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A l'automne 1925, Max Linder et son épouse Ninette Peters ont selon toute vraisemblance fait un pacte de suicide, c'était leur deuxième tentative, et on n'en sait guère plus, si ce n'est que l'un et l'autre étaient depuis longtemps psychologiquement fragiles. Ils ont donc laissé derrière eux un enfant, une fille: Maud, élevée par sa famille, a donc grandi dans une relative ignorance de ces parents, et surtout de ce père, dont elle fait ici le portrait à partir des images qu'il a laissées et qui ont survécu...
Le parti-pris est donc biographique, cinématographique (il s'agit de replacer Linder dans une histoire d'un art qui l'a pour une grande part totalement oublié), historique, et surtout extrêmement personnel, comme si Maud cherchait à provoquer une intimité factice avec ce père flamboyant, si présent mais aussi si absent: dans leur vaste majorité, les images qu'elle utilise sont après tout des oeuvres de fiction, et elles mentent par essence, donc c'est et ce n'est pas Gabriel Leuvielle, dit Max Linder, sur l'écran...
C'est me dernier acte d'une longue quête personnelle, qui avait commencé par la compilation de trois longs métrages En compagnie de Max Linder sortie 20 ans plus tôt: dépositaire des films de son père, Maud Linder a sans dote eu un peu trop tendance à tailler dedans, comme pour les rendre un peu plus attrayants, ce qui n'arrange pas les choses. Reste que les extraits présentés ici, qui sont soit choisis pour leur capacité à illustrer certains aspects biographiques, soit pour représenter l'oeuvre, donnent au moins à voir et apprécier un style, certes suranné, mais foncièrement personnel, et un certain sens du rythme... En même temps qu'une tendance théâtrale qui ne quittera Max Linder que lorsqu'il se rendra aux Etats-Unis, pour une période intéressante, mais bien moins bénie que ne semble dire le film.
Donc ce documentaire qui finit avec pudeur sur une note déchirante, et qui parfois reste profondément subjectif, permet-il de donner l'envie à qui le verra, de tenter de se replonger dans les films de Linder, ce qu'il en reste du moins: il existe d'ailleurs deux versions du film, celle de 1983 sortie en salles, et une révision effectuée pour la télévision, lorsque Maud Linder a recensé un certain nombre de films dont elle ignorait la préservation. Max In a taxi, par exemple, Le petit Café ou Le roi du cirque, qu'elle annonce perdus, ont tous été retrouvé au moins dans des copies fragmentaires. Pourtant, c'est cette version de 1983, au montage soigné et au ton si juste, qui reste ma préférence. Maud Linder y a t-elle satisfait sa quête personnelle? Ca m'étonnerait, mais elle est très claire dans son commentaire final, tranchant, cassant, et encore une fois, juste.