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6 juillet 2019 6 06 /07 /juillet /2019 16:50

Un ronin dont l'épouse se meurt de la tuberculose accepte à contrecoeur un travail qui consiste à faire le garde du corps pour un clan de bandits sans foi ni loi; un frère et une soeur, qui ont perdu leur famille, massacrée par un groupe de bandits, se cachent derrière le déguisement de deux geishas, qui détroussent les clients de leur activité; une femme, veuve, se désole de la tournure que prend la vie de son neveu, un fainéant qui ne pense qu'à jouer... C'est dans un contexte qui est au confluent de toutes ces intrigues que Zatoïchi, le légendaire masseur aveugle extrêmement doué de son sabre, vient passer quelque temps dans un village...

...Les habitants, du moins ceux qui survivront, s'en souviendront certainement.

C'est une commande qui est faite à Kitano de faire revivre la célèbre franchise de plus de vingt films, qui a été créée depuis les années 60 et les romans de Kan Shimozawa... Loin de ses films habituels, le cinéaste et acteur y a vu une occasion de se frotter au film de sabre, l'un des genres fondateurs du cinéma Japonais. Et si possible de le dépoussiérer un peu...

Le résultat est une réussite, autant par les aspects du film qui se conforment au genre et en particulier à la légende de Zatôichi, mais aussi par un certain nombre de transgressions subtiles... Et d'autres qui le sont moins: en particulier Kitano dans son choix de couleurs a favorisé le rouge, en poussant au maximum les scènes sanglantes. Le baroque des scènes de combat dépasse en effet la violence codifiée des films de la franchise. Et l'humour déployé dans ce film qui s'amuse constamment de ce qui est souvent pris au sérieux dans les films Zatôichi des années 60, à savoir le paradoxe du héros aveugle tout puissant... Au point de se livrer à ce qui est peut-être une transgression de trop, sur la fin, mais c'est un point de vue personnel sur un aspect probablement mineur...

Sinon, le film vire inévitablement à une sorte de réflexion sur le genre, sa violence, sa chorégraphie, et Kitano s'amuse à interroger certains codes, notamment la division prude des caractères entre hommes et femmes: le frère et la soeur, déguisés en geishas, vivent bien du sacrifice sexuel de l'un d'entre eux, mais celui qui "se dévoue" pour plaire aux vieux cochons, c'est le garçon. A la fin du film, quand quelqu'un lui dit 'cesse donc de t'habiller en femme', il répond que ça lui correspond... Ce sont là des détails d'un film qui fourmille d'anecdotes, et interprété avec tendresse par des acteurs qui connaissent le genre et ses façons de faire. Kitano cinéaste et acteur s'est fait plaisir, et globalement, c'est vraiment partagé...

 

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Published by François Massarelli - dans Takeshi Kitano Zatoichi
19 novembre 2017 7 19 /11 /novembre /2017 18:18

Le troisième Zatoichi est aussi le premier des films à adopter la couleur. En dépit de la nouvelle palette, utilisée avec bonheur tout du long, c'est d'abord et avant tout un film très amer, qui était supposé clore la trilogie initiale en montrant les raisons qui feront que le héros, le masseur aveugle (et bretteur légendaire) Ichi (Shintaro Katsu), revenu chez lui, s'enfoncera désormais toujours plus avant dans la solitude, l'errance et bien sûr la violence...

Dans un premier temps, Zatoichi voyage, et comme dans les deux premiers films, il fait des rencontres qui testent sa légende: lors d'un séjour dans une auberge, il stationne en compagnie de la famille d'un ami, qu'il a rencontré par hasard, et qui l'invite à se rendre en sa compagnie vers leur village natal. Lors de la soirée, ils sont dépouillés par des bandits... Qu'Ichi retrouve le lendemain, réussissant à trouver les arguments (Sonnants, et trébuchants aussi!) pour persuader les voleurs de rendre leur bien aux paysans qu'ils ont détroussés...

C'est ainsi que dans un premier temps, on constate un glissement du personnage, qui n'était pas aussi "Robin des bois" dans les deux films précédents: il partageait le quotidien des petites gens, mais son "travail" de Yakuza le faisait plutôt s'associer, pour le meilleur et le pire, avec des chefs de clan. 

Mais lors de ce séjour "à la maison", le masseur croise son ancien maître. Tout va fort bien se passer entre eux, jusqu'à ce que le maître ne s'irrite de voir sa jolie soeur passer trop de temps avec son ami. Et le film vire à la confrontation, sous les yeux hagards de la soeur de l'un et de l'amoureuse de l'autre, entre le maître et l'élève...

Malgré la tentation du bien qui se fait insistante dans le film, Zatoichi va donc devoir ajouter de nouvelles sources de frustration à son avenir, lui qui déplore, tôt dans ce film, d'avoir tué trop de gens, qu'ils aient ou non mérité de mourir... 

La réalisation de ce nouveau film est en tous points efficace, confiée à un metteur en scène que je qualifierai volontiers d'illustre inconnu! Quant à Shintaro Katsu, il habite le rôle, toujours avec le même bonheur...

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Published by François Massarelli - dans Zatoichi
12 novembre 2017 7 12 /11 /novembre /2017 17:58

Le deuxième film de la série des Zatoichi est un écho du premier, à tous points de vue: sorti six mois après, il met en scène non seulement Shintaro Katsu dans le rôle qui ne tardera pas à être mythique du masseur aveugle et surdoué aux jeux de sabre, mais aussi quelques protagonistes du premier film. Le titre anglais, plutôt fidèle à l'original, est sans ambiguïté: The tale of Zatoichi continues, soit La suite de la geste de Zatoichi... 

Un an après les événements du premier film, Ichi décide de retourner à Lioka, comme il l'avait promis, afin de rendre hommage à celui qu'il a tué, son égal, et l'un des plus grands regrets de sa vie. Mais il est suivi à la trace, d'une part par un mystérieux Ronin manchot et son apprenti, mais aussi par tout un clan, dont il a été amené à rencontrer le chef, pour un massage: celui-ci était plus ou moins dérangé, ses lieutenants ne veulent pas que ça s'ébruite. Mais à Lioka, Zatoichi est confronté à son passé local: le seigneur qui l'avait engagé n'a jamais pardonné au masseur d'avoir publiquement gagné le combat contre la bande rivale pendant que lui, le chef de clan, se terrait dans coulisses; et Otane, la jolie jeune femme qui l'aimait et l'a laissé partir, va se marier avec un jeune homme. L'arrivée de Zatoichi contrecarre ces plans...

Ca se complique, en fait. Au rythme indolent, au suspense unilatéral du premier volet, les scénaristes ici ajoutent des péripéties un peu dans tous les sens afin de multiplier les occasions de montrer des combats. Ceux-ci sont toujours brefs, et filmés à distance, sans artifices inutiles (notamment du ralenti), mais ils en deviennent un peu banalisés. Je ne pense pas non plus qu'il était si intéressant de faire revenir Zatoichi au pays qu'il avait quitté lors du premier film, et de le voir à nouveau méditer sur le sort de Hirate! Mais un élément important est l'arrivée de ce nouveau ronin mystérieux, reflet d'un passé encombrant pour Zatoichi, et qui promène avec lui le fantôme d'une femme: un secret  inattendu pour notre héros, qui contribue à le rendre toujours plus passionnant... C'est le dernier Zatoichi en noir et blanc.

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Published by François Massarelli - dans Zatoichi
8 novembre 2017 3 08 /11 /novembre /2017 16:59

Zatoichi (Shintaro Katsu) est sans doute un masseur aveugle, mais c'est surtout un mercenaire de tout premier ordre: escrimeur de génie, il compense parfaitement la perte de ses yeux en développant tous les autres sens, et en faisant preuve d'une profonde intelligence... Les sens, nous les voyons tous en action, dès le début, car Zatoichi, s'il n'a pas besoin de cacher son handicap, a une façon surprenante de démontrer  qui en douterait qu'il ne faut pas seulement se fier au fait qu'il ne voit pas. Durant ce film, qui est le premier d'une série, le scénario installe un petit suspense... On entend beaucoup parler des prouesses dont est capable le héros, mais on attendra (Qu'il ait bien mangé, bien bu, bien écouté les conversations des autres, qu'il se soit fait masser même, et qu'il participe à une après-midi de pèche...) avant de le voir en action.

Zatoichi se trouve dans le village où se passe le film, car il a été invité par le maître d'un clan, à venir l'épauler. Et justement, le clan immédiatement voisin, avec lequel la guerre est inévitable, a engagé un samouraï: redoutable, mais déchu car il et alcoolique et tuberculeux, Hirate (Shigeru Hamachi), prend lui aussi son temps, et la rencontre, autour de cannes à pèche et au bord d'une rivière, est inévitable entre les deux hommes.

Zatoichi, qui n'aime pas les hommes qui sont des yakuzas comme lui, car il estime qu'ils ont sous prétexte de se mettre en dehors de la société laissé leur code de l'honneur de côté, ne cherche absolument pas à séduire ses "collègues" et employeurs; il est par contre fort civil avec les domestiques, ceux qui travaillent (Un cuisinier a tout son respect, d'autant qu'il confectionne des choses qui sentent très bon!), les femmes aussi qui sont elles, par contre, facilement séduites par la gentillesse et la force du personnage. Mais il garde pour Hirate une forte sympathie, et leur relation paradoxale va trouver son point culminant dans une confrontation dramatique, qui est courte, mais traitée à la fois comme une scène d'action... et une scène d'amour aussi. Non que le personnage de Zatoichi soit un étendard homosexuel, mais l'idée reste permise... Il a trouvé un égal et le tuer, pour lui, est à la fois nécessaire, et insupportable.

Le film est superbement construit, de bout en bout, et montage et mise en scène se conjuguent dans une efficacité narrative imparable. La tranquillité de Zatoichi, sa lenteur, sa sagesse, et bien sûr son humour, font beaucoup pour rendre le personnage irrésistible... Le film nous donne à voir un conte, dont nous concluons assez vite que l'humanité des Yakuzas, membres de clans, guerriers, mercenaires et autres porteurs de sabre à la petite semaine, ne sont finalement que des médiocres. Mais pas Zatoichi! Nulle surprise donc dans le fait qu'après ce film, il y ait eu une vingtaine de suites... Qu'on a diablement envie de voir.

 

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Published by François Massarelli - dans Zatoichi