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12 mai 2018 6 12 /05 /mai /2018 18:48

Ce film de cinq bobines produit par la société Triangle est le cinquième de Douglas Fairbanks, son deuxième avec son complice préféré Allan Dwan, sa première contribution à l'écriture d'un film, et son premier western! Ca fait beaucoup pour un seul film, mais The Good Bad Man est suffisamment solide et pétri de qualités pour soutenir le choc... 

Sous le nom de "Passin' through" ("je ne fais que passer"), un bandit mystérieux (Douglas Fairbanks) irrite considérablement les braves gens et la loi des contés de l'ouest: en effet, il ne se comporte même pas comme un bandit: il vole un peu aux braves gens pour redistribuer aux enfants de père inconnu. Et systématiquement, il se contente de très peu, avant de faire des espiègleries. Le hors-la-loi trouve refuge auprès d'une bande de malfrats, sous les ordres de The Wolf" (Sam De Grasse), un monte-en-l'air autrement plus dangereux que notre héros. Il trouve aussi en la jolie Amy (Bessie Love) une cause à défendre, mais doit d'abord régler son problème principal: tuer le mystérieux Bud Frazer, qui a supprimé son père...

Bon, je ne révélerai pas l'identité cachée de Frazer, ce serait mal... D'autant que quiconque a l'habitude des mélodrames du temps du muet l'a déjà facilement trouvée! Ce film est un exemple de ce que faisaient Dwan et Fairbanks ensemble: du cinéma solide, riche en péripéties, mais aussi en liberté absolue, dans des décors fabuleux. Le héros est un personnage typique de Fairbanks: faussement enjoué, hanté par une quête, qui plus est liée à sa propre condition de garçon ayant grandi sans père, comme Douglas Fairbanks lui-même. Ce petit western qui a eu un énorme succès a décidé Douglas a récidiver, et à souvent revenir à la même formule, avec bonheur...

Tout ça est déjà fort intéressant, mais j'ai gardé le meilleur pour la fin: c'est aussi la première fois (Sur trois films en tout) que Fairbanks joue en compagnie de miss Bessie Love, et c'est vraiment la cerise sur le gâteau...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Comédie Western Allan Dwan 1916 Douglas Fairbanks **
21 avril 2018 6 21 /04 /avril /2018 08:22

Un petit village à la frontière Mexicaine est la proie d'une occupation répétée, assortie de pillages et de violence, par la troupe de bandits de Calvera (Eli Wallach). Les habitants décident de faire quelque chose, en dépit de la tentation de se préserver en continuant à courber l'échine. Trois d'entre eux se rendent dans une ville plus au Nord, où ils vont trouver un homme, Chris (Yul Brinner) prêt à s'engager pour eux. Il décide de réunir cinq autres hommes, car les finances du village ne sont pas reluisantes, et les ramène, ainsi qu'un rêveur un peu impulsif, mais qui va s'avérer très utile: c'est un paysan lui aussi, qui a essayé de s'échapper de sa condition. Ensemble, ils vont armer les paysans, les diriger, les aider et parfois se sacrifier pour eux...

Ce scénario est, bien sûr, celui des grandes lignes de Sept Samouraïs de Kurosawa... Un film Japonais qui renvoyait autant au western qu'à Shakespeare. Juste retour des choses, sept années plus tard, The magnificent seven est la réponse du western! Cela reste un remake très simplifié du film, qui n'était sorti en occident que dans une version raccourcie. Le film de Sturges garde donc la trame et le folklore, mais se débarrasse en chemin de nombreuses scènes qui insistaient sur la façon dont les samouraïs étaient choisis: ici, Chris les connaît tous plus ou moins, et ça va très vite... Sinon, l'arrière-plan "social" (la condition des hommes et la présence de deux castes, les paysans et les samouraïs) est là aussi escamoté au profit de quelques dialogues qui tiennent plus du prétexte. 

Par contre, si les "mercenaires" sont plus des "types" passe-partout que des personnages développés (on lit souvent que la force du film de Sturges est de s'être plus intéressé à ses personnages que Kurosawa. Oui, on lit parfois des conneries, que voulez-vous), on peut quand même se réjouir que Calvera soit confié à Eli Wallach qui en fait un personnage très intéressant! mais Horst Bücholz, qui interprète le mercenaire-paysan, est supposé reprendre deux rôles de l'original: celui de Kikuchiyo, le faux samouraï qui fait la jonction entre les deux mondes, et l'apprenti, Katsushiro. Il est atroce: la langue lui pose problème, et il est infect.

...Mais la force du film est le pouvoir de l'évasion qu'il permet. D'accord, le message social disparaît au profit d'une solide dose de plaisir. Mais c'est parfois aussi ce qu'on cherche, non? ...Et ces plans en Scope de chevauchées au son de la musique d'Elmer Bernstein, ça a pour toujours un goût d'innocence retrouvée.

 

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Published by François Massarelli - dans Western
25 mars 2018 7 25 /03 /mars /2018 16:39

Une petite ville du far west est l'objet d'une attaque de vaisseau extra-terrestres, qui emmènent un certain nombre des habitants pour une destination inconnue. Dans la petite ville, les pionniers vont s'unir, entre citoyens, cowboys, policiers et bandits, blancs et Apaches, pour tenter de retrouver les leurs, conduits par un trio inattendu: le colonel Dolarhyde, dont le fils a été enlevé, le bandit Jake Lonergan, le seul homme a avoir réussi à s'enfuir des griffes des aliens, et enfin la troublante Ella, qui connait bien les sales bestioles, et cache un secret inattendu...

Parfois toute critique est impossible: Jon Favreau a vendu son film aux producteurs en leur disant "on va faire un film dans lequel le far west rencontre la science-fiction", et hop! Tout ce qu'on peut imaginer se passe à l'écran. Pour ma part, je pense que le metteur en scène s'amuse d'autant plus à recréer avec un casting franchement impressionnant les codes du western: Harrison Ford, Daniel Craig, Olivia Wilde, Sam Rockwell, Keith Carradine et Paul Dano... Les aliens sont esthétiquement immondes, mais c'est un signe des temps, et tout ça n'est pas bien sérieux...

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Published by François Massarelli - dans Le coin du bizarre Western Science-fiction
27 janvier 2018 6 27 /01 /janvier /2018 09:15

Pour résumer ce se passe sans doute dans ce film, disons qu'un jour, l'ancien hors-la-loi Pat Garrett a été engagé par un propriétaire terrien (le richissime ranchero Chisum) ainsi qu'un certain nombre de corps constitués qui se sont sentis obligés de suivre, dont l'état du Nouveau-Mexique, pour éliminer le bandit William H. Bonney, dit Billy The Kid. Sur ce dernier, pas la peine de faire dans la dentelle, après tout: c'est un tueur, un bandit dont la réputation vaguement romantique qui s'est développée autour de lui est complètement incompréhensible, tout comme celle qui entoure Jesse James du reste...

J'ai dit "sans doute", parce que ce film est mou. Il n'a aucune structure, aucun enjeu, aucun squelette. Alors on peut tout de suite imaginer ce qu'un critique Parisien qui se respecte va nous expliquer, à nous autres béotiens: nous n'avons rien compris, c'est une évocation poétique, vue à travers le remords d'un homme qui avait compris que pour avancer, il fallait couper quelques branches et tuer quelques copains, cet homme est Pat Garrett (James Coburn), et son copain c'est Billy (Kris Kristofferson). Mais ça on le comprend en effet très vite.

C'est juste que dans la mesure où Peckinpah ne nous donne rien d'autre à voir que des gusses qui attendent, debout dans des cours et autres haciendas, ou qui trompent le temps en tirant sur les têtes de poulets vivants qu'ils ont enterrés dans le sol (c'est authentique, ce sont de vrais poulets, et c'est dégueulasse), ou des gens qui s'attablent, parlent de rien, avant de se tirer dessus dans tous les sens, ou enfin des hommes qui consomment des femmes (Vous avez remarqué à quel point la femme est un objet non pensant sommée de faire ce que l'homme lui demande, si possible avec deux ou trois copines, dans les scènes de fesse de Peckinpah?)... Bref, il nous raconte une histoire en oubliant de la raconter, mais n'a rien à dire d'autre. 

Ce film n'est rien d'autre qu'un gâchis de pellicule, prétentieux, fumeux, et débile. Deux heures qui en semblent quarante.

Pouah.

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Published by François Massarelli - dans Western Navets
7 janvier 2018 7 07 /01 /janvier /2018 18:41

Tourné en Arizona, principalement à Monument Valley, le très beau film de John Ford prétend pourtant dès le départ être situé au Texas. C'est d'ailleurs visible: les sommets étonnants des gros géants de pierre, l'ocre poussiéreux du sol, l'aridité des paysages: on n'est pas au Texas. Donc avec ce film, Ford a décidé de jeter une fois pour toutes la vraisemblance géographique pour laisser libre cours à son lyrisme visuel.

Au Texas, en 1868, une famille de fermiers installés à l'ombre des grands canyons voit revenir Ethan, le frère d'Aaron, le père de famille. Soldat du Sud vaincu, Ethan revient, mais pas de la guerre; amer, il n'a jamais reconnu la victoire du Nord de 1865. Bien qu'officiellement non-engagé, le Texas a envoyé beaucoup de ses enfants du côté du Sud durant la guerre de Sécession... Ethan, qui a donc mis trois ans à revenir au bercail, est d'ailleurs souvent présenté comme un hors-la-loi en fuite; il a sur lui de l'argent non marqué, donc probablement volé au gouvernement, et il se peut même si ce n'est jamais dit, qu'il ait été un Jayhawker, un de ces soldats sudistes qui se sont enfoncés dans l'illégalité et le terrorisme à la fin de la guerre par jusqu'au-boutisme. Le personnage joué par John Wayne ne laisse jamais passer une occasion de rappeler son engagement dans la confédération des Etats du Sud... Mais Ethan vient se ressourcer en famille, auprès de son frère Aaron, de sa belle-soeur et de leurs trois enfants, Lucy, Ben et la toute jeune Debbie. Mais un groupe de Texas Rangers viennent réquisitionner Aaron pour enquêter sur les exactions d'un parti d'indiens; Ethan part à la place de son frère, mais durant leur absence, la famille Edwards est attaquée par des Comanches. Aaron, Martha et Ben sont massacrés, mais les Indiens ont emmené les petites Debbie et Lucy. Ethan part alors à leur recherche, avec Brad Jorgensen, le fils des plus proches voisins, et Martin Pawley, un jeune homme d'origine métisse recueilli par Aaron edwards après qu'Ethan l'ait trouvé. Les recherches vont être longues, et compliquées par la mort du jeune Brad, et les conflits de plus en plus fréquents entre Ethan qui considère que si les jeunes filles ont été abusées, elle n'ont plus qu'à mourir, et Martin qui pense fort différemment...

L'ouverture est célèbre, et trouve un écho tout aussi connu dans une fin qui éclaire le personnage d'Ethan d'une dimension symbolique. Ethan Edwards, symbole d'un monde disparu dans une société qui ne demande qu'à tourner la page, est un homme de parole, mais aussi de principes. Au capitaine des Texas Rangers, le révérend Clayton (Ward Bond), il rappelle qu'ils ont tous deux juré fidélité à la confédération, mais que Clayton a tourné sa veste en travaillant pour les Texas Rangers. Mais Ethan, qui admet de lui même qu'il 'ne croit pas à la reddition', est surtout obsédé par une haine farouche à l'égard des indiens. Celle-ci se manifeste la première fois lorsqu'il est attablé avec sa famille au début du film, et que Martin Pawley (Jeffrey Hunter) entre. Sans aucun mot d'affection pour celui dont il a pourtant sauvé la vie, il dit tout simplement qu'il ne l'a pas reconnu, et qu'il avait juste cru voir entrer un métis. Leurs rapports sont systématiquement marqués par la volonté de Edwards de taquiner, rabaisser l'autre. Puis, Ethan, qui connait bien les Indiens, leurs coutumes, leurs langages, profane un cadavre en lui crevant les yeux, dans une scène qui fait froid dans le dos. Enfin, bien sur, il devient de plus en plus obsédé par l'idée de tuer sa nièce Debbie (Natalie Wood), la seule survivante des deux captives, parce qu'elle est désormais compromise, étant devenue l'une des épouses du chef Comanche.

Cette obsession raciste est d'autant paradoxale qu'Ethan, très loquace sur ses principes, a pourtant manifestement bien intégré non seulement les bases de la civilisation Comanche, dont il est un expert, mais plus encore dont il a adopté diverses coutumes. Son fusil est protégé par une gaine de peau, à frange et à motifs des Indiens du désert, où il a peut-être séjourné (On sait qu'il vient de Californie, officiellement, au début du film); il porte pour dormir des mocassins faits main, etc. Et lorsqu'il rencontre le chef Scar, ou Cicatriz en Espagnol, il lui dit, entre ses dents: "Tu parles bien l'Anglais pour un Comanche. Quelqu'un te l'a appris?", faisant ainsi allusion à la présence d'une blanche parmi les Indiens. Mais Scar rétorque: "Tu parles bien le Comanche. quelqu'un t'a appris?" La clé de cette répartie, c'est peut-être la découverte quelques minutes plus tard d'un scalp dans la collection de Scar, celui de la mère de Martin. Celui-ci serait-il le fils d'Ethan et d'une métisse? Celle-ci aurait-elle été assassinée par un Comanche? Ces questions ne sont soulevées que par un spectateur attentif, au vu de la haine déraisonnable d'un Ethan par ailleurs très chatouilleux sur sa famille. Ayant vu la jeune Debbie se comporter en Squaw, il la déshérite illico au profit de... Martin Pawley. Et il interrompt les funérailles de sa famille pour aller tuer les Indiens le plus vite possible. Enfin, au terme d'une quête longue et douloureuse, tenant Debbie dans ses bras pour la tuer, il reconnait enfin la jeune femme comme sa nièce, et prononce enfin les mots de l'apaisement: "Let's go home, Debbie..."

A ce personnage aveuglé et par ses principes, et par une rancoeur qui ne s'arrêtera jamais, Ford oppose une communauté fragile mais ténue, de fermiers tous éloignés les uns les autres par des kilomètres de désert. Ces gens sont tenaces, et les femmes le sont encore plus; outre Martha, il faut citer Ma Jorgensen, une ancienne institutrice qui a des belles visions d'avenir d'un Texas enfin acquis à la paix, ou encore sa fille Lucy, amoureuse de Martin Pawley mais qui est prête à se marier à quelqu'un de plus stable, fut-il cette grande andouille de Charlie McCorry (Ken Curtis). Tous ces gens ont appris à faire des compromis, réunis derrière le révérend Clayton. Ils acceptent le changement, le progrès, et on voit leur volonté d'aller de l'avant dans leur vie quotidienne, à travers ces gestes simple que Ford se plait à mettre en valeur... Le bonheur du révérend devant les embrassades des ados et les jeux des enfants, le désir d'un rocking chair, la mise en place d'une liaison postale, et d'une vie sociale symbolisée par un  mariage qui va tourner court. Et une fois de plus, Ford se plait à faire jouer ensemble ces deux magnifiques acteurs que sont Wayne et Bond, en les opposant, créant des étincelles. C'est tout son monde (John Qualen, Harry Carey Jr, Olive Carey, ou encore Mae Marsh pour quelques secondes...) qu'il a réuni dans ce film qui est aussi une chronique d'un monde en construction, dont Ethan, résurgence d'un passé guerrier et haineux, est à la fin irrémédiablement exclu. Il le sait, et laisse tout le monde entrer chez les Jorgensen, restant à la porte pendant que Debbie est enfin accueillie chez les siens. On notera aussi un sous-texte intéressant dans un genre réputé si clairement raciste, dans un film apparemment ambigu à ce sujet: contrairement à ce chef Comanche certes cruel, Ethan lui n'est pas prêt d'accepter le mélange des races. Cette obsession de pureté est d'ailleurs une obsession des blancs, qui vont se doter durant le 19e et le 20e siècle de lois ignobles d'interdiction de mariage inter-racial: pas tendances à tout cloisonner chez les natifs, qui n'avaient eux aucune obsession du pedigree... D'ailleurs Ford qui s'est plu dès les années 20 à donner à des natifs (notamment ses copains Navajos) le rôle des Indiens dans ses films, semble souligner en permanence les yeux bleus et le visage Caucasien de Scar, un chef Comanche qui pourrait bien lui aussi avoir été enlevé aux siens, avant de devenir le chef d'une tribu.

Si l'habillement et l'équipement de Wayne font allusion au métissage, comme on l'a vu, ce métissage est de plusieurs ordres: ainsi, les habits portés par le comédien dans sa première scène sont un mélange détonnant, cape sudiste et pantalon plus jaquette nordiste, sont les témoins d'un passé tumultueux. La recherche, située sur plusieurs années, voit les deux hommes faire beaucoup de kilomètres, depuis le nord (Très belle scène neigeuse dans un sous-bois), jusqu'au Sud, à la lisière du Mexique. Mais Ford se plait à décliner d'autres mélanges, d'autres proportions: les matières naturelles, si nombreuses à monument Valley, sont mises à profit, et on verra beaucoup de poussière, de terre, de sable, mais aussi de boue et d'eau dans ce film. D'une part parce que les Comanches, comme les blancs qui construisent près des points d'eau, suivent les rivières; ensuite, l'eau est la denrée rare de ces contrées semi-désertiques comme se plaisent à nous rappeler certaines scènes. Mais aussi parce que l'eau, qui envahit tout, et qui est présente dans chaque scène, est ici aussi un symbole de passage, de vie, et de mélange. Ethan Edwards, si obsédé par la pureté de la race, devra accepter, laisser couler le flot, ou mourir. Dans la dernière scène, il s'exclut de lui-même... Et laisse enfin vivre les autres.

Pour finir, je sais que Marion Morrison dit John Wayne a fort mauvaise presse; cet homme de droite avait sans doute, pour les jeunes des années 60, du culot d'être encre en vie à l'heure de changer la société de fond en comble. Oui, sans doute certaines idées d'Ethan Edwards sont-elles inexorablement celles de l'acteur. Il n'empêche: celui qui a amené ses propres vêtements, ses propres habitudes de gentleman ranchero Texan au personnage complexe de vétéran habitué à la vie à la dure dans les déserts de l'ouest, a toujours exprimé sa fierté d'avoir incarné un personnage aussi complexe et aussi dur, dans un tel film, qui a toujours eu, du reste, sa préférence.

 

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Published by François Massarelli - dans John Ford Western John Wayne
29 décembre 2017 5 29 /12 /décembre /2017 09:53

The squaw man (1914) est sans doute loin d'être le meilleur film de son auteur, mais c'était le premier, d'où sans doute cet attachement à l'histoire: le metteur en scène l'a refait deux fois... La première fois, c'était en 1918 avec Elliott Dexter pour la Paramount. Peu de temps après le flop de The whispering chorus, DeMille s'était résolu à abandonner toute prétention, et à tourner des films faciles: comédies, mélodrames, et... remake. Le Squaw man de 1918 est perdu, à l'exception semble-t-il de sa dernière bobine. 

En 1931, à la fin d'un court passage à la MGM suite à l'arrêt des activités de sa compagnie indépendante, DeMille se tourne une fois de plus vers cette histoire adaptée d'une pièce de théâtre, et réalise ce qui est sans doute l'un des pires films de sa carrière...

Il me faut une petite trentaine de mots pour établir ceci: un héritier d'une famille aristocratique Anglaise fuit un amour malheureux en endossant la responsabilité d'un scandale qui implique la mari de la femme qu'il aime, et il vient s'installer dans l'Ouest Américain... Il a fallu environ une trentaine de minutes à DeMille, qui en plus s'emmêle les pinceaux en nous montrant l'Angleterre: Warner Baxter et Eleanor Boardman, vraiment? Bon, j'admets que l'Anglais Roland Young a au moins l'accent adéquat, mais le simple fait de faire dire à des acteurs des "rather" et des "oh, really" toutes les vingt secondes ne va pas nous convaincre pour autant... ces trente minutes sont un calvaire...

...tout comme les 75 qui restent, durant lesquelles Baxter rencontre une jolie indienne avec laquelle il a un enfant, et le fait que ce soit Lupe Velez n'arrange pas les choses: on lui a donné du dialogue. Si on veut: on l'entend distinctement dire à Baxter: "Fire... Good". Dans la bouche du monstre de Boris Karloff, ça allait, mais là...

Bref.

Même avec J. Farrell McDonald, même tourné partiellement en Arizona, ce western est d'un ennui mortel.

 

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Published by François Massarelli - dans Western Pre-code Cecil B. DeMille
17 décembre 2017 7 17 /12 /décembre /2017 14:13

Lo Dorman est un métis, comme le titre l'indique ("half-breed") et le film, tourné pourtant la même année que Manhattan madness, His picture in the papers, The mystery of the leaping fish ou d'autres comédies avec Douglas Fairbanks, est un western dramatique, pas éloigné du ton de certains films de William S. Hart avec ses figures de marginaux, rejetés par "les braves gens"... 

Le personnage interprété par Fairbanks est donc le fils d'une indienne Cherokee, qu'elle a eu avec un mystérieux homme blanc, qui a bien sûr abusé d'elle (Il l'a "trahie", comme on disait à l'époque). Cet homme, nous aurons le privilège de le connaître, mais Lo Dorman (Ou Sleeping Water, l'anglicisation du nom Français donné au petit, L'eau Dormante), lui, n'en saura rien. Il vit dans les bois, élevé "comme un homme blanc" par un ermite selon le désir de sa mère qui s'est suicidée après avoir confié son fils. Mais il va surtout grandir au milieu des séquoias, dans la forêt, bien à l'écart de la petite communauté tranquille. Et dès le départ, Dwan se fait lyrique en opposant la nature, merveilleuse, et la ville à travers son lieu le plus emblématique: le saloon... On y joue, on y boit, et la présence de nombreuses femmes assises là, ne laisse aucun doute.

Pourtant, dans cette ville, le pasteur Wynn (Frank Brownlee) s'est installé, bien déterminé à faire revenir les brebis égarées dans le droit chemin. Il nous serait presque sympathique, d'autant q'il prend le taureau par les cornes en allant chercher les pêcheurs là où ils sont. Et s'avisant pendant un service de la présence de Lo Dorman à l'écart, il l'invite à rejoindre la congrégation... Mais il sera aussi le premier à s'offusquer lorsque le métis osera s'afficher aux côtés de Nellie Wynn (Jewel Carmen), la propre fille du pasteur.

Dwan a réservé à Jewel Carmen une impressionnante arrivée de star, bien qu'elle n'est pas vraiment la principale actrice du film: on la voit arriver en gros plan, d'abord sur ses chaussures, puis sur sa robe de Belle du Sud, et enfin sur sa coiffe, avant qu'elle ne relève la tête. Mais cette entrée en matière n'est là que pour annoncer la vanité, voire la suffisance du personnage de péronnelle qui n'aime rien tant que jouer avec ses prétendants... Et avec le feu. Lo Dorman se met au ban de la société parce que lui, le métis, a cru pouvoir développer une amitié avec la belle jeune femme. Et on ne lui pardonne pas d'oser vouloir "sortir de sa race". 

Le film n'est pourtant pas qu'un plaidoyer contre le racisme, on est en 1916, et ça ne se fait pas encore. Lo Dorman trouvera une autre âme soeur, en la présence d'une autre femme, Teresa (Alma Reubens) elle aussi de sang-mêlé, Anglo-Mexicaine cette fois, qui d'ailleurs est impulsive, et plus aventureuse que ne le sera jamais la fille à papa citée plus haut. Quand elle rencontre Lo Dorman, elle est en fuite après avoir poignardé un homme qui l'avait trahie. Mais là où Dwan réussit, c'est dans le fait de nous montrer la division sociale de la petite communauté qui tente d'établir des règles Victoriennes de bonne conduite, tout en pratiquant un ostracisme flagrant, et en confiant par-dessus le marché le bon fonctionnement de la loi à Dunn (Sam De Grasse), un salaud qui a violé une femme.

Oui, c'est le père...

Alors, entre l'hypocrisie de la petite ville en devenir, et la beauté majestueuse des séquoias, comment s'étonner que Lo Dorman, Douglas Fairbanks, ait choisi de rester un homme des bois? Il se condamne à rester à l'écart, flanqué d'une femme qui l'aime sans doute parce qu'elle est bien obligée de se contenter de lui. Le film est très amer, et passe facilement, du début à la fin, du lyrisme naïf associé à Fairbanks (Doux comme un agneau, et aussi dénué de mauvais sentiment qu'un enfant qui vient de naître, il fallait un Douglas pour qu'on puisse y croire!), à l'hypocrisie et au cynisme.

Ce film dur, essentiel dans la longue liste des oeuvres de l'acteur (et qui porte en lui des thèmes très personnels, et qui reviendront souvent, autour de la notion d'illégitimité), est un des produits de la pêche miraculeuse de Dawson City, dans les années 70, lorsqu'on a retrouvé un certain nombre de films muets perdus, conservés dans les glaces de cette farouche cité du nord canadien. Deux bobines 35 mm ont été retrouvées, auxquelles on a pu ajouter divers matériaux conservés un peu partout, et qui aujourd'hui nous permettent de posséder un film très important, aussi bien pour Fairbanks que pour le metteur en scène: Dwan, on le sait, s'impliquait beaucoup dans ses films, et cette préfiguration de nombreux de ses westerns le prouve de manière éclatante.

Et pourtant, il sera un flop sans appel, qui va décider l'acteur à ne jamais ou presque sortir de sa formule (Telle qu'il l'avait peaufinée avec The good bad man, quelques mois avant ce film) qu'il adaptera ensuite à ses intrigues, puis à ses héros.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Allan Dwan 1916 Western Douglas Fairbanks **
3 décembre 2017 7 03 /12 /décembre /2017 10:32

Revenir au western, pas une mauvaise idée: d'une part, contrairement à ce qui se passait au début des années 30, le genre a enfin réussi à redécoller, et le public marche. Et puis pour l'éternel showman qu'est DeMille, c'est une occasion de sortir tous ses atouts: histoire épique, décors grandioses, destins plus grands que nature, et gros sabots... Le tout mâtiné d'une influence certaine de John Ford, mais aussi d'un bon gros fond d'idéologie: la "destinée manifeste" souvent présente dans ses films, de Unconquered à ...The greatest show on earth.

Le destinée manifeste: c'est ce sentiment quasi-religieux qui naît dans l'Amérique entreprenante du 19e siècle, selon lequel les Etats-Unis auraient été créés justement pour s'étendre. Ce serait donc le destin de tout Américain de vouloir aller toujours plus loin vers l'ouest, et accomplir la mission divine. Bien sûr que c'est une vaste connerie, et bien sûr que ça justifie le vol des terres, les conflits territoriaux, et par dessus le marché le génocide des Amérindiens! Mais c'est aussi une sorte d'épiphénomène du progrès. Et ça n'a rien d'exclusivement Américain: le premier colonisateur venu qui a posé les pieds en Algérie ne pensait pas autrement.

Bref: un western, situé dans le cadre de la construction de la ligne de chemin de fer... La compagnie Union Pacific doit rejoindre la Central Pacific, l'une construisant l ligne depuis l'est, l'autre depuis l'Ouest. Le "général" Dodge, mandaté par Washington, est l'autorité bienveillante qui supervise la bonne marche des travaux, et il est assisté d'un homme droit et loyal, Jeff Butler (Joel McCrea). De son côté, le banquier Barrows qui a intérêt à ce que Union Pacific soit en retard, s'assure les services d'un bandit, Sic Campeau (Bryan Donlevy) assisté d'un 'gentleman de fortune, Dick Allen (Robert Preston). Leur mission est de tout faire pour retarder l'avancée du chantier. Mais d'une part Dick Allen et Jeff Butler sont amis. Et d'autre part ils vont vite tomber amoureux de la même femme, la jolie Irlandaise Mollie Monahan (Barbara Stanwyck).

Déjà, Stanwyck dans un western, on réserve sa place... Et si le film doit beaucoup (mais alors beaucoup) à The iron horse, et à son atmosphère épique, DeMille n'est pas Ford, et son sentimentalisme n'est pas de la même eau. Chez lui, c'est factice, et c'est évidemment l'aspect le plus irritant du film. Mais c'est aussi le seul, car si une fois de plus le showman n'a pas fait dans la dentelle, il faut bien avouer que ce Union Pacific de 135 minutes est un show; un western avec tout ce qu'on attend d'un western, à une époque où on redécouvrait le genre à la faveur des contours esquissés par John Ford avec Stagecoach. Bref: on s'amuse, on se distrait, et tout finit bien... Et c'est sans doute le meilleur film parlant de son auteur!

 

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Published by François Massarelli - dans Western Cecil B. DeMille
6 octobre 2017 5 06 /10 /octobre /2017 10:47

Sorti en septembre 1955, Deputy Droopy est l'un des derniers films de Tex Avery, et précisément son avant-dernier Droopy! C'est aussi un remake de Rock-a-bye bear, dont il reprend la principale idée: une situation dans laquelle il est crucial de ne pas faire entendre le moindre bruit... Droopy est un adjoint au shérif d'un conté, qui lui confie une mission: garder un coffre-fort rempli. Et bien sur, deux malfrats qui écoutent à la fenêtre s'apprêtent à ne faire qu'une bouchée du chien. Sauf que le shérif prévient: au moindre bruit, il accourt et il tire dans tous les sens. Les bandits vont donc devoir être particulièrement prudents... A chaque fois qu'un cri menace de se faire entendre, ils courent en direction d'une colline environnante pour le laisser sortir...

Les accessoires utilisés ici pour le gag (...le seul gag, quand on y réfléchit bien) du film sont hétéroclites et assez inventifs: un rocking-chair, un chat, un homard, des pétards, une plume, un vilebrequin chauffé au rouge, une bouteille de lait... Et on obtient ici une situation paradoxale: avec un remake, basé sur UN SEUL GAG (Comme d'autres films de Avery, et beaucoup de films de Freleng, d'ailleurs), c'est hilarant.

...A condition de ne pas avoir d'aversion pour le style de plus en plus géométrique (L'influence UPA, nous dit-on), et disons-le assez moche, de l'animation. Ni pour  la voix sans grand intérêt d'un Droopy de plus en plus désincarné... A noter la présence de deux metteurs en scène au générique: le départ de Tex Avery se précisait à l'horizon, et la succession par Michael Lah (Qui allait tourner un certain nombre de Droopy en solo, pas vraiment fabuleux) était déjà en train d'aménager les cartons.

 

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Published by François Massarelli - dans Animation Tex Avery Western
27 septembre 2017 3 27 /09 /septembre /2017 16:41

De même qu'il convient de savoir commencer une carrière, la fin est importante... bien que je ne sache absolument si Hawks savait que ceci serait son dernier film. Il a quand même du voir les signes un peu partout: le cinéma n'en finissait pas de muter dans tous les sens, et les genres populaires tentaient de se raccrocher à tous les wagons possibles et imaginables, pendant que les auteurs laissaient progressivement la place à des jeunes réalisateurs turbulents... Pas de place pour un vieux réalisateur certes indépendant, mais aussi particulièrement marqué à droite, dans le cinéma Américain des années 70... c'est d'autant plus paradoxal que nombreux sont les petits nouveaux qui d'une manière ou d'une autre se réclameront de son cinéma: Eastwood, Bogdanovich, Carpenter, Milius, tous l'ont dit ou fait comprendre à un moment ou à une autre.

Donc Rio Lobo est le dernier film de Hawks, et donc son dernier western et bien sur son dernier auto-plagiat. Pourtant, quiconque s'endormirait avant la deuxième heure aurait bien du mal à retrouver ici les schémas de Rio Bravo et El Dorado: on y vient tardivement. D'abord, il y a un long prologue poussif durant lequel le Colonel Cord McNally (John Wayne) qui commande une unité Nordiste durant la guerre civile, se fait rouler par une troupe sudiste, mais réussit à triompher d'eux et les faire prisonniers. Ils va se lier avec deux d'entre eux, le Capitaine Cordona (Jorge Rovero) et le Sergent Phillips (Chris Mitchum). Et à la fin de la guerre, ils vont s'allier: d'une part les deux sudistes vont aider le vieux colonel à mettre la main sur deux traîtres de son bataillon, et de son côté, le colonel va leur prêter main-forte pour aller se mêler des exactions malhonnêtes d'un propriétaire terrien qui s'est allié à un shérif corrompu, dans le conté où vit le sergent Phillips...

Et c'est là que les vieilles tambouilles ressortent: autour de Wayne, juste parmi les justes, on retrouve une troupe de bras cassés, avec beaucoup de femmes dont certaines tiennent un discours féministe, tel que Hawks le voyait (Exactement le même que celui des hommes), un vieux porté sur la boisson (Cette fois c'est Jack Elam), un bellâtre (Cordona est d'origine Louisianaise et Mexicaine, donc il drague à tout va), un dentiste rapide de la tenaille... Tout ce petit monde passe son temps à soutenir des sièges et à balancer des bourre-pifs à une troupe ennemie, comme au bon vieux temps de Rio Bravo, et on boit environ une bouteille de whisky frelaté toutes les dix minutes. La partie consacrée au conflit fratricide est hallucinante de stupidité (En gros, c'est un peu de sport dans les bois, et beaucoup de chevalerie, et non un conflit grave de civilisation impliquant de l'esclavage!): les hommes y passent en une minute trente d'ennemis à meilleurs amis du monde... Hawks tente bien de rafraîchit la situation en faisant de ceux qui sont supposés faire la loi les méchants, et en multipliant les personnages féminins, plus une scène de nudité gratuite à la mode 1970, mais on patine, on patine... Hawks aurait-il dû prendre sa retraite? Ce film n'ajoute rien à sa légende, et est constamment mou du genou. Quant à Wayne, il fait vingt-cinq ans de plus que son âge, et c'est pathétique.

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Published by François Massarelli - dans Western Howard Hawks John Wayne