Une compagnie (véreuse) de chemin de fer est en pleine installation d'une nouvelle ligne dans l'ouest. Sous le couvert de sa mission d'assistant aurpè du gouverneur de l'état, l'honorable William J. LePetomane (Mel Brooks), l'infâme Hedley Lamarr (Harvey Korman) décide de tout faire pour faire fuir les habitants de la tranquille petite ville de Rock Ridge. Il a une idée diabolique, celle d'envoyer dans le conté un nouveau shérif... Afro-Américain, pensant que ça les achèvera... Bart (Cleavon Little), le nouveau shérif, arrive en ville et va très vite mesurer à quel point les habitants lui sont hostiles...
Je ne pense pas qu'il y ait vraiment eu avant ce film un western parodique qui osait autant mettre complètement en désordre la belle structure du western, à part bien sûr dans le dessin animé. Auparavant, les comédies-western (certains films de Harold Lloyd ou de Keaton, et bien sûr Way out west avec Laurel et Hardy) plaçaient leurs héros dans le cadre westernien, mais laissaient malgré tout l'intrigue assurer la sécurité du genre! Ici... Non. Brooks a tendance à jeter l'intriue avec l'eau du bain... Mais pas trop vite, c'est ça qui est très appréciable.
Le but de Mel Brooks, pour autant, n'est pas (que) de dynamiter le genre à coup de gags, de dérapages, de digressions, d'anachronismes, de parodie. Il a fait tout ça et plus encore, mais surtout il a osé faire de ce film loufoque situé dans l'ouest un plaidoyer anti-raciste où il tire à boulets rouges sur le racisme et l'intolérance fondatrice de l'esprit des pionniers... Comme le dit Gene Wilder à Cleavon Little dans une scène semi-improvisée, "ce sont juste de simple fermiers... Des gens de la terre... fait d'un roc commun dans l'ouest... Tu sais: des abrutis." Et le film sert admirablement cette thématique, sans jamais se tromper de cible, c'est formidable!
Bon, il propose aussi son lot de scènes dont l'humour est basé sur un excès d'un personnage, Hedley Lamarr étant particulièrement sujet à ce type de chose (il a un rire diabolique tellement mauvais que ce ne peut être pris au sérieux), des gags fondés sur la bêtise (Slim Pickens est particulièrement obtus), des parodies ciblées (Madeline Kahn en chanteuse Allemande qui chante faux et mal avec une voix atroce, comme Marlene Dietrich donc), des gags scatologiques (la très célèbre scène écrite par quelqu'un qui a bien vu que les cow-boys, dans l'ouest, mangeaient souvent des fayots en boîte, et donc...), la destruction du quatrième mur, comme le moment où Lamarr parle de sa future nomination aux Oscars, où bien sûr le moment où la bagarre précipite tous les protagonistes sur les plateaux voisins dans les studios Warner, et de petits anachronismes... Et comment oublier l'apparition de Count Basie et de son orchestre, au détour d'un chemin?
C'est donc un classique, généreusement transgressif et souvent jouissif, qui n'a finalement pas perdu de sa verve et de sa vigueur, à l'heure où les vannes de la liberté et de la décence risquent de se fermer aux Etats-Unis... Notons au passage que ce film au titre si absurde et profondément westernien, comme The Naked Spur, par exemple, a été sorti en France sous le titre glorieusement débile de Le shériff est en prison. Ne jamais sous-estimer les distributeurs français sur leur débilité.
Une actrice de New York, fatiguée de tout, décide de se lancer à l'aventure et elle se rend dans l'Ouest. Dans le train, elle rencontre une autre femme, qui est attendue dans une petite ville de la Frontière par des cow-boys payés par sa tante pour lui faire une petite farce de mauvais goût: ils vont la kidnapper, elle qui s'est plainte de la fadeur des aventuriers modernes...
Mais à l'arrivée, la nièce ayant été retenue en chemin, c'est l'actrice qui est kidnappée par un groupe d'hommes (Dont le plus grand n'est autre que Francis Ford soi-même), qui ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés...
Ce film complètement farfelu (et d'une manière très assumée) est incomplet: c'est une production de Gaston Méliès, le frère de Georges, qui avait eu pour mission dans un premier temps de elayer la production Parisienne de son frère par a la création de courts métrages locaux aux Etats-Unis. Mais Gaston Méliès, plus adaptable que son frère, a très vite pris son indépendance et a lancé une production systématique de westerns qui s'avéreront une grande influence sur la future Universal, et sur les films Ince.
C'est un petit bonheur, en particulier, de voir Edith Storey en actrice qui mène par le bout du nez les piètres acteurs (mais braves cow-boys) dont elle ne fait qu'une bouchée.
Une vallée en Arizona, à deux pas de Monument Valley, a inspiré des promoteurs qui y ont ouvert un lieu de colonisation... Mais les colons successifs vont se frotter aux habitants des lieux, des Apaches de plusieurs familles (antagonistes) qui ne sont pas disposés à les laisser s'installer.
Ici s'arrête la dimension "racontable" de ce film de trois heures... pour s'en tenir à son "premier chapitre", le seul sorti. La sortie du deuxième a été pour l'instant annulée...
On a beaucoup parlé de ce film forcément, d'abord parce que Kevin Costner, acteur plus que compétent et après tout fort estimable, n'avait pas sorti de film personnel depuis 20 ans, et surtout c'est le metteur en scène-auteur de Dances with wolves. Mais ce dernier, sorti en 1990 et accueilli en triomphe, avait beau être un long film, c'était surtout "UN" film. Ici, on nous en annonce trois autres...
Le projet est très ancien, Costner a toujours voulu mettre en chantier cette saga, et le développement en a été très long. Mais le plus fou, c'est qu'il ait été mené apparemment, du moins pour les deux premiers chapitres semble-t-il, au bout.
Mais le film aussi est long, ce qui n'est pas un problème en soi, je ne vais évidemment pas vous faire une liste des chefs d'oeuvre avérés qui dépassent les trois heures de visionnage. Seulement pour faire un film de 180 minutes, il faut intéresser le spectateur, un minimum d'attraction est nécessaire. Ici, on revendique de raconter une histoire, mais elle se noie dès les premières secondes dans la tentation de la contemplation fascinée de ces paysages westerniens fabuleux.
On en vient à ce paradoxe: un western long, magnifique à voir, mais étiré au-delà de toute possibilité pour le spectateur de comprendre ce qu'on lui raconte, ou de s'intéresser à ces redondances systématiques. En Anglais, on le traiterait d'indulgent, et on parlerait de "mess of a film". D'ailleurs, c'est ce qu'il en est dit.
Les vraies questions, dans ces conditions, seraient plutôt "va-t-on oser sortir la suite?"... et "qui, de toute façon, irait la voir?"...
1829: Le trappeur Flint Mitchell (Clark Gable) se lance dans une expédition en territoire Blackfoot; mais pour éviter l'hostilité des natifs, il s'arrange pour se marier avec la fille d'un dignitaire Nez Percé, Kamiah (Maria Elena Marques), qui a été adoptée par Bear Ghost (Jack Holt), chef d'une importante famille Blackfoot... Ce qui est un arrangement économique au départ va profondément changer le trappeur du Kentucky.
C'est une ode à l'Amérique des pionniers, aux vastes étendues sauvages à apprivoiser, à ces Américains que tout opposait mais qui réussissaient à s'allier pour vivre ensemble, côte à côte... C'est aussi une aventure particulièrement impressionnante en soi, un film qui a certainement été une expédition délirante à lui seul! Clark Gable en trappeur, ça interpelle, mais après tout, pas plus que de le voir en chasseur au fin fond de l'Afrique dans Mogambo... Et la galerie de personnages est passionnante, s'il n'y avait un problème: sautez le paragraphe suivant pour en savoir plus!
Adolhe Menjou joue un trappeur béarnais d'origine, qui sert d'interprète aux trappeurs qui doivent parlementer ou dialoguer avec les familles natives; il jouera un rôle crucial dans la communication entre Flint et son épouse, contribuant ainsi à humaniser le héros; John Hodiak est Brecan, un écossais qui a décidé de vivre parmi les Blackfeet du Dakota; Alan Napier interprète un autre Ecossais, le capitaine Lyon, venu d'Europe avec son kilt, et ses souvenirs de la bataille de Waterloo; à côté de ces personnages sympathiques, Ricardo Montalban incarne la menace: il joue Iron shirt, l'héritier Blackfoot qui ne veut pas laisser les trappeurs s'installer, et leur déclare ouvertement la guerre.
Une intrigue simple, mais qui permet une narration ensoleillée des mésaventures dans les grands espaces... La vision fascinante d'une période située bien avant les années rendues traditionnelles par les canons du western... On voit bien ce qui a fasciné Wellman dans ce film. Le problème c'est que le metteur en scène a réalisé une oeuvre jugée trop longue, et avait bien sûr pris son temps dans sa version. Les coupures étaient inévitables (avec l'aide d'une narration en voix off, du fils de Flint Mitchell, un procédé artificiel, mais qui fonctionne plutôt bien malgré tout), et la galerie de personnages en souffre à mon avis, certains devenant de brèves caricatures. Ils apparaissent ou disparaissent, déséquilibrant l'ensemble. Le film, qui représentait pour Wellman une aventure lyrique, est devenu le symbole même du compromis fâcheux... Dommage.
Reste que ce film est une superbe plongée aux origines du western, une histoire d'amour atypique dans laquelle deux forts caractères vont apprendre beaucoup l'un de l'autre, et une oeuvre qui fourmille de détails: à ne pas manquer, une scène de pourparlers qui aurait pu être totalement inspide, et devient hilarante quand on se rend compte que les personnages, tout en devisant sur leurs rapports d'amitié à venir, se refilent tous en douce une puce...
On pouvait toujours faire confiance à Thomas Ince pour s'attribuer le crédit d'un film... Ici, le héros est Francis Ford, et comme pour d'autres films réalisés à la compagnie Bison 101, c'est vraisemblablement lui qui est aux commandes de ce court étrage de deux bobines... Un film dramatique, qui fait un usage systématique des rouages et traditions du western mélodramatique tels qu'ils étaient désormais établis...
L'intrigue est simple: dans un avant-poste de l'Ouest, les Sioux préparent et effectuent une attaque spectaculaire, mais un télégraphiste de l'armée (Francis Ford) et sa petite amie, la fille du colonel (Ann Little) vont inverser le destin et sauver une partie du bataillon...
Il est important de mentionner le personnage de la jeune femme, qui subtilise un uniforme et prend un cheval, pour se rendre sur le lieu de la bataille et sauver son amoureux, cheveux au vent: d'une part le film ne le fait pas et crédite le succès de l'entreprise au seul héros, en contradiction avec ce que nous avons vu. Et d'autre part le metteur en scène a joué de l'esthétique de cette chevauchée désespérée d'une amazone inspirée!
L'esthtétique, d'ailleurs, est importante dans ce film, qui montre que si John Ford a toujours admis avoir pour sa part "un oeil pour la composition" (et un seul comme chacun sait), son grand frère n'était pas en reste, et ce film que je lui attribue sans vergogne fait un bel usage de la profondeur de champ, du début à la fin, certes souvent à des fins mélodramatiques (la jeune femme qui fuit une maison assiégée, visible dans un coin de l'écran, pendant qu'au fond une diligence arrive), mais souvent avec des résultats stimulants: la tribu au premier plan qui aperçoit en haut d'une colline au fond du champ un guetteur qui leur fait des signaux, par exemple: c'est toujours très soigné dans un film qui nous rappelle l'importance d'un grand cinéaste oublié.
John Bunny est un cowboy, dont la rotondité a eu pour conséquence qu'il est devenu la cible de blagues facile sur le ranch où il travaille. Il décide de rendre aux rieurs la monnaie de leur pièce... Il s'envoie un faux télégramme qui annonce l'arrivée de sa soeur jumelle, Kitty, et une fausse lettre qui lui demande de se rendre au tribunal pour une affaire, pile au moment où sa "soeur" doit arriver... Au moment venu, "Kitty" est fêtée et devient, à l'unanimité, la cuisinière du ranch. Les cowboys commencent à multiplier leurs propositions de mariage...
Pour ce dernier point, un élément est à ajouter: l'un des cowboys est complice et il suggère aux autres d'effectuer leurs demandes pour le geste seulement, car "Kitty" n'est sans doute pas une représentante des canons de la beauté de cette rude époque de pionniers...
Bon, je le dis ici sans détour: je n'aime pas John Bunny. Je sais qu'il était une superstar de la comédie à cette époque, mais il est vraiment d'un, voire de deux, autre(s) siècle(s)... Ses rondeurs ne sont pas en cause bien entendu, mais le problème c'est qu'à une époque où on disait à un acteur "tu es rondouillard, tu dois faire de la comédie", il restait possible à l'acteur en question de développer son art au-delà de cette simple condition physique. A part des grimaces, je ne vois pas ce que Bunny apporte à son activité... Si on voulait être méchant, on pourrait le comparer à Oliver Hardy. Mais on ne le fera pas, Hardy était un génie, Bunny était probablement oublié dix ans après ce film.
Voici le deuxième film de l'acteur Viggo Mortensen, et il a fait les choses en grand, comme on dit: acteur-réalisateur, mais également auteur du script, producteur et compositeur tant qu'à faire. La mainmise de l'auteur est telle sur le film, qu'on n'aura aucun doute sur le fait d'attribuer telle ou telle qualité... Il a choisi le western, et on ne peut que l'en féliciter: c'est un costume qui lui va bien, et qui pour le sujet du film, sied particulièrement bien...
L"histoire est contée d'une façon qui ne respecte en rien la chronologie, et deux trames liées mais situées dans deux temporalités différentes vont se jouer sous nos yeux. Ca a pour effet de commencer par la mort d'un personnage, ce qui détermine tellement de choses dans le film, et dans l'atmosphère de tristesse qui s'en dégage, que je ne peux m'empêcher de le reprocher au film: avait-on besoin de cette complication?
En même temps, je ne suis pas sûr qu'on puisse faire autrement, car l'histoire, située autour de plusieurs personnages, et en particulier de Holger Olsen (Mortensen), immigrant Danois de fraîche date installé en Californie, et de Vivienne Le Coudy (Vicky Krieps), québecoise installée à San Francisco, aurait du mal à trouver sa cohérence si on la racontait différemment. Et le fait de commencer par la fin va installer le déroulement dans le point de vue du personnage qui reste... Donc oui, il y a une bonne raison.
Holger Olsen n'est pas un livre ouvert, ce n'est pas un homme au passé trouble, ou avec un fort bagage culturel. Il lit, il écrit même semble-t-il, mais cela ne semble pas avoir tant d'importance que ça. Si on apprend qu'il a demandé et obtenu un poste de shériff dans la petite localité où il habite avec sa famille (Vivienne, et son fils Vincent), au départ, c'est juste un homesteader, un fermier de la Frontière, avec son passé d'immigrant qu'il garde sagement derrière lui...
Au contraire, on apprendra beaucoup de choses sur l'enfance de Vivienne, la mort de son père au Canada par exemple, tué par les Anglais; la façon dont sa mère l'a élevée à l'écart, dans le culte de Jeanne d'Arc; son imagination, qui la voit souvent converser avec un chevalier moyen-âgeux imaginaire qui la protège... L'importance du personnage ne fait aucun doute: Vivienne n'est pas une potiche, et elle va l'affirmer.
Le film aussi...
Le début du film commence non seulement par la mort d'un personnage, il y aura un déchaînement de violence également. Ce qui est la conclusion logique d'un arc narratif particulièrement important, mais là encore cette conclusion commence le film, comme pour en affirmer une bonne fois pour toutes son caractère inévitable... Un coix que là encore je n'approuve pas forcément totalement, mais qui sous-tend le reste du film, qui se déroule ensuite comme un puzzle...
L'affirmation du personnage de Vivienne, bien sûr, EST le sujet du film. Telle qu'elle est, telle qu'elle vit, les choix qu'elle fait, les choix qu'elle a fait. Vicky Krieps compose un personnage de femme rigoureusement indépendante, qui fait et assume ses choix (elle fait généralement les bons) du début à la fin, et se situe en porte-à-faux avec l'image communément associée (et assumée) de la femme de la Frontière... Elle prend des décisions, les soumet voire les impose quand elle sait que c'est préférable et nécessaire, elle est indépendante dans l'âme et désireuse de l'assumer... Son parcours va pourtant passer par des épreuves, et non des moindres... Certains hommes sont prêts à l'accueillir telle qu'elle est. D'autres... vraiment pas; C'est le cas du troisième personnage en ordre d'importance: Weston Jeffries (Solly McLeod) est le bad boy du conté, un fils à papa qui prend son statut pour une autorisation à faire ce que bon lui semble, comme un massacre par exemple... L'intérêt qu'il porte à Vivienne sera d'une importance capitale dans le film, mais aussi dans la vie de ses personnages; il y aura des drames, des conséquences; et il y aura aussi une rétribution.
Les hommes dans le film, finalement, sont vus presque avec un détachement assez narquois: ils se croient supérieurs, toujours. Ils sont soumis à une hiérarchie permanente entre eux, chacun asseyant son importance en fonction de sa position: Holger Olsen est le shériff, et il peut donner des ordres (tout en douceur) à son adjoint Billy. Mais il répond au maire (Danny Huston), qui le paie, et surveille qu'il ne se mêle pas de ses petites combines... Les combines en question, le maire les concocte avec Alfred Jeffries, l'homme le plus riche du conté: c'est Garret Dillahunt, et on ne pouvait rêver de meilleur acteur pour un tel rôle... Le père de Weston, il est le seul qui semble avoir une mainmise sur son fils... Qui en retour aimerait bien le tuer aussi! Les hommes trafficotent, donc, et le maire et Jeffries envisagent d'établir un établissement de prostitution, comme ça, en douce...
Les hommes font la guerre aussi, c'est ce que Olsen va faire: il pense le devoir à son état, et à son pays d'accueil. Incidemment, si lui va choisir l'Union dans la guerre civile qui commence en 1861, et s'engager, Weston Jeffries va lui choisir la confédération, mais rester là où il est, et continuer à semer la terreur partout où il va. Pour Vivienne, en tout cas, cette guerre et un imposture: elle ne doit rien à ce pays, après tout...
Enfin, le hommes se battent, tuent, et violent. Le film n'en finit pas de replacer les images d'Epinal du far west, dans leur contexte, dans leur vérité, et dans leur âpre réalisme...
C'est un superbe film de bout en bout, le travail sur l'image a été particulièrement étudié: d'une part, les choix de paysages qui sont si photogéniques... Je sais, c'est un cliché du western, mais Mortensen a compris qu'un beau paysage ne faisait pas tout: avec le chef opérateur, Marcel Zyskind, il tente par tous les moyens d'intégrer ces paysages dans ses compositions... D'autre part les images ont une qualité picturale d'autant plus palpable, que le metteur en scène choisit d'une part de garder sa caméra aussi souvent immobile que possible, et laisse du temps aux images de faire leur effet. Le lyrisme en devient immédiat... Mortensen a bien retenu la leçon: le souffle du western n'a que faire d'un montage ultra-rapide, et d'un rythme trop effréné...
Ce n'est en rien un défaut, ni un reproche, mais en ces si prudentes années 2020, alors que chaque film qui sort est obligé de se voir décerner des certificats d'authenticité dont on n'a finalement que faire, il y a un anachronisme flagrant: les Colt. le fameux pistolet qui peut tirer six fois sans être rechargé n'a été inventé qu'en 1871, et les personnages (en particulier Weston Jeffries, bien sûr) en portent allègrement un, et l'utilisent... Mais si on ajoute que d'une part tout western "classique", situé à quelque époque que ce soit, a déjà transgressé ce même détail historique (comme le fait remarquer Lucky Luke à la fin d'unlbum de Morris et Goscinny, "il faudrait peu-être que je recharge mon six-coups quelquefois"), d'autre part à l'époque d ela Frontière l'arme de choix était plutôt la carabine, plus pratique... Et pas forcément la Winchester, n'est-ce-pas: ce type de fusil était très cher.
Mais cessons là ces digressions... C'est donc un western, un beau, qui en aucun cas ne pratique le révisionnisme, je sais qu'on aime bien utiliser ce terme dès qu'un film situé dans l'Ouest du XIXe siècle sort des clichés, mais c'est un bien vilain mot. Et The dead don't hurt, l'histoire d'un passage d'une personne lumineuse dans la vie de quelques autres êtres humains, est un grand western, humaniste certes, et qui revendique son féminisme. Laissons les fâcheux nous dire que c'est mal, et laissons-les à leur médiocrité.
Le film commence par la vision d'une petite ville de l'ouest, dans laquelle on annonce l'arrivée d'une jeune femme, la première depuis tant d'années... On est presque en territoire de comédie, au départ, avec ces cow-boys qui s'apprêtent à recevoir une dame et sont tout sauf sophistiqués...
Puis le film glisse vers le mélodrame, avec un quiproquo: la jeune femme reçoit des nouvelles et une photo de son père, ce qui fait croire à un prétendant qu'il sagit d'un fiancé resté à l'est..
Le court métrage va vite en besogne, et oscille entre ces deux atmosphères de façon assez plaisante. Il est un peu inspiré (on ne va pas dire qu'il s'agit d'un pillage, contentons-nous de le penser) de The girl of the golden west, une pièce de David Belasco de 1904, qui sera adaptée au cinéma par Cecil B. DeMille pour Paramount...
On a oublié que Méliès a aussi favorisé à sa façon le cinéma Américain, en envoyant son frère Gaston présider aux destinées de la branche Américaine de sa société, la Star-films... Mais à la fin de cette première décennie du XXe siècle, le magicien de Montreuil est quasiment en retraite. Ses méthodes d'un autre temps, son incapacité légendaire à évoluer, l'ont privé de son indépendance.
Mais la filiale Américaine s'en sortait encore, après tout, et on voit bien avec ce petit film que l'attrait du western (un genre auquel Gaston Mélès s'intéressera beaucoup) a du jouer énormément pour la compagnie, qui est probablement un vivier de futures vedettes de nombreuses compagnies qui compteront: la Kay-Bee, les films Ince, et la Universal. Francis Ford, acteur et réalisateur (le grand frère de John), a travaillé pour toutes ces compagnies.
Dans ce court métrage, il est un cow-boy qui aspire à une vie paisible. Il vit aux côtés d'une mystérieuse inconnue, alors quand il envoie une lettre à la femme qu'il aime (Edith Storey), lui demandant sa main, elle refuse... Quelques temps plus tard cette même femme, farouche et indépendante, aperçoit sa mystérieuse rivale coincée dans les herbes sèches, en proie à un incendie. Dilemme: la sauver, ou... ?
C'est sec comme un coup de trique, ça ne s'embarrasse ni de chichis ni de se livrer à une exposition... L'ensemble du cinéma Américain reposait sur les films d'une bobine, mais cette clarté narrative allait avoir des répercussions sur le style de tout le cinéma Américain pour les années à venir...
Felice (Lillian St Cyr) et Young Deer s'aiment, malgré la désapprobation du père de la jeune femme; un hors-la-loi kidnappe Felice, et le jeune homme se lance à sa recherche. Felice parvient à envoyer un message avec une flèche...
Ce film Lubin fait partie d'une série populaire de courts métrages réalisés autour des réserves du Sud, par des équipes menées par des Natifs: James Young Deer (qui travaillera de manière soutenue sur les années 10) est un acteur, scénariste et metteur en scène de ces petits films, qui offrent aujourd'hui une vision toujours fantasmée (le vernis du western, et les clichés mélodramatiques), mais sans doute plus respectueuse de ces peuples que, au hasard, The battle at Elderbush Gulch, de Griffith, et sa vision des peuples des plaines, sanguinaires et alcooliques...