Ce film rare (péservé grâce aux efforts de l'indispensable Ben Model) présente la première manière des frères Fleischer, qui seront à une période des concurrents sérieux à Disney, avant l'avènement des départements cartoon de la WB et de la MGM... Leur idée était de mêler le cartoon et la vraie vie dans des saynètes qui osaient repréesenter les concepteurs des films eux-même (soit Dave et Max Fleischer, respectivement réalisateur et animateur) en dialogue voire en lutte avec leurs créatures d'encre et de celluloïd, en particulier Koko le clown, justement héros de ce film...
Il y joue avec la liberté que lui procurent ses concepteurs, et crée à son tour une ravissante poupée mécanique pour danser avec lui... Mais ça dégénère bien vite.
On voit ici que la comparaison avec les oeuvres contemporaines de Disney (Alice in Cartoonland) tournerait bien vite à l'avantage des deux frères. Leur film est plus riche en invention, et possède déjà ce ton libre et quasi "adulte" qui ferait la réputation du studio à l'époque de Betty Boop...
Une poule couve ses oeufs, qui écosent tous en même temps, mais le dernier réserve une surprise: une autruche. La bête est inévitablement la plus turbulente des "poussins", et va très vite échapper à la surveillance de sa "maman". Il va aussi tomber dans les griffes d'une fouine, qui va chanter une version corrigée de la chanson titre, remplaçant la phrase "plein d'argent et toi" en "plein de sauce sur toi"... Comment le bébé-autriche se sortira-t-il de ce mauvais pas? ...la réponse est explosive!
C'est l'un des films de la série merrie Melodies, à l'époque où Tex Avery commençait à montrer, dans ses films, une certaine impatience vis-à-vis du ton enfantin et franchement insipide des cartoons qu'on lui faisait tourner. D'où une certaine émulation, je pense: Friz Freleng, ici, adopte parfois un ton légèrement décalé, moins disneyien qu'à l'éccoutumée. On regrettera la laideur du personnage principal, mais le film est une merveille d'animation.
Après ce film, Mickey Mouse va disparaître des écrans pour quelques années: la raison est sans doute qu'on avait épuisé les possibilités de la formule... Avec l'apparition de faire-valoirs tous plus pittoresques les uns que les autres, le personnage s'était affadi... L star c'était désormais Donald. Et d'ailleurs ce film utilise presque Mickey comme un prétexte, le chef d'un orchestre qui assure vraiment, comme le montre la première partie. Mais ceux qui jouent la musique, eux, ont gardé leur caractère, et c'est la bande habituelle, réunie pour la dernière fois. On y reconnait Donald Duck, Goofy, la vache Clarabelle, et le cheval Horace...
Le prétexte? Mickey et son orchestre sont engagés par un sponsor (un industriel italien qui répond au doux nom de Macaroni) pour animer une émission de radio à sa gloire... Ils vont donc interpréter l'ouverture de Cavaleire légère, de Franz Von Suppé... Tout marchera bien sur comme sur des roulettes, sauf qu'au moment fatidique, les musiciens se retrouveront avec des instruments détruits par la négligence de Goofy (qui les a fait écraser par un ascenseur. Mais comme on dit: The show must go on... donc les musiciens jouent, et c'est un magnfique désastre...
Le film est un retour à la musique, omniprésente dans l'univers de Disney: les courts métrages des Silly Symphonies sont basés sur la musique, par exemple, et on n'a pas oublié l'extraordinaire Band Concert de Wilfred Jackson! Mais on se souvient aussi de Fantasia, et de son échec au box-office, sans oublier les critiques acerbes qu'il a du encaisser. Et l'équipe de ce film, qui dans sa première partie cite l'ambiance particulière du long métrage musical, ne l'a pas oublié non plus. Faut-il voir dans ce court métrage une charge ironique contre les critiques (car évidemment, la musique massacrée par les instruments dévastés obtiendra un succès sans précédent), ou tout simplement un pied de nez à la fatalité, en forme d'aveu punk? Quoi qu'il en soit, dans ce film avare de mots, mais riches en gags géniaux, on contemple huit minutes très accomplie d'animation de première classe.
C'est la grande mode du jitterbug (danse swing et acrobatique), et Donald s'apprête à passer une aprèsmidi en tête à tête avec Daisy... Le problème c'est que ses neveux (Huey, Lewie, Dewie) ont également la même intention. La concurrence pour danser avec la belle sera rude...
C'est un type de cartoon qui fera beaucoup de petits, notamment dans les films de Hanna et Barbera avec Tom et Jerry. Les trois trouble-fêtes, ici, sont donc les neveux, qui sont bien plus délurés dans ces premières apparitions que dans les bandes dessinées ultérieures! L'animation est absolument fantastique, le film est une merveille de synchronisation fabuleuse, et les gags sont parfois hallucinants d'efficacité. La palme revient bien sûr à l'absorption inopinée d'un épi de maïs qui vient d'être chauffé, et dont les grains vont faire danser la rumba à Donald.
Dans un carnaval où Minnie est danseuse du ventre, Mickey vend des hot-dogs... Il lui en offre un... Puis il lui improvise une sérénade avec deux chats.
Oui, ça n'en a pas l'air comme ça, mais c'est l'un des grands films des débuts de Mickey Mouse, quand la maison Disney laissait les coudées franches à l'animateur Ub Iwerks (créateur du personnage) pour dérouler son style fait de déformations corporelles, d'une grosse tranche d'Americana, de divertissements populaires, et de chansons immédiatement reconnaissables: une fois de plus Carl Stallings place le fameux Streets of Cairo (en France, la chanson paillarde Trabadja la moukère!).
Bon, on hésite sur le chemin à prendre pour analyser ce flm dans lequel Mickey propose Minnie des saucisses phalliques dotées d'une vie propre... Le moins qu'on puisse dire c'est que le personnage et son univers allaient quelque peu s'assagir avec le temps!
Je l'ai déja dit, le plus immense animateur de l'histoire n'est pas Tex Avery, encore moins Walt Disney, qui n'a jamais été animateur. C'est (roulement de tambour) Bob Clampett!!
Hystérique, halluciné, tellement riche qu'on ne peut tout capter, son style explose dès le début des années 40. Coal black, c'est bien sur une version "noire" de Snow White, et la censure est-elle justifiée? Dans cette histoire ou tout personnage est noir, on parle l'argot de Harlem, fait référence au jazz, et à une certaine culture de vaudeville auto-référentielle (les comiques noirs de l'époque ne disaient pas autre chose, en fait)... On y voit surtout un intéressant noircissement de l'écran, alors que la plupart des films à succès alignaient les gens blancs en gommant toute minorité, ce film qui pousse la "négritude" jusqu'à l'absurde est bienvenu, surtout grâce à la vitalité dont il fait preuve.
Et puis marre: on peut voir des sketches entiers de ce facho de Bigard, on a droit à Eric Zemmour à la télévision, on nous concocte des lois anti-immigration pour stigamtiser les étrangers, on peut aujourd'hui voir, acheter, télécharger légalement TheBirth of a nation, film important oui, mais totalement raciste, mais on ne pourrait pas voir ce petit court qui utilise gentiment des stéréotypes pour faire rigoler? Ca m'irrite, quand même. Surtout que le film est soigné, et une intéressante comparaison avec Snow white and the Seven Dwarfs, le chef d'oeuvre de... David Hand.
Un bateau quitte Nw York pour se rendre sur l'île de Pingo Pongo. Nous sommes du voyage, un aimable monsieur fournit une voix off totalement dans le ton des travelogues du genre, et une fois arrivés, les surprises loufoques nous attendent sur l'île...
C'est l'une des spécialités de Tex Avery à la Warner, qui aimait tant réaliser des faux documentaires pour mieux les dynamiter de l'intérieur. Cette fois il introduit un personnage (Egghead, qui n'est pas encore le prototype d'Elmer Fudd) qu'il rôdait à l'époque, pour créer une attente chez le spectateur. Il introduit aussi une scène idiote avec un ours blanc et un inuit... Et une vision des peuplades noires qui pose évidemment problème. D'où la censure: officiellement, The isle of Pingo Pongo n'est pas visible aujourd'hui et WB refuse de sortir le film de ses archives... Il fait partie d'un panel de 11 films ainsi interdits de diffusion.
Pourquoi? D'une part, c'est la vieille vision "primitive" des peuples Africains, ceux qu'on qualifiait de sauvages, qui en apparence semble l'emporter, sans parler d'une physionomie qui les apparente plus à des caricatures d'humains. Mais on pourrait aussi constater qu'il s'agit ici d'un choc de cultures, avec les noirs qui chantent du jazz (Sweet Georgia Brown avec une mini-caricature de Fats Waller), ou qui interpètent une vieille scie du foklore country (She'll be coming round the mountain) ou dansent le menuet... Un débat qu'on ne tranchera jamais.
Sur le Mississippi, des personnages voyagent en bateau à aubes... Une des passagères a un employé (hum...) qui s'appelle Oncle Tom, et celui-ci se perd en route vers le fleuve. Il se retrouve dans un cimetière...
Bon, arrêtons-nous même si ce film semble avoir un semblant d'intrigue, il n'en a pas beaucoup! Il s'agit plus d'une série de vignettes, qui permettent à Harman et Ising de placer un maximum de séquences qui renvoient directement à Disney. Piggy, le héros, est très proche de Mickey, sa petite amie est une simili-Minnie, les interpèdes musicaux nombreux trahissent un montage au rythme du métronome qui était la pratique courante dans les Mickey et les Silly Symphonies. La séquence sur le bateau renvoie à Steamboat Willie, et le passage dans le cimetière nous rappelle immanquablement The skeleton dance, d'Ub Iwerks (1929), la première des Silly Symphonies...
Ce court métrage des premiers temps de l'unité de Leon Schlesinger fait aujourd'hui partie d'une redoutable élite, celle des censored 11 comme on les surnomme. 11 courts métrages de la WB censurés pour leur représentation problématique des populations Afro-Américaines. Mais honnêtement, Jungle Jitters a fait bien pire... Peut-être cette censure est-elle une façon d'expier le racisme particulièrement féroce que tous les historiens prêtent à Jack Warner...
Porky Pig se rend au fin fond de l'Afrique ("Darkest Africa!) pour y retrouver le dernier des dodos...
...et le trouve.
Déjà vu, donc, car ce film est un remake de Porky in Wackyland, un film en noir et blanc ce 1938, réalisé par Bob Clampett qui y montrait pour la première s conception complètement surréaliste et totalement frappée du cinéma. Pour voir ce que j'en pense, on se réfèrera à la critique de ce dernier film...
...Pour ce qui est de celui-ci, on s'interroge, notamment, comment on peut l'attribuer à Freleng, dans la mesure où en dehors de certaines attitudes du héros, et de changements mineurs, la seule différence majeure (outre l'arrivée de la couleur désormais généralisée) est la substitution des décors de l'original par des images sous la directe influence de Dali. La fin a été aussi redessinée de manière significative, et changée dans les faits.
Clampett absent (il a quitté le studio deux ou trois années avant), la tâche de superviser ce remake a donc incombé au vétéran Freleng, qui débouche sur un film probablement inutile, mais qui en soi, reprenant 80% du film initial à peu près fidèlement, est forcément totalement réjouissant. Et pour le reste, Freeleng n'est pas crédité à la réalisation... et Clampett non plus.
Encore un dessin animé WB censuré! Mais cette fois, comme avec Coal Black and the Sebben Dwarfssorti la même année, il est réalisé par Bob Clampett, un connaisseur des nuits de Harlem, puisqu'il trainait avec des jazzmen à chaque fois qu'il pouvait.
Ici, il s'amuse à montrer la dualité de la communauté Afro-Américaine, à travers deux officines sise côte à côte: la mission baptiste locale, et le bar louche. Un chat, caricature du grand pianiste et chanteur Fats waller, choisit la deuxième, mais l'ivresse le conduit dans un pays zinzin déja exploré par Clampett dans le cartoon Porky in Wackyland, et c'est tellement idiot que le chat en question va finir par retourner sa veste.
Le film est notable pour le fait qu'il agit un peu en chaînon manquant entre Porky in Wackyland, et son remake Dough for the do-do: alors que dans le film de 1938, Clampett et son équipe avaient imaginé un pays délirant et surréaliste, mais visuellement très cartoon, celui-ci transporte les même celluloids qui ont été utilisés par le premier film sur des fonds qui sont autant d'allusions à Dali. Une tendance qui se confirmera de manière spectaculaire sur le remake de 1948.
Les stéréotypes sont là, mais il y a aussi une sorte d'application, en particulier pour rendre hommage aux musiciens. On notera aussi Staline et Hitler, dans le passage délirant, qui nous rappellent que Tex Avery, à coté de Clampett, n'était qu'un amateur... Quant à la censure du court métrage, que la Warner refuse à l'heure actuelle de remettre dans le circuit, il ne m'appartient pas de me prononcer: le film montre une vision caricaturale de la communauté Afro-Américaine (en particulier à travers les aspects physiques des personnages, ainsi qu'un certain nombre de clichés culturels), tout en en reprenant affectueusement la culture notamment musicale.