Vrai, The film fan est une merveille... un de ces films dans lesquels Bob Clampett jette l'intrigue avec l'eau du bain, et s'amuse à promener Porky Pig, l'inutile star paradoxale de ces films en noir et blanc, au milieu d'anecdotes disjointes et propices aux jeux de mots les plus affligeants, un peu à la façon dont Tex Avery se payait allègrement la tête des travelogues, ces documentaires sur les voyages qui étaient souvent des bouche-trous dans les salles des années 30 et 40.
Donc, Porky Pig, qui est un petit enfant (mais oui), entre dans une salle de cinéma à la faveur d'une promotion exceptionnelle pour l'ouverture d'une salle, et nous assistons à la séance, entre des actualités idiotissimes, et un extrait d'un long métrage d'un vengeur masqué qui est une énième resucée de The Lone ranger (Et son cheval s'appelle Sterling, bien sûr). C'est souvent superbe, toujours complètement idiot. Bref, c'est beau...
Je l'ai déjà souligné, les films de Hardaway et Dalton s'intègrent parfois mal dans le canon des Looney Tunes, surtout quand comme c'est le cas ici, ils sont en concurrence avec l'unit de Bob Clampett qui occupait le terrain... Mais ça n'empêche pas leurs films plus marqués par l'esprit Disney d'être parfois de grande qualité, et c'est le cas ici.
Ca commence d'ailleurs par une blague WB typique, avec une référence à l'équipe des Giants (Les Géants): toute ressemblance entre les Géants et les Giants, etc etc etc! Et ensuite on part bille en tête... Car même si le film est long (plus de huit minutes), on ne perd pas de temps. Notre Porky Pig médiéval se joint à une foule en armures pour aller faire la chasse au géant dans on château. Une fois sur place, Porky se retroue seul, et aux prises avec un bébé géant...
Porky Pig ou comment s'en débarrasser... Le cochon est un "joueur de flûte" à Hamelin, qui a débarrassé les citadins d'une invasion de rats, avec sa flûte. Quand on lui demande comment il a fait, un rat se manifeste, et tout recommence... Sauf que Porky fait faire le sale boulot par un chat, et qu'on ne verra donc plus le héros de tout le reste du court métrage...
Pas un chef d'oeuvre, non, mais les animateurs s'amusent avec ce chat qui change de caractère au gré de leurs envies... On peut noter une apparition d'un gag, avec les fameuses neuf vies du chat, qui sera recyclé maintes fois, dont une mémorable réappropriation par le chat Sylvester pour Friz Freleng. Une autre tendance très marquée chez Bob Clampett, celle d'intégrer dans ses films des allusions au jazz contemporain, passe par une scène où Porky joue... à la façon de Benny Goodman.
Le film se situe dans le Kentucky, dans les années 30, autant dire que c'est inévitable: tous les clichés les plus joyeusement assumés sur les habitants des collines et des Monts Ozark vont y être plus ou moins présents: des gens ruraux, pas futés, à la gâchette facile, et une fois de plus occupés à se haïr entre voisins pour des raisons qui échappent à tous. Peu importe, l'important est de se battre...
Au milieu de tout ça, deux coeurs purs: Porky et Petunia, de deux familles ennemies, se désolent de la situation. Pour une fois le généralement inutile cochon va se rendre utile, et pacifier tout ce petit monde.
Clampett a clairement pris du plaisir avec son univers rural et un peu, disons, reculé... Mais on s'attendrait à plus de méchanceté (réalisés par Avery à la WB ou a la MGM, les films sur ce même sujet sont systématiquement censurés, sous couvert de mauvais goût ethnique!). Serait-ce que l'allégorie qui est au coeur du court métrage, soit à prendre pour argent comptant? Que ce Looney Tune de Bob Clampett, aurait en fait un massage pacifiste à nous faire passer? A coups de grenade, certes, mais...
D'une part, à près de 9 minutes, ce film est nettement plus long que la moyenne des courts métrages Schlesinger. D'autre part, il présente d'immenses qualités, et des longueurs, des grands moments et de réelles déceptions... Seul dans son coin à confectionner des films en noir et blanc pendant que Tashlin, Freleng, Jones, Avery avaient droit aux films de prestige en couleur, Clampett faisait ce qu'il voulait, donc, pour le meilleur et... pour le pire.
Au début, on a un exemple de la façon dont Avery et Clampett détournaient avec génie le style des films noirs de la WB dans leurs courts métrages, mais c'est pour annoncer un autre genre: l'agent Porky apprend qu'il doit se rendre dans une maison hantée... Et effectivement, il y a un fantôme, au demeurant assez sympathique, contre lequel le héros ne fait pas le poids...
On pourrait comptabiliser les inventions, comme cette merveilleuse scène de l'escalier en colimaçon, ou l'inventivité du fantôme (qui est doublé non par Mel Blanc, mais par Pinto Colvig, la voix de Goofy, ce qui ne peut que le rendre encore plus sympathique)... D'autres gags ne mènent nulle part, hélas, et le flm se termine sur une énième allusion raciale, quand le fantôme, noirci par les émanations de la voiture de Porky Pig, adopte l'accent typique d'un habitant de Harlem: une probable allusion à l'acteur Eddie Rochester Anderson...
A cette époque, les Looney Tunes se réduisent à Porky Pig. Tout le reste des films produits par Schlesinger sont des Merrie melodies, et sont en couleurs; seul les films autour de Porky restent en noir et blanc. Et l'année 1939, pour cette série de courts métrages, est dominée par Bob Clampett... Ce qui explique le fait qu'ils ne sont pas tous au même niveau.
Du coup, celui-ci déçoit... A Donut Hole, une petite bourgade clairement (avec un nom pareil!) sise au milieu de nulle part, Porky Pig attend dans son hôtel vide, qu'un client daigne arriver... Et c'est à ce moment qu'une immense voiture s'arrête, et une chèvre (qui répond au nom de Gabby, nouvel avatar d'un personnage irritant qui n'a jamais réussi à s'imposer) en sort: affligé de la goutte, le personnage demande du calme avant toute chose. Mais ce sera difficile, puisque un petit canard, qui ressemble plus à une version rajeunie de Donald qu'à Daffy Duck, va lui mener la vie dure.
Il n'y a pas grand chose à dire: une fois de plus, le fauteur de trouble vole la vedette à Porky Pig, et agit avec une grande dose de sadisme; par ailleurs, fidèle à une tradition qui court dans tous les dessins animés depuis 1931, ce court métrage recycle une chanson d'un film WB. Honeymoon hotel, entendue dans Footlight parade, de Lloyd Bacon, devient ici 'The Porky Pig Hotel'...
Daffy Duck, en 1939, était particulièrement cinglé. Et plus encore sous la responsabilité de Clampett. Mais ça ne l'empêche heureusement pas d'être aussi un père de famille... Dans la ferme, Porky Pig apprend donc que la famille va s'agrandir, et se réjouit pour son ami. On ne verra presque plus le cochon-héros en titre du film, dédié d'une part au trouble du canard, et ensuite, mais oui, à un acte d'héroïsme qu'il va acomplir!
Le film est très drôle, et permet à Clampett de faire des variations sur un certain nombre de ses obsessions:
d'une part, la nichée de canetons est composée de trois petits rigoureusement disciplinés, et d'un quatrième plus lent, et qui a l'air beaucoup plus intéressant que les autres. C'est de lui que viendra le trouble (repéré par une bande de buzzards), et c'est lui qu'il faudra sauver. Mais quand les oeufs éclosent, il reste coincé dans sa coquille et se déplace avec, une figure qu'on a déjà vue...
ensuite, Daffy Duck est tellement nerveux d'attendre des petits qu'il se saoule, et ce avec une application qui forcerait volontiers le respect... Et ce sera un fil rouge du film. En attendant, le Daffy cinglé de 1939, saoul comme 36 cochons, est un spectacle navrant certes, mais c'est drôle. Très drôle...
enfin, le metteur en scène profite de la présence de l'incontrôlable Daffy Duck pour varier le rythme en permanence, se permettant aussi des digressions qui n'appartiennent qu'à lui, comme ce chien inutile à l'histoire qui écoute Porky nous indiquer sa joie d'apprendre que son copain va être papa, et qui une fois Porky parti, se tourne vers nous et d'un air incrédule, nous dit, sans sourciller "Amazing!" de la voix de Mel Blanc, dans le registre le plus grave qu'il pouvait mobiliser...
L'animation est superlative, le film sans temps morts, le scénario irrésistible, c'est drôle, c'est aussi tendre et on a si on procède à des arrêts sur images des surprises mémorables. Bref, ceci est un grand film de Bob Clampett.
Ca sent un peu la routine: Porky vient chez sa petite amie Petunia (qui a bien changé depuis la dernière fois qu'on l'a vue; c'était un vamp, maintenant c'est la cousine de Minnie Mouse...) et la convie à un pique-nique. Tout va bien, sauf que Pinky, le petit frère de Petunia, s'invite, et va se révéler une vraie peste.
on, une fois de plus, ni ce pauvre Porky, ni Petunia, ne seront les héros du film; on se rappelle d'un autre film, Porky's naughty nephew, paru quelques temps avant celui-ci, dans lequel Porky se rendait à la plage en compagnie de Pinky, et c'était à peu près le même script. Par contre, Clampett multiplie les opportunités de mettre son monde en danger: visite des fauves au zoo, train lancé à toute allure, etc...
Et donc, un autre film de la série Porky Pig qui se déroule dans l'Ouest à l'époque des guerres indiennes! Clampett adorait se moquer des indiens, ou plutôt de tout le folklore que le cinéma, la littérature pour jeunes et la bande dessinée bourgeonnante véhiculaient. Il le prouve une fois de plus avec ce film qui est essentiellement une enfilade de gags, sur le mode "fort de la cavalerie assiégé par une tribu indienne"...
Mais il y a un avantage tout de même: pas ce pauvre Porky Pig, plus ou moins inepte et qui semble s'être une fois de plus trompé en venant s'installer dans un des films de sa propre série! Par contre il y est confronté à un redoutable général qui finit par faire basculer ce film moyen vers le n'importe quoi absolu, en avalant par mégarde toutes les munitions du fort, et en les recrachant de façon explosive. C'est Daffy Duck, on le reconnaît à son chapeau...
Le pôle nord a toujours inspiré les réalisateurs des films d'animation du studio Schlesinger. On se souvient du film Penguin Parade, de Tex Avery, qui était un excellent exemple de la série des Merrie Melodies quand ces films 'éloignaient du modèle des Silly Symphonies de Disney. Clampett s'y est essayé parfois, mais comme le montre ce film, il hésitait tellement entre un film-revue, démonstratif à la Penguin parade, et une intrigue prétexte à gags, qu'il a fini par faire les deux...
Donc, c'est le matin au pôle nord, et le gardien des lieux, Porky Pig, se réveille. Il vit en parfaite harmonie avec les animaux, et tout le monde chante et danse... Quand un abominable chasseur arrive pour faire leur fête à tous ces manteaux de fourrure à pattes... Le bon droit triomphera, mais avant, on aura vu danser un grand nombre de phoques.