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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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10 avril 2019 3 10 /04 /avril /2019 18:43

Le roman de Dumas était dans l'air, en 1921: d'une part parce que Douglas Fairbanks, dont l'amitié avec le réalisateur Allan Dwan, lui aussi mordu des histoires de mousquetaires, avait sans soute soufflé sur les braises de son attirance pour ces aventures, souhaitait désormais en faire son prochain grand projet après la réussite de son Zorro. Ensuite parce qu'en France, où on accueillait justement l'acteur, on se voyait bien lui fournir des décors irréprochables... C'est ainsi que, si l'on en croit du moins les écrits d'Henri Diamant-Berger, l'acteur s'était un temps laissé aller à imaginer une collaboration entre sa structure abritée par United Artists, et une compagnie Française qui serait dirigée par Diamant-Berger. Celui-ci se rêvait producteur, et voyait comme un trophée le fait de travailler avec Doug Fairbanks.

La rupture entre Diamant-Berger et l'acteur est venue de l'impossibilité pour l'un comme l'autre de voir les avantages proposés par l'autre camp: un raccourci pratique, et un support logistique pour Fairbanks qui se voyait interpréter D'Artagnan sur un film de deux heures, tourné à Hollywood, et une sorte de soumission au roman pour Diamant-Berger qui souhaitait que le film se tourne en France, et qu'il contienne absolument toutes les péripéties imaginées par Dumas. Surtout, Diamant-Berger considérait comme une trahison que le film voulu par Fairbanks s'arrête sur le bal des Echevins, et la restitution des ferrets à la Reine par D'Artagnan. La séparation, c'est un fait peu banal, nous aura permis d'avoir justement la même année deux films, et quoi qu'on pense de l'un ou de l'autre, deux films majeurs... A juger sur pièces, donc...

Juger sur pièces? C'est là que le bât blesse. Si le film finalement réalisé par Fred Niblo aux Etats-Unis est aujourd'hui parfaitement disponible, et en fort bon état, il n'en est pas de même hélas de la version de Henri Diamant-Berger. Celui-ci, qui après avoir cherché en vain un metteur en scène, avait fini par se persuader qu'il aurait le métier, l'énergie et l'enthousiasme de faire le travail lui-même. Il a donc lancé sa production avec tout le dynamisme de ses 27 ans, et a assemblé un casting, une équipe technique, et lancé des recherches pour trouver les lieux parfaits pour tourner. Parmi les gens consultés, on compte quand même (là encore, s'il faut croire les souvenirs de Diamant-Berger) Edouard Herriot... Le format choisi était celui qui avait encore un vif succès depuis les années 10: le film à épisodes. Pour rendre justice à Dumas, Diamant-Berger voyait donc douze épisodes. Le film en son entier totalisait selon le metteur en scène douze heures, mais j'ai des doutes en raison de la version qui est aujourd'hui disponible: présentée comme intégrale, mais privée de ses intertitres, elle compte six heures. 

Donc, si le metteur en scène, pas avare de vanter ses propres mérites, considérait le film comme un chef d'oeuvre, le fait est qu'on en est loin (à moins qu'il s'agisse de son chef d'oeuvre, auquel cas c'est tout à fait envisageable, hum...): Diamant-Berger, de son propre aveu, n'était pas aguerri à un tel tournage, et le choix déterminant de tout prendre ou presque du roman, conditionnait le film à posséder de nombreux moments de redondance, assez insupportables. Pire: une tendance de privilégier l'action au loin, fait qu'aujourd'hui on est parfois au courant de ce qui se passe sur l'écran grâce à la voix off, on imagine que les intertitres devaient auparavant faire tout le travail! Des choix sont pénibles: on a droit à des scènes d'intérieur, détaillées jusqu'à l'extrême, quand le siège de La Rochelle est traité à travers une ou deux escarmouches!

Des beautés malgré tout sont à trouver dans le film: le choix des décors, confiés par Diamant-Berger à Mallet-Stevens, l'excellence des costumes, et la noirceur de plus en plus affichée de la deuxième partie du film (celle qui se recentre sur les méfaits de Milady), avec des scènes d'une véritable grandeur: la mort de Constance, avec un suspense rare dans le film, est un beau moment; tout comme la capture de Milady, et je pense que le sommet du film est justement le jugement et l'accomplissement du destin de cette dernière. Ajoutons que s'il était un metteur en scène pas convaincant, au moins Diamant-Berger avait-il un certain flair pour son interprétation: s'il n'est pas Douglas Fairbanks, au moins Aimé Simon-Girard a la jeunesse, l'impétuosité et le dynamisme de D'Artagnan, et il fait ses cascades lui même. Le reste des mousquetaires est dominé par Henri Rollan en Athos; le plus amer des Mousquetaires ne sera, à mon avis, mieux joué que par Van Heflin dans le film de George Sidney en 1948. Edouard De Max, tragédien de luxe, prête une prestance qui sied à Richelieu, accompagné d'un Charles Dullin parfait en père Joseph. Si Pierrette Madd est un peu fade en Constance, au moins sa rivale Milady bénéficie de la présence incontournable de Claude Merelle...

Impossible aujourd'hui de voir le film autrement que de la façon dont la famille Diamant-Berger l'a voulu: dans une série de décisions que j'ai le regret de considérer comme malencontreuses, ils l'ont adapté pour un format télévisuel: redécoupé en 14 épisodes de 26 minutes (générique et résumé compris), tous les intertitres supprimés, et remplacés pour les dialogues par des sous-titres, et pour les explications narratives par la voix envahissante et pleine de second degré de Patrick Préjean. Je désapprouve, mais si on veut voir le film, il faut en passer par cette version...

Le film a eu un énorme succès, tant mieux. Il est suffisamment différent de celui de Niblo pour justifier de les voir tous les deux, mais si vous me demandez ma préférence, je n'ai aucun mal à vous dire qu'elle va au film Américain! Diamant-Berger pour sa part ne s'en tiendra pas là puisqu'il réalisera dans la foulée une adaptation de Vingt ans après, la suite, au même format à épisodes... Dont aucun, hélas, n'a survécu. Puis il allait récidiver en donnant un remake de son film initial, en 1932, en deux épisodes, dont les extraits parfois vus ça et là m'ont donné furieusement envie... de ne pas le voir.

 

 

 

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Henri Diamant-Berger 1921 * Dumas
8 avril 2019 1 08 /04 /avril /2019 13:10

On ne présente plus Alan Crosland, un vétéran de chez Griffith qui a roulé sa bosse avant de finir par entrer de façon inattendue dans la cour des noms souvent mentionnés du cinéma muet, en devenant le metteur en scène de The Jazz Singer pour la Warner, en 1927... Un poste qu'il a eu en étant, avant l'intronisation de Michael Curtiz à ce poste, LE metteur en scène des grands projets de la firme: il avait, l'année précédente, réalisé le superbe Don Juan pour la WB. Mais si Crosland est un vétéran, c'est aussi et surtout un artisan, un home de métier qui ne s'embarrasse pas de passer pour un artiste.

Le film, une production Selznick de 1920, n'est donc pas une révélation ni une révolution, juste une excellente comédie dans laquelle Olive Thomas incarne une adolescente un peu pressée de sortir de sa minorité et de jouer dans la cour des grands. Il est vrai qu'il n'y a pas grand chose à faire à Orange Springs, la petite ville de Floride où elle vit avec ses (riches) parents. Alors quand elle va se retrouver en pension, elle va tout faire pour apprendre la vie, le plus vite possible...

C'est une comédie charmante, pétillante, menée par une actrice adorable et dynamique, qui est une préfiguration de Clara Bow, en bien moins prolétaire bien entendu. Et surtout, c'est presque un chaînon manquant: en 1920, les "flappers", ces jeunes femmes en quête d'indépendance qui se plongeaient avec délices dans ce que leurs parents considéraient comme une vide débauche, sont encore une curiosité, elles ne sont pas encore une mode... Et Olive Thomas, qui dans vraie vie n'avait sans doute pas attendu très longtemps avant de s'encanailler, a le second degré nécessaire pour le rôle. Elle est vraiment excellente, et sa mort cette année là, a vraiment été une grande perte... Sinon, au rayon des curiosités, on fait grand cas de la présence de la jeune Norma Shearer (voir photo en haut) dans les figurantes, mais on pourrait aussi signaler le fait que ce film nous présente dans le rôle sobre d'un malfrat, le grand Arthur Housman, avant qu'il ne devienne un ivrogne professionnel...

 

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Published by François Massarelli - dans 1920 Alan Crosland Muet Comédie *
7 avril 2019 7 07 /04 /avril /2019 11:55

Nancy et Georgina Brent, deux jumelles, sont les filles d'une solide et prospère famille du Devon. Autant Nancy est volage, capricieuse, dynamique et incapable de rester en place, autant Georgina est calme, posée et pleine de retenue. Un jour qu'elle revient de Paris où on imagine qu'elle a été faire les quatre cent coups, Nancy rencontre sur le bateau Robin, un bel Américain. Mais ce serait trop simple u'elle laisse ce dernier faire sa cour comme il l'entend, alors Nancy décide de lui mettre sa soeur dans les pattes sans le prévenir. De quiproquo en quiproquo, le père qui se désespère et la fille qui s'ennuie vont tous deux partir pour changer de vie, laissant Georgina assumer l'identité de sa soeur auprès de Robin... Sauf que bien sûr, Nancy, qui a une vie dissolue à Paris, ne parviendra pas tout à fait à se faire oublier...

C'est un scénario de Hitchcock, le deuxième pour Cutts après Woman to woman, dont la particularité est d'avoir exactement la même équipe: même réalisateur bien sûr, même assistant/décorateur/scénariste (Hitchcock), mêmes stars (Betty Compson et Clive Brook)... Sauf que ce premier film, qui est hélas totalement perdu, a été un énorme succès aussi bien en Grande-Bretagne qu'aux Etats-Unis... L'idée de Cutts, qui allait ensuite la transmettre à son génial assistant, était de considérer que si la plupart des films Américains étaient meilleurs que les films Britanniques, alors il fallait voir et savoir comment ils étaient confectionnés. Et de fait ce deuxième film est dans la droite lignée d'un solide mélodrame Américain, et pas les pires: on pourrait aisément, dans cette histoire mélodramatique de deux jumelles dont l'une seulement est dotée d'une âme, voir un film de Rex Ingram, dont le style fait de touches esthétiques et de flamboyance visuelle, est assez proche de celui de Cutts. Mais le scénario, lui, est fermement ancré dans le mélo, et pas de la première fraîcheur!

Mais la mise en scène, sur les trois bobines qui nous restent (les deux premières et la quatrième, sur un total de six), nous montre une certaine assurance, un don pour les ambiances variées (avec un goût affirmé pour les scènes nocturnes bellement éclairées) et une envie de dynamisme, qui placent ce film largement au-dessus de la production Anglaise contemporaine.

Et maintenant, venons-en à la question qui fâche: on passe le plus souvent sous silence la contribution de Cutts, pour faire de ce film "le plus ancien film d'Hitchcock conservé"... Les sites les plus divers mentionnent Hitchcock comme co-réalisateur: de quel droit? J'ai vu deux films de Cutts: celui-ci, du moins les bobines qui restent, et The Rat. Ce dernier film, une comédie policière avec Ivor Novello, a été fait sans la moindre intervention d'Hitchcock. Et surprise: il est bon, voire très bon... Truffaut a fait beaucoup de mal à l'histoire du cinéma, au point de donner des oeillères à à peu près tout le monde et en particulier sur l'histoire du cinéma Britannique. Certes, la place d'Hitchcock est celle d'un géant, pas celle de Cutts. Mis de là à penser que le futur petit génie se soit fait engager par un metteur en scène aguerri auquel il aurait tout appris, c'est un peu fort de café...

Une dernière note en forme de clin d'oeil à un ami: il y a un jeune premier dans ce film, and he's one of us.

 

 

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Graham Cutts 1923 Muet *
5 avril 2019 5 05 /04 /avril /2019 16:49

On finit quand même par perdre patience devant ces films réalisés la même année que disons, Safety last de Lloyd, ou Our hospitality de Keaton: certes, Diamant-Berger, producteur, avait eu la bonne idée de permettre la même année à René Clair de réaliser son premier film, et certes le metteur en scène des Trois mousquetaires avait effectivement tenu le public Français en haleine sur les douze épisodes d'une adaptation digne du roman de Dumas, en 1921-1922, et l'avait même fait suivre d'un Vingt ans après dont on murmure qu'il était fort réussi...

Mais ce n'est pas suffisant pour accepter tout et n'importe quoi, et si ce Jim Bougne commence par un excellent gag digne de Lloyd (une scène en trompe l'oeil du plus bel effet, dans laquelle on reconnait d'ailleurs Albert Préjean, silhouette fréquente dans les films de HDB), l'intérêt cesse immédiatement: un père soucieux de mélanger l'avenir de sa fille et son intérêt pour la boxe, désire ne la marier qu'à un pratiquant de ce noble art. La belle a donc l'idée de faire passer son amant Maurice (Chevalier, bien sûr) pour un boxeur...

...Et forcément, il devra le prouver sur le ring. Pendant 18 longues, très longues minutes, qui ne feront rire que ceux qui penseront à autre chose pendant le calvaire. La comédie valait mieux que ce pensum.

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Published by François Massarelli - dans 1923 Muet Henri Diamant-Berger Comédie *
5 avril 2019 5 05 /04 /avril /2019 10:56

Lassé de ses conquêtes, le fringant Roger (Pierre de Guingand) prend une chambre dans un immeuble Parisien, dont les propriétaires seront ses voisins. Et parmi ses voisins, il y a une belle et douce jeune fille (Marguerite Guéreau), qu'il n'aura aucun mal à séduire bien qu'elle soit fiancée. Mais le voudra-t-il? Il pourra en tout cas sans aucun mal s'aider du frère de la jeune femme, Louis-Philippe (qu'on a une folle envie d'appeler Maurice), un brave garçon dont Roger va faire l'éducation...

Sorti en 1923, ce film est présenté aujourd'hui dans des copies qui sèment le doute: un intertitre nous annonce que c'est le début de Maurice Chevalier au cinéma, ce qui est rigoureusement faux: nous le savons puisque nous avons vu les deux précédents moyens métrages de Diamant-Berger avec l'acteur... Et on nous dit aussi que la vedette du film est Pierre de Guingand. Or celui-ci, dans les copies disponibles, a un rôle particulièrement effacé... La vérité est sans doute à chercher dans les pratiques de certains distributeurs, de remonter des années après la sortie de films oubliés, des oeuvres et de les présenter sous une nouvelle forme. Et ce film qui aujourd'hui ne totalise que 24 minutes, me semble en effet être un candidat pour cette hypothèse, avec ses acteurs de luxe (Chevalier, Guingand, mais aussi Marguerite Moreno ou même Edouard De Max, qui joue son propre rôle, vu sur scène où il interprète Néron dans Britannicus) et ses décors de rien de moins que Mallet-Stevens (Dont la photo ci-dessus, la seule qui circule de ce film, nous montre l'une des créations): difficile à croire que Diamant-Berger aurait gardé ce budget pour un court métrage, je penche donc pour une ressortie abrégée...

...et du coup déséquilibrée: car dans l'effort de donner plus de poids à Chevalier, dont le rôle de frère de l'héroïne le transforme souvent en faire-valoir un brin comique, le film semble perdre son intrigue, au point qu'on finit par se demander qui peut bien être ce "Mauvais garçon" annoncé par le titre! Pourtant ce petit film enlevé, qui montre un metteur en scène bien plus à l'aise que dans ses films courts précédents (Les Mousquetaires sont passés par là!) est au moins intrigant, et finalement sympathique avec la façon dont le metteur en scène francise un peu un point de départ qui est de la pure comédie de caractères à l'Américaine.

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Published by François Massarelli - dans Muet 1921 Comédie Henri Diamant-Berger *
5 avril 2019 5 05 /04 /avril /2019 10:45

Maurice (Chevalier) aime Pierrette (Madd) mais comment l'approcher quand elle passe toutes ses journées dans la petite institution pour jeunes femmes très convenables qui lui sert de lieu d'études? Mais il a une idée: on attend Gonzague, l'accordeur, de pianos, dans l'école: sans rien connaître à la musique, le jeune homme sera donc l'accordeur attendu. Sauf que l'affaire se corse lorsque les parents de Pierrette appellent l'institution pour qu'on leur recommande un accordeur de pianos pour la petite réception qu'ils organisent le soir même...

Cette petite comédie burlesque prend racine sur une pièce de boulevard, dont elle ne se détache que rarement... Tout se passe comme si l'esprit d'Henri Diamant-Berger avait été ailleurs: dans l'envie de se concentrer sur Maurice Chevalier, dont c'était l'un des premiers, et rares, rôles cinématographiques, peut-être? Et puis le réalisateur, à cette époque, était plus préoccupé de production, et ça se voit: il manque quelque chose dans ce petit film mal foutu... Il est vrai que Diamant-Berger, avant Les Trois mousquetaires, se voyait plutôt attiré par la production.

Le cinéaste, prenant sans doute appui sur les habitudes des années 10, privilégie les plans larges, et la distance, mais s'interdit aussi souvent que possible de passer par des plans plus rapprochés. Le résultat est sans appel: on perd beaucoup dans ce film où le regard n'est pas attiré par quoi que ce soit. Les acteurs cabotinent, et ne sont pas de la première fraîcheur, malgré la présence de Marguerite Moreno et Albert Préjean, l'un et l'autre gâchés, du reste. Tout ce petit monde fera mieux.

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Published by François Massarelli - dans Comédie Muet Henri Diamant-Berger 1923 *
3 avril 2019 3 03 /04 /avril /2019 17:40

A Paris pendant la guerre, la vie continue... la comédie aussi. C'est le thème de ce film de moyen métrage réalisé par Henri Diamant-Berger (son premier ou deuxième, on ne sait pas exactement) qui vient d'entrer dans son métier de cinéaste, à 20 ans: mobilisé, blessé, décoré, le jeune passionné de théâtre se découvre instantanément une vocation...

...ce qui fait qu'on aura d'autant plus d'indulgence pour ce film bricolé un peu à la va-vite, et sans doute pour soutenir l'effort de guerre. Le metteur en scène le passe sous silence dans ses souvenirs, même s'il mentionne le fait que le plus aguerri André Heuzé, par ailleurs scénariste de ce film, lui a mis le pied à l'étrier. Ici, des sketchs sans grand lien les uns aux autres s'enchaînent sur le thème de la vie à l'arrière, et c'est uniquement la comédie qui règne: on n'a pas encore connu les horreurs de l'hiver et du début du printemps 1916: le pire est donc à venir...

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Published by François Massarelli - dans Muet Henri Diamant-Berger 1915 Première guerre mondiale *
1 avril 2019 1 01 /04 /avril /2019 17:10
Ce film a beau avoir été placé sous la haute autorité symbolique de Jules Verne, il n'a aucun rapport avec le roman; mais on s'amuse beaucoup à ce balbutiement du cinéma fantastique Hollywoodien, qui allait vite devenir majeur, dès 1931, en fait; le principal intérêt réside dans le coté OVNI du film, hybride: muet avec des séquences parlantes, noir et blanc avec des séquences couleur, il a été un pur produit de studio, préparé sous la direction de Maurice Tourneur dès 1926, puis passé brièvement sous la férule de Benjamin Christensen avant que celui-ci ne soit viré de la MGM, puis de Clarence Brown, avant d'aboutir en 1929 sous la direction de Lucien Hubbard, son scénariste. Des trois ans de préparation, reste l'étrange impression que l'acteur Gibson Gowland est parfois blond, parfois brun...
 
Reste aussi un film erratique, mal fichu, mais je le répète hautement distrayant: impossible de croire une seconde à cette apocalypse soudaine, ce déchaînement de violence et d'explosions qui frappe une île reculée d'un royaume de carnaval dans laquelle les anciens amis Lionel Barrymore et Montague Love s'affrontent, pendant qu'un hypothétique "peuple des abysses" attend son heure pour frapper... les séquences parlantes, intégrées au corpus du film, restent sans surprise les moments les plus statiques et les moins intéressants, mais pour le reste, le film ne s'arrête jamais: ça bouge tout le temps, partout, et dans tous les sens...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1929 *
15 mars 2019 5 15 /03 /mars /2019 17:54

Cecil B. DeMille a risqué le tout pour le tout en 1923: lassé de travailler pour la Paramount, qui commençait à être un carcan, il a largué les amarres et s'est lancé dans l'aventure du studio indépendant: une aventure vouée à l'échec, d'autant que l'idée de se placer sous l'aile protectrice de Pathé était une erreur fatale: le distributeur, comme le studio, était condamné à plus ou moins brève échéance... Mais en attendant ce funeste destin, l'autocrate à bandes molletières a au moins eu le temps de lancer une production intéressante, partagée entre des films de série A (les siens, souvent ambitieux et toujours singuliers, parmi lesquels The King of Kings, ou The Volga Boatman, The Road to Yesterday et The Godless Girl sont les plus notables, à des degrés divers), d'autres destinés à alimenter les goûts du grand public (Dont le meilleur films de Rupert Julian, The Yankee Clipper, ou l'impressionnant Chicago crédité à Frank Urson, mais dont la paternité réelle ne fait aucun doute, et puis de nombreux drames romantiques parmi lesquels White gold)... enfin, les films DeMille produisaient aussi des comédies, dont ce joyau.

Rod La Rocque, apparu justement dans les productions ambitieuses du grand réalisateur, est la vedette de ce film, qui prend probablement prétexte de la sortie cette même année de The Black Pirate d'Albert Parker et Douglas Fairbanks. Non que cette comédie soit un film de pirates, mais les clins d'oeil savoureux à Fairbanks, son style et son univers, sont légion... Rod La Rocque, dédié le plus souvent aux rôles sous-valentiniens de séducteur musclé, se moque ouvertement de sa propre image en même temps qu'il nous fait une parodie espiègle de Fairbanks, dans un film qui renvoie d'ailleurs souvent à l'esprit un peu ironique des films du grand acteur réalisés avant son Zorro: des oeuvres souvent marquées par un humour physique et assez inventif...

Jerry Cleggett est le dernier héritier d'une glorieuse famille fondée par un pirate: pour avoir le droit de devenir maîtres d'une conséquente fortune, les Cleggett doivent se marier comme leur ancêtre le jour de leur vingt-cinquième anniversaire. C'est donc l'anniversaire de Jerry, et... pas de fiancée à l'horizon. Mais comme c'est un jeune homme bien de son temps, ça n'a pas l'air de le gêner, sauf que... les huissiers sont là et saisissent jusqu'à son pyjama, dernier rempart contre l'indécence... Et pourtant une femme va entrer dans sa vie: Agatha (Mildred Harris), héritière légitime d'une fortune conséquente, poursuivie par un oncle (Snitz Edwards) qui lui n'hérite que de trente cents, et lui en veut: il a d'ailleurs détruit l'héritage, dont il ne reste qu'une trace: la feuille s'est en effet collée un instant sur le dos humide de la jeune femme qui prenait un bain, et l'oncle voudrait effacer cette dernière preuve...

Oui, ça a l'air délirant comme ça, mais ce n'est que le début: le reste part encore plus dans tous les sens, et comme James Horne est aux commandes, on est dans la tradition du slapstick le plus joyeux, c'est-à-dire drôle, improbable, mais ni sans rebondissements (poursuites, hold-up, coups sur la tête, bagarres, cascades idiotes, et j'en passe) ni sans rigueur... La Rocque se fait plaisir en parodiant son identité de jeune premier (et certaines scènes du début, qui montrent un essaim de rombières tentant de capter la nudité furtive du jeune homme sous des draps, sont particulièrement coquines), et lui et Mildred Harris dynamitent avec allégresse les conventions du cinéma de genre, en alternant baisers fougueux et bourre-pifs bien balancés. Snitz Edwards est généralement un minable dans les films qu'il interprète: ici, c'est un minable méchant, il y est splendide! Bref, ce petit film pour rire est une vraie pépite...

 

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Published by François Massarelli - dans 1926 Comédie Cecil B. DeMille Muet *
23 février 2019 6 23 /02 /février /2019 17:22

Peu importe la religion: ce film est l'histoire de gens qui trouvent la force intérieure de faire bouger les choses, comme finalement d'autres films du même metteur en scène, Tol'able David (1921) ou le magnifique The winning of Barbara Worth (1926) en tête. Ajoutons pour faire bonne mesure un désastre naturel, ici une éruption, pour appuyer les passions; par ailleurs le fait que dans celui-ci les acteurs principaux soient Lillian Gish et Ronald Colman est évidemment une garantie de qualité, d'émotions, de spectacle enfin. En 2 heures et 20 minutes, on n'est absolument pas déçu... Ce film hors norme, tourné partiellement en Italie sur les lieux même du drame, est sans doute le film Américain le plus proche des inspirations des romantiques Européens, tout en les supplantant allègrement!

Et pour commencer, le film conte dans ce qui ressemble à un mélodrame classique, à Naples, la lente déchéance d'Angela Chiaromonte (Lillian Gish), qui un jour perd son père (Charles Lane); sa demi-soeur (Gail Kane) qui la hait se débrouille pour la déposséder de tout, et elle n'a plus que l'amour de son beau capitaine, Giovanni Severi (Ronald Colman); mais celui-ci est envoyé en mission en Afrique, et vite considéré comme mort. En apprenant la fausse nouvelle, Angela perd tout, et décide bien vite d'entrer dans les ordres. Et bien sûr à ce moment, Giovanni revient, bien décidé à se marier avec sa bien-aimée. Pendant ce temps, le Vésuve gronde, et se prépare à entrer en éruption...

Ce n'était d'ailleurs pas une trop grosse surprise, car parmi les nombreux protagonistes, on trouve le frère de Giovanni : contrairement à ce dernier, le professeur Ugo Severi (Gustavo Serena) s'est entièrement dédié à l'observation de l'évolution du Vésuve, dans le but de réussir à prévoir et surtout éviter un nouveau drame du à une éventuelle éruption. Il a dans son observatoire installé une machine qui enregistre l'activité du volcan, doté de voyants qui vont assez souvent être dans le champ, suffisamment visible pour qu'on puisse voir nous aussi comment évolue la situation : aussi bien volcanique que dramatique car dans ce film on s'en doute, les deux sont liés...

King profite de la longueur du film pour asseoir au maximum sa situation, et profite aussi de ses décors: le film a été tourné en Italie, et ça se voit! Il laisse une grande latitude aux acteurs, ses deux principaux en particulier, et Lillian Gish en profite pleinement, faisant passer son Angela par une évolution profonde, de sa post-adolescence à la maturité d'une femme de caractère. Dans ce qui est sa première aventure post-Griffith, c'est elle qui semble porter le film, d'ailleurs bâti autour d'elle. Le principal propos, une réflexion engagée sur le conflit propre à chaque humain entre le spirituel et le corporel, reste d'ailleurs partie intégrante de l'univers personnel et intime de l'actrice, qui doit ici composer avec une obligation, celle d'embrasser son partenaire dans quelques scènes-clé. On sait (les anecdotes du tournage de La Bohême en attestent) que c'était toujours quelque chose que l'actrice faisait tout pour éviter...

Justement, Colman est fidèle à lui-même, fort et séduisant. C'est Giovanni qui a le plus de mal à avaler la situation à son retour, et la scène ou il découvre la vérité passe par une implication physique formidable: il est venu au couvent retrouver son frère qui y est hospitalisé (Celui-ci a craqué, et risque fort de laisser le volcan se réveiller sans lui). Durant le début de la scène, alors qu'il attend, il ne prète aucune attention à le jeune nonne qui passe, et qui ne le voit pas non plus. Nous qui savons, attendons avec un suspense de plus en plus fort le moment ou ils réaliseront tous deux... La confrontation risque d'ailleurs de tourner à l'avantage de Giovanni: Colman est une force de la nature dans cette scène qui à la fin ne retient plus rien en matière d'émotion. Elle installe le fil rouge de la dernière partie: la volonté de l'un de mener une vie ensemble, à deux, contre le voeu de l'autre de se dévouer à la religion. On retrouve une autre scène forte entre les deux, où Lillian Gish, cette fois, mène la barque: Colman l'a attirée dans un stratagème qui vise à la faire signer un papier dans lequel elle renonce à ses voeux. La soeur, sans presque rien faire, fait comprendre à l'homme que c'est peine perdue...

Pendant ce temps, le vésuve ne menace plus, il attaque: la scène a lieu dans l'observatoire du frère de Giovanni, et un voyant peu discret nous informe de l'évolution dramatique du flot de lave.Bien sûr, comme dans Way down east ou La Bohême, Lillian Gish traduit de façon physique sa force de volonté dans des scènes nocturnes de toute beauté, ou elle affronte de métaphoriques tempêtes, avant de recueillir la confession de sa demi-soeur et de la pardonner avant son dernier souffle.

Renoncement, sacrifice, force intérieure, altruisme, rédemption... les mots ne manquent pas pour désigner les notions qui définissent les personnages et leur parcours. Encore une fois, on est dans le même esprit que pour Tol'able david: il n'est pas nécessaire d'être religieux pour apprécier ce film, habité d'une force peu commune, et d'une cohérence rare : si pas un seul des attributs du mélodrame ne manque, ils ont cette fois tous un sens, un vrai... Et la longueur du film (plus de deux heures) permet à King de prendre son temps et de donner à chaque personnage une vraie substance, en s'abstenant de trop sacrifier au manichéisme : du reste, à part la grande sœur, il n'y a pas vraiment de méchant ici. On appréciera aussi de quelle façon le metteur en scène nous prépare dès la scène de présentation à affronter la crise intérieure et mystique de son héroïne : la première fois que le public « voit » Angela, c'est en fait uniquement pas le biais de ses yeux quand la jeune femme, mi-attendrie, mi-fascinée, assiste aux prières incandescentes de son père très pieux. Cachée derrière une grille, son attitude à peine entrevue (mais la force des yeux de Lillian Gish suffit) tranche radicalement avec celle de sa sœur, qui attend irritée la fin des prières de son père en grillant une cigarette...

Plus tard, il continue en nous montrant un portrait sublimé qui annonce à Angela elle-même que son destin est au-dessus des hommes, mariée à l'au-delà : tel le portrait d'une autre Angela (Janet Gaynor dans Street Angel (1928) de Frank Borzage), le tableau va montrer symboliquement que seule la sainteté lui apportera sa raison d'être. Et dès lors son destin est tracé... Et celui de Giovanni, qui devra trouver une autre raison de vivre ou de mourir, tout en prenant la place de son frère, est scellé.

Et puis comment ne pas parler de deux morceaux de bravoure, situé de part et d'autre de la première partie: dans une scène qui correspond à la fin de son adolescence, Angela qui est allée se promener, et a croisé son beau capitaine, se laisse aller à danser quand elle entend la musique jouée par des gitans qu'elle entend depuis la rue, alors qu'elle est au fond de son jardin en compagnie de sa préceptrice. celle-ci, patiente, la laisse faire... Et Gish se lâche complètement: Angela n'a pas encore fait le deuil de son corps, et dans quelques instants elle escaladera un mur pour mieux voir et entendre les musiciens: debout sur le mur, elle verra son beau capitaine de nouveau, et celui-ci devra faire à son tour une ascension pour la rejoindre... Enfin, la dernière scène très notable est donc située à la fin de la première partie: Angela a appris la fausse nouvelle de la mort de Giovanni, et se laisse complètement aller à une crise d'hystérie mémorable dans laquelle l'actrice rappelle qu'elle interprète une femme-enfant, et où elle convoque à la fois le souvenir d'Elsie Stoneman, et celui de Lucy Burrows. Les connaisseurs apprécieront...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Lillian Gish Henry King 1923 *