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26 janvier 2019 6 26 /01 /janvier /2019 13:39

Huit invités dans une île isolée au large de la Grande-Bretagne découvrent qu'ils sont seuls avec un couple d'employés de maison, nouvellement arrivés, et ne trouvent aucune trace du mystérieux propriétaire, le bien nommé "U.N. Owen", pour "Unknown", soit "inconnu". Une vois enregistrée leur annonce qu'ils ont tous été réunis ici afin de subir un châtiment, car chacun d'entre eux est accusé d'un crime... Peu à peu, selon un ordre établi par une comptine ("Ten little Indians") les dix "accusés" meurent les uns après les autres... Mois ils seront, plus le soupçon sera fort entre eux. ce qui promet bien évidemment quelques péripéties...

René Clair nous montre assez souvent qu'il ne s'est pas vraiment sérieusement projeté dans ce film, dont la première scène nous montre, conduits sur une barque précaire par un marin jovial, les huit personnes qui arrivent sur l'île. La séquence est totalement de la comédie, avec un jeu de relais entre les personnes, qui tous commencent à manifester leurs différences. Le choix des interprètes est déterminant, car l'une des motivations du film était clairement de favoriser les numéros d'acteurs: Walter Huston, Judith Anderson, Roland Young, C. Aubrey Smith et Barry Fitzgerald faisant partie de la distribution, nous sommes servis! Et Clair se fait plaisir justement... 

Et du début à la fin, le scénario de Dudley Nichols est relativement fidèle au roman, mais il n'a pas pu l'être jusqu'au bout. Sans rien révéler de l'un ou de l'autre, disons  que le film est une version que nous pourrions qualifier d'édulcorée, qui fera probablement hurler les fans d'Agatha Christie à la trahison, mais aussi qui a le désavantage de perdre, dans ses cinq dernières minutes, tout son sel... Restent quelques scènes qu'on pourrait aisément qualifier de réminiscences du muet, notamment un jeu du chat et de la souris entre Young, Huston et Fitzgerald...

 

 

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Published by François Massarelli - dans René Clair
25 janvier 2019 5 25 /01 /janvier /2019 10:26

Cette comédie noire comme le charbon est sans doute l'un des films les plus grand public de Gus Van Sant, en même temps qu'un de ses projets les plus élaborés en matière de narration... Plus que l'ascension d'une intrigante plus ambitieuse que quiconque l'a jamais été, il raconte le désir de cette jeune femme de réussir, et les dégâts ainsi causés.

Suzanne Stone (Nicole Kidman) est une jeune présentatrice de météo sur une chaîne locale insignifiante, dont le mari (Matt Dillon) a été retrouvé mort. Et, le générique nous l'apprend à travers des coupures de journaux, elle est soupçonnée d'avoir commandité le meurtre... Un certain nombre de témoins vont se succéder face à la caméra: Janice (Illeana Douglas), la soeur du défunt, qui est interrogée sur le lieu de ses entraînements (elle est patineuse), mais aussi Ben (Wayne Knight), l'employeur et collaborateur interrogé dans son studio de télévision; les parents de Suzanne (Kurtwood Smith et Holland Taylor) mais aussi ses beaux-parents, les Maretto (Dan Hedaya et Maria Tucci) sont quant à eux interrogés sur un plateau de télévision, d'une émission qui s'appelle The Suzanne Stone Show... Enfin deux adolescents, Jimmy et Lidya sont également amenés à témoigner: Jimmy (Joaquin Phoenix) en prison, et Lidya (Allison Foland) devant chez elle, dans un taudis au milieu des sous-vêtements qui sèchent...

D'une part, la caricature est féroce, réjouissante et sardonique, avec de gros traits soulignés avec adresse. Mais surtout l'ensemble du film est lié à une petite idée toute simple: toute cette histoire est introduite par la principale protagoniste elle-même, qui semble répondre à la sollicitation d'un intervieweur, et "vendre" sa propre histoire, celle qui lui a donné enfin ce qu'elle désire depuis toujours: elle est devant les caméras, et tout le monde la regarde, faisant enfin d'elle quelqu'un... Pas comme son mari, cet imbécile qui ne rêvait que d'une chose: une vie tranquille, avec des enfants...

Nicole Kidman est donc en registre poupée Barbie, en forçant avec génie le trait de l'égoïsme et du crétinisme total de son personnage: ce qui est souvent savoureux, mais volontiers grossier. Mais le format télévisuel choisi par Van Sant est justement l'occasion d'abandonner toute subtilité, qui serait dans ce contexte, totalement hors sujet. Les couleurs du film, ses décors, renvoient souvent au décorum et au faux assumé par la télévision, que ce soit dans les talk-shows ou dans les publicités, voire dans les sitcoms. Et Kidman se plie à cette règle du début à la fin.

Mais la narration est fabuleuse puisque si nombre de personnages, sitcom oblige, sont faits d'une seule pièce (Jimmy, l'ado qui n'a rien compris et qui parle de masturbation au bout de vingt secondes de son interview, ou encore Larry, le mari qui n'a pas compris grand chose non plus de ce qui lui arrive, joué par un Matt Dillon décidément excellent), ça n'empêche jamais le film de nous permettre de voir des zones d'ombre, des portes vers d'autres possibilités: notamment Janice, dont des fragments de la vie nous apparaissent ça et là, de façon troublante. Et si le film avait été l'histoire d'une patineuse ambitieuse? Et si sa jalousie était motivée par autre chose que le simple dégoût d'avoir vu son mari s'enticher de celle qu'elle considéère comme, disons, la "pire conne"? 

Comme pour nous instruire malgré nous, au milieu de cette narration en forme de soupe télévisuelle génialement restituée dans toute sa crasse, Van Sant a glissé un plan de quelques fractions de secondes, qui nous renseigne sur le futur de la principale protagoniste de ce jeu de massacre. Un plan perturbant parce qu'incompréhensible la première fois qu'on le voit. Mais à la fin, tout deviendra clair.

Ce "Citizen Suzanne Stone" est riche, réjouissant, et noir, le disais-je. Et aujourd'hui plus que jamais, ce portrait d'une ambitieuse (Toujours filmée à proximité d'un téléviseur, d'un micro, ou d'une caméra) est un visage horrifiant de l'Amérique à son pire. Dont je m'empresse d'ajouter qu'il s'agit aussi d'un film Américain, que seul un Américain aurait pu faire... et réussir.

 

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Published by François Massarelli - dans Gus Van Sant Comédie Criterion
25 janvier 2019 5 25 /01 /janvier /2019 10:16

"Sea is my country, ship is my home, sailing is my life, who is my wife?" est un dicton couru chez les marins, qui résume bien la situation... On trouve dans ce film documentaire de long métrage un reflet de la vie de jeunes marins et aspirants officiers. Certains sont Indonésiens, d'autres Philippins, Ukrainiens, Allemands... Leur métier les éloigne de chez eux pour une très longue période, et ils cohabitent, travaillent, fraternisent... Peut-être parfois les conflits affleurent, mais le film ne le montre pas.

C'est austère, bien sûr, mais c'est aussi parfois hypnotique, et mis en images avec générosité par un réalisateur qui a bien sûr pour environ 60 jours de cette période de 10 mois et demi, partagé le quotidien des hommes qu'il montre. A travers leurs rires, leurs moments de creux, leurs espoirs et la façon dont ils se raccrochent à une dérisoire promesse de bonheur ("tu verras quand tu rentreras chez toi, de quelle manière ta femme t'accueilleras"), entre Rouen, Abidjan, Anvers, Libreville, La Rochelle et St Nazaire. Et ils finissent toujours par se retrouver, entre l'odeur de bière et de tabac froid, dans un "seamen's club" où ils chanteront des karaokés jusqu'à l'aube... Certaines choses, finalement, ne changent pas beaucoup...

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Published by François Massarelli - dans Documentaire
20 janvier 2019 7 20 /01 /janvier /2019 13:35

L'un des rares films de Francis Ford à avoir survécu, un court métrage d'une bobine dans lequel une jeune femme arrivée de fraîche date dans l'ouest est confrontée à un bandit dans une aventure excitante. Elle le rencontre dehors, et il lui vole un baiser, puis... il parie avec elle que le prochain baiser, c'est elle qui le lui dispensera de son plein gré! Quelques temps après, son automobile étant en panne d'essence, son frère part chercher du carburant pendant qu'elle se réfugie dans une cabane apparemment abandonnée... Mauvaise idée: c'est celle du bandit!

Grace Cunard joue la jeune femme, Francis Ford le bandit, sinon le frère de la dame est interprété par le tout jeune Jack Ford, un an avant qu'il ne devienne metteur en scène, et qu'il ne supplante son aîné qui n'allait pas tarder à survivre en jouant les poivrots chez son petit frère. Le film est parfaitement efficace, et d'une légèreté très enthousiasmante. Mais après avoir vu les films proposés par la Library of Congress, dont certains étaient justement dus au partenariat entre Cunard et Francis Ford, je pense qu'il faudrait attribuer à l'actrice-réalisatrice la confection de ce film, qui repose largement sur le point de vue de la jeune femme, bénéficiant de nombreux inserts montrant notamment ses réactions face au danger. Et on se trouve plus dans un genre de comédie western assez proche de la liberté de ton favorisée par Cunard (avec Ford) dans The purple mask...

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Published by François Massarelli - dans Western Muet Grace Cunard Francis Ford
19 janvier 2019 6 19 /01 /janvier /2019 16:34

L'unique film musical de Cecil B. DeMille est son deuxième film parlant, réalisé durant une époque particulièrement troublée: la faillite de sa société a obligé le metteur en scène à se réfugier à la MGM en attendant que l'orage cesse, et il n'y bénéficie bien sûr pas d'une grande liberté. Néanmoins, on peut parier en voyant ce film unique en son genre, qu'il y a eu une certaine marge de manoeuvre, tant Madam Satan lui ressemble... Pour le pire.

Angela Brooks (Kay Johnson) se désole: son mari Bob (Reginald Denny) va chercher le bonheur ailleurs, en particulier auprès de Trixie (Lillian Roth), une jeune femme dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle n'a pas froid aux yeux, ni ailleurs. Devant la situation, Angela que son mari prend pour une bourgeoise prude et rangée, joue le tout pour le tout, et lors de la soirée olé olé organisée par James Wade (Roland Young), le meilleur copain de Bob, elle apparait déguisée en femme fatale pour faire tourner toutes les têtes...

La soirée en question a lieu sur un zeppelin, c'est important à signaler puisque le film repose sur la promesse d'une catastrophe qui implique le vaisseau et une tempête, ainsi qu'un nombre potentiellement restreint de parachutes... Mais le film choisit en un peu moins de deux heures un cheminement paradoxal pour mener à cette séquence que le metteur en scène voulait spectaculaire. Ce n'est pas la première fois que DeMille s'adonne à ce genre de piment dramatique: Something to think about, The road to yesterday ou The Godless girl ont eux aussi leur séquence-choc, mais celle-ci est particulière: elle est excessive, prétentieuse et plutôt mal foutue!

En attendant, on a donc une ouverture à la Lubitsch, mais sans la moindre subtilité, un développement au rythme intéressant, qui tente de jouer la carte boulevardière comme le faisaient certains courts Hal Roach. Puis on a la fiesta dans le zeppelin, un chef d'oeuvre de mauvais goût involontaire, avec ses costumes et ses non-costumes, et ses ballets qui trahissent l'absence d'un Busby Berkeley pour prendre les idées extravagantes et en faire de l'or. Ici, c'est plutôt d'une autre matière qu'il s'agit, mais nettement moins précieuse...

Maintenant, tentons l'impossible: pourquoi verrait-on ce film?

Il y a Martha Sleeper. Un peu, mais c'est déjà ça. 

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Published by François Massarelli - dans Cecil B. DeMille Comédie Musical Pre-code Reginald Denny
12 janvier 2019 6 12 /01 /janvier /2019 18:25

Le film qui a révélé Brad Bird, metteur en scène multi-récompensé de The Incredibles (ainsi que de son excellente suite récente), de Ratatouille, de MI4 et de Tomorrowland, est un film d'animation, réalisé pour la Warner à l'époque où celle-ci cherchait à rivaliser (un peu) avec Disney: sans grande surprise, compte tenu de la qualité parfois douteuse des films qu'ils ont sorti sous cette bannière maintenant défunte, le long métrage réalisé et écrit par le futur petit génie de Pixar est le meilleur film d'animation de long métrage jamais sorti par WB, tout simplement, tout en étant particulièrement personnel et singulier...

On parle ici d'animation à l'ancienne, donc majoritairement en 2D, même si Bird se laisse volontiers aller à utiliser avec une grande efficacité les effets 3D. L'intrigue, adaptée d'un roman de 1968 (The Iron Man) de Ted Hughes, est transposée de la Grande-Bretagne vers la côte Est des Etats-Unis, le Mine plus précisément (déjà un endroit bien connu pour ses attaques de Carcarodon Carcarias, si je ne m'abuse...). Hogarth Hughes est un petit garçon, fils unique élevé par sa maman veuve d'un pilote de chasse décédé, qui a tout du gamin des années 50: fan de films de science-fiction, peu intéressé par l'école, mais surtout désireux d'avoir un peu de compagnie. Il va en trouver lorsqu'un robot géant venu d'une autre planète va se poser à cinquante mètres de chez lui, et devenir son copain. Sauf qu'à cette époque, l'arrivée d'un engin comme celui-ci, non seulement aura du mal à être discrète, mais à l'heure où Spoutnik tourne autour de la terre pour narguer les Américains, les paranoïas vont s'échauffer...

Le style d'animation est d'une grande efficacité, avec un graphisme qui est à la fois l'héritier des Disney des années 60 et 70, et bien sûr des oeuvres de Chuck Jones, et c'est d'autant plus réussi que Bird a choisi de traiter son film comme une histoire avec des acteurs, et obtient de ses créatures aimées la même intensité émotionnelles, sans jamais mobiliser comme le font les plus embarrassants longs métrages de Disney les clichés les plus éculés! Et sa fable, qui traite non seulement avec tendresse d'un garçon à part, et de son amitié avec un tas de ferraille gigantesque qui est profondément attachant, se pare de couleurs particulières pour interroger la part d'ombre de l'humanité, dans son versant Américain. Il le fait néanmoins en ne diabolisant pas systématiquement les militaires, puisqu'il a choisi un agent spécial obsédé par l'ingérence étrangère pour incarner le mal dans son film.

Et il touche aussi des thèmes plus profonds, et qu'on retrouvera au long de son oeuvre cinématographique: la notion de choix de son destin par un protagoniste, est ici la principale leçon de Hogarth à son ami le Géant, quand il lui fait comprendre que ce n'est pas parce qu'il a été construit comme une arme destructrice qu'il doit nécessairement se laisser aller à le devenir... Un thème qu'on peut aussi, sans aucun doute, lire à double sens, là encore en le considérant comme un commentaire sur les USA des années 50, et ce qui en a suivi. Mais il a surtout fait un film, avec talent, justesse, tendresse et humour: ce Géant de fer est un pur chef d'oeuvre, comme les deux films qui suivront...

 

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Published by François Massarelli - dans Animation Brad Bird
7 janvier 2019 1 07 /01 /janvier /2019 14:35

Une jeune femme, qui vit dans une famille qui a connu des moments meilleurs, trouve un emploi, de dame de compagnie d'un aristocrate, un ancien yuppie qui est devenu paraplégique suite à un accident de moto. Il est odieux, elle est "nature", ils ont tout pour s'aimer, ça va être compliqué, d'autant que Louisa apprend que Will a négocié auprès de ses parents pour qu'ils acceptent de l'envoyer en Suisse pour un suicide médicalement assisté...

Techniquement, c'est encore une comédie, mais elle fait partie de ces films Britanniques qui incorporent les larmes éventuelles de leurs spectateurs dans l'intrigue... Bon, ça va être difficile: Me before you fait partie de ces oeuvres auxquelles on vient par hasard, et devant lesquelles on reste, on ne sait pas pourquoi! 

...Parce qu'il y a Emilia Clarke, et qu'on est curieux de la voir dans un contexte totalement dédragonnisé? D'autant que la jeune femme a un je ne sais quoi dans le visage, qui me pousse à l'imaginer dans un film muet.

...Parce qu'on se trouve dans le Pembrokeshire, à deux pas de Tenby, un adorable petit village portuaire Gallois?

-Parce qu'on a reconnu, dans un rôle secondaire, Neville Longottom de Harry Potter?

...Ou tout simplement parce qu'on n'a rien à faire d'autre? Alors là, c'est vraiment un cas désespéré.

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Published by François Massarelli - dans Comédie
6 janvier 2019 7 06 /01 /janvier /2019 16:01

Après quelques films pour Warner Bros, dont le célèbre et excellent Don Juan d'Alan Crosland, John Barrymore a signé pour trois films avec Joseph Schenck, qui faisait distribuer ses films par United Artists. Donc l'idée était de donner plus d'indépendance, donc de contrôle, à la star... Du moins sur le papier, comme Buster Keaton, que Schenck venait de lâcher sans trop d'élégance, en a fait l'amère expérience...

Le "beloved rogue" du titre n'est autre que François Villon. Le vrai, auteur d'un certain nombre de poésies, était aussi un monte-en-l'air, un escroc, un voyou, un moins-que-rien, bref: un bandit. Celui de John Barrymore l'est aussi, mais fort brièvement, le film se limitant à une série d'aventures autour d'une anecdote totalement apocryphe de la vie de celui dont on sait quand il est né (en 1431), mais dont on perd totalement la trace 30 années plus tard...

Sous Louis XI, le Roi risque de tomber sous la coupe de Charles de Bourgogne, son ennemi juré qui convoite sa place. Il s'apprête pourtant à donner la pain de sa pupille Charlotte au lieutenant de Charles, en guise de geste de bonne volonté; par cette union, Charles entend briser les derniers obstacles qui l'empêchent d'accéder au trône. Mais Charlotte qui ne souhaite pas se marier avec n'importe qui, trouve refuge auprès de Villon, qui n'est pas insensible à ses charmes. Il va réussir, par la ruse, à s'attirer les bonnes grâces de Louis XI. Mais le temps presse, car Charles de Bourgogne n'a pas dit son dernier mot...

J'ai volontairement laissé de côté les noms des acteurs, tant la distribution est impressionnante: outre Barrymore, on trouve en effet Conrad Veidt en Louis XI, Marceline Day dans le rôle de Charlotte, et si W. Lawson Butt n'inspire pas grand chose (à part dans les possibilités les plus sombres de moquerie immature) dans le rôle de Charles, que penser des apparitions de Mack Swain ou encore Slim Summerville, voire de Nigel de Brulier (en astrologue, ce qui manquait dans son impressionnante collection de sorciers, prophètes, évèques, cardinaux Vendéens et autres prêtres) ou de Dick Sutherland qui ici interprète un bourreau au faciès... de Dick Sutherland, justement... On s'attend à passer un très bon moment, surtout si on a vu Don Juan et When a man loves... Mais non.

Crosland et Barrymore étaient sans doute partis pour récidiver leurs exploits, en faisant construire toute une ville médiévale alambiquée, et louchaient aussi probablement sur la couronne de Douglas Fairbanks, roi cabossé du film d'action depuis le manque de succès de The thief of Bagdad et des films qui l'avaient suivi... Mais le mélange de comédie débridée (beaucoup plus marquée que dans ses films précédents) et d'aventures, mâtiné de sadisme pour une séquence de torture dans laquelle Barrymore à demi-nu est plongé dans les flammes et lardé de coups de fouet, peine à convaincre. Conrad Veidt compose pour sa part un Louis XI convenablement dingo, dont on a l'impression qu'il ne lui en faudrait pas beaucoup pour tripoter tout ce qui bouge, et le style baroque du film lasse un peu... Surtout quand on a parfois l'impression d'assister à un démarquage de The hunchback of Notre-Dame... Bref: Barrymore ferait mieux, bien mieux avec son film suivant, le flamboyant Tempest...

Je termine en vous laissant une petite énigme de rien de tout, dont je sais qu'elle va certainement motiver au moins une personne: il y a trois futurs acteurs de Freaks dans le film, j'ai bien sûr fait exprès de ne pas les mentionner. Bonne chasse!

 

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Published by François Massarelli - dans John Barrymore Alan Crosland Comédie Muet 1927 *
6 janvier 2019 7 06 /01 /janvier /2019 09:48

Ce n'est pas un genre en soi, mais il y a beaucoup de films qui traitent du cancer; sous beaucoup de formes, et obéissant aux lois de beaucoup de genres... Souvent des drames, bien sûr, mais on voit aussi Le bruit de glaçons, de Bertrand Blier, où le réalisateur décide de faire rire, en provoquant un maximum: on ne se refait pas. Souvent, le cancer est évoqué via un truc de scénario, un raccourci bien pratique, tout comme on dit des gens qu'ils sont décédés "au terme d'une longue maladie", dans un film, il suffit d'un rien, comme par exemple le coup de téléphone du médecin à la fin de A serious man, des frères Coen, lorsque le héros entend son praticien lui dire "Il faut qu'on se voie pour parler", d'une voix aussi neutre que possible, on a tout compris...

Haut les coeurs est un film singulier: il prend le parti de raconter le cancer, et un cas peu banal: Emma Stern (Karin Viard) apprend qu'elle a un cancer du sein dans le cadre d'une visite de routine, car elle est enceinte. Et son chirurgien prend les devants, et tout de go, lui annonce que la seule décision à prendre est d'avorter pour commencer, puis d'affronter sereinement la maladie qui est à un stade avancé, mais tout à fait gérable. Sauf qu'Emma ne veut pas: cet enfant qu'elle faisait un peu dans le dos de son compagnon Simon (Laurent Lucas), qui lui n'en voulait pas, elle le veut. Cancer ou pas... A travers un parcours chronologique, et largement (mais pas que) consacré au point de vue de la jeune femme, Solveig Anspach raconte les aventures d'une femme atteinte du cancer, avec le cortège de bonnes et de mauvaises nouvelles, le combat paradoxal pour amener la vie tout en ferraillant avec la mort...

C'est d'ailleurs du vécu, même si Solveig Anspach n'est bien sûr pas contrebassiste contrairement à Emma, et si elle n'a pas attendu d'enfant durant son cancer, elle a affronté sa maladie en écrivant justement un film: celui-ci. Un paradoxe remarquable, et même si cette fois, la réalisatrice a triomphé de la maladie, elle a choisi de ne pas offrir de porte de sortie trop confortable de son premier long métrage: quand on le quitte, on est dans l'incertitude. Emma doit se battre plus, elle doit quitter sa famille pour quelques semaines qui vont être très agressives, et c'est l'hiver. Les feuilles sont tombées, les cheveux aussi... C'est la fin du film.

Karin Viard a bien mérité son César, du reste Karin Viard a du génie. On croit totalement à cette femme qui affronte avec angoisse, mais une immense volonté son ennemi intime, et qui par exemple prend les devants: à la première alerte elle décide de se raser la tête, plutôt que de tergiverser autour de la chute de ses cheveux... Ici elle s'est pliée à une drôle de discipline: écrit dans l'urgence, le film a été réalisé parfois dans les conditions du documentaire et Anspach a imposé à ses comédiens, non seulement la présence de non-comédiens dans beaucoup de personnages, et de situations, mais elle a surtout privilégié le dialogue vivant sur le dialogue léché et peaufiné: d'où le sentiment courant dans le film d'assister à des scènes qui sont un premier jet. Ca sert totalement le film et son impression de vérité... La situation des deux héros est souvent l'objet d'un humour du quotidien, parfois contredit épisodiquement par un conflit: c'est que Karin Viard doit non seulement interpréter une femme malade, elle est aussi enceinte... 

Belle entrée en matière dans l'univers parfois grave, parfois burlesque, toujours touchant de Solveig Anspach, Haut les coeurs va marquer durement sa filmographie, et reste un beau film à regarder dans la douleur parfois... La cinéaste s'y raconte et quand Emma, qui entend un con lui dire (il a vu qu'elle est enceinte) "nous, quand Machine a été enceinte, on s'est tenus à l'écart de la médecine, d'ailleurs elle n'a pas eu d'épi-durale et elle a bien senti passer toute la douleur, c'est super important la nature" (bien sûr c'est l'homme qui parle), la jeune femme lui répond "Eh bien moi, je remercie la médecine et j'emmerde la nature". Un moment comique, mais aussi une phrase que la cinéaste assumait à 100%.

 

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Published by François Massarelli - dans Solveig Anspach
5 janvier 2019 6 05 /01 /janvier /2019 14:04

Ce film est probablement le dernier des films Solax de comédie d'une bobine, qui ait survécu: et on le verra, la portée de ces 15 minutes est importante. On y voit les mésaventures d'un jeune homme (Fraunie Fraunholtz) qui est très amoureux d'une jeune femme (Marian Swayn) et qui décide de la demander en mariage... Mais il rompt cet engagement suite à sa ruine. Quelques jours après, il reçoit un télégramme d'un parent inconnu, qui lui annonce un héritage imminent, à condition qu'il soit marié le jour même à midi pile. Il a douze minutes...

Je vais dévoiler le pot-aux-roses tout de suite: c'est Marian qui a fait un faux télégramme afin de forcer son petit ami à l'épouser. Mais ce qui nous intéresse, c'est quand même le reste, qui va servir de base à plusieurs films. On peut évidemment citer Le Soupirant de Pierre Etaix, mais ce sera beaucoup plus parlant (si j'ose dire) de se référer directement à Keaton, et à son Seven Chances, sorti en 1925, qui est pourtant supposé être adapté d'une pièce de théâtre. Néanmoins, c'est cet exact synopsis qui lui sert de base... 

Le court métrage partage d'ailleurs avec le long une tendance à se placer une course contre la montre, qui dégénère en situations toujours plus délirantes. Maintenant, Guy reste sage dans son développement, et nous livre en moins de 15 mn la clé de son histoire, qui une fois de plus montre que les femmes sont les plus fortes.

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Published by François Massarelli - dans Muet Alice Guy Comédie