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25 juin 2019 2 25 /06 /juin /2019 16:36

Si je voulais, je pourrais être lapidaire, et me contenter par exemple de dire: "Dire que ce film est contemporain des chefs d'oeuvre de David Lean!", et je pense sincèrement que ça suffirait. Mais la brièveté n'étant pas vraiment ma vocation, je vais y consacrer un peu de temps.

D'ailleurs, on doit bien ça à Gance: lui qui a raté tant de films (en gros tous ceux ou presque qu'il a réalisés après Napoléon, pour faire simple), a au moins le mérite d'avoir aussi commis d'incroyables films, indépassables et sublimes. Certes, ce n'est pas le cas de celui-ci...

Le problème, c'est que le réalisateur, qui n'avait pas tourné de nouveau film depuis l'infect La tour de Nesles, n'était il est vrai plus vraiment dans le coup, se contentant de chercher des nouveaux moyens d'exploitation cinématographique, en recyclant ses classiques (Napoléon et le J'accuse de 1938, principalement) au travers d'essais cinématographiques de polyvision. La commande cette fois, d'un long métrage, venait d'Alexander Salkind. Elle permettait à Gance de retourner à un personnage qui lui était cher, auquel il avait bien sûr consacré un fameux film, mais aussi un script tourné par Lupu Pick, Napoléon à Ste Hélène (1929); Austerlitz pouvait donc lui permettre de revenir dans la course en continuant à apporter des pièces au puzzle de sa grande biographie d'un des personnages historiques les plus notables... Ou de commettre un nouvel échec.

Ce sera la deuxième solution, d'une part parce que le scénario sacrifie à l'ignoble manie de Gance de se reposer sur un dialogue envahissant, dit de façon péremptoire par des acteurs qui interprètent soit des génies illuminés et touchés par la grâce, soit des imbéciles qui vont se faire balayer... Ensuite parce que si le metteur en scène est toujours habité par le génie, il ne le montre pas, mais alors pas du tout: pas plus en fait que dans La tour de Nesles, les plantureuses créatures dévêtues en moins. Même si on le soupçonne fort d'avoir cherché à titiller le spectateur avec les décolletés 1800 très loquaces de Martine Carol (Josephine!), Leslie Caron ou Claudia Cardinale... Enfin, le film n'a pu être achevé, c'est une manie, et au lieu de déclarer forfait, Gance a triché avec le montage, et toutes les scènes "à faire" se sont transformées en des compte-rendus verbaux! Sans parler d'une bataille qui donne son nom au film, qui dure bien cinquante minutes, mais qui ressemble à un brouillon monté par un technicien incompétent et aviné, sans aucun chance pour le spectateur, ni de s'intéresser à ce qui se passe, ni d'y comprendre quoi que ce soit. 

Reste Pierre Mondy: il y a eu des ricanements, et pourtant il est peut-être la meilleure idée du film! Il réussit à donner un portrait juste de Napoléon, génie militaire peu à l'aise dans le costume de politicien, mais habitué quoi qu'il arrive à aboyer des ordres à tout ce qui bouge, du haut de son mètre cinquante. C'est irritant, mais que voulez-vous, le fossoyeur de la révolution française, ce tout petit Poléon, était lui-même un personnage irritant...

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Published by François Massarelli - dans Abel Gance