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30 juin 2014 1 30 /06 /juin /2014 15:49

Le milieu dans lequel commence le film, c'est un petit matin de travail comme les autres au près des halles de Rungis: André Chatelin (Jean Gabin) y tient un établissement fort couru; il vient de se voir honoré d'une publicité inattendue: un article élogieux dans le journal récompense le traiteur! Le restaurant se met en route, et une jeune femme venue de nulle part semble hésiter à entrer: c'est Danièle Delorme. Elle finit par sauter le pas, et parle au restaurateur: elle est la fille de son ex-femme, Gabrielle. Celle-ci est décédée récemment, ce qui ne semble pas émouvoir le patron qui en a fait son deuil depuis fort longtemps. André accueille la jeune femme chez lui afin de lui permettre de rebondir, la présente partout puis finit par lui proposer de travailler au restaurant. Et surtout il la présente à Gérard (Gérard Blain), un jeune étudiant en médecine qui est un peu le fils qu'André n'a pas eu. Lorsqu'il finit par se décider à la demander en mariage, c'est trop tard: nous savons, nous, que Gabrielle est encore en vie, et que Catherine, la jeune femme, est en mission: le but de la manoeuvre est de saigner Chatelin à blanc, de le faire cracher... Il faut dire que Gabrielle est morphinomane, et que son métier (du moins ce qu'on en devine) doit certes se faire couchée, mais en relativement bon état... A Catherine donc de mettre le grappin sur André, d'éloigner Gérard, ainsi que la fort acariâtre maman Chatelin, qui a détesté cordialement la mère et n'est pas prête à avaler la fille...

C'est on ne peut plus noir: Voici le temps des assassins est sans doute le film le plus sombre de Duvivier, en même temps que l'une de ses réussites les plus convaincantes, toutes tendances confondues. Il obtient de ses acteurs une interprétation totalement aboutie, et Gabin, s'il est déjà un patriarche (Le film lui permet un grand nombre d'allusions à son âge), n'est pas encore bloqué en pilotage automatique: il met encore du coeur à l'ouvrage. Et Danièle Delorme en garce "à la Duvivier" (Qu'on se rappelle Viviane Romance dans La belle équipe, on sait que c'est un peu la spécialité du metteur en scène!) est absolument époustouflante. L'humour est aussi au rendez-vous,un humour d'observation essentiellement, mais souvent noir: on notera ainsi que si André est et reste un brave homme, il aurait pu mal tourner: sa mère est une abominable tenancière de guinguette qui tue ses poulets à coups de fouet! Et il y a en particulier une scène d'anthologie, durant laquelle Catherine doit se débarrasser d'un corps, un homme mort au volant d'une voiture. Nous savons exactement quel est son plan, nous le désapprouvons évidemment, mais elle le pousse avec difficulté dans un plan d'eau, et la scène anticipe en matière de suspense pervers, mettant le spectateur du mauvais côté de la morale, sur rien moins que Psycho, d'Hitchcock. Pourtant, on est loin de Norman Bates avec cette Catherine chez laquelle tout est calculé, froidement. Elle n'a rien d'une psychopathe... Bref, un chef d'oeuvre malsain, et exemplaire d'une certaine idée du film noir à la française.

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Published by François Massarelli - dans Noir Julien Duvivier