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27 janvier 2024 6 27 /01 /janvier /2024 21:14

Marc Becker (Pierre Niney), réalisateur reconnu, est en plein drame: il est sur le point de finir un film (Chacun tout le monde) et la production mécontente essaie de lui en enlever la paternité. Il s'enfuit avec la copie de travail et l'équipe de montage dans les Cévennes, précisément chez sa tante (Françoise lebrun), chez laquelle il a toujours pu se ressourcer. Elle est malade, mais lui ne va guère mieux: neuro-atypique au dernier degré, il est sous médicaments depuis longtemps et a choisi ce moment précis pour se débarrasser de son traitement. Hyper-actif, cyclothimique et paranoïaque (et un poil hypochondriaque tant qu'à faire) il impose un enfer à Charlotte, sa monteuse (Blanche Gardin), et Sylvia sa productrice (Frankie Wallach)... Passant du coq à l'âne, agressant tout le monde en permanence, jonglant d'idée farfelues en initiative flippantes, de traits de génie en coup bas, finira-t-il son chef d'oeuvre?

Le "livre des solutions", c'est le journal étrange que tient Marc Becker, dans lequel il consigne ses idées, ses dérapages (changer de film en cours de route, inverser le cours du montage, devenir maire, acheter une bicoque pour loger sa monteuse...), et parfois des réflexes philosophiques qui vont parfois (très paradoxalement) le faire avancer.

C'est un film à clés... Je mets un S, mais on pourrait sans doute se contenter d'un singulier, car la clé c'est Gondry lui-même, et une carrière brillante et hyper-active, menée par un homme malade de l'intérieur, différent jusqu'à l'extrême, et qui en réalisant L'écume des jours, a vécu et fait vivre à tout le monde un enfer qui ressemble bien à ce qui est montré ici. Des images qui accompagnaient la sortie du film en témoignent et elles font froid dans le dos. La maniaquerie déployée de façon impressionnante par Niney dans le film en semble un reflet presque atténué... Le choix de Gondry a été d'assumer le résultat en n'en faisant pas autant qu'on l'aurait cru une comédie, justement, et le film est parfois douloureux, comme peut l'être la vie avec une personne neuroligiquement différente, assurément.

Et puis en creux, le film se fait le témoin de la tendresse de Gondry pour sa tante, celle qui l'a élevé, du moins d eson point de vue. Celle chez laquelle il a vécu les plus beaux moments de sa vie, aimé, entouré de tendresse et surtout de patience, parce que manifestement, il en faut...

Le film est un peu moins bricolo que les autres oeuvres de Gondry, d'ailleurs, non que Gondry se soit assagi: il digresse par l'animation, et met en scène des idées qui ont l'air farfelues (le metteur en scène qui s'impovise chef d'orchestre et se fait applaudir de ses musiciens, le jet de spaghetti, l'horreur d'une initiative érotique qui fait froid dans le dos) avant qu'on se rende compte que selon toute vraisemblance elles sont inspirées par du vécu... Et comme pour preuve, d'ailleurs, on notera la présence d'une affiche de Stéphane Miroux (le héros de La science des rêves), le titre du film fictif (Chacun tout le monde) qui est aussi celui du premier album du groupe Oui-oui dont Gondry était le batteur, et sinon, cerise surle gâteau, Marc Becker demande à Sting d'enregistrer la musique de son film à la basse et à la voix. Contre l'attente de tous, il accepte. Pour L'écume des jours, Gondry avait effectivement fait appel à un bassiste-chanteur célèbre pour enregistrer des effets spéciaux de bruits. Mais ce n'était pas Sting... C'était Paul. Un génie.

Génie? Je pense que Gondry, à sa façon rigoureusement unique, en a toujeurs été un... C'est un film parfois douloureux, mais qui a le bon goût de réussir, au terme de montagnes russes d'émotions, à nous montrer qu'on peut parfois aussi se poser, et réussir à trouver le bonheur, y compris dans ce métier de dingos qu'est le cinéma. Mais bon... Si tous ces gens n'étaient pas dingos, il n'en feraient pas, du cinéma.

 

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Published by François Massarelli - dans Michel Gondry