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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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29 mai 2016 7 29 /05 /mai /2016 09:10
Le journal de Gloumov (Serguei Mikailovitch Eisenstein, 1923)

En 5 minutes, ce "Journal de Gloumov" n'est pas à proprement parler un vrai film, mais plutôt un accessoire, une petite bande censée être projetée durant une pièce de théâtre à laquelle Eisenstein participait: on y voit les acteurs, maquillés et grimés, poser au milieu d'autres accessoires, parfois inattendus: des canons et des chars d'assaut. Nul doute qu'il faille y voir un talent visionnaire, un génie en action, un monteur de la mort qui tue. C'est surtout inutile. Ca commence très mal...

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Published by François Massarelli - dans Eisenstein Muet Russie
1 mai 2016 7 01 /05 /mai /2016 08:51

Pour aimer le cinéma soviétique, il faut souvent être assez tolérant quant à la présence d'objets mécaniques ou motorisés censés aider l'homme qui travaille dans sa tâche quotidienne. Bref, il faut aimer les tracteurs...

Je n'en ai pourtant pas vu un seul dans ce film, un de ces grands moments de la fin du muet lorsque un certain nombre de cinéastes souvent progressistes (Ruttmann était communiste du moins au début de sa carrière, Vigo un pur anarchiste, la bande de cinéastes Allemands des Hommes le dimanche n'étaient pas spécialement des fascistes, et Vertov est plus Marxiste que Marx lui-même) ont exploré les possibilités d'un cinéma plus basé sur l'observation directe, en débarrassant les films de leur narration (Dans des degrés différents, bien sur, entre la non-narration de Berlin: Symphonie einer Grosse Stadt, et Menschen am Sonntag qui incorporait plus ou moins une intrigue), et en exaltant le plus souvent la ville, qui devenait le principal protagoniste de leurs films. Le film de Vigo, d'ailleurs, s'appelle A propos de Nice.

L'homme à la caméra représente pour moi le film le plus abouti de cette tendance, ce qui est paradoxal car après tout, il est aussi le plus délirant et expérimental... Dès le départ il se débarrasse des intertitres comme dans le Berlin de Ruttmann, mais contrairement à ce film Allemand que Vertov a pris comme modèle, il reconstitue un fil narratif, à travers la présence sur l'écran de l'homme à la caméra, plus précisément le propre frère et collaborateur de Vertov, Mikhaïl Kaufman... On va donc suivre les pérégrinations du cameraman à travers l'Union Soviétique de 1928-1929, et voir ses images de gens, d'activités, de loisirs même...

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et bien sur, d'abord, les gens. Le film est organisé selon l'ordre d'une journée de travail, donc au début, une femme se réveille, et Kaufman sort de chez lui avec un appareil de prise de vue. Les gens y sont captés aussi bien dans leur vérité que dans la recréation de leurs vies; la femme qui se réveille, clairement, est une actrice dirigée par exemple, et des gestes vus plusieurs fois dans le film de plusieurs angles nous montrent bien ce que ce menteur de Flaherty voulait cacher: un documentaire, ça s'oriente. Vertov ne s'en cache pas, du reste. Mais il accumule les plans de gens captés dans leur candeur, dans leur embarras aussi (Une dame endormie sur un banc se réveille, voit qu'on la filme, et s'en va en colère, une autre au bureau des divorces se cache le visage derrière son sac, etc...); beaucoup de ces gens se prêtent assez volontiers au jeu, avec pour effet que le film donne l'impression de capter l'humanité dans toute sa splendeur, avec ses joies, ses colères, ses naissances, ses morts, ses mariages, ses divorces, son travail, ses loisirs...

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il faut dire qu'ils sont tous actifs. Et c'est là qu'on peut entrevoir la volonté politique derrière le film, et la raison d'être de son film: homme, caméra: l'homme dans ce film est indissociable de la machine, comme la couturière de sa machine à coudre, et le nombre de machines vues dans le film est impressionnant. Vertov, comme Ruttmann (Et comme Keaton dans The cameraman!) sacrifie au cliché des ballets de tramways, de bus; contrairement à son contemporain Eisenstein, il évite les tracteurs, je le disais plus haut, mais il nous livre une belle vision d'un monde en proie à la "machinisation". Et ça tombe bien, comme La ligne générale (De Eisenstein, avec ses tracteurs) qui est sorti la même année, L'homme à la caméra entend illustrer le passage d'une Union Soviétique essentiellement rurale, à l'industrialisation, qui est le but du plan quinquennal en cours. Voilà, c'est dit, on n'y reviendra pas, parce qu'il y a encore une autre dimension, et celle-là elle est franchement fascinante.

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parce que tout ça c'est un film. et un film qui a le mérite de s'intégrer lui-même; grâce à un effet spécial (Un matte, ce qui n'a d'ailleurs rien de spécial en cette fin du muet, tout le monde le fait. Vertov, lui s'amuse beaucoup avec pour nous montrer Kaufman qui marche littéralement sur la ville), il montre dans son film une séance de cinéma: on y projette Человек с киноаппаратом, de Dziga Vertov, autrement dit L'homme à la caméra. Et le film commence par la vision minutieuse de tout ce qu'est une salle de cinéma en 1929. Vertov ne peut échapper à l'auto-fascination pour son art et son pouvoir, pour le fameux 'ciné-oeil', du nom de son premier long métrage, un oeil qu'il nous présente en action du début à la fin, pour le montage aussi, car il nous montre une monteuse en action, et s'amuse à nous montrer des fragments non encore montés de son propre film. La mise en abyme absolue, donc, puisque elle intervient dans un film sans intrigue, la confection du film lui-même devient sa propre histoire. Et on sent la machine s'emballer dans des séquences de montage ultra-rapide, qui ont toujours cet effet fantastique de poussée d'adrénaline. C'est intensément satisfaisant et ça contribue à faire de ce film un film sur le cinéma, ou plutôt sur son exercice même.

Et ça, c'est rudement intéressant.

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Published by François Massarelli - dans Muet Russie 1929 **
20 avril 2016 3 20 /04 /avril /2016 16:46

Issue d'une famille pauvre, dont la mère s'est usée à travailler jusqu'à en mourir, la jeune Maria (Elena Smirnova) rêve de s'élever, et rencontre un jour deux hommes de la bourgeoisie, dont l'un, Viktor (Michael Salarow), est subjugué par sa beauté. Ils deviennent amants, mais très vite, Maria se lasse. partout où ils vont, elle se surprend à regarder les autres hommes, très attentive à toutes les sollicitations. Elle trompe son amant avec le garçon d'un restaurant où ils ont dîné. Mais le train de vie qu'elle lui impose menace Viktor de ruine, et il suggère de partir à la campagne et de vivre simplement. Elle va tout simplement rompre, en lui suggérant de prendre une maîtresse moins onéreuse...

Excellente introduction à la thématique de cruauté amoureuse fréquente chez Bauer, ce film est aussi un intéressant retournement de situation par rapport au mélodrame classique. Ici, la femme mène l'homme par le bout du nez, et celui-ci devient la victime des sentiments. Sciemment, elle se joue de ses amants, et peut mener une grande vie sans être inquiétée. la fin, particulièrement méchante, nous donne une idée claire de ce qui est la motivation profonde du personnage: la vengeance... C'est rendu explicite par un grand nombre d'indices. Tout d'abord, la première scène montre la mort de la mère, qui mène directement à une vision de Maria obligée de travailler. Elle est ensuite représentée, en proie à une forte mélancolie... Qui va contraster avec l'énergie qu'elle mettra à faire une fête de tous les instants, et à rester indifférente au destin de celui qui l'a aimée...

Ce thème de 'amour qui fait des ravages chez les protagonistes masculins reste le plus courant chez Bauer, mais il est ici particulièrement sardonique.

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Published by François Massarelli - dans Yevgueny Bauer Muet Russie 1914
17 avril 2016 7 17 /04 /avril /2016 20:20

Cinq années, c'est tout ce dont a disposé Yevgueny Bauer pour s'installer à la tête du cinéma Russe avant la Révolution. En 1917, il est décédé des suites d'une blessure, et il aura marqué la jeune cinématographie de son pays à jamais. Si il sera longtemps identifié au cinéma Tsariste, c'était un homme d'ouverture, acquis aux thèses progressistes de certains démocrates de son pays, et qui savait une (Ou deux...) révolution(s) inéluctable(s). de ses nombreux films, une vingtaine subsiste aujourd'hui, qui sont autant de reflets de son style, fait de plans fouillés à l'extrême, dans lesquels une action très pensée est soulignée par un don pour le décor, les éclairages, bref la scénographie, et un certain esprit Slave est particulièrement marqué: on y parle de mort, de tragédie, de vieillissement, mais aussi de classes sociales. L'amour y est nécessairement lié à la mort...

La jeune Vera (Nina Tchernova) ne trouve pas que la vie de ses parents, des nobles très en vue dans l'aristocratie Russe, sans cesse accaparés dans des soirées et autres cocktails mondains, vaille la peine d'être vécue. Elle se languit de trouver un sens à l'existence, et se réjouit lorsque sa mère lui propose de venir avec elle pour une mission de charité: elles vont nourrir des gens qui vivent dans des baraquements insalubres. Lorsqu'elles arrivent chez Maxime Petrov (V. Demert), un homme qui vit seul, Vera est fascinée par l'homme. Lui aussi est fasciné, et bien déterminé à la revoir. De son côté, elle revoit sans cesse cette journée en rêveries, elle est donc décidée à répondre favorablement lorsqu'il l'appelle à l'aide. Mais c'est un piège, elle se rend chez lui, et il la viole. Elle prend un couteau, et le tue avant de s'enfuir. son crime ne sera jamais découvert, mais il va la hanter, à tel point qu'elle va essayer de le confesser à son fiancé, le Prince Doslki'j (A. Ugrjumov). Fou amoureux, celui-ci va pourtant très mal le prendre, que ce soit parce qu'il soit choqué par le meurtre, ou parce qu'il est abasourdi d'apprendre qu'un autre homme a déjà possédé Vera. Celle-ci s'enfuit, et va changer de vie...

C'est l'un des premiers films de Bauer, qui était dans la première année de sa carrière de metteur en scène. Il y montre les écarts entre les classe en ayant recours à un stratagème qui permet sans doute d'éloigner les censeurs: les pauvres y sont représentés comme vivant clairement au crochet des dames qui viennent leur faire la charité, et dans un plan obscur, on voit les faces grimaçantes des hommes et des femmes qui viennent de se voir distribuer la nourriture se moquer des belles dames, sans parler du comportement odieux de Maxime. Mais la cible du film, c'est malgré tout l'aristocratie dans sa superficialité et ses préjugés, à travers la réaction de rejet du Prince à l'annonce du passé trouble de la femme qui l'aime... Et on retrouve le thème omniprésent chez Bauer de l'obsession psychologique, grâce aux nombreuses scènes qui nous montrent Vera en proie au trouble; avant le crime, lorsqu'elle ressent une certaine attirance pour Maxime, et après, lorsque l'homme qu'elle aime lui apparaît comme un autre Maxime... Le film est superbement composé, dans des plans éclairés d'une façon novatrice: au fond, laissant l'action à l'avant-plan plus sombre; une façon de signifier que Bauer s'intéressait au fond des êtres. On n'en douterait pas, à la vision de ses films...

Les ténèbres de l'âme féminine (Yevgueny Bauer, 1913)
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Published by François Massarelli - dans Yevgueny Bauer Russie Muet 1913 *
2 avril 2016 6 02 /04 /avril /2016 21:32

Un serial Soviétique, qui fonctionne à la fois en continuité (La dette à Mabuse, aux Vampires et aux serials Américains est évidente), et en rupture ("Soviétique", déjà, et le film s'amuse constamment à envoyer des piques à l'Ouest triomphant, avec un humour souvent provocant, et parfois désopilant). Ces aventures en trois épisodes, situées dans une Amérique de pacotille, sont celles de trois apprentis journalistes embarqués dans une rocambolesque intrigue autour de la mort d'un homme qui n'est pas tout à fait mort, un riche industriel à la vie trépidante et aux maîtresses nombreuses, avec de l'humour méchant qui s'attaque aux préjugés typiques de Américains ("Oui, un homme est mort, mais ce n'est pas très grave, il est noir..."), avec des ramifications sociales (Les héritiers du mort liquident l'usine et renvoient tous les ouvriers), politiques (Derrière le conglomérat industriel, se cache un complot proto-fasciste, et bien sur ces salopards vont accuser les bolcheviques...), policières (Des enlèvements, des assassinats, en veux-tu en voilà) et bien sur une petite pré-apocalypse chimique, avec contamination des pauvres soviétiques par le virus de la peste... Au milieu de tout ça, une femme, convoitée par tous les hommes, une ouvrière digne et flanquée d'un neveu auquel elle tient comme à la prunelle de ses yeux: Miss Mend. D'où le titre...

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Published by François Massarelli - dans Russie Muet 1926 *