Ub Iwerks était parfois sérieusement fâché avec son patron (Et supposé ami) Walt Disney, oh, pour des broutilles: cette manie sans doute de "signer" de son logo absolument tous les films de la firme en oubliant souvent, voire systématiquement, de créditer les auteurs des films, cette assurance dans le mensonge (La création de Mickey Mouse, par exemple), faisaient qu'un authentique artiste comme Iwerks, auquel on doit beaucoup, mais alors beaucoup, finissait toujours par se fâcher. Donc avec ce film i fait une entrée chez les concurrents, et emploie même pour animer son film deux pointures de chez Schlesinger: Jones et Clampett, pas moins...
Mais Porky and Gabby n'est pas autre chose qu'un bouche-trou, quel que soit le génie établi d'Iwerks, l'auteur de The skeleton dance, quels que soient les savoir-faire respectifs de ses deux animateurs-vedettes. L'histoire, réduite à presque rien, ne présente pas d'enjeu: Porky et sa chèvre irascible Gabby vont camper, et la nature s'en mêle, les ennuis s'accumulent, jusqu'au moment où la seule solution est de partir... L'animation est bonne mais les personnages manquent de substance, et la bande-son est vampirisée par du jazz en boîte, rien à voir donc avec ce que fera Stalling quand il se laissera aller... Ub Iwerks fera essentiellement trois tours de piste avant de repartir, et on ne se souviendra pas vraiment de lui.
Après quelques films un tantinet routiniers, voici le réveil spectaculaire de Frank Tashlin! Porky est amoureux, et on se demande bien pourquoi, tant l'élue de son coeur est peu attachante. Le seul argulent qui lui fait ouvrir sa porte à son prétendant est le fait qu'il a amené des friandises. Et elle est flanquée en permanence d'un chien, un Pékinois de la pire espèce... Tentant de se suicider, Porky a des hallucinations, il voit son avenir avec Petunia... Et ça va heureusement lui ouvrir les yeux.
Au début, Tashlin abat le quatrième mur en nous présentant, avant le générique, la petite nouvelle, Petunia Pig. Celle-ci reviendra, mais pas souvent, tant elle a un caractère de... heu... Cochon. Mais le film est formidable, alliant la rapidité de l'action avec un graphisme de plus en plus maîtrisé. C'est drôle, impertinent, et assez grinçant, quand même...
La corrida, cet étrange passe-temps qui prend un peu trop souvent le prétexte de se battre contre un animal qui ne vous a rien fait pour ne pas suffisamment massacrer de toreros (le seul intérêt, c'est quand cet abruti en pyjama à paillettes se fait détruire par le bovin, non?) a souvent inspiré les cartoons, et Tex Avery y reviendra avec Droopy quelques années plus tard. Mais en attendant, c'est Porky Pig qui s'y colle, sauf qu'il y vient par un stratagème: il avait arrangé avec des copains déguisés en taureau! Le problème c'est qu'il vont d'abord boire, et manquer le rendez-vous, Porky affrontant finalement un authentique toro...
Si Porky Pig (Comme d'habitude) manque totalement de substance, on appréciera un taureau plein de santé, drôle, vif et qui plus est il va survivre, ce qui dans ce soit-disant sport est suffisamment rare pour être mentionné...
Ce n'est pas tant par son intrigue, son rythme ou sa mise en scène que ce film de Tashlin se distingue. Il raconte une course délirante dans lequel Porky Pig se distingue par le tacot abominable qu'il conduit. Mais il est plus notable par cette habitude qu'avaient les animateurs de croquer les grands d'Hollywood dans leurs films! Et il n'y a aucune motivation réelle pour que Laurel et Hardy, W.C. Fields, Chaplin ou Charles Laughton, si ce n'est que le grand challenger s'appelle Borax Karoff...
Si il est généralement exact que la plupart des Porky Pig réalisés par Avery sont clairement au-dessus du lot, et c'est vrai aussi pour les réalisations de Tashlin, on tombe parfois sur un ratage. Ceci est un exemple, qui pêche par des idées, avouons-le, trop délirantes, et qui débouchent sur une répétition gênante.
Pourtant le début était prometteur: on assiste à un de ces montages "à la WB" dans lesquels Avery excelle, et qui nous montre l'imminence d'un match crucial, qui passionne tout le monde. Spectateur enthousiaste, Porky en vient par un quiproquo à remplacer sur le ring un lutteur, qui doit se battre contre le champion toutes catégories, et bien sûr ce dernier n'est pas un tendre. Mais si je n'ai rien contre le fait qu'un film soit construit sur la répétition d'un gag et d'un seul, encore faut-il qu'il soit bon...
Continuant à alterner la supervision des films de la série Porky Pig avec Avery, Tashlin s'installe à la Warner Bros, et continue à tourner de bons films, qui ont pour point commun d'aller vite. Je l'ai déjà dit, mais ici, ça va encore PLUS vite! Et pourtant c'est un sujet ultra-rabâché, que n'aurait pas dédaigné Disney... Non, d'ailleurs, il y a du avoir des dizaines de films comme celui-ci chez tonton Walt: la description d'une vie dans les bois, envahie par un gros sale méchant qui chasse, pèche, incendie et braconne. Porky Pig va donc devoir venir en aide aux animaux, et bien sur triompher du gros costaud. Pas révolutionnaire, mais plaisant et comme toujours, animé. Très animé...
Le bonheur apporté par un film comme celui-ci ne vient pas de son intrigue, oh non! On est en 1936, et Tex Avery s'ennuie déjà dans le cadre traditionnel d'un dessin animé: il lui fait donc abattre le quatrième mur, ce qu'il fait du début à la fin de ce petit film... Mais c'est aussi très frappant, de voir ce qui peut aussi bien être une influence consciente qu'inconsciente, le fait que The village smithy ressemble par bien des points à The blacksmith de Keaton!
Dès le départ, un narrateur pose les personnages les uns après les autres, les rappelle à l'ordre, installe littéralement les décors, et c'est du Tex Avery classique... On retrouve ensuite le même cadre bucolique que dans le film de Keaton, avec inscription du maréchal-ferrant dans la tradition rurale Américaine, le duo constitué d'un patron costaud et vaguement violent, et d'un héros-assistant plus, disons, inepte qu'autre chose... Et Porky Pig vit ici le même type d'aventure que Keaton, devant "chausser" un cheval... C'est après que le film dégénère allègrement, avec le cheval devenu fou (Il a reçu un fer rougi sur l'arrière-train, mettez-vous à sa place!), qui cause des catastrophes sur son passage durant une suite que les circonstances vont répéter... Si le film n'est pas notable par une esthétique brillante, il pose vraiment les fondations du traitement joyeusement anarchique que le metteur en scène va faire subir au dessin animé dans les années à venir!
Encore caché sous son pseudonyme de Frank Tashlin revisite l'univers de Beau Geste et Beau Sabreur, déjà largement parodié avec talent par Laurel et Hardy dans le moyen métrage Beau Hunks de James Horne...
Donc parmi les nouvelles recrues de la légion, il y a un cochon, qui tranche un peu par son gabarit sur le reste de la troupe, mais qui est très vite repéré... donc on lui confie le "nettoyage de chameau"! Mais quand la menace du chef rebelle Ali Mode se précise, et que le fort est attaqué, Porky Pig va enfin faire ses preuves et se conduire en héros.
Pas de surprise: le film est certes routinier, mais plaisant, marqué par une excellente animation, un graphisme qui commence à évoluer dans le bon sens, et un sens du rythme qui est la marque de fabrique de Tashlin...
Porky a une petite entreprise de déménagement, et une dame qui en a vraiment besoin fait appel à lui: sa maison est sur une falaise attaquée par une mer déchaînée, et qui menace de s'écrouler. Elle voudrait donc sauver ce qui est sauvable... Porky et ses employés (dont l'autruche aperçue dans Porky's pet) passent à l'action avec, disons, plus ou moins de bonheur...
Etrange impression que ce film nous donne. C'est le tout dernier réalisé pour la Warner par Jack King, reparti chez Disney sans avoir convaincu, et il souffre de quelques scories: l'incapacité à faire le deuil de sa maison mère, ce qui se traduit ici par l'apparition d'un personnage qui n'est rien d'autre qu'un plagiat, en l'occurrence la vache Clarabelle qu'on apercevait souvent à l'époque dans l'univers rural de Mickey Mouse, est un exemple typique. Après, on peut quand même trouver que par rapport aux films bien construits et à l'animation soignée de Tex Avery et Frank Tashlin, celui-ci a presque l'air d'avoir été bâclé, ses décors jetés n'importe comment sur la papier, et son animation cochonnée (Sans jeu de mots)...
Et pourtant il a au moins un avantage sur la plupart de ses six prédécesseurs: le rythme. King a enfin pris acte du fait que les dessins animés de la série Looney Tunes sont là pour que ça bouge! Et ça n'arrête pas, sauf pour un personnage de singe, qui je le suppose hélas, c'est dans l'air du temps, est supposé être un démarquage d'un Afro-Américain. Un gag de saison, oui. Mais qui reste aussi impardonnable que mauvais.
Sorti en septembre 1955, Deputy Droopy est l'un des derniers films de Tex Avery, et précisément son avant-dernier Droopy! C'est aussi un remake de Rock-a-bye bear, dont il reprend la principale idée: une situation dans laquelle il est crucial de ne pas faire entendre le moindre bruit... Droopy est un adjoint au shérif d'un conté, qui lui confie une mission: garder un coffre-fort rempli. Et bien sur, deux malfrats qui écoutent à la fenêtre s'apprêtent à ne faire qu'une bouchée du chien. Sauf que le shérif prévient: au moindre bruit, il accourt et il tire dans tous les sens. Les bandits vont donc devoir être particulièrement prudents... A chaque fois qu'un cri menace de se faire entendre, ils courent en direction d'une colline environnante pour le laisser sortir...
Les accessoires utilisés ici pour le gag (...le seul gag, quand on y réfléchit bien) du film sont hétéroclites et assez inventifs: un rocking-chair, un chat, un homard, des pétards, une plume, un vilebrequin chauffé au rouge, une bouteille de lait... Et on obtient ici une situation paradoxale: avec un remake, basé sur UN SEUL GAG (Comme d'autres films de Avery, et beaucoup de films de Freleng, d'ailleurs), c'est hilarant.
...A condition de ne pas avoir d'aversion pour le style de plus en plus géométrique (L'influence UPA, nous dit-on), et disons-le assez moche, de l'animation. Ni pour la voix sans grand intérêt d'un Droopy de plus en plus désincarné... A noter la présence de deux metteurs en scène au générique: le départ de Tex Avery se précisait à l'horizon, et la succession par Michael Lah (Qui allait tourner un certain nombre de Droopy en solo, pas vraiment fabuleux) était déjà en train d'aménager les cartons.