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20 février 2011 7 20 /02 /février /2011 14:03

 

Dernier des films de Hawks avant l'instauration par le Breen Office du "cesser de rigoler" (Le renforcement du code de production qui passe par une auto-censure impossible à échapper, fini de se lâcher!), ce film est une belle préfiguration de l'arrivée d'un nouveau genre. Twentieth century partage avec It happened one night, de Capra, sorti la même année, la réputation d'être à la base d'un genre nouveau, la "screwball comedy", ou comédie loufoque, dont Hawks lui-même, mais aussi Leo McCarey, Preston Sturges, Gregory La Cava écriront de bien belles pages...

Au départ, il y a une pièce de Ben Hecht et Charles McArthur, les auteurs de The Front page... Ils se sont également chargés du script, et le résultat a échoué dans les mains de Hawks, qui n'était pas le premier choix. Il semble que le film ait été prévu pour Roy Del Ruth, qui était un vétéran de chez Sennett, mais dont le style paresseux aurait probablement tout fait rater. La Columbia a donc, avec bonheur, confié la mission à quelqu'un qui n'avait fait de la comédie qu'en quasi-contrebande, mais le résultat, et la carrière qui s'ensuit, prouvent que ça devait arriver un jour de toute façon. Le ton, les échanges à la mitraillette écrit par Hecht et McArthur conviennent à merveille au style direct de Hawks. John Barrymore, en panne de splendeur, a accepté de se livrer à une salutaire auto-parodie, en Oscar Jaffe, un producteur de théâtre autocratique qui découvre une jeune femme (Mildred Plotka) interprétée par Carole Lombard, en fait une star (Lily Garland), et doit ensuite lui courir après, essayant en particulier de lui faire signer un contrat d'exclusivité dans un train, le Twentieth Century Limited, alors que la belle souhaite voler de ses propres ailes.

Les coups bas de Barrymore dans le film, qui s'auto-caricature avec délectation, revoient directement à Svengali et The mad genius, et le film de Mayo et le roman de Du Maurier sont d'ailleurs cités avec gourmandise à plusieurs reprises, soit lorsqu'on compare Lilly Garland avec Trilby, soit lorsque Jaffe lui-même se compare à Svengali; il a même une allusion à l'autre Barrymore, Lionel, à travers une courte mais réjouissante imitation de son rôle dans Sadie Thompson! Les références troublantes à l'alcoolisme du grand homme de théâtre, ainsi qu'à une carrière en chute libre, sont assumées et par l'acteur et par la mise en scène, d'une façon courageuse, et un brin sadique...

Et il y la loufoquerie globale de ce train dans lequel un petit vieux échappé d'un asile, qui distribue des chèques en bois et colle des auto-collants apocalyptiques inspirés par sa religion baptiste partout! un film dans lequel le monde entier tourne autour de deux égo-maniaques accompagnés de leur suite: Walter Connolly en assistant viré quotidiennement par son patron, Roscoe Karns en autre assistant qui porte haut l'alcoolisme que son patron se refuse, et Dale Fuller en camériste avec un dos particulièrement solide...

Mais l'essentiel, dans ce film volontairement surjoué par des égocentriques coupés des réalités, c'est bien sur la drôlerie globale du projet, moins réjouissant peut-être que Bringing up baby, dont la loufoquerie particulière ne pouvait être obtenue que par l'alliage entre Hepburn et Grant, Twentieth Century était en tout cas une excellente façon de démarrer une carrière de metteur en scène de comédie. Et pour Barrymore et Lombard, géniaux y compris dans l'excès, de confirmer ce qu'on savait déjà, c'étaient de sacrés monstres, des monstres sacrés!

 

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Published by François Massarelli - dans Howard Hawks Comédie Pre-code