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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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18 août 2023 5 18 /08 /août /2023 21:54

1979, dans le Sud. Une équipe de cinéma très fauchée arrive sur une petite ferme pour y tourner un film pornographique; le couple qui leur loue les lieux est assez glauque... surtout Pearl, la dame (Mia Goth), qui invite Maxine (Mia Goth), l'une des stars, à boire une citronnade mais n'a rien à lui dire, si ce n'est d'exprimer une certaine jalousie, et d'esquisser un geste de désir. Mais Howard (Stephen Ure) est lui aussi réticent à recevoir les nouveaux venus.

L'après-midi, Pearl espionne les scènes tournées par l'équipe, et retourne chez elle où elle prie son mari de la prendre dans ses bras... Pendant ce temps l'équipe a des soucis: le caméraman/directeur de la photo/réalisateur (Owen Campbell) est venu pour "faire de l'art" en compagnie de sa petite amie preneuse de son, Loraine (Jenna Ortega)... Mais celle-ci est rejetée par l'équipe, avant d'exprimer le désir de tourner une scène. RJ, le caméraman, s'exécute puis part, furieux...

Il est tué... Puis d'autres meurtres auront lieu sur la ferme de Pearl, la vielle dame si désireuse de ressentir les frissons de sa jeunesse, et de son mari si prévenant envers elle, mais si terriblement traditionnaliste, qui ne voit pas d'un très bon oeil, ces citadins envahir sa ferme, ni sa femme lui faire des avances sexuelles, à leur âge.

C'est un cas d'espèce: un film qui aurait tout d'une parodie, et qui exploiterait en prime à la fois les bas-instincts sadiques des amateurs de film d'horreur (versant slasher film des années 70) et ceux des voyeurs amateurs de films pornos (versant micro-budget, tourné en 5 minutes dans une grange)... Mais en lieu et place, une sorte de contrat étonnant s'établit entre le film et les spectateurs, d'abord par le choix de commencer par le lendemain des meurtres: dès le départ, on sait à peu près où ça va...

C'est bien un film de terreur, lent et méthodique, mais pas sans humour, ni rigueur, en témoigne une étonnante scène troublante et géométrique: Maxine, star en devenir du moins l'escompte-t-elle, attend son tour pendant que sa copine tourne une scène avec la star masculine. Elle se rend près d'un étang, où elle décide de se baigner. La caméra s'éloigne, mais on verra qu'elle n'est pas passée inaperçue: non seulement la silhouette de Pearl est là qui l'espionne, mais un très gros caïman l'observe et alors qu'elle flotte au milieu de la mare, il commence à se diriger vers elle... C'est l'une des premières scènes de suspense, elle est d'une lenteur exemplaire.

Toutes les autres sont motivées par la frustration, la solitude affective de Pearl. Quelle qu'en soit la raison, et on imagine que le film suivant de la trilogie (Pearl) nous l'expliquera, elle ne peut voir arriver ces jeunes gens tous actifs sexuellement mais motivés par d'autres raisons que l'amour, sans en ressentir désir, frustration, et même une profonde jalousie.

L'idée d'avoir confié à la même actrice le rôle d'une actrice pornographique, et celui d'une vieille dame homicide met curieusement en avant la notion d'âge comme étant un vecteur de fierté et de bien-être dans l'exercice de la sexualité. C'est la raison qui poussse Pearl à désirer Maxine, un désir qui culmine dans une scène de rapprochement corporel inattendu... Une façon de mettre en avant une situation qui dépasse le simple cadre de la terreur gratuite pour offrir une vision cauchemardesque du fait de vieillir...

C'est aussi un portrait de l'Amérique, à travers son âme damnée, le Sud, qui décidément ne tourne pas rond, faisant cohabiter dans la même décennie les pires turpitudes sur les écrans, et dans les fermes au bord des bayous, les passions bizarres et arriérées des gens. Mes mots sont durs? Pensez attaque du Capitole, et vous verrez que finalement, je n'exagère pas. En contrepoint de ces meurtres et de ces scènes de tournage (pas trop précises, ni explicites), le cinéaste montre souvent une télévision qui diffuse les élucubrations d'un télévangéliste, qui prèche agressivement une bonne parole dangereuse... Amusant, d'ailleurs, de constater que la scène la plus agressive sexuellement parlant, et sans doute la plus explicite, est une scène de sexe entre les deux vieillards, "vécue" par Maxine qui s'est cachée sous leur lit...

Car il fallait quand même un certain humour pour confronter une équipe de tournage porno, avec un couple de cinglés frustrés du Sud. Le film, plutput rigoureux et réussi, inaugure donc une trilogie qui explorera cette veine criminelle, si prégnante dans le cinéma des années 70, tout en rendant pas si discrètement hommage à quelques classiques, de façon furtive. On pense à Carpenter, voire Kubrick et Hitchcock...

Mais eux n'avaient pas forcément besoin de tourner deux autres films après The Shining et Psycho. La trilogue se justife-t-elle? Réponse plus tard...

 

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Published by François Massarelli - dans Ti West Boo!