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30 janvier 2012 1 30 /01 /janvier /2012 07:57

Domestique, ce petit film (Six bobines, soit 60 minutes, pas une de plus) renvoie clairement au style et aux préoccupations des courts et moyens métrages réalisés chez Roach avant 1922 et Grandma's boy. Il y est question de la vie quotidienne dans le sud de la Californie pour un couple de jeunes mariés, à travers quatre épisodes reliés entre eux de façon crédible, autour d'une journée, si on excepte le prologue. Hot water: le titre fleure on la vie quotidienne, mais il est en fait synonyme de problème... On notera qu'il y est question de la vie de mariage comme d'une jungle, mais que comme Lloyd est un artiste plutôt subtil, et qui fuit le vulgaire autant que possible, il ne s'attaque pas à l'épouse. C'est donc la belle famille qui en prend pour son grade...

 

Le film est structuré en quatre parties. Dans un premier temps, un prologue nous montre un Harold fortement sceptique se marier suite à l'attraction irrésistible des yeux de Jobyna Ralston... Sans transition, on passe à la fameuse journée qui occupera le reste du film: il va faire des courses chez l'épicier, et y gagne une dinde qui lui pose de sérieux problèmes dans le tramway. Une fois rentré, il constate que sa belle famille s'est installée en son absence: la maman (La grande Josephine Crowell), une matrone qui envahit façon viking, avec son mot à dire sur tout, généralement dans le sens opposé de ce que souhaite Harold; le beau-frère, joué par Charley Stevenson, incurable feignant. Et un petit frère qui fait bêtise sur bêtise. Mais l'essentiel, pour notre héros, c'est la Butterfly 6 qu'il offre à sa femme, le principal objet de cette troisième partie, qui finira en ruines suite à une virée mémorable en famille. Enfin, ils reviennent à la maison, ou Harold va se heurter à la belle-maman, qui désapprouve son usage domestique d'alcool (Un voisin lui a offert un petit coup à boire en douce pour qu'il tienne le coup lors de l'invasion...). Cette partie, qui couvre le repas du soir, puis une partie de la nuit, est entièrement construite sur une méprise géniale: Harold, qui a utilisé un tampon de chloroforme pour se débarrasser de sa belle-mère, est persuadé que celle-ci a succombé à une overdose. Tous les indices, présentés au public de façon logique, concordent dans sa grille de lecture; non seulement il se croit un assassin, mais en plus il croit voir un fantôme, la vieille dame étant somnambule...

 

Cette construction en trompe-l'oeil est donc la pièce de résistance du film, mais soyons juste: la partie consacrée à la voiture, qui redéfinit d'une façon superbement construite les rapports toujours réjouissants entre comédie burlesque et automobile sans jamais tomber dans l'exagération à la Sennett, est aussi un beau morceau de bravoure. C'est dans tout le film, tourné avec assurance mais aussi une certaine retenue après le final délirant du film précédent, que Lloyd montre qu'il est toujours aussi à l'aise dans la miniature, la construction burlesque et le comique d'observation. Et c'est un plaisir permanent. Je sais que ce film est souvent considéré comme mineur, mais il reste l'un de ceux que je préfère de Lloyd.

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1924 Sam Taylor *