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15 janvier 2023 7 15 /01 /janvier /2023 15:43

Florian Amidon est un jeune homme bien sous tous rapports, mais sans aucun relief, un employé de bureau tellement effrayé de tout, qu'il n'aspire à rien. Surtout pas à séduire les femmes, car elles lui font peur! Pourtant, il lui arrive une mésaventure peu banale: alors qu'il attend un train, il est assommé par deux bandits... Quand il se réveille, cinq années ont passé, il est dans un compartiment de train, et il ne reconnaît rien de ses affaires, vêtements, etc... Pire, une fois descendu du train, on l'accueille dans une petite ville où on l'appelle Mr Brassfield, et où tout le monde le connaît...

Surtout les dames!

Pour comprendre ce qui lui est arrivé il demande de l'aide à une voyante-hypnotiseuse, qui va lui révéler sa double personnalité: car sous Florian Amidon se cache un homme d'affaires peu scrupuleux, coureur, malhonnête et aux aspirations politiques. Les amis de Florian, déterminés à l'aider, lui demandent de mener à bien les affaires de Brassfield...

C'est le deuxième film de Fairbanks, réalisé à la Triangle, peu de temps après que Griffith l'ait fait venir pour interpréter des comédies. Le premier, The lamb, avait été modelé sur le rôle qui l'avait vu triompher à Broadway, mais globalement le studio ne savait absolument pas quoi faire de lui! D'où un film assez franchement foutraque, dans lequel l'acteur s'amuse quand même un peu à interpréter deux rôles en un... Il y aura des traces de ce film dans la carrière future de l'acteur, puisqu'il reviendra périodiquement aux rôles de grande nouille, que ce soit dans The mollycoddle (1920) ou dans le rôle de l'efféminé Diego Vega dans The Mark of Zorro... 

Christy Cabanne n'a jamais été à proprement parler un réalisateur fascinant, et on sent bien qu'ici il n'y a pas une énergie phénoménale aux commandes de ce petit film fort sympathique, mais aux limites du compréhensible parfois...

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Published by François Massarelli - dans Muet 1915 Douglas Fairbanks *
23 décembre 2022 5 23 /12 /décembre /2022 08:58

Il semble que l'information qui circule autour de ce film de moyen métrage (on annonce 44 minutes pour la version originale, soit trois bobines) soit très incomplète... et le film aussi. Par contre la durée généralement admise, autour de 8 minutes, est à amender: sur l'anthologie des films Russes de Starewitch éditée chez Doriane, le film totalise près de 24 minutes... Mais il y a des sautes de continuité en particulier dans la première partie...

Le personnage principal du prologue est un usurier, et si à aucun moment on n'aura de référence explicite, un nom qui aurait pu nous mettre la puce nauséabonde à l'oreille, ou un élément culturel ou de mobilier qui puisse nous donner des indices, le maquillage du personnage renvoie aux traditions antisémites du roman, et du théâtre: Fagin (Oliver Twist de Charles Dickens) et Shylock (The merchant of Venice de William Shakespeare) ne sont pas très loin... Voilà, c'est dit, on reviendra hélas sur ce chapitre dans un autre film hélas... 

Un usurier, donc, voit sa fin proche et décide, n'ayant pas de descendance, de commanditer un portrait parce qu'il souhaite "vivre après sa mort"... Des années après sa disparition, un peintre talentueux mais sans le sou donne des derniers kopecks pour acquérir la toile, sans bien comprendre ce qui en motive l'achat. Il va en résulter des cauchemars, puis une malédiction: le tableau s'anime dans ses rêves, et lui laisse dans la réalité de l'argent: il va devenir riche, et perdre son talent dans la vie mondaine...

L'allégorie ici est bien sûr consacrée à la valeur d'un art, partagé entre la facilité et le goût d'un public futile (l'écueil dans lequel, sous l'influence du tableau, le peintre va perdre son âme), et un art de la souffrance, du drame, dans lequel un peintre perdra la vie et le confort plutôt que la dignité. Cette morale austère se trouve dans le conte initial de Nicolas Gogol, et donne lieu à des scènes d'angoisse et de hantise, dont le cinéma Russe avait le secret à cette époque lointaine!

Si on cherche la trace de l'animateur Starewitch, on la trouvera dans deux idées de mie en scène... L'une est simple et très efficace: pour signifier la mort du personnage de l'usurier et installer dans l'esprit du spectateur l'incertitude de sa fin et de son destin, un fondu enchaîné le voit littéralement se fondre dans le tableau effrayant qu'il a commandité. Puis une fois le tableau acheté et installé chez le peintre, celui-ci donne un petit coup de chiffon à l'austère toile, couvrant ainsi de sa stature la surface visible du tableau: Starewitch en profite pour utiliser le vieux truc de Méliès de l'arrêt de caméra, et effectuer une transition en douceur entre le tableau et la vision de l'acteur jouant l'usurier dans un cadre vide... C'est très réussi!

 

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Published by François Massarelli - dans 1915 Ladislas Starewitch Muet *
27 août 2022 6 27 /08 /août /2022 16:26

Pas grand chose à glaner aujourd'hui dans un long métrage réduit à 5 minutes de fragments plus ou moins disjoints... Lon Chaney y est un profiteur, fumant le cigare et arborant en permanence un sourire de satisfaction perverse, une attitude qu'il utilisera souvent.

Mais voilà: comme tant d'autres, ce filma été victime du peu d'intérêt que la Universal manifestait pour le devenir de ses films, devenu des produits de saison qui n'avaient plus aucune attraction pour les exploitants et le public une fois leur exploitation finie... du moins le croyaient-ils!

Ida May Park a écrit le scénario, et Joseph de Grasse est le réalisateur, comme souvent pour les films interprétés par Chaney à cette époque. On retrouve d'ailleurs dans ces quelques images la préoccupation de montrer un visage urbain du mélodrame et du crime, qu'on trouvera aussi dans Broadway love de Ida May Park, passée réalisatrice.

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Published by François Massarelli - dans Muet Lon Chaney 1915 ** Joseph de Grasse
11 novembre 2021 4 11 /11 /novembre /2021 11:34

Un mystérieux pirate des airs, Filibus, est un voleur de bijoux hors pair, c'est bien simple, toute la police est sur les dents... Une solution s'offrirait à eux, car comme les Américains de 1950 auxquels ce conseil était prodigué, il leur suffirait sans doute de scruter le ciel... Et aussi de se méfier de leurs préjugés, car ils cherchent un homme, alors que Filibus est...

La baronne de Croixmonde (Valeria Creti) s'intéresse beaucoup aux nouvelles concernant Filibus, encore plus au nouvelles concernant les bijoux, plus ils sont précieux, meilleur c'est. Elle accuse publiquement l'inspecteur Kutt-Hendy (Giovanni Spano) d'être Filibus et entend bien le prouver: cela ne sera pas facile, puisque c'est elle, Filibus! ...Mais elle va essayer, et du même coup, rafler des bijoux, bien sûr, et accessoirement manquer de séduire une fort séduisante jeune héritière: la propre soeur (Cristina Rupoli) de Kutt-Hendy!

Voilà un film qui n'est pas banal. On pourrait tout de suite se dire qu'il est un succédané des Fantômas, les 5 films de Feuillade plus que les romans de Souvestre et Allain. Mais il y a une tentation de gravité chez Feuillade, et une tendance à toujours vouloir rester un pied solidement ancré dans la morale, qui ne se retrouveront pas dans le film de Roncoroni, et pour cause: l'héroïne, clairement, est la voleuse. Et même si la police et les braves gens ne sont pas ridiculisés à tout bout de champ, ils sont souvent des obstacles...

Le film porte plus, selon moi, l'héritage des films Eclair de Victorin Jasset, et leur baroque assumé. Il y a du Protea dans Filibus, d'ailleurs le dernier film de Jasset était déjà marqué par un aspect furieusement parodique... Et tout ici est surtout du plaisir, le plaisir d'accompagner une criminelle sur les lieux de ses exactions, et parfois de frissonner avec elle: une séquence est très claire, et installe un suspense qui nous met totalement du côté de Valeria Creti: Filibus arrive sur les lieux d'un méfait en passant par le balcon, et la caméra la capte depuis la chambre. Elle entre puis ressort et disparaît sur le côté; un policier entre dans le champ par la gauche, et instantanément, nous craignons pour la voleuse, le policier est devenu une menace...!

Une menace bien inefficace, du reste car personne ne s'apercevra que ce bandit masqué, aux moyens bien singulier (c'est un peu un Capitaine Nemo des airs mis sans son exil ronchon, avec des employés casquettés et en uniforme!), ou le jeune comte moustachu qui s'introduit chez Kutt-Hondy pour courtiser sa soeur, sont en réalité une femme, et bien connue par-dessus le marché!

Car Valeria Creti est fantastique, dans un rôle qui requiert une grande crédibilité, et à la fois une féminité assumée ainsi qu'une ambiguité sexuelle marquée. Maintenant on fait grand cas de la présence potentielle d'une intrigue lesbienne dans ce film, il est sans doute aussi possible d'expliquer la présence d'un flirt entre Filibus (sous le déguisement du jeune comte) et Leonora comme un moyen pour la criminelle masquée d'affirmer son déguisement, tout en se livrant à un petit tout pendable pour se payer en secret la tête de son adversaire... 

Mais de fait, voilà un film qui repose sur non une glorification du crime, mais une admission du fait que oui, ça peut être fort distrayant, un bandit qui commet des méfaits... Un film qui repose sur des tromperies élaborées, des déguisements, de la technologie futuriste, et qui nous intéresse aussi fortement à la volonté d'une femme, de damer le pion à ces messieurs... Et en plus, c'est fort bien interprété, d'une clarté narrative accomplie, drôle, et relevé. Bref: un film formidable de 1915!

 

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Published by François Massarelli - dans 1915 Muet Noir **
17 février 2021 3 17 /02 /février /2021 18:26

Je ne vais pas, en dépit d'une forte envie, céder à la facilité qui consisterait en un jeu autour de l'expression "grand souffle", je vais me contenter d'écrire que ce film en manque, justement, cruellement. Et comme le "Grand souffle" en question est celui du patriotisme (cette maladie étrange qui consiste à croire que son pays vaut qu'on meure pour lui), si en vigueur en cette saison 1915-1916, on se doute que l'oeuvrette est un peu pale.

Madame Jeanne Duroc (Musidora) arrive en Provence et elle est secourue lors d'un problème, par un voyou (René Navarre) qui empêche ses collègues de lui faire du mal. Reconnaissante, elle promet à la mère du jeune homme de le faire revenir dans le droit chemin.

...et le droit chemin, c'est celui des tranchées! On assiste donc, dans un film que Ravel tourne dans de glorieux paysages qu'il peine à utiliser, à l'insistance d'une femme vertueuse pour que l'homme qu'elle aime aille se faire flinguer! Cruel destin, que celui d'un couple dans un mélo crétin. Reste le plaisir de voir Musidora en pré-Irma Vep, qui donne la réplique à René Navarre, post-Fantômas!

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Published by François Massarelli - dans Gaston Ravel Muet 1915 *
27 janvier 2021 3 27 /01 /janvier /2021 17:25

Le sujet est mélodramatique à souhait et nous fait craindre le pire: une jeune femme de la bourgeoisie (Fannie Ward) tombe sous le charme d'un homme d'affaires Japonais (Sessue Hayakawa, devenu Birman dans les copies en circulation afin d'éviter de stigmatiser la forte communauté Japonaise de Californie), et lui demande de l'aide lorsqu'elle commet une bourde financière. Sortie d'affaire, elle veut lui rendre l'argent, mais il refuse, sous le prétexte qu'il estime l'avoir achetée. Pour le lui prouver, il la marque au fer rouge. Elle tente de le tuer, juste avant l'arrivée de son mari, qui endosse le crime. S'ensuivent des scènes de procès aux cours desquelles le mari tente d'empêcher la femme de révéler la vérité.

Le film commence par une courte séquence qui nous présente la star Hayakawa, star paradoxale puisqu'il est aussi le génie maléfique du film... Ici tout est dit ou presque: une source de lumière externe, venue de la droite, hors caméra, s'oppose à l'obscurité du plateau. A gauche, une source interne au plan permet de justifier l'éclairage du visage de l'homme. Celui-ci utilise un tampon pour marquer de son empreinte un objet. Tout est dit: le principal acteur est un mystérieux oriental, il est possessif, et a des méthodes radicales pour le revendiquer, et le film sera un manifeste du clair-obscur...

La première surprise, après, c'est le raffinement des décors et des costumes, à une époque ou le cinéma Américain, héritier du plus bas mélo théâtral, ne s'embarrasse jamais de ce genre de détails, et se contente d'utiliser des intérieurs et des toilettes "génériques": on tend ici à croire en l'environnement des personnages, et les scènes de cocktail mondain ajoutent à l'illusion, un peu à la façon des Russes de l'époque, très attachés à la véracité des apparences (On pense à Bauer, et je doute que DeMille en ait eu connaissance); le jeu des acteurs est plutôt sobre, tout en retenue, sauf au plus fort du drame, lorsque les circonstances l'exigent: le marquage est malgré tout filmé avec une certaine sobriété, la caméra se concentrant sur le visage déterminé de Hayakawa. On évite l'hystérie de la victime. Par ailleurs, le mari (Jack Dean) reste lui aussi sobre. On sent une direction d'acteurs avare en effets, de manière à laisser le champ libre au travail visuel.

Et c'est bien sûr dans ce travail de mise en images que l'on retrouve les plus grandes qualités du film, dans un montage parfait, se faisant oublier, mais toujours fluide, sans ces longs plans qui alourdiront les films parlant du maitre (The sign of the Cross ou Cleopatra en montrent de nombreux exemples); ici, l'utilisation fréquente d'inserts, savamment dosée, maintient l'intérêt au même titre que les gros plans des acteurs. Le tout permet une grande lisibilité (une remarque toutefois: sur la plupart des copies, un insert nous montre un journal daté de 1918: il s'agit de la ressortie de 1918, altérée par le changement de nationalité du protagoniste) La plus grande qualité du film, et de DeMille nous soufflerait Brownlow, c'est la science de l'éclairage. Au moment crucial, le metteur en scène et son équipe nous limitent volontairement le champ de vision, n'éclairant que partie du drame, filtrant l'action, en écho aux tromperies en jeu à l'écran: Fannie Ward, fuyant dans la pénombre vers le rendez-vous fatal, ne remarque pas le visage de son mari, qui nous a été partiellement révélé. Je parlais du décor, ici, il disparaît totalement. Ensuite, la lumière étrange du domicile du Birman enveloppe le drame qui s'y joue d'un voile sordide, dont on nous a d'ailleurs prévenu: pour la séduire (l'envoûter?), Hayakawa montre à Ward une statue de Bouddha, et l'éclaire différemment, la rendant tour à tour mystérieuse (derrière un écran de fumée) ou anodine, à l'instar de leur pacte, tour à tour amical (le prêt) ou sordide (le pacte sexuel); le tout ressemble furieusement à une réflexion cruelle sur la mise en scène dans les commerces humains.

Il est hélas inévitable, en 1915, et c'est le point le plus embarrassant du film, que le Birman soit le plus fourbe d'entre les protagonistes, mais les commentateurs qui s'indignent aujourd'hui du racisme du film vont peut-être un peu loin dans le "Politiquement correct". Un autre aspect mériterait sans doute d'être développé, concernant la forte misogynie du film; si le mari est un héros, la femme est assez clairement une idiote... Toutes ces considérations sont sans grande importance: DeMille était un showman, puisant dans le vivier des idées reçues afin d'alimenter ses histoires en images, et ce film est un grand show, proposant 59 minutes de divertissement digne d'inaugurer la grande série des drames/comédies matrimoniales qui allait suivre...

 

 

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Published by Allen john - dans Muet Cecil B. DeMille 1915 *
24 mars 2020 2 24 /03 /mars /2020 18:29

Les années (19)10, ça a l'air reculé comme ça, mais il y a un point sur lequel nous aurions des leçons à prendre: les femmes étaient non seulement acceptées au poste de réalisatrice dans les studios Américains, mais la pratique était encouragée. Il était bien vu de confier une production à une réalisatrice, et c'est ainsi qu'ont pu travailler Lois Weber, Ida May Park, et Elsie Jane Wilson, entre autres. Ivers était scénariste et en 1915, elle a tourné ce premier de quatre longs métrage...

Hélas, si les studios étaient plutôt avancés en 1915, les hommes ont vite repris le dessus, et l'incurie de la préservation des films de l'époque aidant, on n'a que peu de traces de ces oeuvres. Par exemple, il ne subsiste de ce film qu'une seule bobine, la quatrième...

Elle est remarquable: il y est question d'une partie de carte qui dégénère, à cause d'un tricheur, et le montage nous fait évoluer de point de vue en point de vue  avec un gros plan sur la main du tricheur... Le perdant va s'attirer des ennuis et entraîner un ami dans sa chute, qui pour le couvrir va falsifier les comptes de la banque où ils travaillent tous deux: une belle séquence en montage parallèle. Voilà, c'est à peu près tout... Ah, j'oubliais, un "jeune" acteur débute avec ce film, il s'appelle George Fawcett, et on ne peut pas le rater... C'est lui qui interprétait le rôle principal du film, dans un arc narratif quasiment absent de la bobine: il était un juge intransigeant dans les tribunaux, qui se rattrapait ensuite en s'investissant dans l'aide aux familles de ses "victimes"...

 

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Published by François Massarelli - dans Julia Crawford Ivers Muet 1915 **
29 février 2020 6 29 /02 /février /2020 09:01

Ce film est un cas à part, y compris dans le contexte parfois franchement baroque du cinéma Italien des "divas " des années 10! Il est l'adaptation d'un poème de Fausto Martini, une variation sur Faust au féminin. Non seulement il a été conçu comme un "véhicule" pour Lyda Borelli, mais il était accompagné 'une partition très élaborée de Pietro Mascagni, faisant du film une sorte d'opéra cinématographique!

La respectable vieille dame Alba d'Oltrevita (Lyda Borelli) aime à s'entourer de jeunes personnes dans sa demeure, mais ils lui rappellent cruellement la vérité sur son sort. Passant devant une toile présentant Faust et Mephisto, elle émet le souhait d'être confrontée comme le vieux Faust à une nouvelle jeunesse... ce qui n'est pas tombé dans les oreilles d'un sourd: Mephisto (Ugo Bazzini) l'a entendue, et le tableau s'anime.

L'accord conclu entre le démon et la vieille dame est simple: elle va récupérer sa jeunesse et sa beauté, mais a l'obligation de ne pas tomber amoureuse. Et bien sûr elle accepte...

Dans la première partie, Alba tourne la tête d'un jeune homme, Sergio (Giovanni Cinni) qui ne l'intéresse pas du tout. Elle préfère passer du temps avec le frère de celui-ci, Tristano (Andrea Habay) qui est venu pour lui demander de cesser ses manigances, et bien entendu, elle tombe amoureuse, ce qui va précipiter les deux frères dans la mort...

Oxilia a conçu le film en trois parties distinctes, un prologue donc, la première partie qui laisse la place au lyrisme et dans laquelle Lyda Borelli se retrouve très entourée. Mephisto est généralement dans l'ombre, mais au fur et à mesure de l'avancée de la situation, les figurants disparaissent... La deuxième partie, qui vient après la révélation de l'amour d'Alba pour Tristano, est quasiment un solo de l'actrice, qui joue comme elle savait le faire, des pieds à la tête: son jeu n'est ni timide, ni mesuré, mais elle réussit à éviter le ridicule en maintenant un répertoire d'expressions magistral. Oxilia se plait à filmer avec adresse tous les éléments de l'immense propriété où se situe l'action, trouvant toujours des solutions personnelles pour cadrer l'actrice derrière des filtres, des éléments de décor, des branchages... Le cinéaste profite aussi d'une belle lumière estivale.

Un élément essentiel du film, outre sa partition, est la couleur: teintes, mais aussi pochoirs, sont utilisés dramatiquement. Alba et Mephisto en particulier bénéficient d'un traitement de faveur, puisque dans de nombreuses scènes ils sont les seuls à avoir été colorés: Mephisto en pourpre, et Alba en fuschia... Ce dispositif particulier est l'un des éléments qui ont fait que la sortie du film a été retardée, jusqu'à juillet 1917, peu de temps avant la mort d'Oxilia.

Ce reflet extravagant d'une autre époque, mais aussi d'une confiance inconditionnelle dans les pouvoirs du cinéma, cette fois allié aux autres arts, est de ces oeuvres qui ne peuvent laisser indifférent, et qui plus de cent années plus tard, intriguent forcément... A voir donc à tête reposée, dans les meilleures conditions possibles, soit avec ses couleurs et sa musique.

 

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Published by François Massarelli - dans 1915 Nino Oxilia Muet Lyda Borelli *
24 février 2020 1 24 /02 /février /2020 13:32

C'est le premier film d'une série de cinq, qui seront tous réalisés par Sandberg. Tous n'ont pas survécu, et ce moyen métrage qui devait totaliser environ 40 minutes n'est pas non plus complet: il y manque un début qui aurait été une exposition... Cela étant dit, étant admis qu'on ne me fera jamais dire qu'il est bénéfique qu'un film se voie privé d'une partie de son métrage, le fait est qu'en l'état, ce film policier commence de la plus belle des façons, par une poursuite spectaculaire...

Le titre de la "série", tout d'abord": il signifie tout simplement "l'homme au doigt manquant"... On est en plein dans une période de création d'un genre, le cinéma policier, sous l'influence de Jasset et Feuillade, et Sandberg sacrifie au principe d'un héros et d'un anto-hérs récurrents, comme Fantômas et Juve dans les cins films de Feuillade, qui inspireront à peu près tout le courant policier (Lang en tête!) pour le reste du cinéma muet et même au-delà...

Deux policiers, Jackson (Alf Blütecher) et Warren (birger Von Cotta-Schonberg), sont à la poursuite d'un dangereux malfaiteur, Smith (Aage Hertel), qu'ils soupçonnent d'être le mystérieux bandit au doigt manquant, et il leur échappe. Par un stratagème, il les attire tous deux, séparément, dans une villa, afin de se débarrasser d'eux: ils sont tous deux, prisonniers, alors qu'une bombe va exploser... Notons que dans les copies Anglophones, Jackson devient Stacey et Smith le moins transparent Morton.

Coups de théâtre, poursuites, déguisements, ligotages, séquestrations, sauvetages de dernières minutes... Avec de telles situations, on ne s'étonnera pas que Sandberg, sous l'influence des styles baroques de Feuillade et Jasset, se jette à fond dans la bataille du suspense, et ça marche... Le film est sans doute un modeste effort, un complément de programme destiné à fidéliser les foules comme il en existait des tonnes dans toutes les cinématographies durant les années 10, mais il est très réussi...

 

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Published by François Massarelli - dans 1915 A.W. Sandberg Muet Noir
17 février 2020 1 17 /02 /février /2020 09:43

Aux tous débuts du western, d'une part il s'agit de bien comprendre qu'il n'y a aucun besoin de vernis passéiste ou de distance mythique: ce qui rend les westerns des premiers temps précieux, est le fait que nombre d'entre eux sont strictement contemporains! Ce qui n'est pas forcément le cas, mais il y a néanmoins toujours des liens avec la vérité; ce film a été produit en réaction à la multiplication des films produits par d'anciens bandits, le plus célèbre étant Al Jennings qui dans la plus pure tradition du western, avait une façon bien à lui de se mettre en avant. Des anciens hommes de loi ont donc décidé d'utiliser l'arme du cinéma eux aussi, pour rappeler les spectateurs à une certaine décence vis-à-vis de la loi!

Ainsi Bill Tilghman, qui ne se met pas trop en avant, nous montre dans ce film la façon dont les forces de l'ordre balbutiantes du territoire de l'Oklahoma ont fait face à des bandes organisées qui écumaient la région. Le film est fortement authentique, du moins dans la partie qui nous est parvenue: une seule bobine sur les six du long métrage a survécu, mais on y sent un réalisme et un besoin de règlement de comptes particulièrement marqués, comme dans cette scène finale où les bandits abattent gratuitement un passant, suivi d'un intertitre: c'est parce qu'ils sont comme ça que ce sont des bandits...

Bref, on est loin, très loin, de la vision romantique du hors-la-loi comme un Robin des Bois moderne...

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Published by François Massarelli - dans Muet Western 1915 *