En langage mirlitaire, A.W.O.L. signifie Absent WithOut Leave, soit absent sans permission... Le but ici était pour l'armée, au retour d'un conflit traumatisant, d'éduquer les troufions qui avaient tendance à devancer l'appel de la liberté...
On y suit donc les aventures d'un soldat qui suit les tentations d'une jeune femme qui l'emmène avec insistance faire des tours en bolide, et l'animateur s'en donne à coeur joie à jouer avec les ois de la physique dans une séquence éblouissante, qui hélas ne bénéficie pas d'une très grande visibilité à cause du style schématique de l'animation de l'époque...
Ce film serait (attention à ce conditionnel, il a son importance, vu l'état des connaissances sur l'animateur) le seul court métrage consacré par Charles Bowers à Mutt and Jeff, deux héros de comic strip particulièrement populaires et qui ont eu droit à leur propre série de cartoons animés entre 1916 et 1926. L'animation en est rudimentaire, et selon les pratiques alors en vigueur dans le dessin animé, totalement calqué sur la bande dessinée...
Les deux héros y tiennent un restaurant, et pendant que l'un cuisine, de façon, disons, inventive, l'autre sert les clients; et bien sûr, les repas sont éminemment folkloriques...
Je suppose qu'il n'y a pas grand chose de plus à attendre des Mutt and Jeff, que ce que propose ce film rudimentaire. C'est soigné mais c'est un univers austère, fait de trait noir sur fond blanc... Bowers y raffine un monde très personnel où l'ingénierie a son importance, et peut-être ronge-t- son frein...
Existe-t-il quelque part un film plus influent que celui-ci? ...car quand on pense à la façon dont ce premier long métrage Disney a laissé une marque sur le cinéma, on est face à du vertigineux! Comme on dit, il y a un avant et un après...
Avant, c'est un fonctionnement du système cinématographique dans lequel l'animation est reléguée, cantonnée dans les compléments de programme, et laissée à l'écart des longs métrages; à de très rares exceptions près: certes, en Allemagne (Lotte Reiniger et ses ombres chinoises) et en France (Ladislas Starewicz et ses poupées manipulées en stop-motion) il y a eu des longs métrages mais leur succès et leur portée n'a rien de comparable. Dans le cinéma Américain, il y a eu essentiellement les tentatives de Willis O'Brien (The lost World, King Kong...); pour le reste...
Mais Snow White inaugure une sorte de domination par l'évidence de Disney et ses équipes sur le cinéma familial mondial, qui finira par passer par des oeuvres aujourd'hui mythiques. Et pour couronner le tout, certains sont magnifiques!
Maintenant il est de coutume de dire "oh oui, mais Blanche-Neige a bien vieilli quand même": c'est indéniablement un film de 1937... Dans lequel l'intrigue est une épure, simplifiée à l'extrême: la reine maléfique est jalouse, Blanche Neige échappe à la mort, se réfugie chez les nains, la reine comprend la situation, intervient de nouveau, les nains arrivent trop tard, mais le Prince qui passait par là fait son travail, fin! Des balises qui de plus sont truffées de chansons, mon impression est que le film est pour moitié occupé par ces interludes musicaux, dont je vous avouerai qu'on peut très bien couper le son: même s'ils font partie intégrante du film...
Non, c'est l'animation qui m'enthousiasme: même si j'avoue une certaine irritation devant ce qui était déjà une tradition fermement établie chez Disney, à savoir cette assimilation systématique du monde animal et des petits animaux de la forêt aux héroïnes pures, la façon dont durant trois ans les studios Disney ont tout sacrifié au long métrage qu'ils préparaient, et chaque court métrage (notamment le fameux The old mill) devenait un chantier expérimental pour telle ou telle technique, et l'implication de chaque responsable de l'animation dans chaque séquence, tout porte ses fruits, et le résultat est toujours aussi exceptionnel tant d'années après. Ce film porte en germe tout ce que Disney fera, et plus encore, car il date d'une époque où l'économie (réutilisation systématique de cellos, répétition de gestes, etc) n'était pas encore la règle. Bref, l'animation coûtait cher, c'était un luxe même. Mais quel résultat!
Et quelles frayeurs aussi, car je pense que ce qui mettra toujours les productions Disney au sommet, c'est ce monde intérieur effrayant qui y est étalé de façon presque indécente, dans lequel de pures jeunes filles sont soumises aux pires cauchemars dans de sombres forêts. Ici, c'est le prototype...
Pour finir, n'ayant que peu de place pour mentionner dans le bandeau-titre les nombreux metteurs en scènes officiels (car pas vraiment crédités de façon très claire au générique), j'ai décidé d'y placer le nom du superviseur David Hand. Car pour tous les documents d'époque qui nous montrent un certain Walt venant sur le plateau pour y visiter ses employés, il convient quand même de rappeler que chez Disney, s'il y a un homme qui n'était absolument pas impliqué dans la partie artistique, autrement que pour la supervision des travaux déjà finis, c'était Walt. Et ce n'est pas parce que le bonhomme a déplu à Disney au point d'être écarté de l'histoire du studio, qu'il faut oublier l'importance de David Hand, qui lui a passé beaucoup de temps sur le plateau... Il a été réintégré au générique, incidemment, dans la version actuellement disponible en Blu-ray...
Situé fermement du côté des cartoons pour les plus petits, ce film propose un conte inédit et assez étrange... On y trouve un chat qui pourrait ressembler à une version "adulte" de Pussyfoot, le petit chat recueilli par le gros chien Marc Anthony dans Feed the kitty en 1951...
Un tout petit chat a été recueilli dès son plus jeune âge par une femelle rapace, et en a retenu... qu'il sait voler, d'une façon particulièrement personnelle. Il va le démontrer une fois devenu adulte et indépendant, en séduisant une femelle, et en la protégeant contre un énorme molosse...
Ce dernier n'est pas sans rappeler Marc Anthony! Derrière ce film étrange, y aurait-il une volonté de "rectifier le tir" et renvoyer le bouledogue à son destin de méchant de dessin animé? En tout cas, le pauvre animal s'en prend plein la figure.
Ce film est un exemple de ce qui arrive quand un auteur particulièrement têtu remet dans le circuit un concept qui lui tient vraiment à coeur: dans Feed the kitty, le gros chien Marc Anthony trouvait un chat mignon tout plein qu'il ne mettait qu'une minute à adopter... Ici, on revit en une vingtaine de secondes la scènes des retrouvailles entre Marc Anthony et Pussyfoot, sept années après leur création...
Marc Anthony est cette fois le chien qui garde un chantier de construction, et la tâche va être difficile à accomplir avec le petit chat d'une part, et un autre chat qui cherche à lui subtiliser sa nourriture. Si la dynamique est plaisante entre le chien responsable, le chat totalement inconscient des dangers qui l'entourent, et l'autre chat destiné à s'en prendre plein la figure, on a le sentiment que la mayonnaise ne prend pas aussi bien que dans la série originale de trois cartoons.
Ce cartoon appartient à la veine "de luxe" des dessins animés Warner, soit à la série "Merrie melodies", qui bénéficiait de la couleur. Et dans les mains de Chuck Jones, ça va dans un sens assez proche de ce qui se passait chez Disney, le film étant largement un conte à destination des plus jeunes membres du public. Il introduit aussi un personnage qui ne m'a jamais vraiment emballé, la souris "Sniffles", trop jeune pour se rendre compte de ce qui l'entoure, et donc propice à pratiquer un humour en douceur, gentiment décalé, avec comme principal atout une animation qui travaille sur le détail...
Sniffles, enrhumé, se rend donc à la pharmacie pour trouver un remède, et y trouve un sirop tellement alcoolisé qu'il va avoir du mal à ne pas se mélanger entre l'ivresse et la réalité. Une bonne partie est consacrée à la complicité inattendue entre la souris ivre et... un rasoir électrique.
Trois années après sa création pour le film Mexicali Shmoes, celui qui n'a failli exister que pour précipiter la fin d'un dessin animé s'est retrouvé à sa façon la star d'un autre film: car une fois qu'on a vu le cousin de Speedy Gonzales, le tristement bien nommé Slowpoke Rodriguez, il est impossible de le chasser de son esprit.
Grâce à ce nouveau film dans lequel il vient s'installer chez son cousin au mépris du danger (et le danger, c'est Silvero Gato, soit le chat Sylvestre, principale victime de Speedy Gonzales à travers les années), on va en apprendre un peu plus sur lui: d'une part il chante La cucaracha, mais tellement lentement et tellement mal que c'en est une torture. Ensuite, il est lent, mais quelle fourchette! Il a faim. Tout le temps... Enfin... mais non, je ne peux pas vous révéler ça!
Certes, ce n'est pas la période la plus glorieuse de la filmographie des Looney tunes, et certes Freleng n'est pas Bob Clampett. Mais le vieux renard avait des idées à revendre et y compris lorsque son style est essentiellement devenu la répétition de vieilles formules et automatismes (tout comme Jones et Avery, remarquez...), il a su nous charmer. Speedy Gonzales et les clichés des hispaniques, qui ont tant embarrassé la Warner, ont la réputation d'avoir au contraire charmé bien des Mexicains parce qu'il est difficile de prendre au sérieux ces aventures, d'une part, et parce qu'ils ont apprécié de voir une sorte de super-héros typiquement Mexicain... Ou supposé tel.
J'ai un faible pour celui-ci, pour lequel Freleng cède à la tentation de faire de José et Manuel, deux chats particulièrement lents d'esprit, les personnages centraux: toujours cette conception selon laquelle le "méchant" est nettement plus intéressant que le héros. Et puis il y a ici la toute première apparition, laconique mais hilarante, d'un personnage dont la gloire ne tient qu'à deux films, pas un de plus: Slowpoke Rodriguez.
Ce film offre une variation sur le thème de la chasse car cette fois (Comme dans The Heckling harede Tex Avery) c'est un chien qui poursuit Bugs Bunny de ses assiduités. Un chien d'ailleurs vaguement efféminé, totalement façonné comme seul Clampett pouvait le faire, avec une très improbable houppette rousse, et une queue ornée façon caniche de la même couleur...
C'est donc cet animal foncièrement marqué du saut de la crétinerie dès le départ qui va suivre Bunny dans l'eau (Une bonne partie du cartoon est en fait purement sub-aquatique... ce qui a tendance à en ruiner l'effet) et succomber à ses charmes comme à ceux d'une sirène. Si McKimson est à son aise comme à chaque fois qu'il doit animer une bestiole de taille conséquente, Scribner s'en donne à coeur joie avec les changements d'expression du molosse.
Il existe deux versions du film: dans la plus courante, à la fin, Bunny entend le chien se plaindre et souhaiter mourir, il lui offre un revolver avec lequel l'animal se suicide... Il s'agit en effet de la version atténuée, puisque dans l'original il tirait lui-même...
Il aura fallu attendre les années 60 pour que McKimson, animateur respectable mais réalisateur d'une lourdeur et d'une insipidité presque révoltantes, se décide enfin à essayer de retrouver de l'intérêt dans son métier... Et ça passe par une poignée de films nettement plus intéressants que la plupart de ses contributions au canon des Looney Tunes...
Témoin ce petit conte tendre, narré par la voix très générique d'un garçonnet qui nous parle de son chien, un cabot rondouillard, un peu lent et un peu limité, avec un léger décalage entre le commentaire (affectueux) et les images (Bartholomew le chien, c'est quand même un bon gros balourd)... Et l'affaire de la vie de Bartholomew, c'est sa haine des roues, qui le pousse à poursuivre tout ce qui roule, pour les mordre!
Ce qui va le faire voyager...
Le dessin, très travaillé, est rond lui aussi, schématique, et les personnages ont des couleurs simples, la plupart du temps une seule: les chameaux, les éléphants dans la section "exotique" de ce film ont une palette de couleurs qui renvoie aux recherches graphiques d'un Morris...
C'est séduisant, sympathique, court, et je le répète, bien meilleur que tout ce que Mc Kimson a pu signer dans sa longue carrière, avec Bugs Bunny, Daffy Duck et consorts.