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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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14 avril 2021 3 14 /04 /avril /2021 10:01

Rachel (Rosemarie DeWitt) se marie, alors sa petite soeur Kym (Anne Hathaway), ancienne toxicomane, revient à la maison. Elle est en clinique de réhabilitation suite à un accident dans lequel, shootée jusqu'à la moelle, elle avait conduit et précipité la mort de leur petit frère Ethan... L'ambiance va être compliquée...

Dès le départ, on est pris en plein dans le tourbillon insupportable d'un mariage en préparatin: c'est un avis personnel, et tranché, mais j'imagine qu'il y a des gens qui aiment ce genre de rassemblement. Pas moi. Kym aimait peut-être ça avant mais ici c'est difficile pour elle, qui est habituée depuis qu'elle passe de longues années à l'écart, à se centrer sur elle, et sur elle seule.

Du coup, elle dérape en permanence, revient toujours à elle, et c'est gênant! Et ça va finalement révéler qu'il y a un éléphant dans l pièce, comme on dit. Même si chacun sait que la mort de son frère a été un accident navrant, tout le monde lui en veut...

A commencer par elle-même.

C'est donc un film douloureux, et pas que dans son histoire: le déroulement est compliqué, avec un choix de caméra embarquée, de plans-séquences... une musique systématiquement diégétique, c'est-à-dire présente sur l'écran (Jonahan Demme avait un sacré carnet d'adresses). Et puis.. c'est un mariage à l'américaine, soit un concours du discours le plus lacrymal...

Alors pour faire court, Anne Hathaway est remarquable. Pour le reste...

 

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme
17 mars 2021 3 17 /03 /mars /2021 16:49

Jonathan Demme  décidé de réaliser un remake, et Regina Lambert est en vacances à la Martinique, loin de son mari Charles. Quelque chose qui nous en dit long sur le fait que son mariage, qui ne date que de trois mois, a du plomb dans l'aile... Pendant ce temps, Charles est, justement, tué: défenestré d'un train... A Paris, Regina va apprendre la tragique nouvelle et faire la connaissance d'un certain nombre de personnes qui lui veulent pour la plupart du mal: un fonctionnaire Américain (Charles avait, entre autres, un passeport Américain), des barbouzes, un mystérieux touriste Américain... Tous en ont-ils après elle, ou après une mystérieuse somme d'argent que Charles aurait dissimulé? 

Toute personne qui a vu Charade sait: argent, marché aux puces, timbres, etc.

Toute personne qui a vu Charade n'a aucune envie qu'on en fasse un remake. 

Toute personne qui a vu The truth about Charlie sait que la personne qui n'a pas envie de voir un remake de Charade a bien raison...

Des raisons, en voici d'ailleurs: Demme voulait surtout réaliser un film à Paris, en hommage à la Nouvelle Vague. Donc certains des cinéastes de la dite tendance sont représentés, cités, ou bénéficient d'allusions (un Docteur Resnais, par exemple, lu sur un agenda). Quand comme moi on n'aime pas les films de la dite nouvelle vague, la sympathie a du mal à se mobiliser... Sinon, le cinéaste, un documentariste reconnu et plus que respecté, a cru bon de brouiller les pistes en adoptant un faux point de vue "urgent" avec prises de vue à la hussarde, et... il se plante à tous les coups. Certes, Thandie Newton, excellente comme d'habitude, n'est pas en cause, mais cette intrigue avait besoin de la magie et de l'illusionnisme, pas de cinéma vérité! La caméra qui bouge tout le temps ne fait que souligner le factice, au lieu de l'enrober de magie... 

Enfin, il faudra expliquer aux Américains: non, nous ne sommes pas obsédés par ce brave Charles Aznavour (ou les films de Trufo). Et non, le béret, sans façons. Malgré toute l'affection que je garde pour le réalisateur de The silence of the lambs et Stop making sense, je nomme ce film le navet du jour.

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme Navets
16 avril 2020 4 16 /04 /avril /2020 18:41

Pourquoi effectuer un remake d'un film qui fonctionne encore totalement? Sans doute pour les mêmes raisons qu'on joue encore les pièces de Shakespeare aujourd'hui, sans doute. Si on a plus que des réserves à l'égard de The truth about Charlie, le film de Demme dans lequel il a décidé de refaire Charade (hum...), il y a énormément à glaner dans The Manchurian Candidate, remake lui aussi d'un (excellent) film de John Frankenheimer réalisé en 1962. L'intrigue a été bien plus qu'actualisée, et à la lumière de la politique, des médias, et de l'état d'esprit général de l'après 11 septembre, il m'apparaît comme une oeuvre majeure...

Rescapés d'une mission durant la guerre du Golfe, deux anciens soldats, le Major (anciennement capitaine) Marco (Denzel Washington) et le Sénateur (anciennement sergent) Raymond Shaw (Liev Schreiber) vont tous deux se retrouver mêlés dans une étonnante affaire: le mois de novembre approche et l'un des partis en est encore à la nomination du candidat au poste de Vice-Président. Poussé par sa mère (Meryl Streep), le héros Raymond Shaw va finalement emporter la nomination. Marco, son ancien supérieur, se rend compte qu'ils ont en communs des pans entiers de phrases quand ils se réfèrent à certains souvenirs de guerre, et alerté par un ancien camarade de combat (Jeffrey Wright) qui a des rêves de plus en plus éclairants, Marco en vient à douter de la réalité de ses propres souvenirs, et du fait que Shaws soit un véritable héros de guerre...

Demme a toujours assumé une double casquette de cinéaste du vécu, dans une oeuvre documentaire et musicale (Stop making sense est encore dans tous les esprits) d'abord, et de cinéaste romanesque, dans des oeuvres de fiction brillantes: The silence of the lambs et Philadelphia sont là pour en témoigner, deux films qui entre-mêlent brillamment le vrai et le faux. Mais ce nouveau film est un thriller paranoïaque, tourné en 2004, autant dire à la fois post-11 septembre et post-X files! Mais justement Demme sait que le public du début du 21e siècle est rompu aux machineries complexes, et va pouvoir sans problème le suivre pourvu que son film soit bien construit. Pour ça, il n'avait aucun souci à se faire...

Mais entendons nous bien: il ne s'agit pas ici de faire son petit Oliver Stone et d'accuser à tour de bras les politiciens de fabriquer des candidats à coups d'implant. Le film est d'abord un thriller, un vrai, étanche et fourni en acteurs de premier plan. Outre les noms déjà mentionnés, on apercevra ici Jon Voight, Vera Farmiga, Bruno Ganz... Et tout le petit monde de Demme, qui le suit depuis tant de films. C'est un vrai plaisir de suivre le Major Marco dans le dédale de son enquête, et Meryl Streep se comporte en totale diva Hollywoodienne, délivrant un superbe numéro de premier choix; pas la peine d'y croire, on n'est pas là pour ça...

...Même si c'est tentant, bien sûr, mais je le répète: Demme n'est pas un complotiste, juste quelqu'un qui est suffisamment un connaisseur des médias pour savoir quel rôle il peuvent jouer. Car la force du film c'est de proposer, derrière l'intrigue délirante (et qui retranscrit assez fidèlement l'inquiétude des années 60, réactualisée à l'aune des années du terrorisme, et de la guerre aux infidèles menée par George Bush et sa clique), une image de la politique d'aujourd'hui, faite de carrières sur mesure déguisée en vocations divines, et aussi de nous rappeler de quelles façons les médias ont aussi leur mot à dire. Tout le film se déroule dans un environnement envahi par les médias, et c'est peu dire de rappeler l'importance, dans le thriller, du signe. Ces objets qui vont jouer un rôle dramatique, et souligner, compléter, informer, voire faire rebondir l'intrigue: gros titres de journaux, écrans de télévision, mais aussi photos, coupures de magazines ou les "passes", ces cartes informatisées qui sont fournies aux visiteurs dans les grands événements. Toute la mise en scène de ce film est un jeu de piste fait de ces signes, qui mènent tous à un moment, un événement programmé, qui ne nous sera révélé qu'au bon moment.

Et il se dessine une figure bien laide du monde dans lequel la vérité n'est plus que très relative, et où un candidat peut devenir président non parce q'il a des mérites, mais parce que son plan médias, comme on dit, est meilleur que celui des concurrents. La seule chose que n'avait pas identifié Demme ici, c'est l'importance es réseaux sociaux, remplacés ici par les réseaux tout court: ce fameux groupe Manchurian Global, une entité fictive bien sûr, et qui représente à lui tout seul, une fois de plus symboliquement, ces lobbies politiques qui vont se placer derrière des candidats et décrocher le jackpot: les hawks de George Bush, les infortunés de TF1 qui croyaient voir en Michel Noir un présidentiable (et se sont rattrapés sur le candidat Edouard Balladur, lors de la présidentielle de 1995), ou encore les sbires rassemblés autour de steve Bannon pour faire élire Donald Trump...

Le film n'est qu'une fiction; dans la fiction, on utilise des implants... Dans la réalité, il suffit de surfer sur la bêtise des gens.

 

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme Noir
25 mars 2019 1 25 /03 /mars /2019 17:25

Décembre 1983: les Talking heads investissent les planches du prestigieux Pantages à Los Angeles, qu'ils comptent bien remplir de gens et de sons. Le concept, pour ce groupe fer de lance de la New Wave Américaine, est de reconstruire littéralement un groupe et son public à partir de rien: David Byrne (Chant, guitare) arrive donc sur une scène nue et pas préparée, une guitare à la main, et s'approche du micro pour chanter Psycho Killer, le premier single du groupe (de 1977), seulement accompagné d'une cassette dont le son vient d'un gros magnétophone posé à ses pieds: un ghetto blaster, comme on disait alors, en cette époque de fusion des genres et de rap naissant.

Puis il est rejoint par la bassiste du groupe Tina Weymouth, pour interpréter Heaven; Chris Frantz (batterie) et Jerry Harrison (Guitare et claviers) les rejoignent sur respectivement le troisième et quatrième morceau, puis les musiciens continuent à s'ajouter à la formule, pendant que les petites mains s'affairent à construire au fur et à mesure le décor du spectacle. Une fois tout ce petit monde (avec en plus des quatre membres, rien moins que cinq musiciens: deux choristes, un guitariste, un clavier et un percussionniste) en place, la mise en scène continue, constamment changeante: des projections font évoluer le décor, Byrne et Weymouth changent de tenue, cette dernière chante d'ailleurs une chanson (Genius of love) en grande prêtresse de l'encore plus avant-gardiste Tom Tom Club, et un éclairagiste se promène tranquillement dans les rangs des musiciens pour les illuminer de spots qui projettent des ombres changeantes...

Et durant tout ce temps, le groupe assure. Certes, en cette fin 1983, le groupe est plus qu'installé et respecté. Mais la façon dont le concert se passe est purement magique: une énergie folle de tous les instants anime ces neuf musiciens, les chansons sont une fusion constamment excitante de simplicité harmonique et de polyrythmie avancée, l'Afrique (dont le groupe a commencé à s'inspirer avec le superbe album Fear of music en 1979 est ici combinée d'éléments funk particulièrement bien assumés... qu'ils soient membres permanents ou "employés", les neuf artistes donnent tout et sont traités à même enseigne, par un David Byrne qui assure à lui tout seul une partie impressionnante du show, mais l'essentiel, bien sûr, c'est la musique: et là, on est servi, le groupe ayant suffisamment de bonnes choses à son actif pour que le spectacle soit réussi. Donc, pas un seul temps mort, pas un moment de repos.

Et on voit bien ce qui a intéressé Jonathan Demme, un documentariste passé chez Corman, ou un fictionniste chevronné fasciné par l'intrusion du documentaire, on ne sait plus très bien: car un groupe qui expose sa mise en scène dans toute sa nudité, tout en jouant live des chansons que personne ne peut réussir - ou rater- à sa place, c'est du pur documentaire avec de vrais morceaux de tension dedans, et ça peut, si c'est bien fait, faire un film formidable.

Et c'est exactement ce que les Talking heads et Jonathan Demme ont fait: un chef d'oeuvre, de part et d'autre. Le metteur en scène, qui fera interpréter live la chanson Heaven dans Philadelphia (où Denzel Washington citera aussi le titre de la chanson Making flippy floppy) se souviendra longtemps de cette expérience enrichissante.

PS: oui, bien sûr, les Talking heads interprètent les fabuleux Once in a lifetime, Life during wartime et Take me to the river

 

 

 

 

 

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Published by François Massarelli - dans Musical Jonathan Demme Danse
12 février 2019 2 12 /02 /février /2019 11:23

Après les triomphes de The Silence of the lambs (1991) et Philadelphia (1993), l'ascension de Jonathan Demme marque un brutal coup d'arrêt avec la sortie de ce long métrage adapté d'un roman épique, primé, mais aussi dur et controversé: Beloved n'est rien d'autre qu'une épopée Américaine intime qui sonde la part indélébile de l'esclavagisme et du racisme, et le fait en termes pas vraiment aptes à rencontrer le grand public... Toni Morrison a été fêtée, mais aussi vivement critiquée pour le manque total de concessions de son roman (paru en 1987), et Demme qui fera face à un consensus critique positif, devra aussi composer avec un public ouvertement hostile. Ce qui ne sera pas la première fois, puisqu'on se rappelle de la réception houleuse de The silence of the lambs avant son énorme succès, mais cette fois, le film ne marchera pas. Au passage, s'ils vont énormément le regretter compte tenu des sommes engagées dans la production, je ne parviens pas à comprendre comment Disney a bien pu (via le label Touchstone) produire ce film!

En 1873, en Ohio (un état Nordiste situé juste au dessus du Kentucky, sur la route historique des esclaves en fuite), une petite communauté noire vit dans les environs de Cincinnati. C'est ici que Paul D. Garner (Danny Glover) retrouve son amie Sethe (Oprah Winfrey), une ancienne esclave enfuie comme lui, qui vit avec sa fille Denver (Kimberley Elise): elles vivent dans une maison hantée, car la fille aînée de Sethe est morte encore jeune, c'est du moins ce que sa mère prétend... Par ailleurs, d'autres personnes ont vécu avec elles: les deux fils de Sethe, qui se sont enfuis une nuit compliquée dans le prologue spectaculaire du film, et sa belle-mère, décédée depuis...

Paul s'installe, et la vie reprend son cours, néanmoins Sethe qui cache manifestement des secrets, vit volontiers à l'écart des autres... Un jour, une jeune femme (Thandie Newton) fait son apparition dans la maison, une mystérieuse jeune noire, habillée de neuf, entièrement de noir. Elle se présente comme étant Beloved (bien-aimée), et est clairement dérangée. Sethe, Denver et Paul vont s'occuper d'elle... et elle va s'occuper d'eux.

Hautement symbolique, systématiquement situé dans un cadre très réaliste, le film est pourtant une double histoire de fantômes: deux esprits qui hantent Sethe, l'un sous la forme d'un poltergeist, et l'autre sous la forme d'un être de chair, mais le plus inquiétant n'est pas celui qu'on croit. Les secrets inavouables de Sethe sont bien sûr la base de cette situation, mais le spectateur aura toujours une longueur d'avance sur les personnages, puisque nous sommes prévenus assez tôt, dès le premier plan.

Mais le but de Demme (et d'Oprah Winfrey qui a produit le film et s'est énormément impliquée) n'est pas de nous amener à voir un film confortable, loin de là: Beloved est un film dur, complexe (beaucoup de flash-backs qui ne seront pas toujours très explicites), violent et jamais confortable: il y est question de la survie après l'esclavage, et des choix abominables qu'il faut parfois faire. On y croise une bonne part de l'héritage folklorique des anciens esclaves, fait de religion "homemade", de superstition et d'une grande dose de contes terrifiants... Cette difficulté narrative est un héritage du roman, et plutôt que de nous aliéner, elle rend le film plus attachant encore. Certes, les tenant d'un classicisme plus rassurant passeront leur chemin, mais le film, au long de ses presque trois heures, à beaucoup à donner... Pourvu qu'on veuille bien le prendre.

 

 

 

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme
27 février 2018 2 27 /02 /février /2018 09:41

Il est plus question de papillons que d'agneaux dans ce splendide film de l'ex-documentariste Jonathan Demme, qui s'intéresse précisément à l'étrange période d'entrainement d'une jeune femme sur le point de devenir un agent du FBI, Clarice M. Starling (Jodie Foster). Quand le film commence, cette dernière est en pleine course, dans le cadre intensif de son entrainement. On en aura la confirmation très rapidement, Clarice n'est pas encore intronisée agent du F.B.I., d'où une nette impression que les pas qu'elle va faire dans le cadre de cette enquête qu'on lui confie, d'abord par petits bouts, sont cruciaux... Et bien sûr, les deux heures de ce film sont le récit initiatique d'une chrysalide stagiaire qui devient à son tour un papillon du FBI!

Et pourtant, ce qu'on lui demande, dans un premier temps, est très vague: son supérieur veut que la jeune femme essaie de persuader un psychiatre enfermé, le docteur Hannibal Lecter, de collaborer depuis sa cellule avec le FBI. Elle l'apprendra plus tard, en réalité, on souhaite ardemment son aide dans le cadre d'une enquête brûlante, pour attraper "Buffalo Bill", un psychopathe qui a déjà laissé plusieurs cadavres de femmes derrière lui, et qui s'apprête à frapper à nouveau. Bref, on utilise Starling, ou du moins, on lui donne un minimum d'informations, d'une part pour ne pas la mettre en danger, et d'autre part, quand même pour la tester.

Et ce n'est pas rien, car partout où elle va, ce petit bout de femme se heurte à la masculinité sans fards de ses collègues stagiaires (qui se retournent sur son passage avec des regards qui en disent long), de son supérieur (Venez me parler en privé, shérif, je ne voudrais pas effaroucher ma jeune et jolie stagiaire), du docteur Chilton, directeur de la prison psychiatrique pour criminels dangereux (Un séducteur de la pire espèce: persuadé qu'il est séduisant, alors que...), mais aussi des policiers et techniciens de la police scientifique rencontrés sur le terrain, ou bien sûr les criminels qui entourent le Dr Lecter.

Mais pas ce dernier, qui lui manifeste un respect, une courtoisie pour reprendre ses mots, qui le rendraient presque sympathique, si ce n'était une stratégie d'une part, et s'il n'entrecoupait leurs aimables conversations de références à ses dîners cannibales!

Un film qui est d'abord la rencontre entre un monstre et une héroïne en devenir, confrontée à un cauchemar total pour sa première mission d'envergure. Clarice est coincée entre ses trois pères: le vrai, décédé quand elle était encore une enfant, le père officiel de substitution, le parfois décevant supérieur hiérarchique Jack Crawford (Scott Glenn), et le père inattendu, celui qui va paradoxalement lui apporter peut-être le plus: Hannibal Lecter (Anthony Hopkins), psychopathe enfermé et consultant occasionnel dans les affaires de dingues, qu'on ne présente plus.  Et Demme, qui a dit et répété qu'il n'était pas intéressé du tout par les histoires de serial killer, a pourtant fait ce film... Mais le metteur en scène y était attiré en raison d'un personnage fascinant, celui de Clarice Starling justement. Comment une femme va devoir affronter les monstres modernes, pour elle mais aussi afin de devenir une héroïne, et afin d'exister: vous avez remarqué? Comme dans Philadelphia deux ans plus tard, Demme fait tout pour nous cacher la vie privée de Starling, dont on sait juste qu'elle vit en colocation avec une collègue de l'académie, et dont on connaît mieux le passé: la mort de sa mère, celle de son père policier quand elle avait dix ans, et une grosse revanche à prendre sur la vie et la solitude. Et au criminel surnommé "Buffalo Bill", qui convoite ce à quoi il n'a manifestement pas droit, le film oppose Starling, qui mérite ce qu'elle va devoir prendre à coup de flingue s'il le faut: c'est un film dans lequel une femme, clairement, prend le pouvoir, et Jodie Foster n'est pas pour rien dans la réussite absolue du film.

Demme, dès le départ, fait semblant d'entrer dans cette histoire derrière Clarice, comme si celle-ci était suivie d'une équipe de tournage. c'est l'un des atouts majeurs de ce film dont la stylisation  passe justement par l'apparente absence de style. Mais tout est dans le détail (Y compris ou surtout pour Lecter, le fou furieux auquel rien n'échappe, pas même le parfum que Clarice utilise parfois, "mais pas aujourd'hui"...), dans l'accent d'un personnage, dans la prononciation d'une syllabe, dans le plan aussi. Et dans le montage de Craig McKay, bien sûr, on a tous en mémoire deux séquences de haute volée dont Demme n'a pas souhaité revendiquer la paternité, et qui ont assuré la renommée de ce film et ne sont sans doute pas pour rien dans son succès, ainsi que dans le fait que Silence of the lambs ait décroché l'Oscar du meilleur film: pas mal pour un film policier... Le monteur a suggéré à Demme de bouleverser l'orodonnance d'une bobine entière afin de faire monter la température du public... Et ça marche!

Avec ses deux stars, Anthony Hopkins dans le rôle de sa vie et Jodie Foster qui est particulièrement impressionnante, Demme a sans doute plus et mieux montré avec son film qu'on ne le fera jamais dans les infos télévisées du monde entier. Son film a revitalisé et même changé le visage du genre policier pour longtemps, et on a très rarement fait mieux depuis. 

 

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme Noir Jodie Foster Criterion Yum yum
25 novembre 2017 6 25 /11 /novembre /2017 10:11

Après The silence of the lambs, on n'attendait sans doute pas ce film... Jonathan Demme non plus, d'ailleurs. Il a mis cette nouvelle aventure en chantier à la suite de deux événements: d'une part, l'annonce par un de ses amis qu'il était atteint du SIDA, et d'autre part le fait que la communauté gay Américaine reproche au fabuleux thriller du metteur en scène, qui venait par ailleurs d'obtenir un succès phénoménal ainsi qu'un des plus mérités parmi les Oscars du meilleur film de l'histoire, un personnage qui pouvait être interprété comme une vicieuse image d'homosexuel criminel. Ce n'était pas l'intention, mais Demme a conclu qu'il était peut-être temps que le cinéma des studios fasse son examen de conscience et avance enfin, afin d'intégrer dans le bon sens l'homosexualité.

Oui, l'homosexualité, pas le SIDA: c'est l'un des atouts majeurs du film, de montrer que la maladie, à son arrivée, a été immédiatement assimilée à la communauté homosexuelle, et est devenue dans l'attitude du grand public une façon d'exprimer le rejet de ces gens différents; on se rappelle, et si ce n'est pas le cas, autant le redire, ce sera éducatif, d'un candidat à l'élection présidentielle de 1988 en France, qui avait mis dans son programme l'idée de rassembler les gens atteints de la maladie dans des camps. 

Prenant acte de la confusion entre homosexualité et SIDA, et de la nécessité d'un cinéma au plus près de la réalité, le metteur en scène a installé son petit théâtre dans la ville même de Philadelphia, et a investi les hôpitaux, tribunaux et cabinets d'avocats dans la "cité de l'amour fraternel", le surnom de l'ancienne capitale des tous jeunes Etats-Unis...

Andrew Beckett est un avocat brillant, doté d'un charisme et d'une énergie phénoménale. Il est promu d'une façon spectaculaire par ses patrons, et l'avenir ne peut que sourire... Sauf qu'il est séropositif, suite à une rencontre malheureuse dans les années 80, et qu'il a beau tout faire pour combattre la maladie, celle-ci tend à prendre le dessus. Et suite à un épisode malheureux (un dossier crucial sous sa responsabilité, qui s'est mystérieusement perdu), le jeune avocat est licencié. Il ne croit pas à la thèse de l'incompétence, pense tout simplement qu'il a été viré dans des circonstances illégales et entend attaquer son ex-cabinet pour discrimination: il est persuadé que son état de santé a fini par persuader ses partenaires de se débarrasser de lui, à partir du moment où ils ont vu et compris ce qu'il se passait. Tout ce qui précède nous établit Andrew Miller comme un avocat doué, réactif, et dynamique. En dépit ou à cause de l'épée de Damoclès qu'il se trimballe durant tout le film...

Andrew Beckett va faire appel à un avocat inattendu, Joe Miller, le contraire d'un ancien d'Harvard: un afro-américain, doué, mais mal dégrossi. Obsédé par sa propre publicité tellement il peine à se faire connaître, c'est un brave homme, un peu conservateur, et franchement homophobe. Il le reconnaît volontiers... Mais s'il y a  une chose qu'il n'aime pas, c'est bien la discrimination. Là encore, Miller est un personnage entièrement défini par ses actes, et par sa vie, sans aucun excès ni stéréotype.

Le début est sans équivoque: Demme place sa caméra dans les rues de Philadelphia, et filme les gens qui vivent, avancent, jouent, courent, marchent, travaillent... Le documentariste qu'il n'a jamais cessé d'être dispute avec une grande élégance la première place avec le réalisateur de fiction qui nous a donné un thriller impeccable juste avant. Mais il n'y aura jamais conflit, le film est aussi bien l'oeuvre de l'un que celle de l'autre... Et c'est sa plus grande force. car le but de Ron Nyswaner, scénariste, de Tom Hanks et Denzel Washington, acteurs (un duo qu'on suivrait jusqu'au bout du monde), et de Demme est d'inscrire leur histoire dans le monde de 1993, et de plonger le spectateur dans la lutte des gens qu'il dépeint pour qu'on accepte enfin la différence. Le film est truffé de références à la réalité, mais aussi à l'attitude des vrais gens, à travers les décors, les lieux, les séquences parfois inutiles au script, mais essentielles à l'atmosphère: le regard presque hypnotisé d'une personne sur les lésions présentes sur la nuque de Beckett, une engueulade entre le partenaire de Beckett et son médecin, et un plan qui voit le père d'Andrew quitter les toilettes avant de rejoindre la salle du tribunal: autant de moments qui nous rappellent qu'on est autant devant la vie que devant la fiction... 

Et les scènes de procès, qui font partie bien évidemment d'un genre à part entière, dont Philadelphia est l'un des plus beaux représentants, son passionnantes à elles seules, montrant les mécanismes internes, les compromis, les improvisations. A ce jeu, Denzel Washington est fabuleux, mais il ne faudrait pas oublier l'excellente prestation de Mary Steenburgen, qui joue un personnage d'avocate du diable, souriante (C'est Mary Steeenburgen vous dis-je!), admirablement charmante... et diaboliquement ironique, quasi-méchante. Sauf que... elle fait son métier, tout bonnement.

Et Tom Hanks, récompensé par un Oscar, là encore j'insiste, mérité, fait un boulot formidable: d'une part il forme à l'écran un couple avec Antonio Banderas qui a le bon goût d'être le reflet exact de ce que vous connaîtriez d'un couple, à moins que vous ne suiviez vos amis dans la chambre à coucher! Et Beckett souffre, physiquement. Hanks ne s'est rien épargné pour nous le faire savoir: maquillage, jeux de lumières, prothèses, mais aussi tonte intégrale des cheveux, ou encore perte importante de poids... Et reprise.

Au final, Philadelphia est un film d'une honnêteté jamais prise en défaut, qui choisit un moment de l'histoire pour montrer de quelle façon le progrès peut parfois s'imposer à nous, naturellement. Mais pour le faire, il nous donne aussi une expérience inattendue: l'idée de l'ensemble de l'équipe était de fournir, avec Andrew Beckett, un ami aux spectateurs, un ami qui allait mourir du SIDA, et de donner toute l'expérience au public. D'où un constat: une bonne mise en scène est toujours une affaire de faire le bon choix. C'est ce que Demme fait ici, pour deux heures d'une expérience émotionnelle qui a l'amabilité de se déguiser en un plaisant film tout public, et de ne jamais totalement nous prendre en otage...

 

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme
26 septembre 2016 1 26 /09 /septembre /2016 16:08

Une petite surprise intéressante que ce petit film, tourné comme en contrebande avec assez peu de moyens, par un cinéaste habitués des coups de poker documentaires. Pourtant c'est une fiction: il raconte un épisode de la vie d'une femme d'un certain âge, comme on dit pudiquement, qui a abandonné sa famille pour vivre son rêve: devenir musicienne et star. Elle est devenue musicienne, oui mais pour ce qui est d'être star, c'est une autre paire de manche... Ricki (De son vrai nom Linda, interprétée par Meryl Streep) est chanteuse et guitariste du groupe Ricki and the Flash, et joue tous les soirs devant un parterre de 15 ou 16 fans qui aiment son rock sans prétention... Mais elle doit retrouver sa famille, car une crise vient d'arriver: sa fille, en effet, divorce alors qu'elle vient de se marier. L'ex-mari de Linda, Pete (Kevin Kline) juge en effet que seule la mère de Julie peut essayer de l'aider. Mais Julie, ainsi que les deux autres enfants, les garçons Josh et Adam, vont ils se laisser envahir de nouveau par celle qui les a abandonnés quand ils étaient enfants?

Une vraie bonne surprise, donc, que ce film situé dans un milieu de petites gens, modestes et qui doivent faire attention à chaque sou, dont des musiciens qui font une musique pour laquelle on ne se réveillerait pas la nuit, mais qui dégage des qualités de rapprochement, de simplicité humaine, qui motive les mêmes gens soir après soir pour aller la jouer ou l'écouter... Car Ricki et ses musiciens, d'une certaine façon, ce sont aussi bien les oubliés du rêve Reaganien (Ricki a enregistré un disque dans les années 80), que les déçus d'Obama. Et à coté, vivent Pete et ses enfants, des bourgeois, dont le rapprochement avec la mère partie va occasionner de l'embarras, de la comédie, des clashs et de la tendresse. Meryl Streep cabotine, oui, mais que voulez-vous on ne se refait pas. Et au moins, si elle chante vraiment, ce n'est cette fois pas du Abba, mais du rock 'n roll. Parfois pouilleux, parfois moins, parfois excellent... Joué en direct par les acteurs. Un film fortement sympathique, qui vous donnera un répit humain essentiel, même si de courte durée...

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme