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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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24 septembre 2023 7 24 /09 /septembre /2023 16:02

La région de Boston, deuxième moitié du XIXe siècle. Dans une communauté de bord de mer, très rigoriste, Anson, un jeune homme rentre du séminaire, très attendu aussi bien par sa famille, qui ne sont pas du tout des gens qui se laissent aller à la fantaisie, que par sa fiancée... Il déçoit, quand toute la communauté le voit, débraillé, sur le bateau, manifestement heureux au milieu des marins... Mais ils seront encore plus décontenancés par son attitude lorsqu'un naufrage apportera sur le rivage une survivante, une femme qui tous identifient immédiatement comme une prostituée. Anson, en effet, retient des leçons de l'évangile qu'il faut secourir son prochain mais la communauté très pointilleuse ne veut pas le suivre. On commence à parler de lui refuser de devenir le prochain pasteur, et sa fiancée lui fait comprendre qu'elle désapprouve sa conduite...

En compagnie de la jeune femme qu'il a recueillie, il prend la mer... 

On identifiait clairement Lars Hanson, acteur Suédois flamboyant qui avait fait la traversée vers les Etats-Unis, aux personnages de prêtres et pasteurs tourmentés, qu'ils soient défroqués (Gösta Berlings Saga, de Mauritz Stiller, 1924), ou juste pêcheurs (The Scarlet letter, de Victor Sjöström, 1926)... La MGM, il est vrai, aimait à recourir au stéréotype, qu'on appelait typecasting... Mais l'acteur avait justement une intensité dans son jeu qui n'était pas que physique. Ce film est un peu dans cette catégorie de "véhicule" construit auour d'un personnage et de son interprète, mais il est plus qu'intéressant, d'abord parce qu'il ne se contente en rien de recaser une formule, ne ressemblant en rien aux films déjà cités, ou même à Flesh and the devil (sorti quelques mois plus tôt) de Clarence Brown, dans lequel Hanson jouait un rôle important aux côtés de John Gilbert et Greta Garbo. Hanson déploie de la plus belle façon son jeu de personnage en butte à l'intolérance de sa communauté, et partagé entre spassion spirituelle (symbolisée par la virginale Marceline Day) passions humaines (ici, c'est Pauline Starke, mais aussi Ernest Torrence dans un rôle anthologique de capitaine obsédé)...

Bess Morgan, la prostituée, est un personnage riche et passionnant. Quand elle est secourue, elle a déjà tout le poids d'une vie de rejet, et n'est pas avare de révélations: son beau-père l'a violée, elle a eu un enfant, "heureusement qu'il est mort", dit-elle... Quand elle est menacée de consommation pure et simple par le capitaine du bateau qui s'introduit dans sa chambre, elle lui signale qu'elle a le droit de disposer de son prore corps. Entre l'aspirant prêtre épris de tolérance et la fille perdue, une sorte de complicité presque platonique (leur affection commune ne sera pas consommée) s'établit, qui passe d'ailleurs par une scène dans laquelle le jeune homme, sans faire de chichis, la déshabille après qu'elle ait été secourue et la place dans son lit pour lui frictionner les pieds. C'est le regard concupiscent des autres qui transformera cet acte en une transgression... Une scène que Frank Borzage n'aurait pas dédaigné et je vous prie de le croire, c'est un compliment! Et la fin du film, qui voit le serviteur de dieu et des hommes veiller le corps mourant de celle qui est devenue son amie, est profondément poignant.

Cette histoire aussi suprenante que distrayante est mise en images par un vétéran qui n'a jamais a priori été beaucoup plus qu'un artisan, solide mais sans génie apparent. Ici, pourtant, il fait preuve de métier, et son film tourné avec énergie montre de beaux moments d'invention, tels une bagarre dans les cordages d'un bateau, des séquences situées dans les cellules d'un bateau-prison, et le comportement de Torrence, en capitaine violeur, donne lieu à d'inquiétantes scènes où la photo intensifie une atsmophère parfaitement rendue... Pauline Starke joue de son corps et de toute son énergie un personnage qui se tient à l'écart des filles perdues du cinéma muet Américain... Bref, c'est clairement une excellente surprise que ce film rare.

 

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Published by François Massarelli - dans Lars Hanson Muet 1927 *
16 août 2023 3 16 /08 /août /2023 18:16

La carrière de Sterberg commence avec un film que d'aucuns pourraient qualifier d'expérimental, voire d'amateur. Les "stars" en sont George K. Arthur et Georgia Hale (The Gold Rush), ce qui explique peut-être le soutien de Chaplin à un film qui très honnêtement ne devait pas beaucoup attirer la profession à l'époque des studios. C'est par le biais de United Artists que le film a été finalement distribué nationalement.

Le film conte les "mésaventures" de marginaux dans une zone portuaire, un homme ("the boy", George K. Arthur), qui vit au milieu des restes de naufrage et de la boue drainé par les bateaux qui draguent incessament le port; une femme ("the girl", Georgia Hale), qui traine dans les mêmes eaux, garde une certaine dignité qui passe pour de la froideur. Elle oppose une certaine passivité à tout ce qui passe autour d'elle. Ils sont rejoints par un jeune garçon ("the child", Bruce Guerin), un orphelin qui a été secouru d'une correction par une brute épaisse par le héros. 

Ils décident de quitter les environs du port pour se rendre en ville et atterrissent dans un taudis où ils prennent un appartement ensemble. Mais leur logement est tout proche d'un bordel, et quand l'homme cherche du travail, la menace pèse sur la jeune femme...

C'est apparemment un mélodrame, mais l'absence d'émotion visible, et parfois l'absence d'action des personnages, sont rares et assez déstabilisantes. Le propos de Sternberg, qui a tourné le film dans des conditions proches deu système D absolu, étaient de photographier la pensée. On comprend ce qu'il voulait dire quand on voit la façon dont il multiplie les plans statiques, mais il fait aussi une utilisation inventive du décor et des accessoires, montrant par exemple un proxénète adossé à un mur, avec un porte-manteau du plus mauvais goût qui lui dessine des cornes...

Le film ne manque pas d'humour non plus, comme ce plan des trois "héros" qui sont vautrés les uns sur les autres, impassibles, immobiles, avec un cadre au dessus de la tête, qui clame "Home sweet home"... mais il est de travers.

Mais ça reste une vision inconfortable, un film qui s'échappe en permanence des entiers battus. Sternberg y fait la preuve d'un talent évidet dans la composition, et d'une capacité à exploiter le décor, mais l'ensemble reste statique et très énigmatique... Mais tout le film tend vers une résolution qui viendra du fait qu'à un moment, George K. Arthur prendra la bonne décision, au bon moment...

Cette originalité quasi suicidaire n'a pas empêché Chaplin d'y voir bien plus... Il a non seulement fait en sorte que le film soit distribué pour être vu par le plus grand nombre (ce qui n'a pas été le cas) et a engagé Sternberg dont il souhaitait produire un film. Ce sera The Woman of the sea (ou The seagull?) qu'il devra détruire par décision de justice. Non seulement la carrière de Sternberg commençait, mais ses ennuis aussi...

 

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Published by François Massarelli - dans Josef Von Sternberg Muet 1925 *
26 juin 2023 1 26 /06 /juin /2023 19:15

Sorti après son spectaculaire Enfant de Paris, Le roman d'un mousse est une preuve de plus de la maîtrise dont faisait preuve Léonce Perret avant la première guerre mondiale, et de la place qui fut la sienne au sein de la Gaumont: il est évident qu'il bénéficiait pour ses productions mélodramatiques de moyens à  la mesure de ses ambitions... Le scénario de ce nouveau mélodrame d'aventures est basé sur une intrigue très bourgeoise, dans laquelle un marquis ruiné, associé à un banquier sans scrupules (Sur lequel, hélas, je reviendrai plus loin), se marie à une comtesse fortunée. L'idée est bien sur de se débarrasser de la belle après avoir éloigné son bambin afin de faire main basse sur sa fortune; pour se débarrasser de l'enfant, le banquier se propose de jouer son percepteur le temps de la lune de miel, et de faire croire à une fugue, en laissant une lettre dans laquelle le gosse annonce s'être enfui. Puis, le banquier Werb place le gamin sur un bateau ou il sera ensuite brutalisé parle capitaine. Pendant ce temps, le marquis tente de tuer son épouse mais suite à une maladresse se tue lui-même... la comtesse est accusée du meurtre. Le mousse parviendra-t-il à la disculper à temps?

On le voit, les péripéties se situent dans le droit fil du roman populaire, mais Perret est à son aise avec l'installation d'atmosphères idéales: promenade fatale à St-Malo, où le banquier drogue le garçon, scènes sur le bateau ou le gamin est en proie à la tyrannie du capitaine qui lui fait faire tous les sales boulots, intérieurs bourgeois rendus inquiétants par des jeux de lumières, décidément une qualité particulièrement représentée chez Perret, etc... Le film se voit sans aucun déplaisir, même si on n'est pas devant un film aussi beau plastiquement parlant, et aussi avancé que L'enfant de Paris...

Et il y a aussi le problème que je qualifierai de politique: Werb, de son prénom Elie, est un usurier sans aucun scrupule, un banquier de la pire espèce, qui n'a aucune humanité. Encore une fois, faut-il en accuser le metteur en scène, ou faut-il s'en prendre à Gaumont, dont les idées conservatrices n'ont jamais été un mystère? quoi qu'il en soit, cette trace d'antisémitisme, aussi discrète soit-elle, est un défaut irritant dans ce qui reste une oeuvre accomplie, un film à voir donc d'un metteur en scène qui mériterait d'être plus remis sur le devant de la scène...

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Published by François Massarelli - dans Muet 1913 Léonce Perret *
26 juin 2023 1 26 /06 /juin /2023 16:25

Ce film de 1912 interprété par Léonce Perret, Suzanne Grandais et Emile Keppens est une merveille, d'abord en lui-même, ensuite parce qu'on peut y déceler la création d'un genre, qui aura sur le cinéma de Gaumont d'abord, de France ensuite et du monde enfin des répercussions importantes. C'est pour ma part mon film préféré des quelques rares oeuvres de Léonce Perret que j'aie eu la chance de voir, et je dois cette découverte à l'inévitable coffret "Gaumont, le cinéma premier, vol.1", sorti en 2008, qui contenait 13 films de Perret.

Le principal apport de ce film , qui n'est sans doute pas le premier à le faire, mais qui fait partie d'un genre en plein développement, c'est de donner à voir un style de films de mystère, à vocation policière, dans lequel les balbutiements du cinéma de suspense sont intégrés, sans pour autant qu'il faille y voir la dette à Griffith. l'histoire racontée est celle d'un héritage qui tourne mal: Suzanne (Grandais) hérite de son vieil oncle, et son cousin Fernand de Kéranic (Perret) qui est nommé son tuteur deviendra automatiquement le légataire universel au cas ou la jeune femme décéderait ou serait frappée de folie. Fernand souhaite épouser la jeune femme, car, on l'apprend très vite, il a de sérieuses dettes. Mais celle-ci est amoureuse et fiancée, et Fernand a tôt fait de trouver un stratagème pour se débarrasser en même temps de l'amant et de sa cousine... ce qu'il n'a toutefois pas prévu, c'est que les deux tourtereaux puissent survivre, quoique sérieusement traumatisés par le traitement qu'ils ont subi aux "roches de Kador", mais aussi que l'on fasse appel à un traitement psychologique révolutionnaire, avec  projection d'un film, pour établir la vérité en provoquant une catharsis...

Derrière cette trame feuilletonesque, se trouve une intrigue à cheval entre deux mondes: les personnages sont bien sur des bourgeois et des aristocrates, des oisifs, sans qu'aucun jugement ne soit porté à cet égard, mais l'intrusion du crime spectaculaire d'une part, et du cinéma comme méthode térapeutique d'autre part, nous renvoient à ce bon vieux 20e siècle. Le film par son sens du spectaculaire photogénique anticipe sur les feuilletons de Feuillade, qui ont commencé dans le sillage de ses 5 Fantomas commencés l'année suivante. La scène selon moi la plus mémorable est celle qui voit Fernand, qui a convoqué le fiancé aux "roches de Kador" après avoir drogué Suzanne, laissée pour morte sur la plage, tirer sur le malheureux, dans un plan qui est pris de point de vue de Fernand, dissimulé derrière les rochers, avec sa victime en contrebas. dans cette séquence, Perret qui a construit la scène avec une grande lisibilité nous entraîne dans le suspense avec ses champs contrechamps. Le suspense ici tient au fait qu'on sait que Fernand a un projet et qu'il a fait venir l'autre homme, tout ce qui nous reste à découvrir, c'est le mode choisi pour son crime. A un suspense de bon aloi, il ajoute donc une violente surprise...

Les scènes de thérapie, rendues dramatiques par un jeu magnifique sur l'obscurité, jouent bien sur sur l'objet cinématographique; la personne qui va regarder un film, à savoir Suzanne, afin de lui faire retrouver la mémoire, est d'abord isolée dans un halo de lumière, étant de fait désignée comme notre cible à nous spectateurs. Cette personne qui est le centre d'un film va regarder un autre film, découvrir la vérité, et revenir à la raison. La mise en abyme est soulignée non seulement par la mise en lumière de la spectatrice, mais aussi par l'obsédant écran blanc qui envahit une bonne partie du cadre, contrastant avec la longue chevelure noire de la jeune femme. la séquence est étrange, visuellement très forte, et franchement inoubliable.

Une dernière chose concernant ce film qui aspire au respect, et qui nous est transmis dans une magnifique copie: une scène fera sans doute sourire les plus indulgents d'entre nous, lorsqu'on nous dit que'une barque dérive au large, sur la mer déchaînée, et que l'on voit un bateau qui est manifestement échoué sur le fond sablonneux de ce qui est évidemment une plage, on va forcément tiquer. Mais quelle proportion des spectateurs de la plupart des grandes villes françaises en 1912 et 1913 qui ont vu ce film étaient déjà allés à la mer? Combien étaient en mesure de déceler la supercherie? ce qui apparaît aujourd'hui comme une naïveté est juste le rappel qu'en matière de film, il est parfois utile de ne pas en savoir trop, il faut se laisser aller, et permettre au film de prendre le pouvoir. C'est l'une des leçons de ce film essentiel, qui en plus d'être beau à tous points de vue, possède un titre, franchement, qui ne peut que faire rêver.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1912 Léonce Perret *
27 mai 2023 6 27 /05 /mai /2023 11:26

Déjà responsable pour partie d'une adaptation d'un récit de James Oliver Curwood, Back to God's country, l'année précédente, Hartford récidive, toujours sous la supervision de Curwood, avec un film qui reprend beaucoup de la recette... Mais sans l'actrice nell Shipman.

Dans le grand nord Canadien, en pleine forêt, un drame se joue: alors que Nanette Legrand (Betty Blythe), la fille d'un pionnier malade, attend le retour de son fiancé Raoul (Lon Chaney), le principal employeur de la région décide de céder au caprice de son fils, qui veut épouser la jeune femme. En tout cas, il la veut, tout court, et il est prêt à tous les stratagèmes, y compris à prétendre avec un copain que ce dernier aurait assisté à la mort de Raoul... La mort dans l'âme, elle se résigne à épouser l'affreux rejeton (Francis McDonald), mais c'est le moment qu'a choisi raoul pour revenir...

Il va y avoir de la bagarre en effet, et Raoul tuera involontairement un des hommes qui lui ont fait du tort, permettant l'irruption dans l'intrigue d'un officier de la police montée (Lewis Stone): amoureux de Nanette, lui aussi, mais au moins c'est un brave homme... Outre la police montée, absolument toutes les cases attendues sont cochées, à l'exception de la neige, qui jouait un rôle spectaculaire dans Back to God's country: cabanes en rondins, grands lacs, canots d'inspiration amérindienne, ours, mocassins, chemises à carreaux... Lon Chaney joue un rôle relativement secondaire qui donne parfois l'impression d'avoir artificiellement gonflé au montage, ce qui nous rappelle qu'il était en pleine ascension...

Betty Blythe n'est pas Nell Shipman, et elle n'a pas un rôle très gratifiant: d'une part elle qui était habituée aux rôles "historiques" (les guillemets ont leur importance) et aux costumes (et parfois absences de) de reines antiques, est assez peu crédible en fille de la forêt, mais elle a au moins une scène dans laquelle elle prend en main son destin et c'est sans doute le meilleur moment du film, qui pour le reste est du mélodrame sans grande imagination, qui tend à répéter la formule du film cité plus haut... Lon Chaney, quant à lui, est d'ailleurs peu convaincant en brave trappeur, avec, je tremble de l'écrire, un sourire niais: un personnage fade qui reviendra dans The Trap.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1920 Lon Chaney *
17 mars 2023 5 17 /03 /mars /2023 18:48

Paul Körner (Conrad Veidt), violoniste virtuose, doit subir l'odieux et incessant chantage d'un ancien amant, qui le menace de le dénoncer à la police au nom de l'article 175 de la loi Allemande, qui criminalise l'homosexualité; quand Paul rencontre un élève et qu'ils tombent tous deux amoureux, le chantage de Franz Bollek (Reinhold Schünzel) s'intensifie... Il fait en plus face à une tempête familiale, ses parents ne comprenant que trop bien le problème de leur fils...

C'est à l'instigation du Docteur Magnus Hirschfeld, qui en a écrit le scénario avec lui, que Richard Oswald s'est lancé dans ce film. Hirschfeld était un pionnier de la sexologie, dont le cheval de bataille était l'étude et l'aide apportée aux gens dont la sexualité était différente. Une dimension documentaire du film (qui a quasiment disparu dans les très fragmentaires copies qui ont pu être sauvegardées) s'intéresse d'ailleurs de manière très frontale à une transgénéralité assez rarement évoquée dans des oeuvres de plus d'un siècle, et ce sans tabou ni parti-pris négatif.

D'ailleurs, le film revêt un caractère très militant, dans lequel Oswald injecte une solide dose de cinéma tel qu'il le pratiquait déjà: il s'intéresse au cauchemar vécu par le personnage de Veidt, le violoniste qui ne sait pas encore qu'il est à la croisée des chemins. Une scène remarquable est vue du point de vue du jeune élève, qui occupe alors tout l'avant-plan, pendant que derrière lui, donc cachés par lui, Körner et Bollek se battent... Conrad Veidt, en homme délicat, torturé et même désespéré, est totalement dans son élément, et son portrait très sensible est très inattendu pour un film de 1919.

Le film n'est sans doute pas exempt d'une ertaine tendance aux clichés (les gays de 1919 sont souvent présentés comme des gens de la bourgeoisie, surtout, aisés et cultivés. Le maître-chanteur cultive un double "crime", l'un, légalement parlant seulement, celui d'être gay, et l'autre, à tous points de vue, celui d'être un maître-chanteur particulièrement retors. Cette vision d'une criminalité très représentée ches les personnes à la sexualité 'différente' quittera peu le cinéma des trois décennies à venir... Enfin, les bars spécialisés sont les lieux d'étranges danses, plutôt que d'orgies...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Richard Oswald 1919 *
5 mars 2023 7 05 /03 /mars /2023 08:46

Un fragment d'un film, sur lequel on peut quand même dire un certain nombre de choses: on y aperçoit Fritz Kortner, un acteur qu'on connaît bien (Schatten, de Arthur Robison, ou Die Büchse der Pandora, de Pabst), grimé en haut dignitaire Egyptien, dans les bras d'une dame dont les avances sont particulièrement évidentes... Ca dure 42 secondes, et c'est tout ce qui nous reste d'un film, le deuxième de son auteur, qui participait d'une tendance générale du cinéma en cette fin de décennie: imiter, au moins partiellement, la structure particulière d'Intolerance à travers le collage de plusieurs histoires entre elles... Le film partage avec Les pages arrachées du livre de Satan, de Dreyer, le motif diabolique, et l'histoire du cinéma nous apprend que le film aurait été produit/supervisé par le vétéran Robert Wiene.

Qu'y-a-t-il à dire de plus sur ces 42 secondes? Eh bien, tout d'abord, le fait qu'il s'agisse d'un fragment érotique est assez ironique, finalement, puisqu'à l'époque de son travail dans les studios Allemands, Murnau avait la réputation de n'être pas du tout fiable sur ce point... Pour autant qu'on puisse en juger, le film présente du frotti-frotta un rien générique, du reste, ce qui ne contredit pas totalement cette réputation! Sinon, qu'on puisse aujourd'hui examiner un fragment de l'oeuvre de Murnau comme si c'était un fragment du Graal, en dit long sur le statut du cinéaste. 

Un grand regret, aussi, qu'on n'ait pas pu retrouver d'autres fragments (sans parler d'une éventuelle version intégrale), de ce film dans lequel Conrad Veidt incarnait Satan!

Enfin, le fragment a été récupéré dans un scénario à la Cinema Paradiso: une bobine de chutes conservées, généralement de passages censurés dans les paroisses Européennes tatillonnes, qui nous donne ici accès à la fois à un moment qui fut interdit, mais aussi à l'unique matière restante d'une oeuvre d'art perdue. Dit comme ça, c'est joli... Sans doute plus que le film, remarquez.

 

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Published by François Massarelli - dans 1919 Friedrich Wilhelm Murnau Muet *
15 janvier 2023 7 15 /01 /janvier /2023 15:43

Florian Amidon est un jeune homme bien sous tous rapports, mais sans aucun relief, un employé de bureau tellement effrayé de tout, qu'il n'aspire à rien. Surtout pas à séduire les femmes, car elles lui font peur! Pourtant, il lui arrive une mésaventure peu banale: alors qu'il attend un train, il est assommé par deux bandits... Quand il se réveille, cinq années ont passé, il est dans un compartiment de train, et il ne reconnaît rien de ses affaires, vêtements, etc... Pire, une fois descendu du train, on l'accueille dans une petite ville où on l'appelle Mr Brassfield, et où tout le monde le connaît...

Surtout les dames!

Pour comprendre ce qui lui est arrivé il demande de l'aide à une voyante-hypnotiseuse, qui va lui révéler sa double personnalité: car sous Florian Amidon se cache un homme d'affaires peu scrupuleux, coureur, malhonnête et aux aspirations politiques. Les amis de Florian, déterminés à l'aider, lui demandent de mener à bien les affaires de Brassfield...

C'est le deuxième film de Fairbanks, réalisé à la Triangle, peu de temps après que Griffith l'ait fait venir pour interpréter des comédies. Le premier, The lamb, avait été modelé sur le rôle qui l'avait vu triompher à Broadway, mais globalement le studio ne savait absolument pas quoi faire de lui! D'où un film assez franchement foutraque, dans lequel l'acteur s'amuse quand même un peu à interpréter deux rôles en un... Il y aura des traces de ce film dans la carrière future de l'acteur, puisqu'il reviendra périodiquement aux rôles de grande nouille, que ce soit dans The mollycoddle (1920) ou dans le rôle de l'efféminé Diego Vega dans The Mark of Zorro... 

Christy Cabanne n'a jamais été à proprement parler un réalisateur fascinant, et on sent bien qu'ici il n'y a pas une énergie phénoménale aux commandes de ce petit film fort sympathique, mais aux limites du compréhensible parfois...

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Published by François Massarelli - dans Muet 1915 Douglas Fairbanks *
5 janvier 2023 4 05 /01 /janvier /2023 17:16

Yolande, une jeune fille fantasque, est en admiration devant l'horloge que son grand-père vient de finir. Il la prétend magique, et lui dit que les automates qui la peuplent racontent une histoire, celle d'un royaume dans lequel la princesse volage hésite constamment entre le preux chevalier Bertrand, voué à un destin tragique, et un ménestrel... Prise dans l'intrigue, et amoureuse de Bertrand, Yolande casse la pendule... Mais en rêve, elle reprend le fil de l'intrigue, en s'introduisant dans le royaume de l'horloge, pour y sauver Bertrand.

C'est un conte original, imaginé par les Starewitch, Ladislas, sa fille Irène mais aussi son autre fille Jeanne, celle qui joue Yolande sous le pseudonyme de Nina Star; tout le monde a mis la main à la pâte et une fois de plus Starewitch a mélangé adroitement, en multipliant les idées techniques, prises de vues réelles et animation de marionnettes. Il y recycle tout son univers, et on sent que la famille y a passé du temps... Non seulement le montage est aussi soigné et dynamique qu'il était dans La reine de papillons et La petite parade, mais en plus le metteur en scène a une nouvelle fois innové en intégrant dans son animation des photos tirées de films de sa fille Jeanne: ainsi, il a aussi pu animer une figure de l'actrice tout en ayant des attitudes réalistes, qui ne tranchent pas avec l'animation. 

Celle-ci est d'une précision et d'une vie incroyable, seul Willis O'Brien pouvait rivaliser avec Starewitch. Mais l'animation des dinosaures de l'Américain n'arrivait pas à la cheville de ce que fait le Polonais: pas avant 1933 en tout cas. Il est facile et agréable de se laisser emporter dans ce royaume cinématographique, onirique, baroque, et souvent pince-sans rire, pour 35 minutes de dépaysement...

 

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Published by François Massarelli - dans Ladislas Starewitch Muet Animation 1928 *
24 décembre 2022 6 24 /12 /décembre /2022 18:29

Ce film, qui est le dernier des films Russes conservés de Starewitch avant son départ pour l'Europe Occidentale, est incomplet, comme tant d'autres... Mais il l'est doublement: la production, en effet, concevait l'oeuvre comme une fresque en deux parties, visant à montrer l'histoire de la Franc-Maçonnerie! Probablement pas pour en dire du bien... Mais peu intéressé par la thématique même, Starewitch y a trouvé des épices secrètes qui ont précipité son renvoi de la deuxième partie!

On y conte donc les aventures étonnantes et diaboliques de Giuseppe Balsamo di Cagliostro, de son initiation à une confrérie d'alchimistes (je suppose que c'est ici qu'il fallait lire "Franc-Maçons") jusqu'à ses tentatives diaboliques de subvertir la douce jeunesse d'une famille de nobles un peu écervelés... 

Bien sûr que c'est du grand n'importe quoi, mais ce n'est pas grave, je pense que Starewitch a très vite compris l'intérêt d'illustrer cette histoire en s'investissant à fond dans la mise en scène, et d'utiliser avec bonheur les effets spéciaux, son deuxième péché mignon avec l'animation... Et dès l'initiation, où il utilise surimpression, effets de montage, profondeur de champ, et diverses manipulations de l'image, toutes maîtrisées, le metteur en scène... s'amuse. Bien plus que Richard Oswald dans la poussive (et friponne) adaptation de 1929. Après, on ne va pas se mentir: comme on dit parfois, ce n'est pas Citizen Kane...

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Published by François Massarelli - dans Muet 1918 Ladislas Starewitch *