprésence des étudiants aux cheveux longs qui envahissent son salon, on peut quand même se réjouir de la lamentable aventure de Lucien, le copain des filles Dorsay, tombé amoureux de leur mère et qui la poursuit d'une assiduité pathétique: Christophe Bourseiller la joue à la Droopy, c'est déjà drôle, mais la façon dont elle réagit accentue encore l'aspect vaguement minable de la mésaventure d'Etienne. 

Le choix narratif de laisser Etienne nous raconter sa vie, avec une certaine ironie à l'égard de lui-même, n'empêche pas le film de respirer ailleurs, et de faire le bonheur de ses spectateurs par des quiproquos dont le personnage n'a de toute façon pas connaissance: il n'avait par exemple absolument pas repéré le manège de Lucien, par exemple, pas plus qu'il n'avait vu l'effet qu'il fait sur Mme Espéranza (Martine Sarcey), une collaboratrice qui croit qu'il veut la séduire suite à une méprise... Ces éléments contribuent à la richesse du film et surtout à l'excellence de la comédie. Car comme le formidable 10 de Blake Edwards (qui lui doit beaucoup), Un éléphant ça trompe énormément n'est pas qu'un film réussi sur la lamentable tentation, c'et aussi et surtout une comédie de concours, un chef d'oeuvre de son réalisateur et du cinéma français des années 70; en ce qui me concerne, l'effet madeleine est là et bien là, et on ne peut qu'avoir envie d'en revoir aussi la suite, le fort bien nommé Nous irons tous au paradis.

 

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert Comédie