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16 juillet 2018 1 16 /07 /juillet /2018 09:50

Dans le film The incredibles, une scène de pirouette finale est restée dans toutes les mémoires: alors que la situation s'est éclaircie, que tout va bien, c'est en écoutant les messages de la baby-sitter du petit Jack-Jack qu'Helen et Bob Parr apprennent non seulement que ce dernier a été enlevé, mais aussi qu'il a sans doute enfin démontré qu'il avait des pouvoirs... Et quels! Ce court métrage de complément (destiné au DVD) explore cette sous-intrigue en nous montrant l'envers du décor: comment Kari, la baby-sitter (Interprétée par l'animatrice Bret Parker), a vécu l'expérience de garder un bébé dont elle ne savait pas (et ses parents non plus) qu'il pouvait être invisible, léviter, traverser la matière, envoyer un rayon destructeur avec ses yeux et tant qu'à faire opérer une combustion spontanée sans la moindre conséquence sur sa propre santé... mais pas sur son entourage.

C'est une irrésistible suite de gags qui complètent avantageusement le film de long métrage; plutôt que de laisser cette suite de séquences très drôles à la fin du film, en lieu et place de l'énervant bêtisier qui était devenu la tradition Pixar, Bird a préféré en faire une cerise sur le gâteau, mais surtout un film de court métrage à part entière, soigné et fort bien construit... Tant mieux. 

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Published by François Massarelli - dans Animation Pixar Disney Brad Bird
16 juillet 2018 1 16 /07 /juillet /2018 09:15

Le beurre et l'argent du beurre, comme on dit: peut-on à la fois mener la carrière qu'on s'est choisie, le faire bien et sans regrets, et du même coup maintenir une vie de famille résolument solide et "normale"? C'est la question soulevée par ce film... Tout en étant une histoire de super-héros, ce long métrage Pixar qui me semble être tout bonnement le pic absolu de la production du studio, aborde en effet une thématique qui tient particulièrement au coeur de Brad Bird, et dont celui-ci vient d'opérer un dépoussiérage avec son nouveau film, sorti cette année, et qui s'appelle... The Incredibles 2!

Mais n'allons pas trop vite: intéressons-nous à cette drôle d'entreprise, un film qui à la fois offre une satire enlevée des films de super-héros, propose une revitalisation du genre, une histoire modèle, et se paie le luxe d'en exposer les codes dans de nombreuses scènes de méta-cinéma de haute volée! Et tout ça, comme le film Superman de Richard Donner, part d'un lien établi à l'écran entre glorieux passé et présent incertain: on commence par des interviews vintage de super-héros qui apportent leur réflexion à un thème soulevé par des journalistes: qu'est-ce que la vie de héros, quelles en sont les frustrations, et l'anonymat y est-il nécessaire? Les trois héros interviewés, Mr Incredible (Craig T. Nelson), Elastigirl (Holly Hunter) et Frozone (Samuel L. Jackson) sont assez clairs: il est impossible de concilier une vie de famille et un sacerdoce de super-héros. Frozone va même jusqu'à s'en réjouir... Dans un soupir qui en dit long, cependant. 

Mais très vite, après une séquence fabuleuse en forme de florilège du "style" de Mr Incredible, on apprend que la situation de ces trois héros flamboyants est du passé, que les gens du public se sont lassés, et que les justiciers sont priés de faire profil bas, et de ne surtout plus intervenir. Mr Incredible, soit Robert Parr, marié avec Elastigirl alias Helen Parr, est agent d'assurances. Il est la proie de son patron, un insupportable connard de 62 cm de haut qui prend un malin plaisir à se payer la fiole d'un employé taillé comme un tank. Ils ont la sécurité, un petit pavillon et trois enfants... Je n'ais pas encore parlé des super-pouvoirs des deux parents: Bob Parr est fort, très fort: il fait ses exercices matinaux en soulevant des locomotives! Helen, comme son nom de scène ElastiGirl l'indique, est dotée d'une souplesse phénoménale... Et leurs deux grands enfants, la timide fille Violet et le turbulent Dash, ne sont pas en reste: Violet est dotée d'un pouvoir d'invisibilité qu'elle a pour l'instant du mal à contrôler, et peut générer des champs de force, mais là encore, c'est balbutiant. Dash est doté d'une vitesse et de réflexes impressionnants... Mais l'un comme l'autre, tout comme leurs parents, doivent rester discrets sur ce point...

Le film prend vraiment son envol lorsque Parr est licencié après un coup de sang (salutaire, si vous voulez mon avis). Il trouve un emploi mystérieux, en acceptant la proposition d'une femme inconnue, Mirage (Elizabeth Pena) de travailler pour un commanditaire qui restera secret: il accepte, en secret pour ne pas inquiéter Helen (ce qui s'avérera une erreur riche en conséquences), et ne sait pas que pour se remettre à effectuer son boulot de super-héros, il vient de signer un pacte avec un ancien fan frustré, qui a décidé de supprimer tous les super-héros dotés de pouvoirs... Afin de les remplacer avec ses inventions. Un danger public, incarné par "Buddy" (Jason Lee)...

La famille reste le maître mot du film, qui montre de quelle façon elle va être mise en danger, puis réunie par les circonstances. Brad Bird, qui avait montré un certain pessimisme sur le sujet dans The Iron Giant (et allait le faire de nouveau dès son film suivant, Ratatouille), me parait avoir fait une concession à l'esprit Pixar ici, mais ce n'est pas un gros problème, car le thème du film n'est pas que la famille, justement. C'est le problème de la place d'une personne dans le monde que cherchent à établir Robert Parr, Helen Parr et leur ami Lucius Best (Frozone), ce qui est transcrit par des scènes enlevées, de super-héros dans la vraie vie, d'engueulade familiale à table, de rivalité de fratrie entre deux membres de la même famille dotés de super-pouvoirs... Et autre thème (très présent dans les films Pixar, bien sûr): qui est-on? Une question non seulement soulevée par la frustration de ne pouvoir assumer leur réelle identité, pour les héros, mais aussi par le fait que Jack-Jack, le dernier né de la famille Parr, n'a pas de pouvoirs. Pas, ou pas encore? Et si c'est ce dernier cas, quels sont-ils? Réponse dans le film...

Bird arrivait dans Pixar auréolé d'un succès non négligeable avec The Iron Giant. Le studio lui a déroulé le tapis rouge, le laissant libre de développer son projet avec une quasi carte blanche (si on excepte la présence obligatoire de quelques thèmes maison, évoquée plus haut). Le résultat, qui est à la fois une parodie et un film qu'on peut après tout prendre au premier degré, est une réussite au-delà de toute espérance: superbe graphiquement, à l'animation fluide et surprenante, supérieurement monté, et doté d'un script absolument étanche. Pas un défaut ne vient se mettre en travers du plaisir que génère ce film. C'est un chef d'oeuvre...

 

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Published by François Massarelli - dans Animation Pixar Disney Brad Bird
18 juin 2018 1 18 /06 /juin /2018 08:56

Pluto s'acharne contre un chaton, qu'il poursuit jusque dans la maison de Mickey Mouse; celui-ci se fâche, Pluto puni s'endort au coin du feu, et... il subit une tentation extérieure: un chat vient le provoquer, il le suit jusqu'en enfer où une troupe de chats le condamne pour l'ensemble de ses mauvaises actions.

Très moral et impeccablement réalisé, ce court métrage est non seulement l'un des premiers en couleurs (l'excellent Technicolor trois bandes, dont Disney avait encore l'exclusivité), mais aussi l'un des premiers dans lesquels les scénaristes et animateurs essaient de passer outre la transparence du personnage de Mickey, dont il était clair que tout la ménagerie qui l'entoure est beaucoup plus intéressante à tous points de vue. Le voyage de Pluto aux enfers, monuments disneyien de sadisme contrôlé, est un grand moment, et on peut sans aucun problème y voir la source de l'inévitable "spin-off'", la série des courts métrages entièrement consacrés au chien, qui allaient se tourner quelques années plus tard... Ou Pluto.

Comme il est clair que l'enfer que visite le chien dans son cauchemar est une émanation de son subconscient, on se dit que ce personnage, par ailleurs si désespérément vide, a une vie intérieure assez effrayante.

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Published by François Massarelli - dans Animation Disney
17 juin 2018 7 17 /06 /juin /2018 18:12
Admirable film, le premier Mickey régulier en couleurs, avec en prime l'apparition de Donald Duck en trouble-fête. Un concert y est donné par une petite fanfare, qui s'attaque à du lourd (L'ouverture de Guillaume Tell, par exemple) mais dont la prestation est sabotée par l'intervention de Donald, dont l'enthousiasme pour la musique le pousse à jouer avec l'orchestre... Sauf que lui ne sait jouer que Dixie.
 
Le film est indispensable, c'est celui qui fait le lien entre les années durant lesquelles Mickey évoluait au sein d'une basse-cour hétéroclite (Ici devenue un orchestre) et les futurs dessins animés qui le verront perdre de l'importance au profit de ses acolytes. le chef d'orchestre Mickey est très impliqué physiquement dans la prestation, et ça le rend volontiers agressif et irascible. Certes! Pour la bonne cause...
 
Mais il y a aussi une progression notable depuis les premier films musicaux un brin mécaniques, et celui-ci ou tout est si fluide... Un modèle indépassable d'animation où chaque geste est pesé, au profit d'un effet, qui ne rate jamais sa cible.

 

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Published by François Massarelli - dans Animation Disney
28 décembre 2015 1 28 /12 /décembre /2015 17:41

Il n'y a pas si longtemps, disons il y a un peu plus de dix ans, on avait de Pixar une autre image, celle d'un groupe de génies qui étaient tous unis dans la création de films tous plus beaux les uns que les autres... Et d'autre part, on avait un peu le sentiment, lié à l'image de moderniité et de progrès absolu incarné par le studio, que les films Pixar ne pouvaient aller que de l'avant, et que le dernier était forcément le meilleur. C'est naïf, mais heureusement, Cars y a mis bon ordre... Donc désormais, il y a des bons et des moins bons films chez Pixar, c'est comme ça, et si le studio continue à faire des films situés en marge de l'être humain, que ce soit chez les fourmis, chez les jouets qui s'animent en notre absence, chez les monstres qui vivent dans une dimension parallèle à la notre, ou dans notre subconscient, on sait aujourd'hui aussi que Pixar, c'est d'abord et avant tout un studio qui permet à des auteurs de faire des films, et quels films! Brad Bird, John Lasseter, Pete Docter et Andrew Stanton y ont finalement le loisir de développer leur style personnel, leur univers, comme avant eux à la Warner Bob Clampett, Chuck Jones, Tex Avery ou Friz Freleng...

Inside out (Vice Versa en Français) est donc un film de Pete Docter (Monsters Inc., Up), qui part d'une idée géniale, mais difficile à mettre en images: on assiste à une petite aventure pour une jeune pré-adolescente, vue du point de vue de son cerveau, où agissent cinq personnages qui contrôlent et provoquent ses émotions: La Joie, la Tristesse, La Colère, Le Dégoût et la Peur... Ils gèrent aussi les souvenirs qui s'accumulent, et finissent par former la personnalité de la jeune fille. Celle-ci est une jeune insouciante, hockeyeuse de talent, qui vient hélas de quitter le Minnesota avec ses parents pour s'installer à San Francisco, et ça lui pose de gros problèmes... A plus forte raison lorsque dans le poste de commande, une série de bourdes privent la jeune fille de deux personnages cruciaux: la Joie et la Tristesse, en effet, sont envoyées par erreur à l'autre bout de l'univers-cerveau, et vont avoir les pires difficultés à revenir...

Difficile à mettre en images, disais-je, mais c'est réussi sur toute la ligne. Comme on est chez Pixar, aucun risque de se tromper ou de dissimuler l'étrangeté de cette histoire derrière le vieux procédé du rêve, c'est en effet uniquement le point de vue des coulisses qui nous est montré ici! Et l'esthétique est constamment cohérente, renvoyant sans cesse à l'image d'une jeune fille de 11 ans, à peine sortie de l'enfance, et qui commence son adolescence par une fugue irraisonnée. les deux personnages principaux, la Joie et la Tristesse, sont bien sur antagonistes, mais il va leur falloir apprendre à vivre et travailler ensemble. 94 minutes de bonheur plus tard, on en redemande, tant le film tient la route. On espère qu'il ne sera pas gâché par un Inside out 2...

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Published by François Massarelli - dans Pixar Animation Pete Docter Disney
16 juin 2013 7 16 /06 /juin /2013 09:08

Up ne commence pas vraiment comme on l'attend d'un film animé de long métrage, à plus forte raison distribué par Disney: une séquence de 11 minutes qui détaille la rencontre, puis le mariage et enfin la longue vie en commun de deux personnes, Carl et Ellie. Unis dès l'enfance par l'amour à distance de l'aventure avec un grand A, ils ont une vie somme toute pépère, Carl étant vendeur de ballons! Ils s'aiment, mais n'ont pas d'enfants, et un jour Ellie décline, puis meurt. C'est poignant, et c'est essentiel pour le reste du film qui va s'attacher à la personne de Carl, un brave vieil homme devenu acariâtre par les circonstances, et qui pour finir sa vie en beauté, a décidé d'échapper à la réalité quotidinne, et en particulier à la menace d'éviction dont il fait l'objet dans son quartier en pleine rénovation, en attachant à sa maison des milliers de ballons qui vont le transporter vers l'endroit d'Amérique du Sud où Ellie et lui rêvaient d'aller vivre des aventures, des vraies... ce qu'il n'avait pas prévu, c'était d'emmener un scout.

 

Les longs métrages Pixar, dans les années 2000, se suivaient et se ressemblaient, du moins par leur excellence. Celui-ci adopte un style qui se veut gentiment caricatural, subtilement géométrique: au corps presque carré du vieux Carl, on oppose le rondouillard Russell... Par contre, le décor magnifique du haut plateau où l'essentiel de l'action se déroule est plus réaliste; manifestement inspiré par un voyage sur place, c'est un décor rêvé qui rappellera des souvenirs à ceux qui ont vu The lost world, de Harry Hoyt et Willis O'Brien (1923)... On se rappelera aussi du Capitaine Nemo en découvrant le destin étrange de Charles Muntz, l'explorateur admiré de Carl et Ellie, qui a disparu en allant en Amérique du Sud chercher cet oiseau rare qui lui a valu d'être la risée du monde scientifique...

 

La clé de ce film, c'est bien sur la façon dont Carl va progressivement se rendre compte qu'il ne devrait pas vivre dans le passé: il s'accroche littéralement à sa maison, lui parle en l'appelant Ellie, veut conserver intacts tous les objets même les plus insignifiants qui le rattachent à ce passé devenu douloureux par la mort de celle qu'il aimait; mais d'une part, la découverte de Muntz, encore plus vieux et plus fou que lui, qui ne survit que par le souvenir d'une humiliation vieille de plus de cinquante ans qu'il souhaite réparer, et qui collectionne fossile sur fossile, va lui renvoyer un portrait caricatural de son propre attachement à des choses révolues; ensuite, les arrivées dans sa vie de Russell, scout inepte, et de Dug, chien qui parle, vont forcer Carl à s'attacher (Ce sera un travail de longue haleine, bien sur...) à autre chose qu'à des souvenirs. Enfin, un message laissé pour carl par Ellie mourante dans un album photo qui résume leur bonheur passé va lui faire ouvrir les yeux, enfin. A l'opposé de Muntz qui continue à chasser l'oiseau pour en faire un glorieux squelette à exhiber dans les musées, Carl va s'attacher à sauver la progéniture de la bête en question, le regard enfin tourné vers l'avenir...

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Published by François Massarelli - dans Animation Pete Docter Pixar Disney
12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 09:46

Après le spectaculaire premier film de Bird pour Pixar, qui marquait définitivement l'arrivée du petit studio dans la cour des grands en proposant le poste de metteur en scène à une personnalité extérieure, et non à un membre de l'équipe (Au prix de quels renoncements? L'histoire ne le dit pas), Ratatouille est plutôt inattendu; basé après le film de super-héros qu'était The incredibles sur une histoire de rat qui vit dans l'ombre des humains, et imite l'une de leurs particularités (La cuisine) au point d'avoir du génie, on pouvait craindre une hyper-Dineyisation, si j'ose créer un verbe un peu lourd de sens... Mais comme The incredibles n'était pas qu'un film de super-héros, Ratatouille n'est pas non plus qu'un film sur un gentil animal qui vient faire de la cuisine pour les humains...

Rémy est un rat qui n'est pas comme les autres; là ou ses congénères sont des voleurs de nourriture qui ne sont pas très regardants quant à la qualité de ce qu'ils ingurgitent, Rémy est un esthète de la nourriture, versé sur la grande cuisine, et qui a absorbé les leçons prodiguées à la télévision par le grand chef mythique Gusteau. Non que Rémy ait la télévision, non: il n'est pas ce genre de rat. Dans la campagne Française ou il vit, il a repéré une maison dans laquelle la vieille dame qui l'habite s'endort tous les après-midis devant une émission culinaire, il lui suffit donc de s'installer tranquillement et de rêver devant les émissions de son héros. Mais son talent pour la délicatesse gustative n'a aucune utilité pour la horde, sauf... la capacité à détecter une odeur de mort-aux-rats dans la nourriture. Rémy, de fait indispensable à la tribu mais qui s'ennuie profondément, attend son tour.... Qui viendra lors d'une fuite de la famille de rats vers les égouts, puis vers Paris. Séparé des autres, Rémy atterrit dans les cuisines de chez Gusteau. Le chef étant décédé, le restaurant vit sur ses acquis, mis à mal par les coups de boutoir d'un critique, Anton Ego. Lorsqu'il arrive, Rémy est amené à aider un commis, Alfredo Linguini, à réaliser une soupe qui sera si appréciée que les cuisiniers de chez Gusteau vont se prendre à croire à un renouveau du restaurant... Mais ça ne fait pas les affaires de Skinner, le nouveau chef, qui a déjà pré-vendu des abominables plats surgelés sous le nom terni de Gusteau, et qui entend bien développer cette activité au détriment de l'établissement; de son côté, Linguini fait un pacte avec Rémy pour continuer à prétendre qu'il est le nouveau chef du prestigieux restaurant.

En effet, Rémy le rat n'est pas si gentil, après tout. Sommé de choisir entre sa famille et ses nouveaux maîtres, il choisit... de ne pas choisir, et de montrer qui est le patron: lui. la famille? des pique-assiettes, uniquement utiles quand on les commande et qu'ils n'ont pas le temps de réfléchir. Les maîtres? Coincés par la réputation de leur restaurant, ils sont surtout désireux de retrouver ne serait-ce que des bribes des succès d'autrefois. Et de fait, tous, y compris Linguini le faux chef, et Colette la vraie cuisinière qui évite de trop faire d'expériences, sont finalement des médiocres, le rat ne se cache pas de le montrer... Il est sûr de lui, à juste titre en ce qui concerne d'ailleurs ses talents culinaires, et souvent sceptique sur la devise de Gusteau: tout le monde peut cuisiner, pensait le maître; le rat, lui ajoute: "mais certains feraient mieux de ne pas le faire..."

Le film est brillant, parfaitement rythmé: aucun temps mort, aucune chanson pour tout casser, pas non plus de ce mauvais esprit sur commande qui transforme le visionnage des films Dreamworks en calvaire, et un suspense ascendant: on a compris très tôt que la véritable confrontation dans le film n'est pas celle de Rémy avec Linguini, ce garçon n'étant pas de taille; ce n'est pas non plus avec l'inspection sanitaire, encore moins avec Skinner. Non: LA confrontation dans le film, celle qui fait le sel d'une dernière demi-heure enlevée, c'est bien sûr avec l'impitoyable critique Anton Ego... Ce qui nous amène inévitablement au sujet du film, sur l'art et la critique: Ego, critique, le reconnaît, la position de l'écrivain qui fait son métier de critiquer les autres est paradoxale; on peut sans doute attribuer mille fois plus de sens et d'intérêt à l'objet d'art critiqué qu'au texte qui en prouve l'ineptie et le manque de valeur... La réflexion menée dans le film, incarnée par Rémy le rat, est basée sur le fait que quand l'art doit s'exprimer, il faut le laisser faire, qu'on soit un homme, une femme, un peintre, un écrivain, un cuisinier ou un rat... Et Bird, qui connaît bien son art lui-même, s'est fait un point d'honneur de représenter la rencontre entre la cuisine de Rémy et les papilles gustatives des protagonistes. Voilà où se situe le véritable théâtre des opérations, pas dans la cuisine, pas dans les casseroles, pas dans la salle: là où on mange, vraiment... Et les critiques ne sont pas à proprement parler des ogres non plus, puisque Ego montre qu'il peut aussi devenir un allié, et va mettre sa réputation en jeu à la fin du film.

Tout ça est réalisé avec le talent habituel des films Pixar: pas de vulgaire gros ogre sous-développé du bulbe et horriblement mal dessiné à l'horizon, Ratatouille est du 100% Shrek-free, heureusement. Le film est d'une beauté formelle rare, avec son Paris pour univers parallèle pas si éloigné de la vision d'un Jean-Pierre Jeunet, et sa mise en scène bouillonnante qui se situe à hauteur de rongeur est d'une énergie folle. Le film n'est sans doute pas aussi fédérateur qu'a pu l'être The Incredibles (Le Citizen Kane de Brad Bird, quand on y pense: arrivée extérieure d'un metteur en scène, carte blanche... sauf qu'il n'était pas à son coup d'essai), mais c'est aussi un film qui nous amène avec délicatesse à voir une forme de vérité rassurante qui est en face de nous: il y aura toujours des Rémy, qu'ils soient peintres, cinéastes, ou... confectionneurs de ratatouille. A propos de ratatouille, le titre est génial, puisque trois fois justifié. Deux fois de façon limite, donc ça ne compte pas: Linguini bafouille, et en vient à dire "ratatouille", bon; le rat est cuisinier, donc rat-atouille... mouais; mais le plat choisi pour répondre à l'impossible défi du très inquiétant Anton Ego, c'est bien sûr le rustique plat aux légumes du soleil... Une façon de dire, exactement comme dans The incredibles, que c'est parfois les plus vieilles recettes qui font les meilleurs plats. Et les films d'animation n'ont pas besoin de plus que de trouver la bonne histoire, le bon rythme, le bon suspense, et le bon graphisme... a part des bons artistes, s'entend.

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Published by François Massarelli - dans Animation Pixar Disney
25 juin 2012 1 25 /06 /juin /2012 15:59

5 minutes! un artiste éloquent n'a pas forcément besoin de plus. Ces cinq minutes représentent, évidemment, plus du double du premier film réussi de Pixar, Luxo Jr... Mais si on les compare aux courts MGM de Tex Avery (En particulier Magical Maestro, une évidente influence), ou à ceux de Chuck Jones pour la Warner qui ont manifestement compté dans le style de ce film, on est loin du compte: ils faisaient plutôt sept minutes...

 

Chuck Jones, Tex Avery, ou deux réalisateurs mythiques, qui aimaient à faire passer le gag (Avery) et les personnages (Jones) devant l'histoire, et c'est un peu ce qu'on a ici: Un prestidigitateur est en retard pour son numéro, il remet donc à plus tard le diner de son collaborateur, un lapin. Celui-ci se venge en sabotant son numéro grâce à un dispositif qui me semble bien difficile à décrire... Magicien, lapin, théâtre, on est bien dans un cartoon classique... et c'est là qu'on se trompe: Presto dépasse tout ce qui a pu être fait en la matière, transcende le genre et va plus loin encore, en introduisant dans le monde du cartoon à gags (Et non des moindres, l'ensemble du film est à tomber par terre à force de rire) des éléments inattendus: d'une part, l'impression de vérité des lieux, le théâtre, sa loge et sa scène, les sièges avec les spectateurs; d'autre part, l'impression renforcée par la 3D que ce monde de cartoon est réel... Et tordant.

 

Pixar, bien sur, ce sont des longs métrages superbes et des courts qui ont systématiquement pour mission de faire avancer la technologie de la 3D d'animation. Je ne sais pas quel a été l'apport technique de ce chef d'oeuvre, mais en tant qu'admirateur des riches heures de la Warner, je le considère comme un tour de force cinématographique, un chef d'oeuvre de timing, et le tout (A l'heure des très laids dessins animés que sont Shrek ou The ice age) en prime est d'une beauté plastique idéale. Bref, c'est admirable...

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Published by François Massarelli - dans Animation Pixar Disney
31 décembre 2011 6 31 /12 /décembre /2011 18:42

Au-delà de la polémique sur le nom de l'auteur (Le vrai titre complet a beau être "Tim Burton's Nightmare before Christmas", l'auteur de Beetlejuice n'est pas, n'a jamais été, et ne sera jamais le réalisateur de ce qui est souvent appelé son chef d'oeuvre.), le très beau film un peu anachronique de Henry Selick est devenu en peu de temps un vrai classique, et mérite d'être vu et revu avec obstination. On l'attribue si facilement à Tim Burton, mais c'est sans doute l'oeuvre de trois hommes, plus qu'autre chose. A Tim Burton, auteur de l'anecdote et des dessins originaux, pourvoyeur d'ambiance et inspirateur, viennent s'ajouter Danny Elfman, génie musical qui crée une oeuvre quasi opératique, complexe et qui colle au film à 100%, et Henry Selick, qui a su donner corps à ces deux visions de deux génies ombrageux (Qui étaient d'ailleurs fâchés à l'époque de la conception du film, comme en témoigne la sortie en 1994 du seul film de long métrage de Burton dont la musique n'était pas de son alter ego), en un film superbe, fait à l'ancienne, et qui réussit à tenir la dragée haute à bien des films d'animations en images de synthèse...

Le projet initial était un vieux rêve de Burton, qui croyait pouvoir convaincre quelqu'un chez Disney de donner son feu vert. C'est finalement chez la défunte branche Touchstone (Créée afin de financer des films atypiques dans le giron de Disney) que le projet a atterri, mais sans Tim Burton. celui-ci, entre deux Batman, ne pouvait plus prendre le temps nécessaire à la création d'un dessin animé. Il est producteur exécutif sur le film, ce qui veut tout dire, ou rien... Selick, quant à lui, est un animateur authentique, qui a réalisé plusieurs films depuis, dont James and the giant peach ou Coraline. Burton a même essayé de co-réaliser un film d'animation (The corpse bride) sans parvenir à oblitérer le souvenir du classique qui lui a échappé... Mais Disney, qui a depuis récupéré le film, s'évertue à faire oublier le souvenir de Selick en plaçant le nom de Tim Burton (Désormais établi) un peu partout.

Le projet doit beaucoup au Grinch, du Dr Seuss, un livre (Et un dessin animé de Chuck Jones ) qui a beaucoup inspiré Burton dans sa vision, mais le film de Selick rend à la fois hommage à Seuss dont le héros tentait lui de saboter Noël en volant tout ce qui s'y rapporte, et à toute la littérature et le dessin animé pour enfants qui aime à verser dans l'épouvante, et partant à toute l'histoire du cinéma fantastique: les décors clairement inspirés du Cabinet du dr Caligari, Jack Skellington qui se dresse dans son cercueil tel Nosferatu, et bien sur le recours obsessionnel à Frankenstein, sont augmentés de nains joviaux et multicolores, et de références discrètes (La tombe d'Hazel la sorcière qui a beaucoup rencontré Bugs Bunny chez Chuck Jones, par exemple...). L'animation en volumes était un voeu formel de Burton, et Selick y excelle justement. Si les dessins de base sont à attribuer à Burton, il faut applaudir le rendu extraordinaire du mouvement, et la vie qui se dégage de ces marionnettes...

Danny Elfman s'est vraiment enthousiasmé pour le projet, allant jusqu'à interpréter les rôles antithétiques et plus grands que nature de Jack Skellington, et bien sur de Oogy Boogie, le méchant de l'histoire. Mais la progression, qui accompagne avec génie l'intrigue, s'enrichit d'une relecture amusée de styles classiques (Duke Ellington chez Oogy Boogie, une version déprimante de Ain't we got fun, par l'orchestre de suicidaires de Halloweentown). Mais la musique, comme le film, c'est du sérieux, et c'est au premier degré qu'il faut prendre le dosage subtil d'émotion et de frissons: le chef d'oeuvre de Danny Elfman, donc!

Il est des images moins marquantes au cinéma que celle de ce couple étrange, elle créature recousue à la Frankenstein, lui squelette citrouilloïde et filiforme, réunis enfin sur une colline en spirale, au son de l'apothéose composée par Elfman: plutôt qu'une fanfare avec 60 musiciens, il a choisi pour finir le film d'ignorer les foules, et de laisser deux personnes se parler à l'oreille, ce qu'ils n'ont jamais réussi à faire durant les 70 minutes qui précèdent. un immense sentiment d'accomplissement vaguement mélancolique accompagne à cet instant un spectateur comblé, qui vient de voir l'un des plus beaux films qui soient...

 

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Published by François Massarelli - dans Animation Henry Selick Disney
3 août 2011 3 03 /08 /août /2011 09:23

Il y a un avant et un après Bambi, c'est incontestable... il n'y a qu'à voir la virulence de la réponse de Tex Avery à ce film (Screwball Squirrel, 1943) pour mesurer l'importance de ce long métrage en tant que film fondateur pour le srtudio Disney. Avant Bambi, l'anthropomorphisme dominant se doublait de burlesque, et la rondeur du graphisme se mélangeait à un joyeux fourre-tout particulièrement bien représenté par le bric-à-brac surréaliste qu'est Fantasia. Bambi fait naitre au sein du studio Disney une nouvelle unité, ainsi qu'une rigueur du style qui n'ont de précédent que certains courts métrages de la série Silly symphonies.

 

A la base du film se trouve un roman de Felix Salten, paru en 1923, dans lequel l'auteur exaltait la nature et diabolisait furieusement l'homme, ce qui laisse des traces dans le film, même si les commentateurs qui se sont penchés sur le livre et le film ont tous noté une appropriation très Disneyienne: on n'est pas éloigné de tout anthropomorphisme avec ce film, mais j'y reviendrai. Les difficultés à mettre ce film en route sont d'autant plus palpables si on considère que Walt Disney voulait que Bambi soit son deuxième long métrage, tout de suite après Snow White. Ce ne sera que le 6e, repoussé et constamment affiné: la comparaison entre Dumbo (1941) et ce film est édifiante: à un graphisme rond, hérité des premières Silly symphonies, Bambi substitue un réalisme des personnages allié à une stylisation très subtile du décor, et tout en respectant Dumbo, il faut bien reconnaitre que le studio a fait très fort avec ce nouveau film...

 

Le scénario est principalement dédié au passage d'une année, captée à travers 8 moments forts: la naisance de Bambi; la découverte de la forêt grâce à la complicité avec le lapin Thumper (Pan-Pan); la découverte de la prairie avec la mère, incluant la première rencontre avec faline, la future Mrs Bambi, mais également la rencontre mythique avec le "prince de la forêt", le père; l'arrivée de l'hiver, et ses développements, jusqu'à la fameuse mort de la mère; le printemps et son cortège de changements, métamorphose physique et comportementale; les amours avec la jeune Faline et la lutte pour le couple; les hommes et le feu, séquence spectaculaire; enfin, le retour du printemps qui coïncide avec la naissance de deux faons chez Bambi et Faline.
 
Passage des saisons, évolution dans la nature et évolution du caractère rythment aussi naturellement que possible l'intrigue de cette histoire d'apprentissage, avec un aspect frappant: les seuls animaux dangereux que nous apercevons sont les chiens (sales bêtes) d'ailleurs tous bâtis sur le même modèle, et aperçus fugitivement, en meute; ils sont aussi menaçants, effrayants et presque aussi stylisés que le feu, l'autre grande menace vue dans le film. Quant aux hommes, ils sont vus de loin, assimilés symboliquement à une nuée de corbeaux qui les accompagnent, et à la fumée du feu qu'ils ont allumés avant de partir massacrer les petits êtres de la forêt. Il est intéressant de comparer ce film à The Lion King, qui en reprend de nombreux traits; Si l'homme disparaitra totalement du film de 1995, l'anthropomorphisme reviendra sous la forme de figures simili-Shakespeariennes, de la trahison du frère, et d'une société en proie à la monarchie douce (même si suspecte) puis au fascisme sous la domination de Scar... L'allégorie en sera plus lourde aussi, là ou Bambi maintient un équilibre fragile entre la tentation anthropomorphe et le naturalisme un rien béat.
Si le film reste un film Disney, et donc attribue à nos héros des pensées, un dialogue, des amitiés, et une hiérarchie (Insupportable tendance à vouloir faire d'un animal le 'prince de la forêt', pour ce patriote Républicain qu'était Disney, non?), l'assimmilation passe ici par le caractère, et l'animation se charge de capter un réalisme physique des animaux qui est assez révolutionnaire pour l'époque. Mais les vieilles manies ont la peau dure, et le personnage du père est intéressant à plus d'un titre; il y a plusieurs façons en effet d'interpréter sa mise à l'écart: vu par quatre fois, il est constamment en hauteur, et mythifié; il est à la fois le père, le monarque, et Dieu. Sa deuxième scène le voit d'ailleurs, après avoir salué Bambi, remonter, comme
une apparition; enfin, vu le comportement sexuel des cerfs évoqués dans la scène de bataille entre Bambi et un jeune anonyme, il convient de rappeler que dans ces cas-là, le gagnant rafle plus que la mise: le père est éloigné de la mère, sans doute parce qu'il est le conjoint de toutes les biches alentour... Ce qui fait probablement de Faline sa fille, de ce mythique et divin "prince de la forêt" un affreux polygame, et de Bambi et Faline des incestueuses bestioles. Dans ces cas-là, il valait mieux qu'il séloigne...

La scène la plus traumatisante du film, la mort de la mère, témoigne bien sur d'une volonté d'aborder les problèmes sans pour autant virer dans la violence. C'est une réussite graphique et cinématographique, dont le seul défaut est selon moi l'apparition du grand cerf à la fin: venus dans la prairie pour manger un peu d'herbe qui a percé la neige, la mère et le fils sont tout à coup à porté e de fusils, et doivent s'enfuir; ils s'enfuient, on les voit ensemble; la caméra est cadrée sur Bambi lorsqu'on entend un coup de feu, et le jeune faon sa réfugie çà l'abri, en forêt. La neige recommence à tomber, et devient vite une véritable purée de pois. L'intervention divine et pédagogique du père, qui donne forcément corps à la notion d'apprentissage chère à Disney, est de trop, alourdissant ce qui était une ellipse superbe...

 

Le roman était écrit en Allemand par un Hongrois, mais le film est furieusmeent Américain; pas dans un sens péjoratif, non, mais dans la mesure ou le bon sens qui règne ici, allié à l'atat de nature, renvoie à une innocence cinématographique chère à Disney, déja présente dans les premiers Mickey Mouse très ruraux, et  présente aussi dans le cinéma depuis Griffith (A romance of Happy Valley, True Heart Susie), King (Tol'able David) ou même Harold Lloyd (The kid brother). Le fait que cet Américanisme de bon aloi soit présenté dans une animation splendide est une valeur ajoutée. Mais si le film a eu une descendance en particulier dans l'équilibre revendiqué entre humanisation et état de nature, il me semble qu'aucun de ses descendants ne s'approchera de sa perfection formelle.

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Published by François massarelli - dans Animation Disney