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23 février 2019 6 23 /02 /février /2019 11:05

Une fois indépendant, Griffith a commencé à réaliser systématiquement des longs métrages, de 6 bobines pour commencer, qui se sont succédé jusqu'à l'été. Le dernier d'entre eux, après les expériences de Home sweet home (film à sketches) et Battle of the sexes (adaptation de pièce de théâtre) est aussi un film bien curieux. Inspiré de Edgar Poe, un auteur éminemment Américain auquel le metteur en scène vouera longtemps un culte, le film se situe pourtant dans l'Amérique contemporaine, et plutôt que d'adapter un récit ou un poème précis, Griffith a amalgamé un certain nombre d'événements tirés de divers contes, nouvelles et poèmes. L'histoire est celle d'un enfant gâté par son tuteur et qui, devenu adulte, ne supporte pas que celui-ci lui refuse d'épouser celle qu'il aime. Pris de dépit, il l'assassine et emmure soigneusement le cadavre, et devra ensuite être tourmenté par sa conscience, par un détective un peu trop malin, et par un maître-chanteur Italien.

Les acteurs sont tous tirés de la troupe de Griffith, et à l'exception de Blanche sweet (Qui n' a pas grand-chose à faire ici, hélas) se retrouveront dans le film suivant: Walthall est le héros, assez convaincant. Spottiswoode Aitken joue l'oncle, affublé d'un bandeau sur l'oeil. Ralph Lewis est le détective, et George Siegmann l'Italien (forcément louche, un navrant signe des temps). Quant à Mae Marsh et Bobby Harron, Griffith les a placés pour un intermède comique qui ne s'intègre pas très bien à l'ensemble. Le résultat est, disons, bizarre, mais pas sans qualités: l'idée d'intégrer des éléments d'horreur dans un drame bourgeois donne lieu à une série de surimpressions, trois ans avant The whispering Chorus de DeMille, qui sont moins virtuoses, mais bien dosées: Bitzer a bien relevé le défi ici. Griffith utilise à merveille le montage, c'est bien connu, et on n'est pas déçu: les scènes spectaculaires intègrent de façon dynamique des gros plans qui relaient efficacement le suspense: outre un gros plan des yeux de Walthall torturé par la culpabilité (Il voit partout le fantôme de son vieil oncle), il y a aussi utilisation de plans des pieds d'un personnage pour souligner la nervosité, etc... Griffith fait même jouer pour un plan les mains de Lewis et Walthall, avec un effet de précision. C'est, bien sur, dans les deux dernières bobines que le feu Griffithien se déchaîne: montage parallèle, élargissement du cadre, accélération de l'action, meurtre, morts violentes, suicide... (Pas de train, par contre!) Honnêtement, l'attente est un peu longue, mais elle en vaut la peine...

Certes, Griffith se cherche encore en 1914, mais le film, s'il est souvent gauche, est une bonne surprise: on n'attendait pas vraiment Griffith sur le terrain du fantastique, et il ne s'en tire pas si mal. Et puis, avant de devoir se replonger dans le tumulte et la salissure du film suivant, The Birth of a Nation, ce petit conte est assez ravigorant.

 

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Published by François Massarelli - dans 1914 David Wark Griffith Muet *