Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
  • Contact

Recherche

Catégories

2 mai 2024 4 02 /05 /mai /2024 23:39

Un banquier véreux, Jules Tafard (Raimu), s'évade de prison... Il cherche refuge auprès d'une ancienne maîtresse, Claire (Yvonne Hébert), qui travaille pour la maison Génissier, un petit commerce poussiéreux qui vend des corsets: il se présente à la famille qui tient la boutique sous le nom de Gédéon. La boutique tourne tellement en rond, qu'il va se rendre bien vite indispensable, après s'être fait engager comme veilleur de nuit... Il subjugue toute l'entreprise, de la patronne (Pauline Carton) jusqu'à la belle-fille de celle-ci (Edwige Feuillère). Il spécule avec les fonds des Génissier, vend et achète de tout; sous sa responsabilité, la boutique devient un magasin incontournable. Mais où s'arrêtera l'ascension?

L'affaire Stavisky s'est terminée, dans le sang, deux mois avant la sortie du film... On peut dire que cette comédie satirique, à sa façon, a su capter l'esprit de toute une époque... Mais c'était dans l'air de toute façon: duvivier avait réalisé David Golder en 1931, par exemple... Mais l'apport essentiel de ce film est d'avoir su éviter, ou presque, un écueil délicat, que Duvivier n'a pas su, d'ailleurs, mettre de côté: l'antisémitisme ambiant, et surtout de l'extrême droite qui était à l'affût de tous les scandales financiers pour fustiger à la fois les gouvernements, les partis et les juifs, accusés de tous les maux... Alors bien sûr, si Raimu interprète un banquier qui n'est pas juif lui-même, son principal collaborateur, Zwerch (Guy Derlan), se revendique justement juif, et il est usurier, par dessus le marché! De plus, une conversation téléphonique avec un banquier profiteur nous montre Raimu s'adresser à son interlocuteur qu'il appelle Salomon... Mais la charge principale du film semble plutôt être dirigée contre les petits bourgeois médiocres interprétés par Pauline Carton, et Lucien Baroux, auprès desquels Tafard / Gédéon semble se rendre indispensable, qui va leur apporter la fortune. une fortune dont il aura lui-même bien profité cependant...

C'est de toute façon un trait indissociable, hélas, du cinéma des années 30, en particulier sans doute du cinéma français... Mais le film est vraiment réussi, au delà de cet aspect, et si on craint au départ une énième adaptation de pièce de théâtre, Colombier (dont le frère a collaboré au film, dont il était le décorateur) a su sortir ses personnages et ses séquences du carcan de la scène, en faisant respirer le tout. Il profite de la préférence de Raimu pour les plans séquences, mais comme il n'est pas Pagnol, il laisse la caméra s'approcher avec subtilité. Il laisse les acteurs très libres de leur jeu et quand on a Raimu, Baroux et Pauline Carton sous la main, ça fait de glorieuses étincelles... Il fait évoluer le décor avec l'importance du magasin, et laisse Raimu adapter son apparnce avec génie: plus le magasin s'agrandit, plus il paraît humble... 

Pour résumer, derrière le film un brin poouliste, qui surfe à la fois sur le succès d'une pièce et sur un scandale fort opportun, c'est un petit classique savoureux du cinéma français qui nous est présenté... Avec un monstre sacré dans un de ses rôles les plus mordants.

 

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Comédie Pière Colombier Raimu