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26 avril 2017 3 26 /04 /avril /2017 15:29

Dans la carrière inégale de Boorman, ce thriller au vitriol occupe selon moi une place de choix: c'est l'un de ses meilleurs films... bref, ce n'est pas Zardoz ou Exorcist II: The heretic! Il met en scène Pierce Brosnan dans un rôle qui permet sans doute à l'acteur de régler ses comptes avec l'un des rôles les plus connus qu'il a interprétés dans sa vie (Je pense qu'il est inutile de préciser lequel) et autour d'une intrigue d'espionnage un peu tordue, s'amuse à faire de la politique-fiction qui se termine de façon spectaculaire. C'est une farce noire et souvent comique... mais qui passe aussi par une certaine dose de tragique. 

Grillé en Europe, l'agent secret du MI6 (Les services secrets Britanniques) Andy Osnard (Pierce Brosnan) est nommé sur un poste qui a tout de a punition: il va devoir en effet être la liaison du MI6 à Panama, et ça ne le ravit pas du tout... Une fois arrivé, il doit en particulier trouver un Britannique qui vit sur place, afin d'en faire une source d'information; son choix s'arrête sur Harry Pendel (Geoffrey Rush), un tailleur installé depuis quelques temps, et qui a pignon sur rue: il habille tout le monde, de la majorité présidentielle à l'opposition, en passant par des banquiers, des Américains aussi... Il a une enseigne prestigieuse, Pendel & Braithwaite, supposés avoir commencé à Savile Row à Londres... Mais c'est faux: Pendel est un ancien taulard, qui a payé pour son vieil oncle en allant en prison à sa place, et que ce dernier a ensuite mis "au chaud" en l'exilant à Panama. Il a appris son métier en prison, mais il le fait plutôt bien; Andy Osnard sait tout cela, et pour exploiter les secrets éventuels que pourrait avoir glané Pendel dans l'exercice de son métier, il le fait plus ou moins chanter. Mais Pendel, qui a menti toute sa vie (Son épouse Louisa, interprétée par Jamie Lee Curtis, n' pas la moindre idée de son passé), va mentir à nouveau pour se sortir de cette impasse, et inventer pour satisfaire l'agent des bobards tous plus grands les uns que les autres...

L'intrigue est inspirée d'un roman de John Le Carré, qui a situé son intrigue dans Panama, à cause de son passé tortueux... Et on le voit, entre une classe politique qui fait plus ou moins semblant d'être une démocratie exemplaire bien qu'elle soit bâtie sur les ruines à la fois de la folie criminelle de Noriega, et de la destruction du pays par les Américains qui a suivi sa destitution, une opposition de coeur qui est muselée de fait , mais qu'on croit capable de toutes les folies, les Américains dont la droite ne rêve que de revenir pour s'installer durablement, et les observateurs de tout poil, qui n'attendent qu'un signal quel qu'il soit pour tenter de s'intaller durablement parmi les gens qui comptent à Panama, il y a du sport; une double référence à Casablanca achève de nous montrer les lieux comme un panier de crabes: quand il arrive, Osnard, dédaigneux, compare en effet Panama à la ville du film mythique de Curtiz... et à la fin, s'adressant à l'ambassadeur Britannique, il cite la fameuse phrase finale du film!

Osnard est un sale type, c'est évident dès la première scène: l'éloigner en l'envoyant à Panama, en fait, sonne plus comme une mise à l'écart qu'une promotion, et le bonhomme a tous les défauts du monde: raciste, sans gène, vulgaire, opportuniste, hypocrite, et en prime il se prend pour un séducteur irrésistible. Il essaiera d'ailleurs à plusieurs reprises de séduire (d'une façon odieuse, bien sur) Louisa Pendel... Mais sans succès. car la seule chose qui semble fonctionner dans le film, c'est le fait que les Pendel vont raffermir leur couple, qui n'a jamais connu d'accroc. Louisa s'est faite à la réserve de son mari, et sa part de mystère. Mais elle est prête, lorsqu'il s'absente un peu trop souvent, à s'imaginer qu'il a une aventure! ...la vérité, c'est que Pendel est un homme qui ne sait pas vraiment dire non. Il tient à l'illusion qu'il a savamment construite sur tant d'années, et il a vu ceux qui se sont levés contre les injustices se faire arrêter, torturer ou pire. Il a gardé de cette époque deux solides amitiés: Michelangelo Abraxas (Brendan Gleeson), un ancien opposant à Noriega qui est devenu alcoolique d'une part, et Marta (Leonor Valera), une jeune opposante qui a subi la destruction de son visage et de sa beauté en représailles de ses activités politiques. Elle travaille désormais à ses côtés à la boutique. Ce sont ces deux personnages, qui, à la suite des mensonges improvisés de Pendel, vont souffrir vraiment.

Pour le reste, le film est un conflit entre trois personnages, l'odieux Andy Osnard et ses manières de viking priapique, Harry Pendel le tailleur qui veut rester à l'écart des ennuis autant qu'il veut épargner la vérité à sa petite famille, et Louisa qui va profiter de l'aventure pour en savoir un peu plus sur son mari, et réaffirmer son amour pour lui... quant aux Britanniques et aux Américains, ils vont se distinguer par une réaction aux bobards de Pendel, qui va dépasser toute dimension raisonnable. 

Moral? Non... Le film est pourtant satirique et très drôle, en même temps que tragique et propre à susciter l'indignation. et c'est le portrait d'un type formidable, auquel on s'attache malgré soi, le petit tailleur Harry Pendel, pour moi le plus beau rôle de Geoffrey Rush! Quant à Jamie Lee Curtis et Pierce Brosnan, ils sont explosifs. Et Brosnan avait vraiment une envie impérieuse d'interpréter un agent secret totalement détestable, on le sent bien.

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Published by François Massarelli - dans Comédie