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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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5 novembre 2025 3 05 /11 /novembre /2025 21:44

Don Quichotte de la Mancha a lu, beaucoup lu, et principalement des romans de chevalerie. A tel point que ça lui est carrément monté à la tête, et il est donc parti en quête d'aventures... le problème c'est qu'il est vieux et, on l'aura compris, fou. Aidé, plus ou moins, de son écuyer Sancho Panza, il parcourt les routes à la recherche de rencontres guerrières. Et quand il ne trouve rien, eh bien! ...L'imagination débordante du vieil homme fait le reste... Mais bientôt, le légende se répand, et les deux hommes deviennent la cible des moqueries...

Carl Schenstrom et Harald Madsen, alias Fy og Bi au Danemark, étaient mieux connus sous le nom hallucinant (mais justifié) de Doublepatte et Patachon en France, ils étaient Pat und Patachon en Allemagne ou encore Long and Short dans les pays Anglophones. Leurs films souvent réalisés par Lau Lauritzen (Senior) sont encore aussi populaires en Scandinavie et en Allemagne que le sont Laurel et Hardy aux Etats-Unis, pour situer.

Pourtant ce film très ambitieux est à part: clairement, il n'a pas été tourné au Danemark mais bien en Espagne, et très peu de concessions apparentes ont été faites aux deux personnages habituels de Schenstrom (qui interprète un Quichotte très convaincant avec sa silhouette de géant filiforme) et Madsen (qui prête à Sancho sa rondeur et sa petite taille). Et surtout pour ce dernier, le personnage de Sancho Panza est très éloigné des emplois habituels de clown lunaire lent et timide du comédien. Sancho est roublard, calculateur, dédié aux plaisirs... Juste, peut-on faire remarquer, il est quand même un peu naïf, surtout lorsqu'un canular pendable lui est joué, afin de lui faire croire qu'il est gouverneur d'une île.

Ce film, qu'on peut enfin voir entier (voir plus bas) est une fascinante entreprise: il s'agissait pour Lauritzen de faire une adaptation stricte de la tragi-comédie de Cervantès, avec deux comiques dans les rôles principaux; et en plus, comme c'est le seul film dans lequel on ne reconnaisse pas le maquillage traditionnel des deux comédiens Schenstrom et Madsen, c'était un risque commercial certain; mais l'idée de décalage entre un monde qui tourne dans un sens et deux hommes qui tournent dans l'autre (surtout Quichotte, car cette fois c'est Schenstrom qui est le plus à part!) est somme toute présente dans le film.

Reste quand même une interrogation: qu'est-ce qui a bien pu pousser dans cette direction Lauritzen, metteur en scène et producteur d'une série de films de comédie qui, s'ils n'ont sans doute pas révolutionné le médium, ont quand même provoqué un succès considérable pour lui et ses interprètes, l'excellente fortune de la Palladium, et même une réputation très enviable de poule aux oeufs d'or pour la scénariste et productrice Alice O'Fredericks? Le film est ambitieux, soigné même, l'intrigue du roman y est respectée, les personnages en sont bien définis, surtout bien sûr Quichotte et Panza, mais aussi les deux chevaliers ennemis d'une intrigue secondaire, deux beaux jeunes hommes comme il y en avait toujours pour "seconder" les héros joués par Schenstrom et Madsen, mais cette fois dans des personnages tangibles et riches... La photo de Julius Jaenzon, confrontée à l'aridité Espagnole, est d'une luminosité exceptionnelle, et les décors souvent printaniers nous rappellent que nous sommes entre les mains de maîtres Danois. Les deux acteurs principaux sont absolument géniaux mais ça on le savait déjà!

...Et pourtant le film est réussi mais sans plus. Lauritzen a soigné sa partition, bien utilisé les décors existants, et bichonné ses effets spéciaux: la scène mythique des moulins, par exemple, donne lieu dans cette version à une visualisation très baroque des «monstres» et géants aperçus par le vieux chevalier fou...  Il manque pourtant à cette superproduction un peu austère la gentille folie douce habituelle des films du duo, et dans ce contexte le ton du film, de la romance picaresque jusqu'à l'inévitable tragédie, on débouche sur une version soignée d'un grand roman, qui se cantonne à une sagesse embarrassante: on pense pour comparer au Carmen, de feyder, d'ailleurs tourné la même année, également en Espagne. Fallait-il absolument, pour exister, que les deux clowns et leur metteur en scène prouvent une bonne fois pour toutes que oui, ils pouvaient aussi faire un film sérieux, ou un "grand sujet"?

Pendant des années, on ne pouvait voir de ce film que des extraits diffusés dans le cadre d'une série télévisée Allemande qui recyclait les longs métrages du duo; de ces dix bobines (soit 135 minutes à 20 images par seconde), il nous restait 48 minutes en tout, dénuées d'intertitres, et remontées afin de donner une idée du film plus qu'autre chose. Le remontage avait été fait afin de privilégier la comédie, mais le début était à peu près intact. La seconde intrigue, qui voit se développer une trahison chez d'authentiques chevaliers, qui vont ensuite être authentiquement aidés par Quichotte et Panza, ne mettait pas suffisamment les deux stars en valeur et avait été tout bonnement supprimée. Maintenant, le Danske Filminstitut a enfin rendu publique sa version restaurée (un tirage soigné, mais aux marques du temps bien visible) de la version intégrale, disponible sur le site Stumfilm du DFI, où il sera visible en permanence, comme la digne pièce de musée qu'il est enfin.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Comédie Scandinavie 1926 Lau Lauritzen Schenström & Madsen *
26 octobre 2025 7 26 /10 /octobre /2025 23:23

Esthète Irlandais et cabochard, Ingram ne pouvait finalement pas s'empêcher d'attribuer la vertu au beau et le vice au laid; on a des exemples de cette tendance dans le très mouvementé quatrième acte de ce beau film, première adaptation d'un roman de Rafael Sabatini dont George Sidney fera en 1952 un film de cape et d'épée entrainant et joyeux, avec Stewart Granger... Mais qui est finalement fort éloigné de cet imposant long métrage muet de dix bobines situé en pleine Révolution Française, sans doute le film le plus massif d'Ingram après ses Quatre cavaliers de 1921... Depuis le succès duquel le réalisateur a eu le temps de découvrir un nouveau jeune premier, Ramon Novarro, qui compose un excellent héros pour ce film. André Moreau est un jeune étudiant en droit, devenu fraichement avocat, qui revenant au pays est témoin de deux scènes qui vont le choquer très profondément: d'une part, un pauvre homme, surpris à braconner sur les terres du Marquis de la Tour d'Azyr (Lewis Stone), est ramené chez lui mourant, exécuté par les hommes du marquis; ensuite, lorsque l'ami d'André, Philipe de Vilmorin (Otto Matieson) dit son fait au noble qui assiste lui aussi à la scène, le marquis le tue froidement, étant la meilleure lame du royaume. Cherchant de l'aide auprès de sa famille, André essaie de mobiliser son parrain, Quintin de Kercadiou (Lloyd Ingraham), qui refuse de tenter quoi que ce soit contre le Marquis; puis il essaie, à nouveau en vain, d'en référer aux autorités. C'est alors qu'il prend conscience que le seul moyen de prendre efficacement des mesures contre l'injustice, c'est de lutter politiquement, mais cela ne lui apporte que des ennuis... Il en vient donc à se cacher, poursuivi par les troupes du roi, dans une compagnie théâtrale, à laquelle il va fournir de robustes succès, dont une pièce qu'il intitule Figaro-Scaramouche. C'est à ce titre qu'un soir, il voir face à lui dans le public, sa fiancée Aline de Kercadiou (Alice Terry), la protectrice de celle-ci, Thérèse de Plougastel (Julia Swayne Gordon), en compagnie de son ennemi juré le Marquis... Devenu Monsieur X, l'acteur, André se rend compte qu'il va falloir pousser la révolte un peu plus loin...

Ingram n'est évidemment pas un pro-révolutionnaire acharné, son protestantisme pro-Anglais (il est d'origine Irlandaise, certes, mais du camp Orangiste) ne le poussant pas à épouser une autre vision que celle partagée par le Hollywood de l'époque, coincé entre l'exaltation de la Révolution en ayant en tête celle de 1776 dont ils sont finalement les héritiers, et une tendance à freiner devant l'expression violente d'un changement populaire, telle qu'elle venait de s'exprimer en Russie. C'est dire si on est finalement dans un terrain déja parcouru par exemple par Griffith pour son Orphans of the storm (1921), qui montrait une révolution nécessaire, qui dégénérait en boucherie sous l'influence de l'odieux Robespiere, d'ailleurs nommément traité de "Bolchevique" par un intertitre. Mais Ingram, contrairement à Griffith, ne donnait pas ainsi son opinion aussi simplement, c'est la construction de ce film qui nous donne cette vision bien dans la ligne: un premier acte centré sur les efforts d'André pour essayer de faire triompher la justice, et venger son ami. La noblesse y est bien du coté des tortionnaires, incarnée en particulier par le Marquis; un deuxième qui le voit se cacher dans une troupe de théâtre, confronté sous cape à l'évolution de son pays; dans le troisième acte, il redevient André Moreau, est élu député, et décide de contrer la noblesse en adoptant ses propres armes, et il devient ainsi un bretteur redouté, et est de plus en plus populaire. Mais son histoire privée, et compliquée, avec Aline, culmine dans un duel avec le Marquis dont le véritable enjeu est plus la main de la jeune femme qu'autre chose. Enfin, le dernier acte, tumulteux et déchainé, voit Moreau apprendre que certains des nobles contre lesquels il se bat sont de sa famille, et la foule de son coté devient incontrôlable, se livrant à des massacres et des pillages... La seule voie possible, donc est une voie médiane, incarnée dans une scène par andré moreau défendant sa noble de mère et sa fiancée contre une foule hostile en appelant à ce qu'on le reconnaisse, ni noble ni roturier, juste un caractère noble, de basse extraction. Dans le même temps, le marquis devient vraiment noble en se sacrifiant pour sa famille, et le bien commun... Si on est très loin de Griffith dans la réalisation, on constate que la source est donc la même, et finalement les conclusions idéologiques absolument identiques.

Sca.jpgIngram est un grand directeur d'acteurs, qui a su jouer sur tous les tableaux, aussi bien des grandes scènes épiques, dont le souffle impressionnant n'étouffe jamais les personnages, que sur des moments d'intimité. il fait une utilisation fluide du montage, intégrant parfaitement des gros plans dynamiques, et repose beaucoup sur le jeu subtil et en demi-teintes de Alice Terry, Ramon Novarro et Lewis Stone. Ce dernier a la charge d'être le "villain" du film, mais étonne par son humanité, et sa capacité à mettre en particulier les rieurs de son côté dès sa première scène, lorsqu'en passant devant une femme qui lui fait de l'oeil, il se demande si il pourrait bien être le père de l'enfant qu'elle tient dans ses bras... un détail qui a plus d'importance qu'un simple gag, puisque le film possède une intrigue mélodramatique à souhait, avec coups de théâtre liés à de vieux secrets familiaux... Mais au-delà, c'est bien l'esthétique qui prime dans ce film rigoureux: des décors splendides, parfaitement intégrés dans des compositions magistrales; un sens, avec le fidèle chef-opérateur John Seitz, de la lumière, qui prolonge le travail d'un Maurice Tourneur: chaque gros plan d'un acteur est ainsi logiquement inséré dans la structure d'ensemble (Par opposé aux plans symboliques de Griffith), et doté d'un lien avec la lumière: une larme qui brille dans un rayon de soleil dans la scène d'ouverture, les yeux déterminés d'André Moreau dans une scène dramatique, etc... Ingram, dans des décors superbes, privilégie les lieux d'ombre, ave toujours une ouverture qui diffuse partiellement la magnifique lumière Calfironienne, donnant des images aux nuances riches... Le sens esthétique d'Ingram n'est pas lié qu'à cette tendance à bien composer, on le retrouve aussi dans sa façon de mobiliser des acteurs recrutés pour leur laideur et leur difformité, donnant ainsi aux sans-culottes une trogne et des manières odieuses, dignes de leur réputation... Mais le souffle épique de cette histoire mélodramatique, non pas réaliste, mais intrinsèquement parfaitement cohérente emporte l'adhésion jusqu'au bout, et culmine dans des scènes maitrisées de représentation du chaos, d'une rare violence...

Il ne faut pas chercher la vérité historique dans ce film, qui simplifie la marche de la Révolution en quelques touches efficaces avant de la montrer en déchainement spectaculaire d'une foule qui sent mauvais. Mais des allusions, ça et là, rappellent quand même un peu de vraisemblance, notamment le titre de cette pièce, qui a pour tâche de justifier le titre du film, désormais bien éloigné sans doute du roman initial (Le film de Sidney lui étant certainement plus fidèle, donne le temps à Granger de faire du personnage de Scaramouche qu'André Moreau interprète sur scène un véritable alter ego), mais aussi de rappeler un acte fondateur de la révolution balbutiante, le Mariage de Figaro de Beaumarchais. Ce qui fait d'André-Louis Moreau, dans sa version interprétée par Ramon Novarro, le véritable précurseur de la révolution Française... Bon, soyons clairs: on ne peut pas prendre ça au sérieux, mais qu'importe? Scaramouche, film magnifique et flamboyant, aussi prenant aujourd'hui qu'à sa sortie en 1923, film rescapé des années 20, reflet d'une période dorée du cinéma Américain, est un souffle qui emporte tout sur son passage, c'est le meilleur des films de Rex Ingram que j'ai vus.

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Published by Fraçois Massarelli - dans Rex Ingram Muet 1923 *
26 octobre 2025 7 26 /10 /octobre /2025 23:04

Dans les années 20, l'occultisme est une forme de mode qui prend essentiellement les classes les plus aisées, et va aboutir à un chef d'oeuvre cinématographique absolu... Ce n'est pas ce film, qui s'inspire quand même du mouvement, ainsi que de la personnalié d'Alceister Crowley.

Rex Ingram, impétueusement fâché après la MGM qui lui a refusé la réalisation de Ben-Hur après le retrait de Charles Brabin, et profondément en colère contre Louis B. Mayer (au point de toujours demander à ce ses films sortent sous étiquette « Metro-Goldwyn » seulement, c'est dire l'étendue de la bouderie), a prétexté un film situé en Europe pour y partir, et maintenant il ne veut, tout simplement, plus revenir. Il est basé à Nice, et utilise les Studios de la Victorine, mais pas seulement, comme le prouvent de nombreux extérieurs situés à Paris... Son film, après l'ambitieuse vignette d'après-guerre Mare Nostrum, version opératique des années de conflit mondial vues sous l'angle de l'ivresse de l'amour fou, est un petit mélodrame occulte adapté de Somerset Maugham, qui promet beaucoup, et déçoit quelque peu...

Alice Terry y interprète une sculptrice Américaine installée à Paris qui a un accident, nécessitant une intervention chirurgicale délicate. Celle-ci est confiée à un jeune prodige Américain, le docteur Burdon, joué par Ivan Petrovitch: de l'opération, qui est un succès, naîtra une relation entre les deux jeunes gens. Mais un autre homme a des vues sur la jeune artiste, l'occultiste Oliver Haddo (Paul Wegener), qui très vite va lui montrer l'étendue de son pouvoir...

...De suggestion ? Le film contient une inconsistance majeure : d'un côté il semble qu'Haddo soit réellement doté de pouvoirs, ce qui évidemment ouvre la porte à une interprétation magique au premier degré. Sauf que vers la fin du film, un intertitre nous apprend qu'il est en réalité totalement dingo. Ce qui pose évidemment problème, puisque un (excellente) scène nous montre, en effet, Wegener emmener avec lui Alice Terry dans un monde inquiétant de faune, de diables et de sorcières... Et qu'à deux ou trois reprises, il l'hypnotise comme un rien.

Mais c'est sans doute la loi du genre, le mélodrame fantastique avec tours lugubres, laboratoires médiévaux, grimoires et assistants nains : tous ces ingrédients sont d'ailleurs bien présents, et si vous ajoutez un faune, vous voyez qu'on n'est pas volé... Mais le principal écueil du film, c'est que si on constate qu'il est à l'aise pour réaliser un film de genre, on aimerait qu'il aille un peu plus loin, car c'est quand même le metteur en scène de l'époustouflant Scaramouche et du baroque Mare Nostrum, alors cette petite entreprise occultiste, qui bénéficie de beaux décors et de l'équipe rodée de Rex Ingram, méritait mieux que ça, quand même ! Reste Wegener, le principal atout du film, qui est exactement comme on l'imagine, c'est-à-dire inquiétant, énorme et parfaitement à son aise dans ce fatras inspiré à la fois de Haxan, de Nosferatu (LE chef d'oeuvre ouvertement occultiste dont je parlais plus haut) et de Gustave Doré...

Au moins le film a-t-il un atout qu'on pourra qualifier d'ironique. Derrière cette jeune artiste (qu'on nous conduit à imaginer vierge, ce qui va sans dire et ça tombe bien puisque le dire clairement serait proscrit même en intertitres!) qui sous hypnose et à la vue d'un faune, se met à imaginer des bacchanales crapuleuses (beaucoup, mais alors beaucoup de gens à peine vêtus) il y a tout un fantasme rigolard de la répression sexuelle, si typiquement Anglo-Saxonne, dont l'Irlandais Rex Ingram, fils de pasteur protestant, devait quand même bien avoir la mesure... Au point d'en confier le rôle à son épouse...

Sinon, Ingram se cherche, et pour ce film, il a trouvé... des influences: m'est avis que le fils d'Hollywood a vu, pêle-mêle, les films Le brasier ardent, de Mosjoukine, The penalty, de Wallace Worsley, Häxan, de Benjamin Christensen, et sans doute Dante's Inferno, de Henry Otto. Tous l'ont clairement inspiré*... Et puisqu'on parle de l'influence d'un cinéaste, rappelons en guise de post-scriptum que le tout jeune Michael Powell, qui a commencé travailler en qualité d'homme-à-tout-faire pour Rex Ingram avec le film précédent, est ici acteur, entre autres choses. Vous le reconnaitrez facilement, il interprète un touriste Britannique...

*Puisqu'on parle de Dante's inferno, produit en 1924 pour la Fox, il y aura un remake parlant en 1935, avec Spencer Tracy, un film qui utilisera des extraits et rushes du film de 1924... Il fut réalisé par Harry Lachman, qui en 1925- 1926, était en France. Il était l'un des assistants d'Ingram sur ce film.

 

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Published by François Massarelli - dans 1926 Muet Rex Ingram *
21 octobre 2025 2 21 /10 /octobre /2025 10:13

On ne présente plus l'histoire de ce Prisonnier de Zenda, due au prolifique romancier Anthony Hope. C'est probablement son roman le plus connu, et pour cause: si cette adaptation par Rex Ingram n'est pas la dernière, loin de là, ce n'est pas non plus la première... Ce privilège appartient à un film rare, longtemps considéré comme perdu et réalisé à la fin de sa carrière par le vétéran Edwin Porter, en... 1913. Avec son héros pris malgré lui dans l'aventure d'un royaume en pleine ébullition, le film nous entraîne dans un autre monde qu'il est certes difficile de prendre au sérieux, mais qui possède tant de charmes...

Rudolf Rassendyll (Lewis Stone) ne va pourtant pas en Ruritanie par hasard: il cherche clairement à s'y rendre, regardez le film. Au début, il évoque avec ses cousins la branche lointaine de la famille qui règne au lointain pays de Ruritanie, puis part chasser... Comme par hasard, on le retrouve aux abords de la capitale Ruritanienne. ...La chasse, vraiment? L'aventure, oui! Ingram, en compagnie de toute sa distribution et de toute son équipe, a décidé clairement de jouer la carte de l'enchantement et de la plongée intégrale dans le monde merveilleux, et si peu réaliste, du roman.

Alors comment s'étonner que ça marche si bien, tout en étant si raisonnable, car c'est une histoire dans laquelle tout est si bien rangé... Les traîtres ont des têtes de traîtres, les vamps des têtes de vamps, et la belle princesse qui attend maussade de devoir se marier avec le futur Roi Rudolf, par obligation et par devoir, va avoir la surprise de sa vie quand elle va rencontrer celui qui le remplace momentanément. Une surprise qui sera elle aussi momentanée, bien sûr...

Autant The four horsemen of the apocalypse était un film personnel, autant ce Prisonnier est une oeuvre à part, une récréation pour celui qui vise une récompense qu'il n'atteindra jamais: la reconnaissance de son génie et de son talent pour tourner un film. Une récompense qui aurait pu prendre la forme, par exemple, du tournage d'une superproduction, comme en 1924-25 Ben Hur! Mais non. Pourtant, la production de ce Prisonnier de Zenda est absolument efficace, superbement interprétée par tous (Lewis Stone, Ramon Novarro, Stuart Holmes, et toute la troupe d'Ingram, d'Edward Connelly à John George) et toutes (Alice Terry, Barbara La Marr, et l'espace d'un instant, Maude George), et totalement distrayante. Ca manque d'âme, je l'ai plus ou moins indiqué, mais Ingram savait parfaitement mettre un peu plus de souffle quand ça lui chantait: voir le superbe Scaramouche pour s'en convaincre... 

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Published by François Massarelli - dans Muet Rex Ingram 1922 *
14 avril 2025 1 14 /04 /avril /2025 11:45

Adapté de son propre roman, le film de Rupert Hughes est l'un de ces films qui tendent à Hollywood un intéressant miroir, comme pouvaient l'être la comédie Ella Cinders (1926) de Alfred Green avec Colleen Moore, ou le film de Tourneur A girl's folly (1917). Mais le film de Hughes affiche des ambitions assez différentes de ces comédies, l'idée étant de chanter les louanges des acteurs, metteurs en scène, techniciens de Hollywood, à l'heure ou les scandales éclatent les uns après les autres: les procès du comédien Roscoe Arbuckle, la mort étrange du réalisateur William Desmond Taylor sont dans toutes les mémoires, et l'heure est en effet à la prudence. Mais cette ambition, aussi louable soit-elle, est le point faible du film, donnant lieu à des intertitres sentencieux et ronflants. Somme toute, les deux autres avantages de cette histoire sont principalement une mise en scène énergique, qui culmine dans les scènes dramatiques, et le fait que Hughes a été admis sur certains plateaux, avec la complicité des metteurs en scène, acteurs et producteurs. Cette inscription du film dans les coulisses du spectacle reste sont principal point fort...

Remember Steddon (Eleanor Boardman), fille d'un pasteur en croisade contre le diable Hollywoodien, épouse un homme, interprété par Lew Cody. Elle décide de lui faire faux bond, mue par un pressentiment: bien lui en prend, le monsieur étant en fait un tueur d'épouses qui collectionne les assurance-vies... Mais en quittant le train qui les emportait, elle se trouve au milieu du désert, et est secourue par l'équipe de tournage d'un film. Elle va intégrer le monde de Hollywood, devenir actrice, gravir les échelons, mais le tout avec la crainte du scandale qui menace; comment lui échapper quand on est mariée à un meurtrier notoire?

Donc, Eleanor Boardman visite Hollywood, fait la figurante pour Chaplin, et assiste au tournage d'une scène de Greed... C'est sûr, les atouts comme ceux-ci ne courent pas les films muets. mais le reste du film est surtout basée sur une intéressante, mais un peu timide symbolique, autour du vrai et du faux, qui se joue de certains stéréotypes. ainsi, Barbara LaMarr, qui était LA vamp de Rex Ingram dans The prisoner of Zenda(1922) et le film perdu Trifling women (1922), est-elle ici une actrice spécialisée dans les rôles de vamp, mais une excellente camarade, et une femme triste qui vit dans le souvenir d'un mari perdu: les témoins qui ont connu miss LaMarr, au destin  tragique, ne disaient pas autre chose d'elle... De son coté, Scudder, le tueur qui avait épousé Remember afin de la détrousser, tombe amoureux d'elle lorsqu'il découvre qu'elle est actrice: l'attrait de l'écran déforme tout, et semble-t-on nous dire, souligne la beauté...

Certaines scènes qui nous font visiter Hollywood et ses coulisses sentent les collections de stars, l'accumulation de noms, mais les scènes qui nous impliquent un peu plus dans l'action du film (La tentative d'arrestation de Scudder, l'incendie DeMillien du plateau au final, durant lequel richard Dix, en metteur en scène, ordonne à ses techniciens de continuer à tourner quoi qu'il arrive pendant que la tempête se déchaîne, relayée par une machine à faire du vent, bref: du spectaculaire!!) restent le meilleur. De plus, Eleanor Boardman, qui porte le film sur ses épaules, nous donne suffisamment envie de la suivre sans trop poser de questions, passant d'un registre à l'autre (une scène la montre se vautrer dans son premier essai, lorsqu'elle s'avère incapable de jouer la comédie, c'est drôle comme tout...). On peut aussi faire comme Hughes dans son film, et citer le nom des acteurs de ce film Goldwyn: Eleanor Boardman, Richard Dix, Mae Busch, Dale Fuller, Barbara LaMarr, Snitz Edwards, William Haines, Aileen Pringle, pour s'en tenir aux plus connus. Outre les apparitions dans leur propre rôle de Zasu Pitts, Chester Conklin, Erich Von Stroheim et Jean Hersholt, tous occupés sur le tournage de Greed, apparitions également de Fred Niblo, de Chaplin, et de Marshall Neilan (excusez du peu), on appréciera au détour d'une scène de voir parmi les figurants à la recherche d'un petit rôle Lon Poff et le petit Sammy Brooks, qui étaient tous les deux des sbires de Richelieu dans The three must-get-there de Max Linder en 1922. Poff, de son coté, est également au générique de Greed: c'est lui qui apporte à Trina ses gains à la loterie, affublé d'un sparadrap. Dale Fuller est également au générique de Souls for sale, après avoir incarné la domestique au destin tragique, Maria Miranda Macapa, dans le film de Stroheim... Décidément, on ne peut pas ne pas revenir à Greed.

En attendant, ce film peu banal mérite amplement le détour, que ce soit pour ses qualités (nombreuses) ou ses petites manies... Un film qui a le mérite de nous offrir un regard gentiment ironique sur le miroir aux alouettes, tout en se livrant à une mise en abyme intéressante, quand lors d'une scène située dans un commissariat, l'actrice incarnée par Eleanor Boardman panique en pleine interprétation en apercevant sur le mur un avis de recherche pour son mari...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1923 *
6 avril 2025 7 06 /04 /avril /2025 17:36

En 1927, le documentariste André Sauvage a donc tourné ce voyage en Grèce, et en a tiré un long métrage... perdu. Seules restent des images disjointes, des chutes, des plans de second choix, des coupes et quelques fragments...

Réduit à une demi-heure sans véritable ordre ni construction, le "film" (ou son fantôme...) porte malgré tout en lui un je-ne-sais quoi de totalement poétique, une sorte de portrait d'une certaine vérité, à l'écart des images d'Epinal: des vues de la misère et de la joie, des hommes au travail, de la vie forcément "exotique" de cet ailleurs qui nous est présenté à l'écran. Quant à savoir ce que Sauvage a mis dans son film, eh bien... On ne saura jamais!

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Published by François Massarelli - dans André Sauvage Muet * 1927
3 avril 2025 4 03 /04 /avril /2025 22:25

Ce film est une promenade, et qui prend son temps, dans le Paris de 1927 - 1928, par André Sauvage, cinéaste qui avait choisi le documentaire comme étant son mode d'expression. Un moyen comme un autre d'assumer son envie de cinéma, à travers une vision poétique, calme et posée, des choses. 

On y sent une tendresse, une envie de s'arrêter sur la vision des gens; comme Grémillon pas loin de lui, comme Hawks aux Etats-Unis, Sauvage aimait sans doute les gens au travail, dont il capte parfois la concentration, à distance respectueuse... Mais il capte aussi ceux qui, à côté, flânent, et prennent leur temps. Lui aussi, et nous aussi du même coup.

Et comme il vient à Paris par les canaux, on profite de visions poétiques: la lente descente ou remontée d'une péniche à une écluse, restituée en accéléré, semble réussir à trouver le moyen d'être belle, au lieu de ressortir du burlesque par la simple grâce de l'accélération du mouvement; en s'enfonçant dans le Cnal Saint-Martin, le cinéaste voit et nous transmet des rayons de lumière qui viennent d'en haut... C'est d'une grande beauté.

Le film suit le rythme à la fois indolent et sûr des péniches, et nous invite à profiter de ce qu'un artiste ait arrêté le temps, pour laisser sa caméra s'imprégner des images d'une grande ville, donc d'un endroit qui ne peut que changer, et changer encore au gré des époques. Presque cent années plus tard, Paris est toujours Paris, mais ce n'est pourtant pas la même ville... Comme ces plans qui opposent des camions qui s'affairent, et un troupeau de chèvres battant le même pavé Parisien...

Bref: comme Berlin, symphonie d'une grande ville, mais sans sa luxuriance, ce film lent et contemplatif a le culot d'être toujours en mouvement, pourtant... Il se place du côté des observateurs, des traqueurs du détail, des Tati par exemple, ou de Vigo, mais sans l'acidité d'A propos de Nice. C'est un très beau film... 

 

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Published by François Massarelli - dans 1928 Muet André Sauvage *
17 mars 2025 1 17 /03 /mars /2025 15:39

Réalisé avec l'aide de la police de Munich, ce documentaire participe d'un essor du genre dans les années 20, en Allemagne: sous diverses formes, des documentaires attiraient les foules, tout en propsant une utilisation du cinéma nouvelle, excitante et souvent inattendue.

Ce film n'est pour autant pas à assimiler aux Kultürfilme (Kraft und Schönheit est le premier exemple qui me vient à l'esprit), dans lesquels on tentait d'épuiser un sujet de façon rigoureuse, méthodique... et un rien ronronnante! Il n'est pas non plus un de ces films d'avant-garde qui pulluleront à la fin des années 20, comme bien sûr le très célèbre Berlin, symphonie d'une grande ville, de Walter Ruttman (1927): non, plus simplement, il s'agit de montrer de quelle façon les rues allemandes peuvent se muer en autant d'endroits dangereux, en adoptant une approche documentaire légèrement modifiée avec un recours à des acteurs qui interprètent le rôle de passants, de passagers des transports, dans un décalage parfois légèrement farfelu, mais aussi parfois le film rappelle les accidents tragiques... 

Et sinon, le film glisse vers le baroque en tâchant de montrer la différence entre un bon et un mauvais mendiant...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1924 *
16 mars 2025 7 16 /03 /mars /2025 14:40

L'étudiant de Prague a déjà fait l'objet d'une adaptation par son scénariste Hanns Heinz Ewers en 1913, avec la collaboration de Stellan Rye. Le rôle principal, celui de l'étudiant épéiste Balduin, était tenu par Paul Wegener, qui était, déjà, trop vieux pour le rôle... C'est aussi le cas de Conrad Veidt mais ça se voit moins!

En automne, un groupe d'étudiants en goguette s'arrêtent à une tavrne pour y boire et prendre du bon temps. Balduin l'étudiant est amené à secourir la fille d'un noble local, la belle Margit, dont le cheval s'est emballé lors d'une partie de chasse. Balduin est hanté par le souvenir de la jeune femme, et délaisse sa petite amie Lyduschka. Prenant conscience de sa classe sociale, il passe un contrat surnaturel avec le prêteur sur gages Scapinelli (Werner Krauss), qui lui confère richesse et gloire. Il peut désormais essayer de séduire la belle Margit...

Nouvelle variation sur le thème du double et du contrat maléfique, le film est sorti la même année que Faust... Sous la direction de Galeen, il se pare d'un souffle impressionnant, et d'une richesse que ne possédait pas celui de 1913, tout en lourdeurs assez poussiéreuses... Un remake ne s'imposait peut-être pas, mais de toute façon, ce nouvel Etudiant de prague est bien un tout autre film, plus accessible en 1926 aux spectateurs du monde entier, clairement. 

Galeen poursuit ainsi un travail de réappropriation des mythes (Germaniques ou non, puisqu'il a collaboré au film Nosferatu, après tout) en s'appropriant différemment des habitudes de l'écran allemand, l'héritage de la tentation d'un cinéma expressionniste, sempiternel sujet de débat autour des oeuvres cinématographiques de Weimar..; Il y utilise bien des aspects du style (les décors marqués d'Hermann Warm, et bien sûr les deux acteurs les plus marquants de Caligari, ce n'est pas rien) mais son film est empreint d'une vraie fraîcheur: et le jeu de Veidt en particulier y est moins chargé qu'à l'accoutumée. Et Krauss est méconnaissable!

Galeen, et Ewers qui a collaboré au scénario, placent le film dans un souffle spectaculaire, en développant l'intrigue sur deux heures, aussi, évitant les lourdeurs de l'oeuvre initiale. La scène la plus emblématique, durant laquelle Scapinelli opère un échange entre Balduin et son double à travers un miroir, est sans doute la plus traditionnelle, sous l'influence inévitable des habitudes du cinéma allemand d'avant... Mais la magnifique scène de l'entrevue nocturne entre Balduin et Margit, qui fait intervenir les quatre principaux personnages, est superbement pensée, avec l'utilisation inquiétante de l'immense ombre de Krauss...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Henrik Galeen Conrad Veidt 1926 *
15 mars 2025 6 15 /03 /mars /2025 08:29

Henrik Galeen, c'est bien sûr d'abord et avant tout le scénariste de Nosferatu, film unique en son genre, et incursion inattendue, pour une adaptation (même oficieuse) d'un roman Gothique anglophone, au pays de l'occulte... à l'Allemande! Mais il est aussi un réalisateur, de huit films en Allemagne entre 1915 et 1933. Celui-ci est l'un des plus célèbres... C'est auss une sortie tardive d'une oeuvre fantastique sur l'écran allemand, à une époque où la cinématographie nationale se tournait vers des études psychologiques et des drames sociaux... Galeen, sans aller jusqu'à verser dans l'occultisme comme Albin Grau, le coproducteur de Nosferatu, avait en effet une passion pour la tradition du fantastisque, et ce n'est pas un hasard si sa première réalisation était justement la première version du Golem avec Paul Wegener...

Celui-ci interprète le professeur Jakob ten Brinken, un scientifique notable obsédé par un projet délirant: il croit en le pouvoir fantastique des mandragores, cette plante mythique qui pousse au pied des gibets, et dont la présence vient de la semence éparpillée par les condamnés lorsqu'on leur met la corde au cou! Il souhaite créer un enfant, en utilisant une mandragore pour imprégner une prostituée, et voir comment évoluera l'enfant...

Le résultat de cette expérience sera une fille (Brigitte Helm): Alraune (l'allemand pour mandragore) va grandir dans un pensionnat, où elle sera très vite remarquée pour son indiscipline et ses audaces, capable de corrompre tout un dortoir d'un rien... Punie, elle s'enfuit, trouve du travail dans un cirque où elle corrompt tous les hommes qu'elle est amenée à rencontrer... Le professeur ten Brinken la retrouve et décide de la récupérer. Mais les ennuis ne sont pas finis: alors que la jeune femme s'installe dans le luxe de sa relation filiale avec le vieux professeur, ce dernier est de plus en plus persuadé de l'incapacité de sa création à échapper à sa nature fondamentalement maléfique, mais en prime il tombe fou amoureux d'elle...

Le film est intéressant sur de nombreux points, l'un d'entre eux étant cette capacité qu'a eu Galeen d'adapter le fantastique de son film à la nouvelle donne du cinéma Allemand: fini l'arrière-plan expressioniste, dont les derniers feux étaient visibles encore l'année précédente dans Metropolis et Faust. Ce film de dix confortables bobines s'inscrit dans l'élégance du cinéma moderne Européen, et son fantastique ne repose en rien sur les délires chargés d'une imagerie fascinante, mais dont il fallait bien un jour s'échapper. Il a beau être fort long, il en ressort une certaine légèreté... Et de conte fantastique, Alraune deviendrait presque un mélodrame, ou un drame de moeurs, qui aurait pu être réalisé par un Richard Oswald (qui justement en era un remake parlant quelques années après, avec Brigitte Helm), ou A.W. Sandberg. Les décors du cinéma de l'époque sont tous présents, de tables de jeu surpeuplées de bourgeois en habit, aux vastes demeures dont les appartements recréés en studio soulignent l'opulence et la vacuité d'un monde corrompu.

Car le film n'oublie jamais le rôle assigné à son personnage principal, et on comprend que Brigitte Helm a été engagée pour reprendre un rôle à la façon de sa première incursion dans le cinéma, quand elle a joué non pas Maria de Metropolis, mais son double maléfique: la gestuelle de l'actrice, sinueuse, angulaire, nous renvoie en effet aux agissements troubles de celle qu'un savant fou avait créée pour fondre sur le monde et y engendrer le chaos. Rotwang avait un but, celui de se venger... Pas ten Brinken, si ce n'est celui d'engendrer une découverte scientifique (au but bien nébuleux) qui puisse donner du sens ) son obsession d'un vie... Bref: du vide. Car le film, derrière son personnage qui découvre (en lisant les notes de son "créateur") les circonstances de sa naissance, elle comprend qu'elle est condamnée au mal, et décide... de l'assumer pleinement. Car elle pense qu'il n'y a pas d'issue pour elle: reprochant au monde d'avoir été créée maléfique, elle s'adonne au mal pour se venger! Jusqu'à ce qu'un retournement de situation révèle qu'après tout, il y a bien un responsable de sa nature...

Il y a, sans doute, des ponts entre cette histoire basée sur un roman de Hanns Heinz Ewers, et le Lulu de Wedekind, donc entre la Mandragore de Brigitte Helm et Die Büchse der Pandora de Pabst avec Louise Brooks... Comment ne pas y penser, quand l'amant de la jeune femme se donne la mort dans les coulisses d'un cirque, ou quand Wegener poursuit sa "fille" dans leur maison, un couteau à la main, partagé entre le délire érotique et l'instinct de meurtre? Et les deux films sont construits intégralement sur l'extraordinaire interprétation d'une actrice, qui crève l'écran pour l'une comme pour l'autre... Mais à la lecture sociale de Pabst, Galeen oppose une lecture fantastique, presque ludique... C'est plus léger, en effet. Il est clair qu'il y a moins de portée... Mais c'est aussi très distrayant!

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Brigitte Helm Henrik Galeen 1927 *