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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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4 février 2022 5 04 /02 /février /2022 17:53

La vie de Jésus, présentée à travers des tableaux élaborés, de l'arrivée de ses parents à Bethléem jusqu'à la résurrection, en passant par tous les événements marquants... C'est une compilation très propre sur elle, visant autant à l'édification des masses sous l'égide de la bonne morale catholique, la seule qui vaille pour Léon Gaumont, qu'une tentative consciente et militante de montrer et démontrer la puissance du cinéma... D'ailleurs, c'est le premier film de long métrage (in extremis, mais l'intention est là) réalisé en France, et une fois de plus Alice Guy est à la manoeuvre...

Et c'est aussi, de façon importante, la base d'une injustice profonde: parmi les assistants de mademoiselle Alice, il y avait un futur cinéaste, ce qui a permis à de nombreux soi-disant historiens dont le toujours approximatif George Sadoul, de se dépêcher d'enlever tout crédit à Alice Guy. Et comme ce genre d'injustice stupide est toujours vouée à faire école, le film est présenté aujourd'hui par Gaumont sous le double patronage de sa vraie réalisatrice, et de son assistant. A ce régime-là, si vous voulez, je parlerai bientôt de La ruée vers l'or (1925) d'Henry D'abbadie D'arrast, ou des Nouveaux Messieurs (1928) de Marcel Carné... Je vous laisse bien sûr le soin de chercher le nom du réalisateur que les imbéciles ont décidé de promouvoir afin d'éviter qu'une grande première soit considérée comme l'oeuvre d'une femme.

Blague à part, le film n'est sans doute pas folichon, mais c'est quand même, à sa façon, une grande date...

 

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Published by François Massarelli - dans 1906 Muet Alice Guy *
4 février 2022 5 04 /02 /février /2022 11:41

Le journal The Evening Sun, basé à Liberty (Kansas), possède une branche dont la rédaction est située en France, dans la ville d'Ennui-Sur-Blasé: The French Dispatch est une tradition du quotidien, qui s'honore d'avoir réussi à établir aussi loin de la maison-mère une tradition de journalisme intransigeant... Mais le supplément est condamné à très brève échéance, car le directeur (Bill Murray) qui vient de mourir a stipulé dans on testament que le journal cesserait de paraître après son décès. Le dernier numéro reprend donc trois articles mythiques et un éloge funèbre...

Un prologue aux trois autres parties contient un segment sur un journaliste cycliste, Herbsaint Sazérac (Owen Wilson), qui nous permet de visiter la ville; le premier des trois articles est l'oeuvre de la très respectée J.K.L. Berensen (Tilda Swinton) qui nous raconte l'étrange épopée du peintre psychopathe Moses Rosenthaler (Benicio Del Toro), depuis sont enfance au Mexique jusqu'à son enfermement dans une prison, où sa relation clandestine avec une gardienne de prison (Léa Seydoux) va provoquer une révolution artistique; le deuxième article s'intéresse à une mini-révolution qui ressemble beaucoup à Mai 68 (il y est question pour les garçons d'avoir accès au dortoir des filles à l'université d'Ennui-sur-Blasé): l'article est signé Lucinda Kremetz (Frances McDormand) qui a bien connu le meneur estudiantin Zeffirelli (Timothée Chalamet) avec lequel elle a eu une aventure; enfin, le dernier article est dû à la plume de Roebuck Wright (Jeffrey Wright), dont une enquête culinaire va se transformer en une véritable histoire policière, avec enlèvement d'enfant à la clé...

C'est extravagant, et on peut le dire tout de suite, ce film, le plus franchement excentrique de toute la production de Wes Anderson, n'a pas plu à tout le monde. Entre une ovation de dix minutes à Cannes où il a été projeté, et des articles acerbes voire vengeurs de nombreux médias de par le monde (pour certains articles, on en viendrait à se demander sil n'y avait pas une sourde, sournoise, et très ancienne envie de s'essuyer les pieds sur le petit génie Texan), la réception a été, disons, variée... Bien sûr, il y a aussi eu des critiques très positives, mais l'occasionnelle volée de bois vert est notable justement parce que c'est rare dans l'histoire du metteur en scène. Pour ma part, j'admets que le film n'est sans doute pas, sur bien des points, son meilleur, mais cette vendetta ne se justifie en rien: d'une part, Anderson a lui-même choisi de faire le contraire de ce qu'il a toujours fait en proposant un film à segments, dans lequel les personnages se multiplient, tout en amenuisant leur portée. 

Donc oui, en effet, on pourra se plaindre de rester trop peu de temps avec Lucinda Kremetz et Zeffirelli par exemple, ou on pourra déplorer que la petite amie de celui-ci soit un personnage moins développé que Agathe, la petite pâtissière (Saoirse Ronan) de The grand Budapest Hotel, qui donnait à tout le film un parfum de nostalgie triste par son passage. Mais le propos, qui à mon sens complète et prolonge The Grand Budapest Hotel (sans doute LE meilleur film d'Anderson) est bien moins de s'intéresser aux personnages, que de rendre hommage à trois univers bien particuliers, et imbriqués les uns dans les autres: la France de toujours ou de jamais, non pas celle des années 50, 60 ou 70 telle qu'elle donne l'impression d'être représentée dans le film, mais bien son double fictif, cette France vue à travers les films tournés souvent en langue anglaise, dans les années 30, 40, 50 et 60 justement, par des Lubitsch, des Wilder, Blake Edwards ou d'autres génies. Une France décalée, inexistante, que Wes Anderson recrée à grand renfort de noms tous plus gentiment impossibles les uns que les autres (Nescaffier, Le Boulier, la gardienne Simone, et... Zeffirelli?), et qui sent bon le cinéma: Love in the afternoon, Irma La Douce ou Bluebeard's eighth wife, par exemple. Et on y fume des Gaullistes...

Autre tradition explicitement référencée, celle du cinéma français. Comme j'en ai marre qu'on profite de Wes Anderson pour montrer sa science en ce qui concerne Godaut et Truffard, qui sont effectivement tous deux dans le panthéon du cinéaste (c'est son droit), je vais me contenter ici de rappeler deux choses: d'une part l'influence évidente de Jacques Tati, plus forte sur ce film que d'habitude, et dont Anderson a emprunté la géniale maison-dédale de M. Hulot (c'était dans Mon Oncle); et d'autre part le commissaire joué par Mathieu Amalric est un ancien colonial, moustachu et malade, qui a ramené des colonies un petit orphelin métis. Il ressemble tellement à l'inspecteur Antoine (Louis Jouvet dans Quai des orfèvres de Clouzot) que c'en est troublant.

Enfin, il y a la presse, celle qu'on vilipende partout, de complotisme en manifestations, d'éditoriaux de tout petits candidats fascistes, en colère infantile de tous petits candidats d'extrême gauche. C'est pareil aux Etats-Unis, où un président a pu tenir quatre ans à nier tout et n'importe quoi en attaquant systématiquement les journalistes, pourtant la presse est supposée être une institution aux Etats-Unis. Anderson utilise donc le cinéma, et ses possibilités, pour envoyer une lettre d'amour amusée aux journalistes de terrain, comme il avait inscrit son film précédent dans une logique profondément littéraire. Avec The French Dispatch, on voit à l'oeuvre des journalistes investis à 100 % dans une recherche souvent tellement précise et minutieuse qu'elle en devient absurde, comme Berensen qui semble avoir passé sa vie entière à écrire un article sur Rosenthaler... des journalistes qui sont autant d'auteurs, et qui dépendent d'un rédacteur en chef qui saura exactement trouver quoi prendre et qui laisser dans leur production... Bref, des pros et des artistes. D'où un sens aigu de la digression qui se retrouve dans la forme délirante du film.

Et c'est peut-être ce qui a gêné dans ce film étrange, cette façon, mélangeant une constante référence au texte, dans ces images toujours aussi impeccablement et géométriquement horizontales, avec ces mouvements d'une caméra habitée qui nous oblige à la suivre, un coup à droite, un coup à gauche. Le film est un dédale de sollicitations textuelles, sonores et picturales, en 1:33:1 sur une large part mais pas que, aux couleurs pastel, mais parfois en noir et blanc en fonction des besoins... Il y a même de l'animation mal fichue (moins plaisante aux yeux en tout cas que les maquettes en image par image des poursuites de The Grand Budapest Hotel). La musique d'Alexandre Desplat est sans doute la partie la plus normale de ce drôle de film! C'est épuisant, mais on s'y fait très vite, et on sait qu'on y reviendra justement avec le plus grand plaisir... Enfin, moi, en tout cas.

Et pour finir, vous avez un aperçu du casting exceptionnel dans cet article. Mais il y a en a d'autres, et non des moindres... Allez y faire un tour, vous verrez...

 

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Published by François Massarelli - dans Wes Anderson Comédie Saoirse Ronan
3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 18:53

Est-ce Alice Guy, comme on le pense aujourd'hui, qui a souhaité immortaliser un tournage d'une "phonoscène", ces courts films musicaux qu'elle avait pris en charge afin d'alimenter l'exploitation des films Gaumont, le patron ayant tout misé sur cette technique avant-gardiste mais surtout rudimentaire... En tout cas il est impressionnant de voir, élargi au-delà de sa réalité cinématographique, un film avec ses acteurs, actrices et décors, avec en plus ses techniciens, caméraman, accessoiristes, et bien sûr sa réalisatrice, habillée comme il se doit à la mode 1905!  Alice Guy se tient entre la caméra et ses acteurs, et il est clair qu'elle est la patronne. On notera qu'une autre feme semble avoir de l'importance, celle qui se tient au-dessus du phonographe: c'est elle qui enregistre le son de ces films parlants et chantants.

Le résultat, je vous le donne en mille: le film, aussi simple et limité soit-il, est mille fois plus intéressant que les phonoscènes qui nous sont parvenues, pour la plupart des chansons du music-hall interprétées par des artistes qui étaient populaires à l'époque, et qui aujourd'hui, sont... antiques: Mayol, Polin ou Dranem.

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Published by François Massarelli - dans Alice Guy Muet
3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 18:45

En 1905, avec son opérateur Anatole Thiberville, est partie en Espagne afin d'y trouver des "vues" pittoresques, comme on disait alors. Il en subsiste un ensemble de plans touristiques qui sont autant de vues d'un autre âge (littéralement) de nos voisins du Sud... Un peu dans l'esprit des films Lumière: cette fois, Guy et Thiberville posent la caméra, et filment avec un mouvement panoramique de gauche à droite, une rue de Madrid ou un panorama de Grenade...

Puis elle convoque des danseurs et des musiciens pour des films muets, mais coloriés au pochoir: Tango, La malaguena et le torero, et aussi  Saharet -Le boléro, une danse 'typique' exécutée par une artiste de music hall. L'intérêt est plus qu'anecdotique.

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Published by François Massarelli - dans Alice Guy Muet
3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 18:20

Une jeune femme arrive dans le quartier noir d'une petite ville Sudiste; on ne la reconnaît d'abord pas, mais sa grand-mère (Ethel Waters) ne peut s'y tromper c'est Patricia (Jeanne Crain) dite Pinky en raison de sa couleur très proche de celle d'une blanche: au point que durant sa scolarité, dans l'école où elle a appris le métier d'infirmière, elle a, involontairement d'abord, trompé son monde, et s'est faite passer pour ce qu'elle n'était pas. Mais dans le Sud, elle ne tardera pas à retrouver sa place et les ennuis qui vont avec...

Mais sa grand-mère, qui s'est prise d'amitié pour sa voisine (Ethel Barrymore), une vieille dame excentrique qui vit dans une plantureuse maison à l'ancienne, et qui a la réputation d'être très raciste: Pinky, pour faire plaisir à sa grand-mère, accepte de devenir l'infirmière de Miss Em... 

Le film me semble plus célèbre pour ce qu'il n'est pas que ce qu'il est: systématiquement, il est fait mention de la participation de John Ford au tournage, mais il a été remplacé par Kazan après seulement une semaine, et même si je ne croyais pas l'écrire un jour, on peut se réjouir du changement de réalisateur: d'une part, Ford aurait sans doute été incapable de conférer la moindre vérité à ses acteurs Afro-Américains; d'autre part, Kazan qui sortait d'un autre film polémique sur les préjugés ethnique (Gentlemen's agreement, 1947) était clairement le meilleur choix.

Son film évoque donc aussi clairement que possible, sans jamais citer le KKK, la situation des petites bourgades de Louisiane, qui sont sous la coupe d'une loi et de moeurs racistes, avec des patrouilles de police qui surveillent littéralement les moindres faits et gestes des noirs. Pinky, qui a le culot de ressembler à une blanche, excite bien plus encore les grincheux, et quand elle hérite d'une maison, le sang de la population ne fait qu'un tour. C'est un beau film, et Kazan joue à merveille de la richesse des échanges entre Jeanne Crain et Ethel Barrymore... Il y a aussi une volonté de fuir la facilité, et le renoncement (le petit ami nordiste et blanc qui suggère à Pinky d'oublier ses origines, et qui lui même finit par trahir un certain racisme), mais le film a quand même deux défauts... 

D'une part, son juge vertueux et anti-raciste: s'il a raison de dire qu'un procès gagné par une noire risque de relancer la haine à l'égard de la communauté et de précipiter les noirs dans une ségrégation encore plus violente, reste un voeu pieux: en Louisiane, en 1949, il fallait probablement faire partie d'une société secrète mais célèbre pour prétendre devenir juge (un poste politique aux Etats-Unis, on s'y fait élire juge); et bien sûr, Jeanne Crain en afro-américaine... Difficile à croire, bien sûr. 

 

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Published by François Massarelli - dans Elia Kazan
3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 18:09

Un officier Allemand, francophile, se voit assigner une demeure, celle d'un homme qui vit avec sa nièce dans une petite ville du Dauphiné. Les deux hôtes, contraints et forcés d'accueillir l'intrus, ne lui diront pas un mot durant toute la période de son séjour, mais l'officier (Howard Vernon) tombe très vite amoureux de la jeune femme (Nicole Stéphane), sous l'oeil tranquille de l'oncle (Jean-Marie Robain)...

L'esprit même de la Résistance, c'était le sujet du récit de Vercors, sorti sous le manteau, comme le rappelle un prologue qui montre un homme avec un exemplaire caché dans un bagage. Melville, qui sort lui aussi du maquis, a tenu absolument à tourner son adaptation, et l'a fait sans en avoir l'autorisation. Son succès a probablement sauvé la carrière de celui qui venait de jouer à quitte ou double pour s'improviser cinéaste.

C'est frappant de voir avec quelle rigueur, quel naturel, aussi, celui qui se plantera dans les grandes largeurs avec son abominable deuxième film, adapte un récit qui n'est pourtant pas très cinématographique au départ... Si ce n'est justement dans la tension des silences, dans la communion des tristesses: celle des deux occupés, qui doivent à contrecoeur accueillir un soldat ennemi; celle aussi de l'officier, désolé de venir en occupant. Celle enfin de ceux qui ne peuvent assumer leur amour. A ce titre, le mono-dialogue continuel d'Howard Vernon, qui rythme le film, est exemplaire; la subtilité de Melville qui nous montrera dans le film son officier valeureux aux prises avec de vrais nazis, ceux-là, est, deux années après la guerre, tout aussi remarquable.

 

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Published by François Massarelli - dans Jean-Pierre Melville
3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 17:58

A Manhattan, un journaliste qui travaille à l'agence France-Presse, Moreau (Jean-Pierre Melville) fait équipe avec un photographe à la réputation désastreuse, Delmas (Pierre Grasset) pour retrouver la trace d'un diplomate Français de l'ONU dont l'absence a été très remarquée et commentée; ils cherchent d'abord dans les nombreuses maîtresses de l'homme, et commencent un long périple nocturne dans les rues toujours actives de la ville...

Melville traque les noctambules et lâche deux hommes parfaitement compatibles avec la vie de la nuit New-Yorkaise, aux trousses d'un insaisissable (et pour cause: il est mort) diplomate, qui devient le prétexte d'un jeu du chat et de la souris entre cynisme et morale, entre la docilité d'un Moreau qui ne veut pas faire de tort à la diplomatie française, ou à la famille d'un mort, et Delmas, le buveur et coureur qui jongle avec l'idée de devenir riche en publiant des photos douteuses... Et on se demande bien ce qu'on est venu faire devant un film pareil. 

Il faut dire que je soupçonne que les véritables motivations de Melville, qui semble avoir improvisé son film à New York, soient surtout de filmer Américain! D'où des trous béants, occupés à nous montrer des taxis, des gens qui prennent des taxis, des gens qui sortent de taxis... C'est raté, du début à la fin. Melville retournera tourner en France, et accumulera les oeuvres de premier plan... Tant mieux.

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Published by François Massarelli - dans Jean-Pierre Melville Noir
30 janvier 2022 7 30 /01 /janvier /2022 18:42

Le miroir aux alouettes: Holywood et le cinéma Américain n'ont pas attendu très longtemps avant de s'auto-représenter, et par exemple en Californie, à la Keystone, dès les années 10 le pli était pris. Plus loin vers l'Est, dans les studios de Fort Lee où on résistait encore à la tentation de l'exil vers le Pacifique, Maurice Tourneur a mis en chantier cette petite comédie avec Doris Kenyon, où une jeune femme de la campagne est repérée lors d'un tournage en extérieurs par l'acteur principal d'une série de westerns... Kenneth Driscoll (Robert Warwick) est vain, attaché à son statut de star et il séduit sans trop de problème Mary (Doris Kenyon), qui en dépit d'un début difficile (son essai est une catastrophe) va s'accrocher, et sous la protection de Driscoll, devenir une vedette... Mais sa mère (Jane Adair) vient la voir pour son anniversaire, et tombe sur une soirée bien arrosée...

C'est touchant: d'une part, le film part des ressorts du mélodrame et réussit à en faire quelque chose d'assez solide, de par l'ironie dont fait preuve le cinéaste face à ses pantins qui sont tout à coup confrontés à la vraie tendresse, rustique mais sincère, d'une mère éplorée; d'autre part Tourneur se fait plaisir à tourner en montrant les studios où il travaille quotidiennement, et où il a déjà accompli un nombre important de grands films. On le verra d'ailleurs en plein travail, sauf qu'il joue un accessoiriste... Il montre également le studio sous un jour bien moins glamour que ce qu'on aurait pu imaginer, avec ses acteurs farceurs et dragueurs, mais de fait, dans le film, tout le monde ou presque a l'air de prendre du bon temps dans son métier.

Le film est adorable, même s'il est mineur. Le réalisme de la situation, au milieu de ce mélodrame très classique, donne un intéressant mélange. Quel dommage que les copies qui circulent soient assez peu glorieuses, sauf la version abrégée disponible un temps dans une anthologie consacrée, justement, aux studios du New Jersey.

 

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Published by François Massarelli - dans Maurice Tourneur Muet 1916 *
30 janvier 2022 7 30 /01 /janvier /2022 09:11

Quand Sam (Noée Abita) et Lucile (Manon Valentin), deux lycéennes, rencontrent Troy (Andranic Manet), le nouveau du lycée, l'une d'entre elles a une révélation: ce grand gaillard un rien effrayant (il a une tête de psychopathe, mais il a surtout un comportement sérieusement limite) devient son petit ami, et la séduit en lui montrant qu'elle peut le frapper autant qu'elle veut, il ne sentira rien... Très vite, ils deviennent la cible de moqueries prudentes...

L'initiation amoureuse, ici, en prend sérieusement un coup: les deux tourtereaux se séduisent à coups de beignes, du moins sur les autres: car si Troy a la batte qui le démange, on ne le verra jamais taper sur sa petite amie... C'est un contre-pied ironique qui nous est montré ici, renforcé par un recours à la musique doo-wop. Et les ralentis dans certaines scènes de groupe et d'exaltation, accompagnés de cette musique des années 50, font sérieusement penser à Martin Scorsese.

L'interprétation de ce court métrage est plutôt soignée, et Noée Abita (qui commence à se sentir à l'aise, semble-t-il, dans les initiations sexuelles, disons, "alternatives"!) est aussi intéressante que son partenaire: on voit bien que pour Sam, le choix est entre une attirance fascinante, et une vie sans problèmes; et elle sait que la rencontre avec Troy aura un impact sur toute sa vie... Nouveau venu, Andranic Manet a un jeu tout en intériorité qui lui fait par moment ressembler à... Grimsrud, le psychopathe interprété par Peter Stormare dans Fargo. Ca doit être la batte de base-ball.

 

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Published by François Massarelli - dans Court métrage
30 janvier 2022 7 30 /01 /janvier /2022 08:39

Willy Ferrière (Gaston Jacquet), un jeune homme de bonne famille qui évolue dans les milieux interlopes et populaires de Paris, n'a plus le sou. Et c'est dommage, car il est sur le point de se marier... Et Edna (Gina Manès), la promise, aime bien l'argent. Alors quand à l'Eden café, il parle un peu fort du fait qu'il serait bon de se débarrasser de sa bonne tante, qui est assise sur un tapis d'argent qui lui reviendrait à lui directement, des oreilles écoutent... Et il reçoit une proposition qu'il décide d'accepter. 

Quand le bandit minable Joseph Heurtin (Alexandre Rignault) se rend chez la tante Henderson, il a plusieurs surprises: d'abord c'est ouvert; ensuite, il y a du sang partout; enfin, la vieille est déjà morte, et il y a quelqu'un: Radek (Valerii Inkijinoff), un étudiant en médecine avec lequel il avait planifié le crime, avant que ce dernier se dégonfle... Mais Radek a tout manigancé justement parce que Heurtin est faible, et pas très intelligent... Radek lui a donc permis de se rendre sur les lieux d'un crime, de se mettre du sang partout et de laisser ses empreintes sur chaque objet de l'appartement! Il promet à Heurtin de tout effacer, en échange de la promesse de ne pas dénoncer son complice. Un seul des deux hommes tiendra sa promesse...

Quand le commissaire Maigret (Harry Baur) est chargé de l'affaire, on ne tardera pas à appréhender Heurtin. Celui-ci ne tardera pas à pousser le commissaire à ne pas pouvoir un seul instant croire à sa culpabilité et surtout au fait qu'il ait pu être seul sur un meurtre comme celui-ci. Le commissaire lui tend donc un piège, en lui permettant de s'évader: il sait qu'une fois libre Heurtin fera tout pour retrouver un hypothétique complice: c'est comme ça que Maigret va retrouver la trace de Radek. Mais celui-ci, au lieu de se débiner, fait tout pour attirer l'attention sur lui...

L'intrigue, adaptée évidemment d'un roman de Simenon, est touffue, c'est le moins qu'on puisse dire. Mais si Simenon charge particulièrement son assassin psychopathe (un étranger, on ne se refait pas: l'écrivain était sérieusement xénophobe), Duvivier étend aussi la noirceur de son film à à peu près tout le monde de la nuit, mais à des degrés divers. Ce pauvre Heurtin, par exemple, devient une victime d'un criminel, un homme et qui a décidé d'emporter tout le monde dans la spirale de sa mort. Willy Ferrière et Edna, les deux bourgeois qui aiment s'encanailler, sont finalement deux minables qui vivent aux crochets du crime, et la première scène donne clairement l'impression que Ferrière serait quand même un tout petit peu proxénète. La vision sans fard d'une société parallèle, avec les malfrats, les ivrognes, les prostituées, est autant une forme de réalisme qu'une trace de baroque dans le film... 

Et Duvivier soigne sa partition en ayant recours à sa technique dérivée du muet, tout en expérimentant avec le sonore: le monde qu'il nous dépeint fonctionne comme d'habitude sur plusieurs niveaux, visuel bien entendu mais aussi sonore avec ses contrepoints, lorsque le cinéaste nous montre une chose en nous en faisant entendre une autre. La scène de l'évasion d'Heurtin, par exemple, est l'occasion pour les policiers de laisser Heurtin seul dans une voiture en fausse panne, pendant que tous les policiers du véhicule se penchent sur le moteur: la bande-son nous fait entendre la conversation de tous ces garagistes du dimanche qui regardent dans le moteur, pendant que l'image reste sur Heurtin qui hésite à tirer parti de l'oportunité... 

D'autres expériences sont moins heureuses, telle cette scène qui permet à un policier d'enchaîner les visites à des établissements divers, à la recherche du coupable présumé: Duvivier a utilisé des transparences, qui permettent au policier de passer dans le même plan d'une boutique à l'autre. La compression du temps pour des actes routiniers était une bonne idée, mais le résultat est médiocre quant à la qualité photographique... 

Mon grand regret face à ce film est lié à l'interprétation: tout le monde est excellent, et le film confine parfois à la comédie policière en particulier avec les interrogatoires des domestiques, totalement savoureux. Hélas, Inkijinoff, auréolé sans doute de la réputation du film Tempête sur l'Asie de Poudovkine, dont il était le principal acteur, est souvent excessif: certes, son personnage est un dangereux psychopathe, et son physique lui confère facilement des aspects inquiétants: il me fait penser à ce niveau à un petit cousin de Peter Lorre... Mais il en fait dix fois trop, contrairement à Lorre: je suis persuadé que le film de Lang était dans le viseur de Duvivier... Ce dernier rattrape le coup avec le dynamisme phénoménal de sa mise en scène sur le final ...

La tête du titre, c'est celle d'un homme qui sera condamné si on ne prouve pas son innocence. Innocence relative, car on n'est sans doute jamais totalement innocent, et Joseph Heurtin s'est rendu chez la Tante Henderson dans le but de... de quoi, d'ailleurs? La tuer ou simplement s'en prendre à son argent? En lieu et place de cet homme qui sauvera sa tête, Maigret va se retrouver face à un nihiliste sauvage et mourant, un sale type qui fera tout pour laisser autant d'ennuis que possible derrière lui: bref, c'est noir.

 

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Published by François Massarelli - dans Julien Duvivier Noir Criterion