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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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13 juillet 2019 6 13 /07 /juillet /2019 18:15

Je suis à peu près sûr que les frères Hakim, quand ils se sont lancés dans cette production, avaient pour intention de faire un petit scandale... C'est que les moeurs du cinéma grand public se relâchaient un brin, quand même, l'année du triomphe de Brigitte machin dans Et dieu créa la femme, de Roger Vadim! Et Duvivier, je pense, était au courant de cette sulfureuse intention, car c'est même pour ça, et pour l'exposer un tantinet si vous voyez ce que je veux dire, qu'il a engagé Dany Carrel! Mais le film va au-delà des ces intentions peu orthodoxes, et assez typiquement, il devient plus un port rait en creux de l'époque à laquelle il a été conçu, plutôt qu'une reconstitution du second empire...

Le jeune et idéaliste Octave Mouret (Gérard Philipe) arrive à Paris avec de grandes ambitions et la soif de conquêtes qui sied: conquête de Paris bien sûr, mais surtout comme il le dit lui-même, des Parisiennes... Nous assistons à son évolution, de commis Au Bonheur des Dames, l'établissement de Madame Hédouin (Danielle Darrieux) puis lorsque les rapports se tendent avec sa prude patronne, il expérimente chez Vabre, en face, de nouvelles idées commerciales diablement efficaces. pendant ce temps, il fait comme à peu près tous les hommes du film: il monte et descend les escaliers de sa maison, de chambre de bonne en alcôve, avec les unes et les autres...

Dans chaque volume des Rougon-Macquart, Zola a dosé trois ingrédients: la dimension sociale parfois pamphlétaire, la peinture des moeurs... et le scandale! le dernier découle des deux autres, et Zola est devenu Zola quand il a vraiment décidé consciemment de les doser, en changeant bien sûr la formule d'un volume à l'autre: Pot-Bouille, qui préfigure Au bonheur des dames, n'est pas à proprement parler l'un de ses chefs d'oeuvre, mais c'est l'un de ses livres les plus réjouissants... Duvivier en a conservé la peinture des moeurs, et le parfum de scandale, mais en poussant un peu plus loin dans le registre de la comédie. Sa mise en scène suit Gérard Philipe, pas si Candide que ça, dans ses allées et venues, qui toutes semblent combiner ambition et coquinerie, et il bouleverse un univers d'hommes consommateurs, monde qui s'avère dans le film un véritable château de cartes, qui permet à Duvivier, aidé des dialogues impeccables d'Henri Jeanson, de questionner et d'asticoter un peu les moeurs des années 50. Certes, on le préfère à son plus noir (Voici le temps des assassins, ou encore le classique Panique), mais aucune raison de bouder notre plaisir devant cette tambouille, où l'appétit est surtout sensuel...

 

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Published by François Massarelli - dans Julien Duvivier Comédie
8 juillet 2019 1 08 /07 /juillet /2019 14:57

Ce film est un classique, mais c'est surtout une oeuvre dont on entend parler sans vraiment la voir... Le film de Lamprecht est la première adaptation d'un roman de Erich Kästner, qui fut un phénomène de librairie dès sa sortie en 1929. Et pour continuer à inspecter le pedigree du film, rappelons que si Kästner a contribué au script, celui-ci est signé de Billy Wilder (qui orthographiait Billie à cette époque reculée), et de Emeric Pressburger, qui en revanche n'est pas crédité...

Le petit Emil Tischbein quitte sa coiffeuse de mère pour un séjour à Berlin, où il doit retrouver sa grand-mère. Il porte sur lui 140 marks pour sa grand-mère, et n'est pas peu fier de prendre seul le train et de voyager comme une grande personne. Au début, le compartiment est bondé, mais finalement il se retrouve seul en compagnie d'un curieux bonhomme, qui non seulement lui dit des absurdités, mais en plus paraît profondément louche. Il lui donne un bonbon, et Emil plonge dans l'inconscience... Arrivé à Berlin, il se rend compte qu'il a été volé, mais n'ose pas se plaindre à la police, car quand il était chez lui, il s'est livré à quelques farces douteuses aux dépens du pandore local. Il suit donc le malfaiteur et va bien vite trouver de l'aide auprès de gamins des rues de Berlin, des débrouillards dans son genre, qui se sont auto-proclamés "les Détectives"...

C'est l'un des quelques grands films de la fin de la République de Weimar, l'un des rares qui en plus, parle... Quoique, on n'y parle que peu, et toujours à bon escient. Lamprecht, touche-à-tout, trouve dans cette histoire pour sourire le prétexte à montrer l'entraide des petites gens contre la malfaisance, sans avoir besoin comme Lang de convoquer une histoire abominable de meurtre d'enfants... Il y a pourtant en Fritz Rasp, l'immense acteur qui joue le bandit, beaucoup plus que de la malhonnêteté: c'est un peu une figure satanique, surtout vu des yeux naïfs d'un enfant... Emil n'est pas un petit ange, comme le prouve un prologue particulièrement intéressant (et totalement muet) dans lequel on le voit se payer la tête d'un policier local en collant une moustache similaire à la sienne, et une casquette, à l'imposante statue d'un square...

Mais le film joue la carte de l'humour, du volontarisme, et montre comment se prendre en mains, avec un esprit typiquement boy-scout qui est celui des années 30, et d'ailleurs, à la fin, Emil et les "Détectives" se rendent en avion pour retrouver Mme Tibschein, et sont accueillis par une foule de fans en délire, comme Tintin à la fin de ses premières aventures. Au-delà du portrait tendre, de l'enfance éternelle et positive, le film incarne un peu malicieusement toute une époque, à deux pas d'Hergé et ses gamins Bruxellois...

 

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Published by François Massarelli - dans Gerhard Lamprecht Comédie Billy Wilder
4 juillet 2019 4 04 /07 /juillet /2019 07:32

Avant d'aborder un des films mal-aimés de Ernst Lubitsch, il convient de rappeler le destin de Kiss me again, une comédie réalisée durant son contrat avec Warner dans les années 20, la période qui a dessiné les contours du style définitif du grand réalisateur: Kiss me again, sorti en 1926, est aux dernières nouvelles un film perdu... Cette adaptation d'une pièce de Victorien Sardou, avec l'acteur Monte Blue. Parmi les ingrédients du film qui mobilisent l'intérêt du cinéphile, on note une participation de Clara Bow juste avant son entrée à la Paramount: celle qui allait être au générique du pesant Children of divorce, avait donc aussi participé à une comédie sur le même sujet... Qu'on ne peut hélas pas voir.

Ce film est le remake de Kiss me again, réalisé par Lubitsch, et produit par lui, pour le compte de Sol Lesser... Et si on ne peut juger Kiss me again sur pièces, au moins celui-ci est disponible. Trop même: il est dans le domaine public, ce qui veut dire qu'on a accès à des copies dans un état lamentable...

Jill Baker (Merle Oberon), mariée depuis six ans, a un problème, qui la pousse à aller voir un psychanalyste: à cause de son mariage, qui devient routinier, elle est prise de crises intempestives et incontrôlables de hoquet... Lors d'une de ses visites chez le spécialiste, elle rencontre un personnage particulier, le pianiste Alexander Sebastian (Burgess Meredith), dont elle devient assez vite proche, au point de l'inviter quand son mari, un assureur, invite une délégation de matelassiers Hongrois pour discuter d'une fusion importante... Le mari (Melvyn Douglas) assiste, impuissant, à la glissade vers l'adultère. Il prend les choses en mains et décide de divorcer...

Le divorce, justement, Lubitsch connaissait, et ça n'avait pas été une comédie. D'où peut-être cette envie de revenir à un scénario déjà tourné, et d'après ce qui se raconte, assez peu réactualisé. Dans un premier temps, le personnage central est l'épouse, mais la dernière partie du film se concentre surtout sur Melvyn Douglas. C'est un des soucis: difficile dans ces conditions de s'attacher à l'un ou l'autre. Je suis mitigé sur le trio initial, c'est vrai qu'ils sont compétents, mais d'une part je ne pense pas que Merle Oberon soit dans son élément, d'autre part Burgess Meredith a du mal à être autrement qu'antipathique! Mais ne nous méprenons pas: il y a des scènes formidables, des purs moments de grâce comme seul Lubitsch ou son disciple avoué Billy Wilder pouvaient en prodiguer: une scène de dîner (avec l'apparition de Sig Rumann) avec les Hongrois, dans lequel une simple expression en langue Hongroise change complètement l'ambiance, une autre scène chez l'avocat des Baker, durant laquelle ça tourne à la loufoquerie pure et simple. Et sinon, Melvyn Douglas a une réplique qui nous rappelle, préoccupation inévitable de Lubitsch en 1941, que le monde est en guerre: s'adressant à lui-même, il lâche un "Heil Baker!" assorti d'un salut nazi, qui trouvera un écho sardonique dans To be or not to be l'année suivante...

Voilà ce qui concerne cette petite comédie finalement bien de son époque, qui ne paie pas de mine, mais qu'on peut quand même savourer, à sa juste place, à condition bien sûr de trouver une bonne copie. Et ça, ce n'est pas gagné!

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Ernst Lubitsch
3 juillet 2019 3 03 /07 /juillet /2019 16:05

L'auteur de A star is born (1937) a mis du temps à percer, si on en croit son imposante filmographie: celle-ci commence en effet en 1920, soit deux ans après la fin d'un événement crucial de sa vie: sa participation à la première guerre mondiale. Ce qu'il en a retiré en tant que cinéaste? Un sens absolu du refus du compromis, et une maîtrise hallucinante des films d'action. Ce qu'il reste de ses vertes années, pourtant, est ce film: l'une des comédies les pires que j'aie pu voir... Et apparemment ce sentiment est unanime.

Il nous conte les mésaventures de Peter Good (George K. Arthur), un nigaud (en Anglais de l'époque, a boob) qui dans un petit coin campagnard et donc fort reculé de l'Amérique, est amoureux depuis toujours de son amie Amy (Gertrude Olmstead). Mais celle-ci lui préfère un beau moustachu, Benson (Harry D'Algy). Pour impressionner et récupérer sa fiancée, Peter décide de devenir un homme d'action...

Théoriquement, c'est Robert Vignola qui devrait être crédité ici, sauf que... Wellman, décidément mal perçu par le nouveau studio qu'était la MGM, a été appelé à la rescousse pour terminer le film à la place de Vignola qui était hors-jeu. C'est assez incroyable qu'un dur à cuire comme Wellman, dont on sait l'efficacité, ait pu être considéré uniquement comme un "réparateur" de films par le studio, puisque ce cas n'est pas isolé dans sa période MGM. Mais sa période de travail sur le film a été jugée suffisamment longue pour qu'il hérite d'un crédit. Je ne pense pas que le cadeau soit très valorisant!

On va le dire tout de suite: Wellman a toujours prétendu qu'il avait commencé à boire plus que de raison durant le tournage de ce film afin d'oublier et de faire passer la pilule. On ne peut que le croire, tellement ce film n'est ni drôle, ni réussi, ni intéressant. Une heure qui passe lentement, dans une torpeur malaisée... Rien à retirer si ce n'est une série d'apparitions de Joan Crawford, dont on peut se demander pourquoi la MGM l'employait au compte-gouttes! Wellman a ensuite tout fait pour se faire virer, et comme on le sait, il a ensuite trouvé refuge à la Paramount où on l'a un peu mieux traité. Ouf.

 

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Published by François Massarelli - dans 1926 William Wellman Comédie Navets Robert Vignola **
2 juillet 2019 2 02 /07 /juillet /2019 07:41

La comédie est bien malade dans ce pays: d'un côté le genre est envahi de ce qu'on appelle en Anglais des "properties" spécifiques, souvent héritées de la bande dessinée, dont la production espère tirer un jour le jackpot en créant des franchises (Le petit Nicolas, Spirou et Fantasio, Benoît Brisefer ou Gaston, crime ultime), de l'autre les écrans sont envahis de cette génération d'acteurs venus de la télévision qui d'une part participent souvent aux projets cités plus haut, et d'autre part formatent toujours un peu plus le cinéma qu'ils pratiquent, d'où le succès de Camping 23 ou Les Tuche 14. Pour une réussite dans l'une ou l'autre catégorie, combien de films qu'on n'a pas envie de voir?

Papa ou Maman faisait exception en 2015, un film qui est une vraie comédie au script venu de nulle part, avec un jeu sur les situations et des acteurs physiques. Laurent Lafitte et Marin Foïs, dans un film intelligent et un brin provocateur, sur deux personnes qui s'investissent deux fois plus dans la réussite de leur divorce qu'ils ont pu le faire dans celle de leur mariage au point de tout faire pour laisser à l'autre la garde des enfants...

Bon, le film n'a pas échappé à la sale manie qui consiste à faire une suite, et trouver l'idée géniale de l'appeler Machin 2. Un plus notable est que le scénariste-réalisateur a associé ses deux stars à l'écriture, et ça se sent. Lafitte est totalement libre, et comme c'est Laurent Lafitte il est excellent; Marina Foïs est très impressionnante aussi, dans un rôle qui requiert d'être en forme! L'intrigue propose d'explorer une situation inédite: Florence et Vincent sont divorcés, mais le vivent bien. Comme leur fille Charlotte est toute petite, ils vivent en face l'un de l'autre, en parfaite harmonie... Quoique: d'une part les enfants en ont assez de traverser la rue, et d'autre part il est difficile de maintenir un couple dans de telles conditions: Vincent s'est dégoté une petite amie, Béné (Sara Giraudeau), prof de fac, qui est cordialement détestée par tous, les enfants comme l'ex-épouse. Et Florence commence à fréquenter Edouard (Jonathan Cohen) qui est un m'as-tu-vu de la pire espèce. la jalousie entre eux remonte à la surface, et avec elle la confrontation permanente...

C'est une excellente idée, surtout dans les deux premiers actes: la vie en voisinage avec ses contraintes et ses routines est souvent du plus haut comique et vire à l'absurde logique, une spécialité de la comédie loufoque traditionnelle... Le deuxième acte, avec la guerre des conjoints, est d'autant plus réussie que les "outsiders" sont interprétés par Sara Giraudeau et Jonathan Cohen! Mais la dernière partie du film détruit cet équilibre en se vautrant dans la redite, malgré une scène de beuverie d'anthologie... 

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Published by François Massarelli - dans Comédie
30 juin 2019 7 30 /06 /juin /2019 13:42

C'est avec ce film que Lubitsch va prendre congé de la Paramount où depuis 1928, et à deux exceptions près (Eternal Love en 1929 et The merry Widow en 1934) il a dirigé des films importants tout en étant souvent considéré de façon plus ou moins officieuse comme le directeur général du studio... Un studio où à n'en pas douter il devait faire grincer quelques dents chez les DeMille et consorts. Mais peu importe: les années 30 n(ont été qu'une suite de films brillants pour lui, et il a imposé sa marque, et quasiment créé un genre à lui tout seul, repris avec bonheur par d'autres, en non des moindres... Car à sa suite, Hawks, Preston Sturges et Mitchell Leisen ont offert leurs variations de la Screwball comedy, et bientôt Billy Wilder suivra.

Puisqu'on en parle, justement, c'est un moment important aussi dans la carrière de ce dernier puisqu'avec ce film, il commence à travailler pour celui dont il prendra plus ou moins la suite. Remake d'un film de Sam Wood en 1923, adaptation d'une pièce Française, Bluebeard's eighth wife est aussi un script de Charles Brackett et Billy Wilder, et c'est le premier d'une longue lignée, dans laquelle suivront Midnight, Ninotchka et Ball of fire, puis bien sûr les propres films de Wilder. Tout ça pour dire qu'on est un peu face à un important passage de relais...

Dans un magasin de la Côte d'Azur, le richissime Américain Michael Brandon (Gary Cooper) vient faire un achat revendicatif: il souhaite en effet acheter une veste de pyjama sans pour autant s'encombrer d'un pantalon qu'il ne mettra de toute façon pas. Il y rencontre la belle Nicole de Loiselle (Claudette Colbert) qui vient justement acheter un pantalon de pyjama pour son papa, un noble désargenté. Le dit père, le Marquis de Loiselle (Edward Everett Horton), est justement en contact avec Brandon, dont il espère le soutien pour une invention. Brandon décide d'épouser la jeune femme, mais il commet deux erreurs: d'une part, il l'a choisie sans vraiment la consulter, ce qui n'est pas (trop) grave puisqu'elle s'avère consentante; mais surtout il a négligé de lui confesser qu'il avait déjà été marié... sept fois, et divorcé six: l'une de ses épouses est décédée. Du coup, Nicole décide de lui mener une vie infernale...

Tout film ressortissant de ce style qu'on appelle la screwball comedy est très dépendant de ses vedettes, et on peut se réjouir du fait que Gary Cooper et Claudette Colbert soient associés. L'actrice a même priorité sur l'acteur au générique, et les deux personnages, deux fortes têtes, sont à égalité. La satire du mariage, émaillée de saillies ironiques à l'égard de l'institution, est datée mais fonctionne toujours aussi bien grâce à la vivacité du script. Mais le film agit aussi en distillant un humour féroce et gonflé, qui multiplie les petits jeux de cache-cache avec le code de bonne conduite édicté par les ligues de décence... Bref, on le savait déjà, mais le film le confirme et promet des beaux jours: on ne peut pas museler Ernst Lubitsch.

Et celui-ci, qui tourne un film souvent pétillant, est à la fête avec cette histoire risquée de mari frustré, au régime affectif sec et qui fait des efforts surhumains pour essayer de conquérir son épouse. Une épouse acquise, mais qui a décidé de faire une affaire de principe de s'imposer à son mari sur ses propres termes... C'est sans doute cet aspect un peu abstrait qui gène les commentateurs du film, qui considèrent souvent le film comme un exercice plaisant mais mineur dans la carrière de Lubitsch. Le fait est qu'on ne s'y ennuie jamais, et que les nombreuses marques de la "touche Lubitsch" s'y succèdent comme à la parade: variations sur un même thème (le pyjama, qui sert à la fois de "petit caillou" en permettant à Brandon de reconnaître Loiselle au premier regard, mais qui sert aussi de cri de ralliement masculin, quand on voit par exemple le patron du magasin sortir de son lit sans pantalon pour répondre au téléphone, sans parler des nombreux quiproquos et "double-entendres" apportés par ces histoires de veste sans pantalon!), situations basées sur la hiérarchie, vieil héritage Berlinois, partagé entre le Berlinois Lubitsch et le Berlinois d'adoption Wilder (Quand un problème touche les sous-fifres du magasin, ils se rendent chez le vice-président, qui dans un plan muet décide illico... d'appeler le président! On retrouve cette montée ironique et fulgurante dans l'échelle sociale, dans le sketch tourné par Lubitsch pour l'anthologie If I had a million), raccourcis cinglants (quand Claudette Colbert échoue à entrer dans la maison de repos où est Michael, un institut tenu par un spécialiste des cas extrêmes et notamment des gens qui se prennent pour des animaux, le père va sonner, et quand l'infirmière l'entend aboyer elle le laisse entrer derechef!) et bien sûr gags essentiellement visuels (ici, une séquence nous montre Michael prendre en exemple les comportements décrits par Shakespeare dans The taming of the shrew, dans une séquence très drôle dont le seul mot sera d'ailleurs "Shakespeare")... Bref: tout y est!

Et l'univers de Lubitsch est en prolongement de celui qu'il  exploré depuis les années 20, avec un personnage secondaire de secrétaire timoré interprété par David Niven: non seulement il est excellent, mais il confirme cette tendance déjà explorée avec bonheur par le metteur en scène dans The marriage circle et dans One hour with you: quand un homme sent qu'il a un rival pour l'affection de sa femme, c'est déjà terrible. Mais si en plus c'est un minable, alors là rien ne va plus! 

 

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Published by François Massarelli - dans Ernst Lubitsch Billy Wilder Comédie Edward Everett Horton
28 juin 2019 5 28 /06 /juin /2019 06:13

Tourné dans les Bouches-du-Rhone des années 70, avec ses vedettes millésimées (Pierre Richard, Jane Birkin, Claude Piéplu, Henri Guybet), et sa (petite) satire sociale, ce film de Claude Zidi a tout de la madeleine... Je vais le dire tout de suite, pour moi, Zidi reste à tout jamais le metteur en scène des Bidasses en folie ou des Rois du gag, ou des Sous-doués: un tâcheron. Un type qui a sans doute eu du métier, du savoir-faire et des opportunités, mais dont le rapport au cinéma est compliqué, voir pour s'en convaincre la parodie (très drôle au demeurant) de metteur en scène dépassé par les événements dans ce film (Vittorio Caprioli) et l'insupportable, poujadiste "Wellson" dans Les rois du gag, ou le metteur en scène ambitieux tel que l'interprétait Michel Serrault au pire de la caricature...

C'est dire si ça me fait plaisir de pouvoir voir - ou revoir- une comédie comme celle-ci, dans laquelle le réalisateur s'est un peu plus impliqué... à moins qu'il ait tout simplement mis son ambition au service de quelqu'un qui en avait un peu plus que lui! J'y reviendrai.

Dans la région d'Aix-en Provence, le député-maire d'une petite ville, Hubert Durois, est en campagne électorale; son fils, lui, est au lycée: il y enseigne les maths. L'un et l'autre se rejoignent sur un point: le père est un vrai père-la-pudeur, obsédé par la pornographie, et le fils, qui est plus ou moins fiancé à une de ses collègues, se montre particulièrement prude. Et très maladroit, et pour cause, c'est Pierre Richard. L'intrigue est liée à la présence locale, pour un tournage, d'une actrice de premier plan; Jackie Logan (Jane Birkin): elle est harcelée par les paparazzi, et doit se battre quotidiennement pour les contrer. Le destin (et une substitution malencontreuse de dossiers) va les mettre l'un en face de l'autre, et le parfum de scandale qui en découlera aura des répercussions sur la carrière politique de papa...

Le film est, dans son intrigue, typique de Pierre Richard: il y incarne, une fois de plus, un fils à papa, un jeune homme qui fait probablement le malheur de son digne chirurgien de papa, interprété par Claude Piéplu sous la forme d'une évidente caricature de feu Jean Royer, pourfendeur obsédé de la pornographie sous toutes ses formes... Un jeune homme distrait, maladroit comme on aime tant le voir, et auquel il va arriver une drôle d'aventure. L'acteur est d'ailleurs crédité au scénario en compagnie du metteur en scène, et c'est là que ce film fait sérieusement la différence avec le reste de la production de Claude Zidi! Sinon, la satire des paparazzi est légère, celle du monde de la politique sympathique, et la peinture du milieu enseignant reste très puérile, mais qu'importe? On veut de la comédie de situation, on est servi. On cherche de la rigolade physique qui dépasse le coup de pied dans les joyeuses, et on a justement ce qu'on cherche... Oh, bien sûr, tout n'est pas parfait; il y a dans ce film une caricature des gays qui n'est pas de la toute première fraîcheur, mais dans l'ensemble, l'équipe a su s'amuser en amusant, et on passe assez près du bonheur des bonnes comédies de situation concoctées par Lautner ou Veber à l'époque. Pas un mauvais pedigree, donc...

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie
27 juin 2019 4 27 /06 /juin /2019 10:57

Madame Maniette Thomas (Catherine Frot) est une personne âgée, une digne vieille dame dont l'essentiel des activités tourne autour d'une croisade partagée par ses voisins: garder le quartier aussi authentique que possible, contre les promoteurs véreux qui ont déjà obtenu, à coup de liasses sous la table, d'acheter la majorité des maisons... Mais elle souffre d'une cause inattendue: elle se demande pourquoi, alors qu'il n'y a pas grand chose pour la retenir sur terre, Dieu ne l'a pas rappelée à ses côtés. Elle est persuadée, même, d'être immortelle car elle aurait commis une faute, mais... laquelle?

Sydney Thomas (Albert Dupontel) est quant à lui le fils de la précédente. Officiellement, il a quitté sa môman 20 années auparavant pour accomplir ses études: il lui avait même donné une durée, qu'il estimait à cinq ans, quatre mois... Inutile de dire que non seulement c'est un gibier de potence, mais en plus il n'a jamais eu le coeur de le dire à sa chère maman, qui en plus ne sait absolument pas ce qu'il a bien pu devenir.

Mais nous le saurons avant elle! Car Sydney vient de faire un casse, et si il a réussi, ça s'est bien moins bien passé avec ses complices qui l'attendaient à l'extérieur, et donc ceux-ci veulent sa peau. Une balle dans l'épaule, poursuivi par un camion noir avec des gens qui tirent sur tout ce qui bouge, Sydney vient presque par hasard, se réfugier chez sa maman... Qui va en une seule nuit de révélation, apprendre d'une part qui est vraiment son gamin... Et comprendre enfin quelle faute elle doit expier!

On pourrait croire que pour Dupontel, qui tend à peindre au vitriol des histoires basées sur des familles dysfonctionnelles et mal foutues, c'est "famille je vous hais", mais non: c'est plutôt "Famille, avec vous c'est compliqué". Après tout, y compris dans le délire cauchemardesque et funéraire de Bernie, on a un garçon certes perturbé, qui cherche à reconstituer le cocon familial! 9 mois ferme est aussi consacrée à cette reconstitution paradoxale, et les problèmes familiaux sont à la base de la fuite en avant de la "gueule cassée" de Au revoir là-haut... Donc tout ce film est basé sur la confrontation entre une (presque) sainte femme, et un fils dévoyé, dont l'historique nous apparaît dans une scène de révélation superbement menée (il garde dans un recoin secret de sa chambre les preuves de toutes ses ignominies, et elles remontent à la maternelle!): il y a une morale, mais Dupontel, dans sa sagesse, a décidé que celle-ci serait surtout "privée", entre Sydney le dingue et sa maman trop gentille.

Et il y a des gags: on comprend l'enthousiasme de quelques spécialistes qui ont prêté main forte à leur copain Albert pour la promotion de sa comédie: Terry Gilliam, Terry Jones, Ray Cooper et Marcel Gotlib ne sont-ils pas des connaisseurs en matière de rigolade? Car Dupontel, qui met toujours quatre ou cinq ans entre deux films, est un orfèvre en matière de gag, et un cinéaste rigoureux. Son style est raffiné, pensé à l'extrême, et d'une grande finesse. Il en fallait pour non seulement imaginer toute une sous-intrigue autour d'une tortue homicide (et couverte d'inscriptions obscènes) mais aussi la faire tenir dans le film, du début à la fin, et la cerise sur le gâteau, c'est que si vous enlevez la tortue, l'édifice se casse la figure...

S'il n'est pas encore à la hauteur des deux films suivants, ce film a au moins le mérite de montrer une facette de Dupontel, qui à sa façon et seulement à sa façon, s'attendrit. Quant à Catherine Frot, elle est absolument géniale du début à la fin du film.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Albert Dupontel
23 juin 2019 7 23 /06 /juin /2019 12:10

Rompant avec la tradition de satire des médias établie avec Ali G. et Borat, et continuée avec Brüno et The Dictator, Sacha Baron Cohen a accepté une proposition de mettre son humour et sa personne au service d'une parodie plus classique d'un film de genre, cette fois un film d'espionnage. L'idée d'engager Louis Leterrier avait pour but de donner au film autant de punch, et de cohérence qu'un authentique film du genre, et ça s'avère une excellente idée... Pour le reste, l'acteur-producteur-scénariste fait ce qu'il fait toujours, c'est-à-dire développer des idées de gag toutes plus provocantes les unes que les autres, et au passage égratigner toujours un peu plus l'humain, en mode light toutefois, puisque ce film qui nous raconte essentiellement les aventures de véritables médiocres à travers le monde, sont quand même surtout une sorte de spectacle familial qui aurait sérieusement mal tourné... avec du sperme d'éléphant dedans.

A Grimsby, Nobby Butcher, hooligan, père de 9 (ou 10? 11?) enfants, vit tranquille, de quoi exactement, on ne le saura pas, avec sa petite amie Dawn, sa très grande famille, et il aurait tout pour être heureux (indemnités non méritées, bière, football, pubs, copains, football, l'amour et les enfants, le football) s'il n'y avait une ombre dans sa vie: depuis sa plus tendre enfance, il est séparé de son petit frère Sebastian, et il meurt d'envie de le revoir... Celui-ci est un agent du MI6, a oublié sa condition antérieure, et est engagé dans une mission délicate. Les deux hommes vont se retrouver, et Nobby va créer des ennuis à n'en plus finir pour son frère, entre suçage de testicule et... sperme d'éléphant.

Oui, vous avez bien lu...

Pourtant, il est vraiment attachant, ce film, qui louvoie entre gros clin d'oeil balourd, gags plus gros que tout ce qu'on peut imaginer, et dialogue bien torché. On le sait depuis très longtemps, l'alliance de deux contraires donne du ressort à la comédie, mais Sacha Baron Cohen sait mieux que quiconque payer de sa personne pour rendre le sordide très drôle, même si c'est toujours vaguement gênant. Pour finir, c'est quand même à noter que dans ce film on se débrouille pour refiler le SIDA à Donald Trump, entre deux gags plus inattendus. Avec du sperme d'éléphant.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie
22 juin 2019 6 22 /06 /juin /2019 16:57

Brüno (Sacha Baron Cohen) est Autrichien, et ça doit faire un moment qu'il se présente comme ayant 19 ans. Passionné de mode, attiré par les paillettes et le show-business, il présente une émission spécialisée, Funkyzeit. Lors d'un gala de mode, il a l'idée malencontreuse de venir avec un costume entièrement fait de velcro... Ca sera un désastre: il est viré, son petit ami Diesl s'en va, et il prend la décision de partir aux Etats Unis, à Los Angeles précisément, pour devenir une star. Le voyage va le changer, mais surtout, si pour Brüno il a l'air initiatique, il sera surtout bouffon.

Le film s'est fait à partir d'une série d'actions de tournage qui ont tout de la guérilla: la scène du gala de mode, par exemple, a été tournée à la façon d'une caméra cachée, où Cohen et une équipe réduite étaient les seuls à savoir qu'il n'était pas réellement Brüno. De même, la scène durant laquelle Brüno et son agent de L.A. présentent aux producteurs d'une chaîne de télévision le pilote le plus outrageusement trash, über-gay et sordide qu'on puisse imaginer, seul Cohen et son équipe de tournage (j'imagine qu'il est assez facile d'introduire une équipe de télévision légère en prétendant être l'objet d'un documentaire en Californie!) savaient que c'était du chiqué... Le but poursuivi par l'acteur est triple: d'une part, parodier le show-business en s'en servant; ensuite, traquer l'homophobie en la confrontant à sa pire peur: un type tellement gay qu'il dépasse les pires délires homophobes du plus W.A.S.P. des dirigeants du K.K.K. de l'Alabama, pour situer.

J'imagine que Cohen et son équipe on du prendre d'énormes risques, d'ailleurs certains se voient à l'écran: l'avant-dernière scène, qui nous montre "Brüno" essayant de se faire passer pour le présentateur hétérosexuel d'une séance de catch supposée être organisée par des associations protestantes de militantisme anti-gay, se termine par une escalade surréaliste: Brüno y retrouve son petit ami, et ils commencent à laisser libre cours à leur tendresse au milieu de l'arène littéralement entouré de plusieurs centaines d'homophobes aguerris qui réalisent soudain qu'ils ont été trompés. C'est certes douteux, mais le résultat est là: l'Amérique est aussi homophobe que ces chasseurs Sudistes qui apprennent à Brüno à tirer sur des lapins, ou que ce pasteur qui fait un business de sortir les brebis égarées de leur homosexualité. La façon dont Sacha Baron Cohen réussit à introduire dans ces échanges réels des allusions totalement loufoques, avec un accent pourtant tellement pourri qu'il semble étonnant qu'on s'y laisse prendre, est une certaine forme de prouesse...

Tout n'est pas parfait dans cet exercice de tricherie intéressant avec la vérité, dans lequel on prouve du reste par A + B que les médias de cette cruelle époque, quand le premier crétin venu est prêt à tout pour devenir célèbre. Mais on y apprend incidemment que les parents d'enfants acteurs sont prêts à tout pour placer leurs enfants (question: votre enfant est-il confortable près de guêpes ou de frelons? réponse: oui, pas de problème) y compris à voir leur bébé payé pour être déguisé en Hitler. Et sinon, la spécialité de Sacha Baron Cohen reste le gag inapproprié poussé jusqu'au bout, plus c'est embarrassant voire lamentable, mieux ce sera: croyez-moi, avec la vie sexuelle de Brüno, on est servi copieusement... Le meilleur moment est sans doute celui où il se retrouve coincé, harnaché à demi-nu avec son petit ami, au beau milieu d'une manifestation homophobe de l'extrême-droite Américaine. Que toute l'équipe ait survécu au tournage est un miracle...

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie